Cela va faire un petit moment que je suis installé sur la banquette. J’occupe une bonne partie de la table avec mes Pokémons. Je les observe avec une tendresse mal dissimulée. Chunchunmaru somnole paisiblement dans un coin de la table, probablement bercé par les tic et toc que produisent les pattes de Ganozunozu. Celui-ci est encore en train de danser. Encore. Je ne sais toujours pas pourquoi il apprécie tant de danser, mais ce qui est sûr, c’est qu’il suit perpétuellement une musique qu’il est le seul à entendre.
Quand j’y pense, ça me rend un peu triste. Si ça se trouve, un rythme entêtant lui vrille le cerveau depuis qu’il est tout petit, ne lui laissant que la danse pour extérioriser sa souffrance.
Mouais, tu parles qu’il a l’air de souffrir, avec son air innocent pendant qu’il est en train de grignoter… Mon sucre ?! Mais- Quand est-ce que… ? Bah ! Il est trop tard de toute façon. Je lui fais un regard de réprimande, pour la forme. Gerugeruni a une mauvaise influence sur lui.
Je bois une gorgée de mon thé noir avant de le regretter… chaudement. Je sens le liquide glisser tout le long de mon œsophage avant de sentir une bouffée de chaleur me remonter jusqu’aux joues. Mouais. Pas très malin de prendre une boisson chaude par ce temps… Mais la délicieuse saveur des fruits rouges rattrape la bévue. Si au moins Gerugeruni avait été là, il aurait pu me le refroidir avec un peu d’eau. Mais connaissant sa fâcheuse habitude à semer la pagaille, je n’allais certainement pas l’amener à proximité d’une telle quantité de porcelaine. Et puis comme ça, il tient compagnie à Batakana.
M’enfonçant un peu plus dans la banquette, je ne peux m’empêcher de pousser un soupir de contentement avant de reporter mon regard sur mon travail : une feuille de dessin est étendue devant moi. Blanche, la feuille. Désespérément blanche. Je n’arrive pas à choisir un sujet. J’ai déjà beaucoup de dessins de Chunchun, j’ai envie de dessiner autre chose qu’un Tylton pour une fois (même s’il est vraiment trop mignon quand il dort). Evidemment, j’ai également un Paras sous les yeux, mais n’allez surtout pas compter sur lui pour garder la pose…
Je commence à regarder les autres clients du café, espérant que mon regard serait accroché par quelque chose.
Alors que mes yeux parcourent la population de la salle, mon regard croise celui d’une cliente qui semblait perdue dans ses pensées. Enfin, perdue dans ses pensées, mais en me fixant. Troublé, je n’arrive pas à détacher mon regard de ces deux perles d’ambre. L’instant s’étire, et avec lui bourgeonne un malaise grandissant.
* Ben quoi ? Je me suis taché avec mon crayon ?*
Je me palpe rapidement les joues mais ne sens pas de texture étrange. Gêné, j’allais détourner le regard lorsqu’un mouvement à sa table me fait réagir : un Paras se tiens devant son Stalgamin et semble l’examiner.
* Tiens ? Il était déjà là avant ? *
Mon cœur rate un battement lorsque le pokémon insecte se met à faire ce qui ressemble à un numéro de claquettes, comme pour impressionner sa cible. Mon coude, qui jusque-là supportait ma tête, glisse du bord de table (me donnant probablement l’air ridicule) lorsque, du coin de l’œil, je m’aperçois que Ganozunozu manque à l’appelle.
Me levant avec précipitation, je me cogne deux fois à la table, le mollet contre le pied (* Aïe. *) et la hanche contre le coin (* Mais, aïe ! *). En plus de me faire mal, je réussi également à renverser un peu de mon thé et à réveiller Chunchunmaru qui se met à pépier contre cet outrage. Au temps pour la discrétion.
J’arrive devant la jeune femme, essoufflé, endolori et le rouge aux joues. Le pire, c’est que ce dernier n’est absolument pas dû aux deux premiers, mais bien à l’embarrât que j’ai réussi à générer, tout seul, comme un grand. Enfin, maintenant que je suis la…
« HUM ! Excusez-moi madame, mon Pokémon à dû vous déranger, je vais le récupérer… »
Ben ! Voilà que le Stalgamin se met à danser avec Ganozunozu maintenant ! Enfin, s’ils s’entendent bien, c’est le principal. Pendant un moment j’ai cru que son Pokémon allait assommer le miens à coup de miroirs. Je pousse un discret sourire de soulagement : à mes yeux, le plus dur est passé.
