Un, deux, trois
Compter les pas - compter les minutes, les secondes qui s’écoulaient. Tu ne savais pas où tu allais, tu ne savais pas ce que tu faisais. Tu avais décidé d’explorer les grottes. C’était amusant, les grottes, mais tu ne savais pas. Tu ne savais pas où aller ensuite, ni même ce que tu cherchais. Soyons honnête, tu ne cherchais rien de précis. Simplement l’exploration d’un endroit, l’adrénaline du moment; comme toujours.
Si tu devais faire une introspection, tu dirais que tu es pas mal satisfait de la personne que tu es aujourd’hui. Tu n’es pas un saint, tu n’es pas pur. Tu trempes dans certaines activités que la police n’approuverait pas - mais tu n’es pas non plus un criminel endurci qui tue, qui torture - tu n’es pas un criminel psychopathe ou sociopathe qui prend plaisir dans le mal des autres. Tu essaies simplement de survivre comme tu le peux, en te dispersant un peu partout. Parce que tu ne peux rien faire de fixe.

Un, deux, trois
Tu ne savais pas si ta mère serait fière de toi. Peut-être étais-tu un peu trop comme ton père, un peu trop incapable de te poser - lui qui allais voir les femmes de joie alors même qu’il était avec ta mère. Toi qui ne savais pas te contenter d’une seule et unique personne pour la vie entière. Peut-être étais-tu un peu trop volage, un peu trop comme lui, pour qu’elle soit fière de toi, mais tu espérais qu’elle l’était quand même. Ne serait-ce qu’un peu.
Casper se trouvait sur ta tête et Phantom flottait autour de vous deux. Tu n’avais pas sorti tes autres pokémons parce que vous vous trouviez dans une grotte glacée alors… ce n’était pas trop l’endroit pour des pokémons feu. Tu ne voulais pas les rendre mal non plus. Une visite au centre pokémon par ta faute, ça ne te tentait définitivement pas.

Fallait que tu repeindes ta voiture. T’irais acheter la peinture en revenant, c’était évident.

Alors que ton esprit dérivait, alors que tes pensées se succédaient sans vraiment avoir de sens - tu pensais à ta voiture que tu devais repeindre, au livre que tu avais acheté pour Vlinder et à la peinture pour Zamas, aux cadeaux que tu voulais lui faire… Tu aperçus un pokémon dont tu ne connaissais pas le nom. Fallait que tu penses à le chercher sur le net, tu le ferais en rentrant (mais il y avait de très grandes chances que tu oublies).
Il semblait peu serein et tu te rapprochas du pokémon sauvage sans trop comprendre ce qui se passait. « Qu’est-ce qui se passe Monsieur ? » De sa trompe, le pokémon sauvage te montra une horde d’autres pokémons dont tu ne connaissais… toujours pas grand chose. Tant que ce n’était pas un pokémon feu, toi, tu n’y connaissais pas grand chose. T’es pas trop sûr que les autres pokémons soient gentils, mais lui semble prêt à te protéger. « Merci ! Je vais m’éloigner et sortir Pillar, comme ça on peut fiou, les enflammer s’ils s’approchent ! » Tu saluas le pokémon en t’éloignant et en sortant ta Pyronille.

Tu te demandais si elle allait bientôt devenue un Pyrax, Pillar pourrait enfin aller vite et te suivre sans trop de problème. Parce qu’elle n’était pas trop satisfaite de sa lenteur quand tu la sortais en ce moment. Elle était très impatiente et caractérielle et souvent, tu allais trop vite, ce qui ne lui convenait pas. Tu te retrouvais à te faire enflammer le bas de pantalon par frustration de sa part. Ce qui t’énervait quand même. Tu avais des brûlures déjà, tu n’en voulais pas d’autre. Mais Pillar ne se souciait pas souvent de ce que tu voulais.
Tu observais ta chenille de feu qui semblait calme aujourd’hui en soupirant légèrement. Le temps passait vite, quand même. Tu avais vingt-cinq ans, bientôt tu en aurais vingt-six. Bon, peut-être pas si bientôt que ça non plus, c’était en octobre ta fête. Non ? Il te semblait. Oui, c’est ça, en octobre. C’était le jour de l’Halloween. T’allais avoir vingt-six ans, c’était un peu perturbant et ça te rendait toujours un peu mal, parce que c’était le jour de ta fête que le feu avait dévasté votre maison.
Bientôt.
Bientôt, ça fera six ans.

Le jour de ta fête;
Ton monde s’est effondré;
Le jour de ta fête;
Le feu a tout pris.

Le jour de ta fête - et ta vie qui a repris, recommencé - tu ne restais jamais longtemps à terre.

