« Oh, tu es là, ma petite douceur. Viens me voir. »

Ça, c’est papa qui vient te chercher dans ta chambre après les cauchemars que tu fais toutes les nuits depuis l’accident. Tu as 6 ans. Ta maman n’est plus là pour toi parce que quelqu’un de méchant n’a pas su arrêter l’accident. Accident dont tu ne veux pas entendre les détails parce que la réalité te rattraperait bien trop rapidement. Papa te serre fort dans ses bras. Ce soir là est pire puisque ça fait une semaine qu’elle n’est plus là. Pourtant, tu n’as jamais vu papa pleurer une seule fois, lui. Pourquoi est-ce que tu pleurais, toi ? Cette question a résonné dans ta tête toute la soirée, avant que tu ne t’endormes profondément contre le torse de ton père qui laissait les larmes silencieusement couler sur ses joues, pour ne pas te déranger.

Tu n’as jamais su que les papas pouvaient pleurer.

Ce que tu as su, néanmoins, c’est qu’à partir du lendemain tu allais arrêter de pleurer. Et tu allais recommencer à sourire, parce que c’est ce que maman voudrait. Te voir heureuse. Avec toi, tu traînes toujours la boucle préférée de maman, que tu attaches presque tous les jours sur le collet de ta petite robe.  Puis le sourire de papa est revenu, lui aussi. Lors de tes neuf ans, toi et papa changez de maison pour rejoindre Relifac-le-haut, toujours dans la région de Kalos. C’est là que ta vie débutait, avec les études, les amis… bref, tout semblait bien aller, parfaitement même.

Jusqu’au jour où tu as eu tes 20 ans. Tu viens de terminer tes cours d’administration et de gestion de dossiers et de données. Alors que tu retournes chez toi, diplôme en main, on t’accoste On te vend le gros rêve, avec un bon salaire, un travail temps plein et plein de perspective. Quoique la demande au milieu d’une rue vide après une fête de graduation d’étudiants et étudiantes en administration et gestion par un inconnu si étrangement vêtu sonne bizarre, il reste que tu t’es jeté sur l’occasion, mais tu as aussi mordu à pleine dent dans l’hameçon. En moins de temps qu’il n’en faut pour dire « chat », tu t’es retrouvée à gérer des affaires criminelles. À gérer la paperasse sale et malhonnête de la team Flare. Tu ne vois rien de tout ça, en revanche, au début. Tu crois que tout ça, au fond, est une affaire juste et fiable.

Comment as-tu faite pour ne rien voir ? Facile, l’amour.

L’amour t’a rendue idiote. L’amour t’a rendue aveugle. L’amour t’a rendue… encore plus naïve. Tu as eu le malheur de t’éprendre éperdument d’un des sbires de la team. Toutes ses convictions ont fini par t’atteindre et te faire croire que tout ce que tu faisais était juste et légitime Tu te sentais appréciée à ta juste valeur. On t’a même offert un Pokémon, ordre du grand boss Lysandre lui-même ! C’est là que tu as obtenu ton Pokémon, Misty la Psytigri.

Malheureusement, tout ce qui est heureux ne dure qu’un temps. Assez rapidement, tu remarques l’insistance de ton copain, Anthony, à vouloir te faire rester plus tard. Tu le fais, parce que l’amour te rend addictive. Tu restes si tard que bientôt tu dors dans le quartier général. Puis après vient l’arrêt de communication avec ton père. Lui qui t’envoyait des lettres presque toutes les semaines, ou qui t’appelait souvent, tu te retrouves avec plus rien, du jour au lendemain. Malgré ta naïveté, ton instinct commence à se réveiller et à te faire paniquer. Tu perds le contact avec tes amis, ta famille, et tu te retrouves bientôt prisonnières des activités de cette organisation malhonnête. Au fil des semaines suivantes, tu continues de faire ce qu’on te demande, pour Anthony. Tu crois en lui, et tu crois en vous surtout.

Deux ans. Deux ans à savoir. Deux ans à continuer. Deux ans avant de te réveiller. Tu n’as plus personne sauf la team. Tous les jours, ton positivisme semble aspiré par l’ambiance générale. Enfin, la veille de ton anniversaire de 22 ans, tu l’attrapes. Anthony, en train de te tromper. Ton cœur brise à cet instant, et tous les motifs pour rester semblent se désintégrer entre tes petits doigts. C’est tout ce dont tu avais besoin pour quitter. Dans la nuit, alors qu’Anthony dort dans le lit qui est à votre disposition, tu sors ton sac prépaé et prend ta Pokéball avant de partir à la course vers le coffre de l’organisation dont le code ne t’est pas inconnu. Tu ne voles pas beaucoup, juste assez pour bien vivre une fois que tu sauras saine et sauve loin d’eux. Toutes les alarmes sonnent, et c’est une fois devant les portes que la voix de ton ancien amant sonne, trop près à ton goût.


- Tu es là, ma douceur. Reviens, MAINTENANT.

Une question de seconde, tu as ouvert la porte avant qu’elle puisse être verrouillée, et tu as courue. Courue comme jamais dans ta vie. Jusqu’à ce que tu puisses enfin te jeter dans un train qui part en direction de Port-Tempère. Tout ce que tu arrives à faire, c’est d’écrire une lettre à ton papa pour lui expliquer, et t’excuser. Tu lui expliques, en espérant que c’est vrai que les papas ne peuvent pas pleurer.

Aujourd’hui, où en es-tu ? 1 ans plus tard, te voilà établie dans une nouvelle région, Lumiris. Tu as, avec l’argent, réussi à te créer un réseau de contact qui t’a permis de pouvoir avoir ta propre bibliothèque, où tu tiens beaucoup de livres en tout genre. Tu as retrouvé ton sourire, et la nouvelle toi, qui ne se laissera plus piler sur les pieds aussi facilement, et qui sait aujourd’hui tirer le positif des situations encore plus. Tu espères toujours en toi que papa viendra te voir, maintenant qu’il sait où tu habites. Une chose est sûre, Lumiris était pour toi la chance d’un renouveau, une nouvelle vie, loin de la criminalité.