« Tu dessinais quelque chose ? »
Hein ? Comment elle sait ça ? Ça fait combien de temps qu’elle m’observe ? De gène, je me gratte l’arrière du crâne avec mon crayon.
Ah. Oui. Mon crayon. Bref.
« Pas encore, à vrai dire je cherchais un sujet de dessin quand je vous ai vu. »
Euh… Je viens de dire ça ? Et c’est sensé vouloir dire quoi ? Je rattrape le coup :
« Non pas que j’ai envie de vous dessiner hein ! »
PAR-FAIT. Brillant, Sanzo. Vraiment.
« Je ne veux pas dire par la que vous n’êtes pas belle, au contraire. Enfin je n’ai pas dit que vous êtes belle, attention, vous êtes jol-raviss-charm-enfin, plutôt normale quoi. »
Voilà que je m’enfonce. J’essaye de formuler une réponse cohérente, mais toute ce que je réussi à faire, c’est à m’embarrasser. J’essaye de retourner sur le sujet principal :
« AHUM. Quoi qu’il en soit, je dessine plutôt des Pokémons d’habitude, du coup c’est pour ça que vous, ça serait pas possible. Enfin pas facile. Enfin pas joli. Non ! Euh… »
Je suis maintenant rouge comme une tomate. J’ai vraiment l’impression de glisser dans un puit sans fond. Si je ne change pas de sujet dans les secondes qui viennent, je vais me liquéfier de honte. J’avise le matériel répandu sur sa table : une ouverture ! Je tente une accroche :
La jeune femme est visiblement assez magnanime pour passer outre mes erreurs et balbutiements, c’est bien gentil de sa part. Je pousse un soupir de soulagement. Lorsqu’elle se met à parler de fossiles, je me prends à rêver de fouilles archéologiques dignes des films qui passent à la télé, avec des méchants de la team Rocket qui tentent de garder le trésor à des fins personnelles. La grande aventure quoi !
Mais ma rêverie est vite interrompue par sa question suivante :
« Enfin bon, tu n'as pas envie de les dessiner ces deux-là ? Je peux continuer mon travail en attendant, comme ça. »
Plutôt serieuse hein ? Enfin je peux la comprendre, moi et mes pokemons on l’a dérangé en pleine préparation.
« Je peux essayer oui, même s’ils ne sont pas du genre coopératif à bouger comme ça. »
J’avise la table presque pleine. Pour éviter de la gêner davantage, je vais chercher la mienne pour l’accoler à la sienne. Chunchunmaru me jette un regard noir pendant que je déplace la table.
« Nan mais dis donc ! Ça va oui ?! Espèce de fainéant ! »
Loin d’être affecté par ma réprimande, il se contente de se retourner et de se réinstaller pour dormir. Nan mais vraiment, on croit rêver ! Enfin. Je finis de placer la table, puis m’installe à l’opposé de ma compagne de fortune, afin de lui laisser de la place. Buvant une gorgée de thé (Argh, toujours trop chaud), je l’observe un instant. Je me rends compte qu’elle est assez inexpressive tout de même… Probablement dut à la concentration. Je vais essayer de briser la glace.
« On ne s’est pas présentés au fait : je m’appelle Sanzo. »
Ça aurait sans doute mieux sonné si je ne faisais pas encore une grimace à cause du thé. Je ne sais pas quelle étoile j’ai offensé, mais elle a décidé de me le faire payer aujourd’hui.
Ekaterina. Le nom a une drôle de sonorité. Comme s’il y avait une syllabe en trop. Enfin, on ne choisit pas son prénom, n’est-ce pas ? Je me concentre plutôt sur mon dessin. Contrairement à ce que je craignais, le Stalgamin est très coopératif. Elle s’est arrêtée de danser et s’est immédiatement mise à poser. Une vraie starlette !
« Tu es déjà allé aux Ruines d'Akeos ? »
« Euh, non, pas du tout. »
Pendant que je trace doucement la forme générale du Stalgamin, je fais tourner le nom du lieu dans ma tête. Je suis certain de l’avoir déjà lu, ou entendu. Mais où ?
