Mais qu’est ce que je fous ici ? Sérieusement. J’étais venue voir si les rumeurs s’avéraient réelles, et j’avais eu tort. Mon frère était bel et bien passé par ici mais je n’ai toujours pas trouvé la raison exact. Jake, sincèrement… Je veux bien te retrouver mais arrête de me mener dans des endroits pareils. Le type avec lequel j’avais discuté l’autre soir semblait un peu sur la réserve. Selon lui, Jake Harper – qui colle avec le nom de mon père finalement – serait bien venu au Volcan Eneka afin d’y faire des recherches. Était-il devenu un scientifique ? A croire que c’était devenu à la mode. Klaus m’avait suivi, mais étrangement, il n’aimait pas du tout cet endroit. Il y faisait bien trop chaud. J’avais bien un guide avec moi, mais il avait décidé de lâchement m’abandonner quand je lui ai dis vouloir explorer les sentiers hors des chemins ouverts aux visiteurs. Quel lâche. Et maintenant, me voilà au milieu de nulle part, en proie à la lave et à la déshydratation tellement il faisait chaud. J’avais eu vent qu’un champion d’arène possédait son arène dans le volcan même. Ce type devait avoir le sang chaud pour rester dans un endroit pareil.

- A vos risques et périls mademoiselle Trevor. Je ne vous suivrai pas dans cette folie.

Ses paroles trottaient en boucle dans mon esprit et je commençais peut-être à comprendre pourquoi. Néanmoins, être une tête brûlée ne m’avait jamais empêchée de m’en sortir. Je marchais à travers le sol rocailleux, à travers les vents chauds et les ondulations. Ce n’était qu’une illusion d’optique liée à la chaleur et à la vapeur… Rien d’autre. Je devais juste retrouver mon chemin. J’avais tout de même beaucoup de mal à réfléchir. Je buvais bien trop souvent dans la bouteille que j’avais emmenée et elle était quasiment vide. Je doutais du fait que je pouvais trouver une boutique dans les parages. Je ne savais absolument pas où je m’étais fourrée. Klaus ne semblait pas se rappeler du chemin retour. Et je n’avais pas du tout trouvé une seule trace de mon frangin ici. Cela me désespérait fortement. Est-ce que j’allais dépérir ici ? Quand même pas, ce n’était qu’un volcan bon sang. Se perdre sur les sentiers interdits, comme quoi, ce n’était pas interdit pour rien. Il fallait que je retourne à la civilisation avant la tombée de la nuit. Ou alors, j’allais devoir camper ici, comme une survivante, comme ces types dans ces émissions de télévision. Seul, face à une nature imprévisible et déchainée. Je n’avais jamais cru à ces conneries. Pour moi, ce n’était que des histoires. Du divertissement. Et maintenant, je commençais à regretter de ne pas avoir regardé ces bêtises. Mais en avais-je seulement le temps ? Bien sûr que non.

Je posais mon sac contre une paroi, et m’adossais en regardant le ciel. Mes yeux piquaient, ma tête était en sueur, ma respiration saccadée, j’en étais presque à retirer une partie de mes vêtements afin de trouver un peu de fraîcheur. Si seulement j’avais eu un allié capable d’user de capacité d’eau ou de glace. Cela aurait été tellement plus simple. Mais non. Klaus ne pouvait que porter des charges lourdes, frapper… Et c’était tout. Machoc n’était pas connu pour être un tendre, et le voir là, sans qu’il ne puisse m’aider, ça m’attristait. Pour la première fois, Klaus n’avait pas son utilité. Il fallait que je réfléchisse, mais le soleil tapait sur mon crâne et la chaleur environnante m’empêchait d’avoir assez d’oxygène pour avoir les idées claires. Si le destin veut me donner un coup de pouce, qu’il agisse maintenant.

Je me sentais tellement lourde. Cela faisait peut-être cinq minutes que j’étais adossée à la paroi chaude du volcan. Y a pas à dire, ça faisait quand même du bien. La chaleur, c’était à double tranchant. Elle m’empêchait de respirer, mais me faisait comme un effet réconfortant sur ma peau. Ah, quelle bonne idée j’ai eu de me mettre dans cette galère. Je ne remercierai pas Jake, qui m’a mené sur des traces inutiles. Je n’arrive toujours pas à comprendre ce qui l’a attiré ici. Et je pense que sur le moment, je m’en fichais royalement. J’avais juste envie de retourner à la civilisation. Je pensais à mon ancienne vie. Pleine de débauche et lorsque j’avais un problème, j’appelais mon manager. Il me tirait toujours des sales situations. Et là, j’eus comme un flash.

