La demoiselle était tranquillement accoudée à une barrière en métal, lui donnant une vue royale sur la mer. Quand même, le coin était chouette. Néanmoins, elle n'était pas là pour ça. Elle sortit son téléphone avant de composer un rapide message, signalant sa présence juste devant le quai qui amenait des passagers de Port-Corail. Elle avait quitté Ren un peu plus tôt – notamment pour lui laisser le temps de faire les derniers préparatifs avant leur voyage dans la région. Bien plus sereine que lorsqu'elle avait débarqué dans son appartement, elle aperçut le blond qu'elle ne connaissait que trop bien s'approcher. Il lui fallait une photo à envoyer à son frangin, il serait sûrement ravi d'avoir des nouvelles du Wills. Elle remit ses lunettes de soleil en place et se mit à marcher vers lui de manière enjouée.
« Eh, Allen ! Alors, ravi de me revoir ? C'est qu'il s'en est passé du temps depuis notre dernière rencontre. Mais là, tout de suite, j'ai face à moi le grand Allen Wills ! -kyaa~ »
Elle poussait volontairement le jeu pour essayer de le déstabiliser, comme elle savait si bien le faire. Elle lui tendit néanmoins la main, lui offrant cette fois-ci un sourire plus posé.
« C'est cool de te revoir. … Elle lui affligea une grande tape dans le dos. Alors, mon article t'as ému ? -kya~ ? »
Oh. Un selfie. La meilleure idée du monde. Elle dégota son téléphone en deux temps trois mouvements, se colla à Allen en lui disant de sourire et CLIC ! C'était dans la boîte. La créatrice folle n'avait pas perdu un instant, un sourire narquois accroché aux lèvres. Plus le temps passait, plus le côté taquin de Noctis déteignait sur elle. Elle observa son contact du jour, d'un air interrogateur, attendant visiblement qu'il lui explique pourquoi il voulait la voir.
La panique totale. Le chaos absolu. L'anarchie compulsive.
Je ne saurai décrire les sentiments qui envahissent mon cœur et mon esprit, mais on pourrait imaginer un Teddiursa piégé contre un mur par une meute de Lougaroc. Elle est ici, ELLE ! Des flashbacks me reviennent tel un film entrecoupé de cris et de rires. L'Académie représente l'un des seuls passages de ma vie où je n'avais pas le contrôle. Et le destin s'est bien amusé à cette période, cela ne fait aucun doute.
En réponse à mon anxiété maladive, un rayon de lumière surgit de l'unique Pokéball accrochée à ma ceinture. Mon gargantuesque compagnon de roche trône désormais dans cette rue longeant le littoral. Kling ! Elle est déjà arrivée au point de rendez-vous. Le traumatisme doit être conséquent que je ressente encore cette nervosité apparente alors que je traite jour après jour avec des géants du monde entier. Les Flavelle m'auront bien marqué ! A quelques mètres de là, je la vois, elle, posée contre cette barrière de métal. Lyph Flavelle, la pile électrique. Elle a bien grandi mine de rien.
« C... CA FAIT PLAISIR DE TE GARDEVOIR APRES TOUT CE TEMPS !»
HA HA HA. Ok. Tout ceci est ridicule. Une bonne inspiration et ça y est, je suis de nouveau moi-même. La mine de nouveau tranquille, j'esquisse un sourire avant de m'accouder dos contre la fameuse barrière qui sépare la ruelle de la mer. Diamas fixe la jeune femme avant de poser ses yeux sur moi, il a l'air plutôt inquiet. Comme pour le rassurer, j'arbore mon sourire le plus confiant, tellement Dracolgate qu'il pourrait en devenir commercial.
Après ce magistral selfie - je sais précisément qui va le voir en premier - je m'affaire à poser ma main sur la tête de la Flavelle, faisant mine de lui ébouriffer les cheveux, mais il n'en est rien. Le temps est bien passé, toutes ces choses se sont produites, toutes ces choses ont été vécues, c'est un fait établi qui nous mène à chérir nos souvenirs. Tant qu'elles restent des souvenirs, n'est-ce pas ?
« Je vais aller droit au but. Je me demandais si tu pouvais éviter au pauvre Allen que tu as connu de resurgir devant le monde entier. Je t'avouerai que la plupart de mes "exploits" sont plutôt embarrassants. »
Et je pèse mes mots. J'ai enfin pu me débarrasser de cette réputation qui me collait à la peau pendant toutes ces années, ce serait dommage de replonger la tête première dans cette édifiante montagne de quiproquos.
« Mais sinon ! Toi ! Comment tu vas ? Et ton cher frère, toujours aussi maniaque de la collecte d'informations ? »
Elle observa le blondinet amener maladroitement sa phrase d'introduction. Gardevoir ? Oula, elle devait vraiment le mettre mal à l'aise. Cette pensée manqua de la faire pouffer de rire. Elle l’écouta tenter de négocier – et c'était bien mal la connaître que de penser qu'elle abdiquerait facilement – avant qu'il ne détourne le sujet vers son frangin. Elle avait des tonnes de choses à lui raconter. Elle inspira, avant que le moulin à paroles ne prenne le relais.