Stalgamin ayant des contours assez faciles à dessiner, je passe très vite aux détails. Mon modèle met du cœur à l’ouvrage, ça me motive pour en mettre également dans le miens.
Akeos. Akeos. Pour le coup, on dirait plutôt qu’il manque quelque chose à ce nom là… Ça me trouble de ne pas me souvenir où j’ai entendu ce nom. Ça me fait froncer les sourcils, et je n’aime pas froncer les sourcils. Ça donne un air trop sérieux.
Curieux, Ganozunozu s’est rapproché du dessin également. Probablement plus pour être avec sa camarade que par curiosité en fait. Mais ce n’est pas grave. Il est particulièrement calme depuis qu’il a réussi à l’approcher. Si j’ai le temps, je le dessinerais également.
Akeos… Je me masse la tempe avec ma gomme pour m’aider à réfléchir. Je l’ai lu, j’en suis sûr. Mais sur quoi ?
Mon regard se pose sur la carte d’Ekaterina (vraiment, quelque chose cloche avec ce prénom). MAIS BIEN SUR ! Je l’ai vu sur une carte alors que j’étudiais la région avant d’emménager ! Enfin, je peux arrêter de froncer les sourcils, mon visage s’éclaircit :
« Ah ! Ça me revient ! Ce n’est pas perdu au milieu du désert ? C’est là-bas que vous comptez aller ? Vous pensez trouver des fossiles dans ces ruines ? »
La carte posée sur son coin de table, Ekaterina mua ses lèvres en une légère moue, n'insistant pas. Tant pis, il n'avait rien à lui apporter de plus sur ces Ruines, elle se débrouillerait. Yeux rivés sur la carte, elle cercla le lieu qui abritait les Ruines, étudiant la distance à parcourir parmi les dunes, se demandant s'il n'y avait pas moyen de louer un Bourrinos aux habitants d'Herisis. Ils étaient peut-être un peu sauvages, n'empêche qu'ils connaissaient les lieux mieux que quiconque et un petit arrêt là-bas n'aurait rien de négatif. Prenant son carnet, la chercheuse nota quelques indications pour son propre compte ci et là, les sourcils légèrement froncés, pensive. Si elle n'en montrait rien, Ekaterina était rongée par l'impatience : que trouverait-elle là-bas ? Quels Pokémon maudits s'éveilleraient ? Y'aurait-il des fossiles ? Les pilleurs étaient-ils encore en vie ?
Stalgamin, elle, prenait la pose avec beaucoup d'engouement, le sourire immense, déviant un peu son regard bleuté vers le Paras lorsqu'il s'approcha. Cependant, sérieuse et très concernée par le travail de Sanzo, elle ne se laissa pas davantage distraire, bien trop heureuse qu'on prenne son sublime.... que dis-je, divin portrait ! Ekaterina releva la tête, le minois un peu interrogatif quand le jeune garçon s'exclama soudainement, le faciès tout éclairé par une quelconque révélation.
« C'est bien ça, c'est par-ici. » Souffla la jeune femme en usant du bout de son crayon pour entourer l'endroit, le tapotant un peu avant de relever son regard vers Sanzo. « Oui je m'y rend d'ici peu. On parle de tombeaux et de lieux antiques, j'imagine que la probabilité de trouver des fossiles est élevée. »
Elle rabaissa son regard, un léger sourire en coin.
« Mais apparemment, il ne fait pas bon d'y aller en ce-moment. Quelques histoires un peu macabres dignes de films d'épouvante. » Laissa t-elle échapper avant de se remettre à noter quelques petites choses alors que Stalgamin bousculait gentiment son ami Insecte, finalement distraite. Comme quoi...
« Oui je m'y rends d'ici peu. On parle de tombeaux et de lieux antiques, j'imagine que la probabilité de trouver des fossiles est élevée. »
Des tombeaux hein ? Je l’imagine déjà, dans un vieux bâtiment sombre et poussiéreux, avec pour seule lumière une torche enflammée et pour comme seules armes son courage et sa détermination ! Quel beau tableau ! Mon esprit se met à dériver pendant que je continue distraitement de dessiner.
« Mais apparemment, il ne fait pas bon d'y aller en ce-moment. »
Des risques d’effondrement ? Des pièges ? Des sables mouvants ? J’entends d’ici la musique d’aventurier fier et libre comme l’air !