- Mon téléphone !

Je sortais ainsi mon portable avant de remarquer qu’il ne s’allumait pas. Merci le destin. Merci de me laisser seule dans la mouise. Klaus cherchait désespérément une solution, sans succès. Il n’était pas vraiment doué avec l’orientation. Ce n’était pas son point fort, et dans cette situation, tout ceux qu’il possédait ne me servait à rien. Je fermais les yeux quelques instants. Vas-y… Pense… Klaus me tapotait le bras au bout de deux minutes afin de pointer le petit ourson noir et rose qui s’approchait docilement de nous. Il tendait le museau vers l’avant, comme s’il avait senti quelque chose. Il lorgnait mon sac, posé sur le sol. Klaus commençait à se taper les poings, comme s’il voulait intimider la pauvre créature qui avait certainement senti la barre énergétique aux baies dans mon sac.

- Laisse-le tranquille. Tu ne vois pas qu’il ne nous veut pas de mal ?

Je sortais la petite barre afin de l’ouvrir et de la tendre à la créature. Il avait l’air si adorable. Peut-être qu’il pouvait nous ramener sur le chemin des visiteurs. Comme ça, je retournerai via la voie normale. Car de là, il n’y avait rien d’autre que des rochers et des falaises abruptes. Oui, c’était risquer de descendre par ce genre d’endroits. Je ne voulais pas me casser une jambe, déjà que j’étais au bord de l’insolation… Je me relevais avec beaucoup de mal et m’approchais de la petite boule de poil. Je lui posais la barre au niveau de ses pattes, et il l’attrapait avant de fuir lâchement. Je tendais le bras vers lui, comme pour lui dire de nous attendre mais il avait juste une petite fringale, et son but n’était pas de nous aider. J’ai certainement été idiote de penser qu’une créature sauvage allait nous aider à nous en sortir. J’avançais à travers les rochers, prenant appui sur ce que je pouvais. J’attrapais ma bouteille et laissais tomber les rares gouttes jusqu’au fond de mon gosier. Ca me rafraichirait pendant un léger moment. C’était déjà ça de gagné. Le soleil tapait si fort sur ma tête, je sentais le mal de crâne me frapper. Ma main venait se poser machinalement sur mon front, il dégoulinait de sueur. Déjà que je n’étais pas bien épaisse… Mais là, je fondais carrément au soleil. Je tentais de repérer la piste du petit ourson. Avec un peu de chance, j’arriverai à lui remettre la main dessus et à retrouver mon chemin. S’il vivait dans ces contrées, il devait bien connaître les chemins normaux. D’autant plus qu’il n’avait pas l’air méchant ou effrayé lorsqu’il s’est approché de moi. Cela signifie qu’il a l’habitude des gens, et qu’il doit venir racketter les diverses visiteurs du volcan. Les gens se laissent berner facilement tant il est adorable. Mais quelque chose me dit que toutes les créatures des environs ne sont pas aussi dociles…

Après quelques mètres, je sentais comme un effet de chaleur plus puissant que le volcan et le soleil réunit. Je me retournais, avant de remarquer une petite flamme mouvante. Il m’épie, me fixe, sans bouger. Ce n’est pas une situation angoissante qui venait de démarrer. C’était carrément flippant. Lui aussi, il voulait un bout de barre ? Il ne m’en restait plus qu’une, et si je devais passer la nuit ici, j’allais devoir me trouver à manger. A moins de garder cette cochonnerie de côté. J’en avais assez de traîner des pieds ici, la route ne devait pas être très loin, et Klaus semblait tout aussi agacé de la situation.

- Je crois que nous sommes sur la même longueur d’onde, mon cher Klaus.