Le Mangriff est beau, le Mangriff est joyeux.
Toi aussi, tu es joyeux. Parfois, pas toujours. Tu es humain, après tout - tu ne peux pas toujours être content, tu ne peux pas toujours sautiller de joie. Parfois, tu peux juste regarder le monde qui t'entoure et espérer que les journées passent, et le lit devient ton meilleur ami et tu as l'impression d'étouffer. Comme si la fumée revenait, comme si tu ne pouvais pas bouger - comme si on t'avait enchaîné quelque part. Mais souvent, tu sautillais, tu courrais, tu vivais. Tu vivais chaque seconde dans toute leur splendeur parce que demain n'existe pas.

Tu t'approches un peu du Mangriff et tu souris parce que tu vois son dessin. Tu n'arrives pas vraiment à dire ce qu'il a essayé de faire comme dessin, mais c'est l'intention qui compte ! Pillar rampe en arrière de toi, visiblement peu contente que tu ailles vite. Elle fait des flammèches. Elle en fait tout le temps quand elle est contrariée.
Parfois, tu te dis que tu aurais dû être traumatisé du feu. Tu étais brisé, malfonctionnel - quelque chose ne fonctionnait pas chez toi; mais le feu demeurait ton ami.
C'était compliqué, être dans ta tête, parfois.

 « Bonjour toi ! Je suis juste de passage, mais ton dessin est très joli. Bonne journée ! » Au moins, tu connaissais le nom de ce pokémon-là. Tu n'étais pas totalement, entièrement inculte. Tu avais quelques connaissances de base. Bon, pas forcément beaucoup - quoique. Tu étais quand même intelligent. Fallait juste qu'on te donne le temps de le montrer. Parce que beaucoup de pensées se bousculaient dans ta tête et te donnaient l'air un peu idiot parfois.

"Coucou toi." Ton regard qui se pose sur la corne qui dépasse et tes yeux qui brillent. Tu sais ce qu'on dit des Absol, tu ne t'en souciais pas - tu ne t'en étais jamais soucié. Les rumeurs et les superstitions, ça ne venait jamais t'atteindre. Parce que toi, tu savais que la seule chose qui menaçait réellement ce monde, c'était la fin du monde qui approchait. Pas rapidement, mais doucement. Lentement. Pas à pas. Et fallait vous préparer pour espérer survivre. Vous aviez toujours été jugés, les jumeaux et toi - et vos paroles, ignorées. Alors il ne resterait que vous trois à la fin et c'était peut-être mieux comme ça. Les seuls capables de comprendre seraient les seuls survivants. Rien de plus compliqué.

Phantom sorti de sa pokéball flottait désormais autour de vous. Il t'avait suivi après que tu aies vu Abbie - que tu l'aies rencontré, et il était même entré dans ta voiture sans que vous ne le remarquiez. Du coup, t'avais fini par le capturer, il semblait si seul. Et maintenant, c'était Phantom. Parce que t'avais regardé sur internet et t'avais pu comprendre que c'était un pokémon spectre... et dragon, c'est ça ? Bon, t'étais pas le plus doué pour savoir quel pokémon était quoi quand il ne possédait pas un type feu dans ses deux types. Mais au moins, tu étais son ami !

Tu t'assis à côté de l'Absol, juste pour lui tenir compagnie. Tu ne veux pas qu'il se sente seul. S'il décide de te suivre, tu n'allais pas refuser, mais tu n'allais pas chercher à le capturer non plus. Parce que tu savais que ce n'était pas un pokémon feu, donc il n'allait pas vraiment "fit" dans ton équipe que tu essayais de construire.
Tu voulais un dôme, tu le savais maintenant - tu voulais un dôme qui aurait le funambulisme dedans, et qui aurait du feu. Tu ne savais pas comment t'allais tout agencer, mais tu savais que c'était un but. Bon, t'allais sûrement perdre ton but de vu environ cent fois avant de l'avoir, mais ce n'était pas grave.

Il finit par partir, l'Absol. Tu te demandais où. Est-ce qu'il avait une famille ? Tu espérais que oui. Ce serait toujours mieux, toujours plus agréable pour lui, toujours plus doux. Toi, tu avais les jumeaux. Et tu ne te voyais pas vivre sans eux; alors tu te disais que c'était toujours plus simple quand on avait une famille et tu ne voyais pas trop pourquoi ce serait différent pour les pokémons. Alors tu espérais que l'Absol ait une famille, d'autres Absol vers qui aller, et qu'il ne se retrouvait pas condamné à une vie de solitude.