« Quelques histoires un peu macabres dignes de films d'épouvante. »
Le retour à la réalité est dur. La mine de mon crayon se casse, faisant sursauter Chunchunmaru et gratifiant au passage mon dessin d’une magnifique rature. Les deux autres, dans leurs jeux dansants, ne se rendent compte de rien. Alors que je me mets à tailler mon crayon, je bafouille :
« M-m-macabres vous dites ? De films d’épouvantes ? Ce ne sont que de simples exagérations, n’est-ce pas ? Des bruits de couloir, n’est-ce pas ? Héhé, héhéhé… »
Même à moi, mon rire me semble faux. Je respire un grand coup pour me calmer et me sortir de la tête les images colorées qui m’ont traversé la tête. A en voir son sourire en coin, elle l’a fait exprès ! J’me suis fait avoir comme un bleu ! J’efface ma rature un peu boudeusement.
« Même si ce ne sont que des rumeurs ou des exagérations, il y a des chances pour qu’il y ait un point de départ réel à cette histoire. Les ruines sont au milieu d’un désert après tout, n’importe quoi pourrait arriver alors… f-faites attention à vous. »
Zut. J’ai rebafouillé. Décidément, pas moyen de discuter normalement avec cette femme. Mais le message est là, c’est l’important, je suppose.
Ekaterina releva légèrement les yeux vers Sanzo, un sourcil arqué, intriguée par sa mine cassée et ses bafouillages. Stalgamin, elle, ricane légèrement face à cette situation, se moquant même du Tylton qui a sursauté, une patte devant la bouche. Des bruits de couloir ? Devant la peur du jeune garçon, Ekaterina s'amuse, elle redresse son corps et arbore un léger rictus en coin. Son coude droit glisse sur le bois de la table et s'y pose tandis que, tranquillement, nonchalamment, elle pose son poing contre sa joue et scrute Sanzo. Il faut croire que l'air terrifié du jeune dresseur à réveillé l'humeur joueuse de la chercheuse.
« J'imagine que des chasseurs de trésors disparus là-bas sont un bon point de départ. »
Souffla la demoiselle. En effet, des chercheurs de trésors étaient partis là-bas, également de simples scientifiques, aucun n'était revenu des entrailles des ruines, silence radio. Que faisaient les autorités ? Excellente question mais cela faisait longtemps que Ekaterina ne comptait plus sur elles pour changer quoique ce soit. Tant mieux, elle n'avait pas envie d'être embêtée par quelques policiers durant ses propres fouilles et recherches.
« Mes Pokémon sont forts et je sais me défendre, il n'y a pas à s'inquiéter. » Fit-elle d'une voix particulièrement assurée, haussant un peu les épaules.
Ekaterina était de toute manière une scientifique de terrain, jamais elle ne cracherait sur une telle expédition : que pouvait-il bien lui arriver ? Elle calculait tout, préparait tout, ses actions étaient précises et minutieuses, ses Pokémon entraînés et elle-même savait se défendre. Pourtant, n'était-ce pas parfois une telle arrogance et assurance, qui, alors, perdaient même les plus Grands ?
« Tu es simplement dessinateur ou tu cherches quelque chose de particulier, aux côtés des Pokémon ? » Demanda soudainement la chercheuse, son entière attention posée sur Sanzo.
« Tu es simplement dessinateur ou tu cherches quelque chose de particulier, aux côtés des Pokémon ? »
Voilà une question qui me prend au dépourvu. Jusqu’à présent, j’avais l’impression d’avoir à peine capté son attention. Qu’est-ce qui a éveillé son intérêt ? Est-ce qu’elle cherche juste à faire la conversation ?
Non pas que ça ait grande importance, j’imagine. Cependant, cette question me trouble à un autre niveau : je me rends compte que je ne me la suis jamais posée. Je prends du recul sur mon ouvrage, m’adossant au dossier de la chaise, et prends le temps d’y réfléchir.
« Hmmm, c’est une bonne question. Pour être franc, je n’y ai pas beaucoup réfléchi. J’avais soif d’aventures en arrivant sur cette ile, alors je me suis lancé sans vraiment y penser. Mais je me rends compte que ça nous a beaucoup rapproché, mes Pokémons et moi. Et au-delà de ça, J’ai le sentiment qu’on a commencé à changer depuis qu’on est là… »
Presque instinctivement, je me mets à gratouiller le haut du crane de Chunchun qui se met à roucouler de plaisir.