Il s’étirait, de manière naturelle, avant d’approcher du petit singe tout feu, tout flamme. Il lui décrocha un coup net et précis. Klaus ne faisait pas dans la demi-mesure. Le singe ne se laissait pas faire. Il tentait de garder le Machoc chromatique à distance. Mais rien n’y faisait. Mon allié se lançait corps et âme dans la bataille. Il voulait vraiment s’en débarrasser. Néanmoins, je remarquais les quelques sphères de capture dans mon sac. Je sifflais le Pokémon plein de hargne avant de lui montrer. Il avait tout à fait compris, je comptais adopter ce petit singe. Pour quelle raison obscure ? Je ne savais pas encore. Quelque chose me disait qu’il pourrait me servir plus tard. Nous verrions cela le moment venu. En attendant, je m’asseyais dans le seul petit coin d’ombre que j’avais croisé jusque là. Une sensation de fraîcheur m’envahissait même si c’était léger. J’avais tout de même l’impression d’être dans un endroit plus frais que tout ce qui se trouvait autour. Je regardais le singe, se débattant de toutes ses forces. Klaus avait tellement d’impulsivité et de force qu’il allait certainement le blesser. Mais je trouverai bien un moyen de le faire soigner. Ou avec du repos. Tout est possible.

- Vas y doucement quand même, j’aimerais bien le ramener avec nous. Il va nous servir à sortir de là.

Immédiatement, Klaus entreprit de ne plus frapper aussi fort. Il avait tenté de l’intimider avec sa capacité Groz’Yeux avant de lui asséner une énième Balayette. Je pense qu’il est temps d’envoyer une Pokéball et de voir si le petit avait envie de nous suivre ou de mourir ici. Le tuer ne me rapporterait rien, j’avais besoin de lui pour retourner au pied du volcan. C’était primordial, et plus le temps passait, plus ça allait mal se passer pour moi. Le temps était quasiment compté maintenant. J’avais si chaud, si soif… Que le destin soit de mon côté, car il semblerait qu’il m’ait abandonné aujourd’hui.

Klaus n’attendait pas que la sphère s’arrête après avoir enfermé le singe, il la ramassait et me la ramenait directement. Elle s’arrêtait une fois en ma possession. Le ouistiti venait de faire le bon choix, et grâce à lui, j’allais pouvoir rentrer chez moi. Du moins, à l’hôtel afin de me reposer. Quelque chose me disait que j’allais devoir dormir un peu. Le mal de crâne s’intensifiait. Il fallait certainement que je passe par une pharmacie ou un centre Pokémon. Histoire de trouver un médicament afin de faire cesser cette douleur. Ma bouche s’était asséchée, et mes jambes tremblotaient. Je n’avais plus vraiment le temps et la force de courir. Je libérais le singe avant de le dévisager.

- Mène-nous au bas du volcan. Le chemin le plus rapide.

Il pointait une direction, avant de monter sur mes épaules et me laissait avancer. Je boitais, j’avançais de manière saccadée mais l’envie de retrouver un lit était bien trop forte pour que je m’écroule maintenant. Klaus me poussait au niveau du fessier afin de m’apporter un soutien. C’était difficile mais je voyais quelques personnes en contrebas. Le sentier des visiteurs ! Enfin, des gens. Je commençais à descendre tout doucement, je sentais mes jambes faiblir. J’arrivais en contrebas et je sentis juste mon corps flancher avec le reste. Oui, j’étais si près du but mais je n’avais pas trouvé la force d’aller jusqu’au bout. J’avais bien trop soif et j’étais bien trop faible. Quand je me réveillais, un homme se tenait dans la chambre d’hôtel. C’était le guide qui m’avait abandonné quelques heures plus tôt.

- Je vous avais bien dit que c’était de la pure folie. La personne que vous cherchez a eu exactement le même problème. Il était là-bas pour faire des recherches et était tellement dans son travail qu’il en a fait un malaise. Paraîtrait qu’il aurait oublié de manger. Je n’en sais pas plus. Si vous voulez le trouver, il était à l’hôpital la dernière fois que j’ai entendu son nom. Maintenant, je vais vous laisser, reposez-vous.

Je le remerciais, avant de rester allongée, à réfléchir. Devais-je suivre la trace de l’hôpital ? Mais pour l’instant, je voulais juste me reposer, mon crâne était encore en bouilli…