« Très bien mon cher Wills ! Je peux envisager de te laisser hors du feu des projecteurs contre une certaine négociation. Mais on verra ça après -kya~. Elle ne devait pas être tout à fait elle même pour pousser le jeu aussi loin. Mais ça sonnait bizarrement bien, kya. Mon frangin... Oh tu sais, toujours à fond dans son travail. Avec une petite nouveauté. Accroche-toi bien à ton Onix, car tu n'as pas encore entendu la dernière. Il va se ma-ri-er. Genre, à la mairie – peut être à l'église je lui ai pas demandé – comme notre très cher paternel il y a des années et oh- Elle s'interrompit une seconde. Tu le crois toi ? Se marier ? Se caser pour la vie ? Ce n'est tellement pas l'image que je me faisais de lui. Il a toujours été flatteur et flirteur, mais le mariage ? C'est un autre monde pardi ! Enfin devine qui va organiser toute la décoration ? Elle lui offrit un sourire machiavélique. C'est moiiiiiiiii -kyaaaa~ »
Si tenté qu'il soit capable de demander proprement en mariage la demoiselle en question. Ça n'était pas gagné non plus. Connaissant son sérieux, il avait dû déjà prévoir toutes sortes de mesures – et de contre mesures pour elle. Mais peu importait ! Elle pouvait fouiner encore plus.
« D'après lui-même – et Ren – il l'aurait connu à Mhyone. Comme je trouve déjà surprenant que ces deux-là ce soit croisé là-bas, est-ce que je ne parierais pas tout de suite que tu y as fourré ton nez aussi ? Inutile de répondre j'ai déjà tiré les vers du nez à Ren. Oui Ren est dans le coin. C'est dingue non comme le monde est petit ? Enfin bref, je ne te cacherais pas plus longtemps le nom de la charmante demoiselle qui a su ravir son cœur ; elle s'appelle Elisthel Firefly. … -kya~ »
Elle observa avec minutie le visage d'Allen, espérant voir une myriade de réactions qui l'informerait davantage sur sa future belle-sœur.
Kya ? Depuis tout à l'heure Lyph finit ses phrases par un "kya" qui est pour le moins intriguant. Avait-elle un tic particulier à l'époque ? Je n'arrive pas à m'en souvenir.
Enfin, ce n'est pas le plus important. Dans le tsunami d'informations que la jeune femme a déversé sur moi, j'arrive à décrypter les points cruciaux. Ren est ici. Ren Lowell. Je décroche un sourire incontrôlé en repensant au phénomène que représente cet homme, un scientifique chevronné haut en couleurs. Mais ce sourire s'accompagne d'un rictus figé à l'entente d'un nom qui m'est bien plus que familier. Elisthel Firefly. Nul besoin de dire qu'il s'agit d'une longue histoire digne des télé opéras comme "Plus Belle la Vipélierre" ou "Lovdisc, Victini et Milobellus" dont nous étions les protagonistes. Si le choc est bien réel, il n'en est pas moins court et révolu. Un soupir de soulagement vient souligner mon regard maintenant perdu vers l'océan.
« Oh ? Elisthel et Noctis hein. Tu dois t'en douter, mais oui, je la connais. Je suis heureux de savoir qu'ils ont fini ensemble. »
J'imagine que les iris de Lyph brillent de mille feux à l'attente d'un croustillant idylle à raconter, mais malheureusement pour elle, ce sera pour une prochaine fois.
« Et toi ? Y a t-il un Don Juan dans ta vie ? Kya ~ »
Je ne veux pas me moquer d'elle, mais la taquiner un peu ne lui fera pas de mal. Je me redresse légèrement, un œil sur ma PokéMontre, et Diamas, fatigué de fixer la jeune fille en grognant silencieusement, finit par s'allonger de tout son long sur la route. J'aimerai au moins féliciter l'heureux couple pour leur mariage, il ne faudra pas que j'oublie de lui demander le numéro de son frère. Tout ceci ne fait que me faire constater que le temps passe, et passe. Les mains agrippées à la barrière, je prends mon souffle avant de me mettre à crier face à la mer.
« NOCTIIIIIS !! J'ESPERE QUE TU ES PTIRAVI DE TOI GROS LEVEINARD ! »
Mine de rien, ça fait du bien ! Mon Onix, surpris de m'entendre élever la voix, se relève et m'imite, grognant à tue-tête.
La question d'Allen la prend un tout petit peu au dépourvu. Ses joues se colorent d'une teinte rosée et elle détourne brièvement le regard. Pas vraiment, a-t-elle envie de répondre. Mais peut-être ? Incapable de formuler une réponse cohérente, elle se contente de saisir l'occasion que lui fourni Allen lorsqu'il se met à beugler, accompagné de son pokémon. Le cerveau d'Allen a grillé ? Elle ne s'en soucie guère lorsqu'elle décide de faire sa proposition.