Oui, on a commencé à changer depuis qu’on est là. Notre rencontre avec le voleur, l’arrivée de nouveaux camarades, les rencontres que l’on a faites… je relève la tête vers Ekaterina.
« Oui, c’est ça : j’avais l’impression de stagner dans ma vie depuis un petit moment. Mais mes Pokémons m’aident à avancer, à évoluer en quelque sorte. Et j’aime à penser que c’est réciproque. Que ce soit en les dessinant ou en leurs préparant à manger, j’aime passer du temps auprès d’eux et les voir changer. »
Je me rends compte que je me suis beaucoup ouvert, j’émets un petit rire gêné.
« Désolé, je ne suis pas sûr d’avoir répondu à votre question... »
Pour essayer de reprendre un peu de contenance, je reprends une gorgée de thé, qui a enfin une température convenable.
Ekaterina se redressa un peu sur son siège, bras croisés, appuis bien encrés dans le sol, le regard posé sur Sanzo. Elle observa les mimiques de son visage tandis qu'il se plongeait dans une profonde réflexion, répondant alors, quelque peu pensif. Ekaterina grimaça légèrement sans forcément s'en cacher, presque repoussée par les dires du garçon. Pourquoi fallait-il que tous finissent par tomber dans.... cette amitié ? Grandir avec les Pokémon, amitié, changer ensemble, évoluer, ensemble c'était quelque peu ridicule à entendre. Les humains devaient tous êtres profondément seuls pour finir par s’amouracher de ces êtres qui, à ses yeux, n'étaient que sujets d'études et outils fort utiles. La Violette observa le geste d'affection, le regard fixe et dénué de toute expression, à présent. Avoir un lien avec son Pokémon renforçait-il véritablement quelque chose ? Est-ce que cela, ce... pseudo Pouvoir de l'Amitié aidait à remporter des affrontements ? Que nenni. Foutaises.
Elle reposa son regard sur Sanzo, plongeant ses prunelles d'or dans les siennes, céruléennes. Stagner dans sa vie jusqu'à rencontrer les Pokémon ? Ridicule. La scientifique reposa ses coudes sur la table en laissant un soupire passer la barrière de ses lèvres, elle posa des doigts contre ses tempes et ferma les yeux, songeuse. Ekaterina resta muette un instant, les yeux clos, tentant de rester ouverte d'esprit pour poursuivre la conversation bien qu'elle doutait grandement en tirer quelque chose de plus intéressant que d'habitude.
« Hm.. Non, je vois, je vois ce que tu dis. » Elle rouvrit ses yeux et redressa sa tête, posant son menton fin contre ses mains croisées devant elle. « Des choses que répètent presque tous les dresseurs. »
Elle haussa ses épaules, un rictus en coin, secouant la tête.
« Mais c'est des conneries. Les Pokémon ne sont pas nos amis. Ce ne sont que des outils que nous avons soumis il y a de ça de longues et longues années. »
Stalgamin se stoppa et scruta sa dresseuse de ses petits yeux, l'air intrigué d'entendre son ton bien moins sympathique qu'auparavant. La Violette ne lui accorda pas son attention, préférant scruter Sanzo et observer ainsi ses réactions face à ces dires.
Tiens, elle a l’air agacée tout à coup. J’ai dit un truc qui fallait pas ?
Et puis qu’est-ce que c’est que cette histoire d’outils ? De … soumission ? Est-ce qu’elle parle des combats ? Ou alors ?
« Oh je vois ! Vous voulez parler des Pokéballs, c’est ça ? »
Pensivement, je sors mes crayons de couleur de leurs étuis. Le jaune, l’orange, le noir, mais aussi le bleu, pour les yeux de ce charmant Stalgamin.
« Je peux comprendre que ça vous rebute. Moi-même j’évite de les utiliser. Je préfère me lier d’amitié avec mes Pokémon plutôt que de juste les capturer. »
Je commence à colorier mon dessin avec application, veillant à ne pas dépasser les bords.
« Je n’aime pas vraiment ces objets, ils donnent l’ascendant au dresseur. A la fois physique, mais surtout psychologique. Le Pokémon n’a pas le choix de rentrer ou non dans la Pokéball, ça doit être très dur, moralement.