Phantom s'était posé sur la tête de Casper qui n'était pas trop contente et qui venait de lancer une attaque. Toi, tu riais. Tu riais parce que tu te souvenais du Mimikyu très timide qui n'osait même pas sortir de tes bras, et qui ne voulait pas laisser tes bras - la toute première fois que tu l'avais rencontré, quand Pillar l'avait sauvé d'un... euh, d'un arbre vivant. Puis, tu avais décidé de la faire partenaire de tes prestations artistiques avec Pillar, et, petit à petit, Casper s'était ouverte au monde. Aujourd'hui, elle revêtait autant un caractère craintif que revêche, n'hésitant pas à faire sa place auprès des autres pokémons.
C'était un merveilleux chemin qui avait été entrepris.

Mais Casper ne supportait toujours pas l'idée d'être dans une pokéball, préférant le dessus de ta tête - ou tes bras, ou marcher tout près de toi. Alors tu acceptais, tu y allais à son rythme et un jour, elle serait peut-être capable de rester temporairement dans une pokéball, et dans une autre pièce que toi aussi.
Phantom se rapprocha alors d'un ... c'était quoi ce pokémon encore ? Bon, t'allais définitivement devoir travailler ta connaissance générale, t'étais beaucoup trpo largué. Mais le dit pokémon ne semblait pas content de la présence de Phantom et toi, tu te crispas légèrement, te demandant comment ça allait se dérouler - et si Pillar allait s'en mêler. Pillar était rendu fort avec le temps. Tu n'avais pas de doute qu'il pourrait cramer le pokémon algue devant toi.

Pas du tout content, en plus... Tu soupiras quand le pokemon adverse se décida à attaquer Pillar qui rampa vers lui rapidement. Enfin, aussi rapidement qu'une chenille pouvait ramper, parce que c'était pas toujours très rapide une chenille.
Pillar décida de ne pas trop s'embêter avec l'ennemi, lançant une attaque feu qui réchauffa les alentours assez rapidement, mais - par chance que tu te disais - ne brûla pas l'autre. Tu ne voulais pas tuer un pokemon sauvage hein ! T'étais pas un criminel. Bon, pour d'autres trucs oui, mais tu refusais quand même de blesser inutilement un pokemon. "Pillar, c'est bon. On ne veut pas le blesser. Phantom, donne-lui de l'espace, il se calmera." Heureusement pour toi, tes pokémons avaient décidé de t'écouter.

Pillar rampa vers toi. L'endroit où la neige avait fondu ne tarda pas à se recouvrir de nouveau d'un fin tapis de poudreuse - on pouvait remercier cette tempête éternelle qui continuait de tomber, et de faire rage sur le volcan eneka, et donc, par extension, sur le mont. Tu n'étais pas le plus calé en histoire, mais tu savais très bien que ça faisait deux ans que tout ça durait. Tu te demandais même si ça n'allait pas finir par s'éteindre un jour ? Bon. T'avais un peu peur que le volcan finisse par entrer en éruption si la neige s'en allait.
Un petit coup d'oeil au pokémon te laissa comprendre qu'il s'était calmé maintenant que Phantom lui avait donné de l'espace. Tant mieux. Tu préférais définitivement cette situation. Aucun pokemon ne risquait des blessures importantes.

Le soleil,
Le soleil descend dans le ciel; doucement - et c'est la nuit qui approche. Tu ne peux que réaliser le temps que tu as pris dehors, le temps qui s'est écoulé - sans même que tu n'en aies eu auparavant conscience et la lumière de Pillar qui illumine, alors que son mécontentement se transmet par le feu qui jaillit de ses cornes. Tu en restes assez éloigné pour ne pas te faire brûler. Ce serait définitivement dommage.
Le soleil,
Il descend dans le ciel et comme les coups de minuits, il indique que ce serait peut-être potentiellement le temps de rentrer. Alors tu respires doucement et tu acceptes. La fatigue n'est toujours pas là et tu as envie de perdre ton temps, de te perdre tout simplement un peu partout pour vivre; toujours et encore vivre, mais le corps finit toujours par avoir besoin de repos et la journée a été longue. Alors il est temps de rentrer. Les pokémons ont besoin de manger, eux aussi.

Il est temps de rentrer, Oyaris.
Demain, le soleil brillera de nouveau - tu pourras penser à la fin du monde, aux anciennes relations, tu pourras parler avec le feu et t'occuper de tes pokémons. Tu pourras sortir, arpenter le monde et essayer de trouver de nouveaux endroits à explorer - mais pour le moment, pour le moment, il fallait rentrer. Prendre des nouvelles des jumeaux, les questionner sur leur journée, faire à manger pour les pokémons et pour toi-même, et
dormir.
Il fallait rentrer.