« Eh bien, puisqu'on en est là... J'aurais un tas d'anecdotes à raconter sur comment il m'a annoncé ça, tu aurais vu son visage embarrassé, ça n'arrive jamais ça ! -kya~ »
Elle lui fit un sourire complice, avant de se recentrer sur le sujet qu'elle souhaitait réellement aborder avec le Wills.
« Concernant nos négociations, sache que je n'ai pas froid aux yeux non plus. Je suis la créatrice de la marque Australe, une marque en vogue à Kalos. Seulement, si je souhaite l'exporter, tu t'en doutes, je vais avoir besoin d'un partenaire commercial pour le transport. -kya~ »
Elle le pointa du doigt de la manière la plus naturelle du monde, et inspirant profondément, elle s'exclama :
« C'est toi que je veux, Allen Wills !! »
… Les personnes aux alentours se retournèrent, se mettant à chuchoter. Allen Wills ? C'est toi que je veux.. ? La rumeur se répandit à toute allure, jusqu'à ce qu'un type commence à prendre une photo. Puis un autre. Et un autre. Les photos se multiplièrent, jusqu'à ce que Lyph fasse la seule chose qu'elle savait faire : attraper le garçon par la main et se mettre à courir. Ça marchait à tous les coups.
C'était sans compter le Onix gigantesque qui dévoilait leur position à quiconque voulait bien le voir.
Là où le jeune garçon innocent avait accusé Arceus de lui infliger les situations les plus embarrassantes possibles, il ne pouvait pas plus se tromper que ça. Pendant mon parcours international en tant que petit-fils du grand patriarche, tout s'était absolument bien passé. Pas un seul faux pas, pas une seule scène cocasse, pas une seule maladresse engendrée ni subie. Le paradis. Tout ceci n'est donc que le résultat de l'aura d'autres personnes, l'aura de cette poignée de jeunes femmes que j'ai rencontrées quelques années auparavant. Cette fois, c'était clair et net.
Tout avait bien commencé, une discussion plutôt normale - même si le danger que représente Lyph est la seule raison de présence ici aujourd'hui - entre deux personnes aux responsabilités plutôt élevées, jusqu'à ce que son excentricité et son dynamisme se reflètent dans ses mots. Catastrophe ! Très vite, tout dégénère, des photos sont prises, des gens parlent. C'est la fin !
Dans notre fuite, Diamas tente de prendre des virages à toute allure, ce qui n'est pas sans laisser beaucoup de traces de son passage, outre le bruit et les dégâts qu'il occasionne. Il faudra que je paie pour tout ça plus tard. Ah la la. Afin de lui éviter de s'embarrasser davantage, j'attrape la Pokéball à ma ceinture et fait disparaître mon Pokémon dans un rayon rougeâtre. Oh ! Un coin ! Ni une ni deux, mon bras passe à la ceinture de la jeune fille, avant que de pouvoir la plaquer contre le mur en tentant d'effacer nos silhouettes le plus possible. Nos respirations haletantes sont la seule source de mouvement qui pourrait nous trahir, et même ainsi, j'arrive à rester plus ou moins calme.
« Je pense qu'on est tranquille ici... »
Je peux affirmer que ça ne m'avait pas manqué, toute cette agitation. Il faudra que je fasse plus attention à l'avenir.
Elle observa Allen la tirer vers un coin sombre, la plaquant au mur. Certes, Lyph ne se faisait aucune illusion face au blond, et son cœur était un poil trop préoccupé par un certain brun. Néanmoins, elle restait une femme et cette action la mit quelque peu mal à l'aise, et elle s'efforça de ne rien laisser paraître. Elle posa simplement sa main sur le torse de l'homme, forçant un peu pour lui faire comprendre que leur position était inconvenante.
« C'est pas que t'es pas joli garçon Allen, mais quand même quoi, -kya~. »
Elle attendit encore un peu, avant que le chemin ne lui paraisse clair pour sortir de là et pouvoir réitérer sa proposition.
« Bref, tout ça est bien joli – désolée pour les paparazzis, j'ai tendance à oublier que tu attires le regard. Mais comment comptes-tu répondre à mon offre, hein ? -kya~ »
Elle l'observa quelques secondes, avant de se mettre à marcher de manière nonchalante, pour pouvoir parler sérieusement.
« Ma marque se compose d'une ligne de boutique sur Illumis, et avec sa croissance en popularité, j'aimerais pouvoir l'exporter chez de grandes galeries dans le monde entier, si possible. Cela n'est possible que si j'ai un partenaire commercial assez influent pour me faire une place dans le milieu, et tu as le profil parfait pour ça ! -kya~ »
Elle se contenta de regarder les boutiques autour d'elle en attendant sa réponse.
Rejoins la famille !
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