Mais d’un autre côté, certains Pokémons peuvent se montrer très dangereux lorsqu’ils ne sont pas maitrisés, ou contenus. Prenez Limagma par exemple, son corps entier est constitué de lave. Même avec les meilleures intentions du monde, il risquerait de blesser quelqu’un. »
Je pousse un soupir. C’est une question que j’ai souvent tournée et retournée dans ma tête, mais je n’ai jamais trouvé de solution viable.
Si ce n'était que les Pokéballs. Ekaterina eut un petit sourire en coin tandis qu'elle secouait un peu la tête, soupirant intérieurement. Cela ne la rebutait d'ailleurs aucunement, loin de là, la scientifique n'en avait pas grand-chose à faire et ces sphères métalliques étaient, entre-autre, une nécessité. Du moins pour les Pokémon basiques, les légendes méritaient de meilleures prisons capables d'enfermer leur force dévastatrice.
A vrai dire Ekaterina ne prenait pas de position, si certains défendaient farouchement les droits des Pokémon et que d'autres préféraient les voir uniquement comme des armes, la scientifique voyait ces fabuleuses créatures comme, peut-être, des moyens de. Le fait était tout simplement que les Pokémon étaient des êtres capables de donner de véritables ailes à grand nombre d'humains et rares étaient ceux qui vivaient sans Pokémon. Ekaterina songea un peu, l'air neutre. S'était-elle attendue à une réaction plus enflammée ? Sûrement mais ça changeait un peu, au fond.
« Mon Teraclope n'a jamais eu de Pokéballs ou du moins, pas depuis que... Enfin, il n'en a pas. » Disons qu'il avait simplement été là à son réveil et qu'il l'avait toujours suivit sans Pokéball. Ekaterina n'avait jamais songé à l'enfermer dans une sphère et le Spectre était extrêmement fidèle alors qu'il était, d'une certaine manière, complètement libre. « Mais il m'obéit au doigt et à l'oeil. Cependant, ma Séviper ne désir que me tuer. Elle a même une fois réussit à sortir de force de sa Pokéball pour me trancher. »
Le serpent était un véritable démon et la scientifique en gardait une vilain cicatrice dans le flanc. La queue-lame de Séviper avait tranché vêtements et chair, lui écrasant quelques côtes au passage et venant répandre du venin au sein de son organisme. Elle n'était pas passée loin ce jour-là mais au fur et à mesure, elles avaient réussit à plus ou moins trouver un terrain d'entente.
« Mais ce n'est pas tant des Pokéballs dont je parlais. » De quoi voulait-elle exactement parler ? La Violette fronça légèrement ses sourcils, pensive. Elle se rétracta finalement, affichant un faux sourire tandis qu'elle reposait son regard sur Sanzo, détaillant quelques secondes son visage avant d'hausser les épaules. Ekaterina n'avait pas vraiment l'habitude de beaucoup parler et encore moins de ses ressentiments, elle préféra donc se taire à ce propos.
« Enfin ! Ce n'est rien, oublie-cela. J'ai laissé mes pensées s'exprimer sans réfléchir. »
Elle perdit son pseudo sourire et se renfonça dans sa chaise, scrutant le dessin puis Stalgamin qui sautillait sur place, encore heureuse d'être dessinée. La jeune femme termina sa boisson vivement puis commença tranquillement à rassembler ses affaires.
J’ai l’impression qu’elle n’est pas du toute satisfaite de ma réponse. Ou plutôt que j’ai répondu à coté de la plaque.
Enfin j’en sais trop rien. Sa réponse était un peu confuse. Un Téraclope sans Pokéball ? Ou est-il alors ? Un Seviper qui sort de sa Pokéball ? C’est la première fois que j’entends ça. Je ne sais trop quoi en penser.
Et pour couronner le tout, maintenant elle a clos le sujet et semble être sur le point de s’en aller ! J’ai vraiment l’impression d’avoir tout foutu en l’air. Enfin, de toute façon, cette discussion est placée sous le signe de la malchance depuis de début, donc au final, ce n’est pas si étonnant.
Pensif, je contemple mon dessin, finit. Probablement la seule chose réussie de la journée. J’ai vraiment réussi à capter l’expression adorable de ce Stalgamin ! J’ai même fini par rajouter Ganozunozu à coté, avec sa petite bouille curieuse. C’est rare de le voir aussi calme, alors j’en ai profité.
