Il fut un temps où les humains craignaient les Pokémons et où la cohabitation se faisait à l'aide de frontières et de murs. Dans l'idée d'une harmonie, les puissantes créatures ont fini par s'allier aux intelligents humains, construisant lentement un monde où le paysage pourrait ne rencontrer aucun obstacle sans en alterner sa paix. Mais l'humain est celui qui a le mieux évolué. Les puissants alliés sont rapidement devenus inutiles, tant la société humaine a progressé, et ont fini exilés. De nos jours encore, il existe d'un côté des humains et des Pokémons qui cherchent à entretenir ce qu'il reste de cette ancienne harmonie et de l'autre, ceux qui les considèrent, avec un déni hypocrite ou une franchise cruelle, comme de simples outils déjà acquis. Se rendre au Parc Safari était pour Alexey quelque chose comme une expérience sociale. Non pas qu'elle désirait caresser son ego en taquinant des valeurs qu'elle n'avait honnêtement pas, mais simplement, elle désirait se faire une propre opinion d'elle-même face à ce qui pouvait être considéré comme polémique : une réserve où il est possible pour un dresseur d'arracher quelques habitants à sa faune contre une modeste somme d'argent.

Sans trop de cérémonies ou d'explications, petit dépliant en papier en guise de guide, on lâche des dresseurs de tout âge dans un parc où la nature est encerclée de routes de terre ou de barrières en bois. Si un citadin n'ayant jamais quitté son nid n'avait aucun mal à s'imaginer en milieu sauvage, n'importe quelle personne ayant un jour parcouru une forêt, une savane ou un quelconque marais, aurait un mauvais rictus en subissant toute cette publicité mensongère proposant aux dresseurs des villes de faire face aux Pokémons sauvages... Alexey pouvait concevoir que ce genre d'endroit puisse être des émotions fortes pour le petit peuple qu'un mauvais temps suffit à chambouler. Les petites natures, comme elle les appelait parfois... C'était toujours un peu déroutant pour elle, ingénieuse qui avait plus sa place dans un atelier ou un laboratoire, de réaliser qu'elle était bien plus dégourdie et aventureuse que la plupart des dresseurs de sa génération... Enfin, c'était aussi pour cette raison qu'elle était devenue mercenaire. Ce petit confort qu'ont les gens de nos jours, il fallait bien quelque courageux pour le préserver.

Participer au Parc Safari est payant, pour une modeste somme, on vous promet que vous allez pouvoir attraper tous les Pokémons que vous voulez dans l'enceinte du parc. Cependant... Cette publicité n'est pas entièrement vraie. Non seulement vous ne recevez que 5 Safari Balls, seules Balls autorisées dans le Parc, mais votre présence est aussi chronométrée. C'est donc une véritable course contre le temps et une épreuve de dextérité et de chance qui vous attente. Si Alexey n'avait guère l'habitude de lancer des objets ronds sur des animaux pour les emprisonner, elle possède néanmoins d'autres très bonnes habilités...

Le premier réflexe de la jeune femme fut de trouver un endroit surélevé afin d'avoir une vue d'ensemble, autant que possible du moins, sur la vaste zone du parc. Une façon de savoir quelle direction prendre, de gagner du temps sur les routes trop longues et n'offrant aucun contact rapproché avec les zones où, potentiellement, se nichaient des Pokémons. N'étant pas une spécialiste en environnement et encore moins en créatures magiques, Alexey avait choisi de prendre la direction du lac. Cet endroit semblait entourer de hautes herbes, un habitat idéal pour certains petits Pokémons de type Eau. L'ingénieuse avait choisi la voie la moins risquée.

Les lacs ont toujours cette image saisissante, parfois paisible sous la mélodie du vent, tantôt mystérieuse sous la brume et, qu'importe l'humeur de l'astre, toujours scintillante sous les rayons du soleil. Alexey n'a jamais su totalement se laisser submerger par la beauté ou la force de la nature, considérant l'architecture humaine, et globalement tout ce qui peut naître des mains de l'homme, tout aussi incroyables, voir plus, que ce que la vie peut bâtir. Rien d'étonnant venant de quelqu'un fabriquant une multitude de technologies et autres gadgets en tout genre, me direz-vous... Son pas se voulait le plus silencieux possible, ses chaussures se posant doucement sur l'herbe humide ou sur la boue, s'assurant d'un bon appui avant d'aller vers le mouvement suivant.

Les hautes herbes autour de l'eau ne la rassuraient pas, ainsi, elle préféra les zones un minimum découvert. Ce serait aussi malheureux que stupide de se faire piquer par un Rapion caché dans la végétation... Après un long moment à avancer entre l'eau et les hautes herbes, avec pour objectif de faire le tour du lac, les yeux bleus de l'ingénieuse avaient fini par repérer quelque chose. Devant le lac au lointain, dos à elle, un petit Pokémon semblait s'être perdus à admirer les cristaux de lumières flottant sur la surface de l'eau.