Je suis quand même très content du résultat. Dommage que le reste de la conversation n’ai pas été au même niveau.
Alors que je range mes crayons dans leur étui, quelque chose commence à me titiller un coin du crane. Elle a dit qu’elle avait quels Pokémons déjà ? Téraclope ? Seviper ? Et en plus un Stalgamin ? Est-ce que ça serait possible que… Nan, la coïncidence serait trop grande. Pourtant, j’ai bien envie de lui demander quand même.
Et puis bon, foutu pour foutu, j’me lance :
« Pardonnez-moi si c’est indiscret mais… vous ne viendriez pas d’Hoenn, par hasard ? »
Ekaterina laissa son regard s'attarder sur le dessin, se stoppant un instant dans son rangement pour secrètement admirer l'oeuvre. C'était indéniablement bien fait mais la Violette se garda bien de laisser échapper le moindre compliment, faisant mine de s'en ficher alors que Stalgamin était aux anges, attrapant même la tête de Paras pour lui offrir un baiser sur la joue. La jeune femme haussa ses épaules puis fit glisser ses affaires dans son sac à dos quand, alors, la voix de Sanzo fut à nouveau audible. Elle coula ses prunelles mordorées vers lui, l’œil interrogateur. De Hoenn ? Pourquoi lui demandait-il cela... ? Fronçant ses sourcils, elle tenta un instant de chercher ce qui aurait pu l'amener à une telle conclusion.
« Non je viens de... » Elle fronça un peu plus ses sourcils, baissant le regard. Apparemment elle venait d'ici, non ? C'était assez gênant de n'en avoir aucun souvenir. Soupirant un peu, la demoiselle secoua sa tête puis releva son minois vers Sanzo.
« Je viens d'ici. Mais pourquoi demandes-tu cela ? Qu'est-ce qui te fais penser que je pourrais venir d'Hoenn ? » Lâcha t-elle finalement, intriguée bien que son air détaché n'en montrait rien. Avait-elle une tête à venir de là-bas ? Un style vestimentaire ? Une manière de parler ou... Oh, ils avaient parlé de Pokémon avant qu'il pose cette question non ? Peut-être.. Un rapport avec cela, peut-être qu'elle possédait massivement des Pokémon venant de là-bas ? Elle avait parlé de Téraclope, Séviper et Stalgamin était présent. C'était donc ça... Elle eut un léger sourire en coin.
« Mes Pokémon, hm ? C'est un hasard. T'as l'air de t'y connaître en Pokémon d'Hoenn. » Elle avait cessé de s'agiter pour partir.
Elle marque une pause, comme si elle réfléchissait à la réponse… C’est pourtant simple non ?
« Je viens d'ici. Mais pourquoi demandes-tu cela ? Qu'est-ce qui te fais penser que je pourrais venir d'Hoenn ? »
Son regard se pose sur Stalgamin qui, heureuse d’avoir été dessinée, est en train de faire des bisous à Ganozunozu. Le pauvre en a la tête qui tourne ! Il vacille, ne sachant visiblement plus sur quelle patte se tenir – un comble, quand on en a autant que lui ! – avant de finalement se laisser tomber sur la table.
Je ne peux m’empêcher de sourire devant la scène ! Pour un peu, je soupçonnerais cette petite d’avoir rendu mon Paras confus avec une attaque doux baiser !
Ekaterina reprend, son sempiternel sourire en coin au bord des lèvres :
« Mes Pokémon, hm ? C'est un hasard. T'as l'air de t'y connaître en Pokémon d'Hoenn. »
Etrangement, elle ne semble plus si prête à partir que ça. J’ai décidément beaucoup de mal à la cerner.
« Je viens de là-bas. J’y ai habité toute ma vie – jusqu’à ce qu’on déménage ici, bien sûr – donc forcément, j’en connais un grand nombre. Je n’ai jamais vu de Stalgamin avant – pas très étonnant, j’habitais au pied d’un volcan ! En revanche j’ai déjà croisé quelques Seviper. C’est très difficile de les approcher – et assez dangereux même. C’est d’ailleurs étrange que le vôtre vous déteste autant, d’habitude ils réservent leur haine aux Mangriffs, leurs éternels rivaux. J’ai vu un nombre incalculable de leurs combats, quand je me baladais près de chez moi ! »
Je fronce les sourcils. Le troisième Pokémon dont elle m’a parlé est à mes yeux bien plus inquiétant que Seviper…
« En revanche Téraclope… Il a très mauvaise réputation. On raconte qu’il est capable d’aspirer l’âme des gens ! Manipulateur, vicieux, dangereux. Ma mère me disais souvent que si j'étais pas sage, un Skelenox viendrait me chercher.»
Je souris en repenssant à ça. Mais je me rends compte que je suis en train de dire du mal du compagnon de toujours de mon interlocutrice. Je tente de rattraper le tir :
« Enfin, j’imagine qu’ils ne sont pas tous comme ça hein ! Beaucoup de Pokémons spectres ont mauvaise réputation parce qu’ils trainent dans les cimetières, comme le mont Mémoria… »
Hey, pas trop mal rattrapé pour une fois !
« Enfin je parle, je parle, mais je me suis un peu éloigné du sujet. Il y a quelque chose que vous vouliez savoir en particulier ? »
Elle l'écouta parler d'un air attentif bien que cet air se modifia petit à petit au fil des paroles de Sanzo. Peut-être qu'il l'ennuyait un peu, avec son blabla ? Dans tous les cas, l'air plutôt neutre de la jeune femme revint au galop tandis qu'elle l'écoutait toujours. Ekaterina haussa ses épaules, de toute manière, sa Séviper détestait à peu près tout le monde, mieux valait qu'elle ne rencontre pas de Mangriff, ce serait sûrement un carnage au vu de l'agressivité dont faisait preuve le serpent h24. Elle reposa ses prunelles sur lui, un léger sourire aux lippes. C'est vrai que les spectres n'avaient généralement pas bonne réputation et Skelenox, Teraclope ainsi que Noctunoir en avait une particulièrement sombre. On racontait même que Noctunoir était un messager direct de la Mort, qu'il amenait les âmes là où elles devaient êtres.
« Ce n'est rien, pas besoin d'essayer de te rattraper, les Spectres ont tous mauvaise réputation de toute manière. Mais le mien sait se tenir. »
Et il avait intérêt à savoir se tenir. Il quitta d'ailleurs son invisibilité, redevenant tangible, debout aux côtés de sa dresseuse qui rappela finalement Stalgamin dans sa Pokéball. Cette-fois, elle comptait bien y aller, elle avait suffisamment tergiversé avec ce jeune homme.
« Bien, j'y vais à présent. Bonne continuation. » Lâcha t-elle en remettant son sac à dos en place après s'être relevée, laissant un peu d'argent sur la table. Elle tendit ensuite sa main au jeune garçon pour la lui serrer puis s'esquiva, quittant les lieux en silence, suivie par Téraclope.
Bon, cette fois c’est la bonne, j’ai l’impression.
Elle se lève d’un air résolu, bien décidée à partir. Je sursaute lorsqu’apparait à côté d’elle son Teraclope. Il était là depuis le début ? Mince, j’espère qu’il ne m’en veut pas trop, lui non plus. La jeune femme rappelle son Stalgamin, laissant Ganozu seul sur la table, un peu surprit du départ soudain de sa compagne.
« Bien, j'y vais à présent. Bonne continuation. »
Je lui sers la main plus par reflexe qu’autre chose, moi aussi surprit de son départ à la fois aussi soudain que déterminé.
« Euh, merci, vous aussi. »
Puis elle s’en va après avoir laissé un peu d’argent pour payer son addition. Je reste encore un peu de temps pour finir ma boisson, pensif. Est-ce que j’ai dit quelque chose qu’il ne fallait pas ? J’ai le sentiment que je ne suis pas près de le savoir. A moins de la recroiser au hasard d’un voyage ? Mais bon, ça me parait hautement improbable.
Ganozu m’a l’air désœuvré depuis que Stalgamin n’est plus la. Il tourne en rond, sans motivation particulière. Je le gratte entre ses champignons, je sais qu’il apprécie. Il a l’air d’apprécier, mais je n’ai pas l’impression que ça le réconforte pour autant.
Je pousse un soupir. Drôle de rencontre. Je fini ma boisson, paye à mon tour l’addition, puis prend à mon tour le chemin du retour.
Rejoins la famille !
Accueil
Dernières images
Rechercher
S'enregistrer
Connexion
Reira