Ferranium n’avait plus été longue à rejoindre après le petit incident avec les Capumains. Toi, tu avais été songeuse une bonne partie du temps de route, songeuse et étrangement silencieuse. Une fois en ville, dès l’aube, tu avais proposé d’aller manger afin de prendre un bon petit déjeuner et après ça, tu avais souhaité aller faire tes petites affaires en ville, abandonnant quelques heures ton compagnon de route que tu n’avais plus quitté depuis votre rencontre sur la route deux. Si tu n’aimais pas la solitude, tu avais jugé bon d’aller acheter tes affaires toute seule, comme une grande et de laisser Shinichi faire ce qu’il avait envie de faire dans son coin à lui. Tu avais dépensé beaucoup … tu n’aimais pas ça mais heureusement, ça ne représentait qu’une toute petite partie de tes économies et surtout, de l’argent placé par tes parents sur ton compte en banque. L’avantage d’avoir une famille riche. Tu n’avais pas spécialement à te soucier des histoires d’argent, du moins pour le moment. Tu avais bien conscience que cette somme, bien que conséquente, ne serait pas éternelle. C’est pour ça que tu faisais attention. Là … disons que tu n’avais pas eu le choix. Un nouveau téléphone était indispensable. De même que de bonnes chaussures, ainsi qu’un sac de couchage. Tu avais aussi réapprovisionné ta trousse de premiers secours et craquer sur quelques vêtements que tu avais jugés adaptés pour les températures du moment. En clair : maintenant, tu avais tout ce qu’il te fallait. Enfin. Normalement.

Vous aviez gardé le plan de Shinichi. Il ne te paraissait pas mauvais et … le fait est qu’au final, le plus doué des deux pour vous orienter et décider où aller, c’était lui. Étrangement. Ferranium quittée, la prochaine étape était donc Fort-des-Songes. Maintenant que tu avais de nouveau un téléphone à portée de main, tu avais profité de la première partie de la route pour te renseigner sur l’endroit. Visiblement, c’était une ville ancienne, un morceau du passé placé au beau milieu d’un vieux bois. Les commentaires des différents sites que tu avais pris le temps de visiter n’en disaient que du bien … et ça te confortais dans ton envie de visiter l’endroit. La route à suivre n’était pas bien compliquée … du moins, en apparence, comme toujours. Vous aviez encore tardé. Tu avais pris un peu plus de temps que prévu à te préparer, stressée à l’idée d’encore oublier des affaires, tu avais à la dernière minute vider ton sac pour vérifier son contenu une dernière fois. De plus, une fois sur la route deux, le réseau avait recommencé à faire des siennes et vous aviez emprunter un chemin qui certes était bon, mais plus long que l’autre puisqu’il serpentait à travers le bois. Ah ce bois. Parlons-en. C’était effectivement bel et bien le même que lors de ta première rencontre avec Shinichi. Le jour, l’endroit était particulièrement joli. De vieux arbres, une végétation dense, et les rayons du soleil qui venaient percer joliment la cime des plus hauts arbres offrant à l’endroit une ambiance toute particulière… Seulement. Le soleil avait commencé à décliner depuis longtemps déjà. La lumière légère et agréable avait fait place à une pénombre étouffante et il avait fallu que tu t’armes de cette lampe de poche que tu avais pris le temps d’acheter en ville pour vous permettre de continuer d’avancer. Le réseau revenait, parfois, vous permettant de vous orienter, un peu, mais vous étiez lents et visiblement, pour cette fois, tu n’étais pas décidée à t’arrêter pour dormir et attendre le jour. Ça, c’était sans doute à cause des bruits particulièrement étranges qui avaient commencés à te parvenir aux oreilles à travers les arbres … des sortes d’appels, de cris parfois, de gémissements, de soupires et de murmures tous droits sortis d’un vrai film d’horreur.

HRP:

Au final, tu n’auras jamais mis les pieds dans un endroit aussi flippant que celui-là. Même la soi-disant maison hantée de la fête foraine que tu avais visitée lorsque tu étais plus jeune, à côté, c’était du pipi de Skitty. Tu te souvenais avoir eu peur, vaguement, ou plutôt de t’être sentie angoissée, oppressée. Là, maintenant, alors que tu avances sur le petit sentier, c’est quelque chose comme cent fois pire, environ. Tu trembles. Tu as l’impression que ton cœur pourrait lâcher à tout moment tant il bat fort, et vite. Rien d’apaisant. C’est comme si ça ne se calmait jamais … Depuis que la nuit était tombée, les bruits s’enchaînaient, se suivaient, et ne se ressemblaient même pas. Tu en étais même venue à te demander si des Pokémon sauvages étaient vraiment capables de produire des bruits similaires. Malgré ta peur, tu accélères, tu tentes de faire abstraction de cette ambiance atroce, et tu y arrives pendant un instant, en te convainquant que tout ça n’est dû qu’à la vie nocturne de certaines espèces et que même si ces murmures et ces soupires sont inquiétants, ils n’en sont pas moins normaux ou presque. Malheureusement, ça ne dure qu’un temps. Bientôt, un cri plus fort que le reste des bruits environnants résonne à travers le bois et tu te figes complètement … tu n’as pas l’impression qu’il s’agisse d’un Pokémon. D’ailleurs, les paroles de Shinichi te confortent dans cette idée. « N-non. La dernière fois qu’on s’est mêlé de quelques choses on a failli finir en pâté. » Et non, tu n’as toujours pas oublié l’épisode glorieux des Mangriff. Sérieusement. Lui et sa tendance à fourrer son nez dans les affaires des autres … Un lourd soupire passe entre tes lèvres. D’un autre côté, laisser des Pokémon se battre était une chose. Abandonner un être humain à son sort en était une autre. Et si demain tu apprenais la découverte d’un cadavre dans ces mêmes bois, hein ? Tu t’en voudrais pour le reste de ton existence. « Bon … on peut aller jeter un œil. »

Tu le sais bien, pourtant, que c’est la pire idée au monde. Si ça se trouve, les cadavres qu’on va retrouver au petit matin, ce sera les vôtres. Aucun instinct de survie. Vraiment. Vous voilà donc partis dans la direction d’où semblait provenir le fameux cri … ta lampe de poche toujours dans la main, tu essayes tant bien que mal d’éclairer devant toi tandis que le faisceau lumineux tremble tout autant que ta main. Tu as cette impression plus que désagréable que ça gigote autour de vous, alors tu éclaires tantôt à droite, tantôt à gauche, tantôt en l’air pour ne finalement jamais rien capter. Du moins, pas jusqu’à ce que ta lumière s’arrête sur ce Chenipotte. Il a l’air calme. Il ne bouge pratiquement pas et en réalité, il semble déjà bien occupé, trop pour se soucier de vous deux. Par curiosité, tu fais donc deux pas en plus pour l’observer … et cette fois, c’est toi qui laisses échapper un cri lorsque tu constates que ce Pokémon est en train de manger l’un de ses frangins qui d’ailleurs, n’a plus l’air de première fraîcheur. Tu réprimes un haut le cœur, reculant de quelques pas cette fois avant de t’arrêter pour respirer. Là. Tu sens … ce truc bizarre, et froid, dans ton dos. Ton premier réflexe et de tenter de te débarrasser de ce truc – quoi que ça puisse être – et effectivement, tu attrapes bien quelque chose, quelque chose de très bizarre qui te forces à te retourner pour tomber nez à nez avec un horrible Saquedeneu qui visiblement semble beaucoup s’amuser en agitant ses lianes dans tous les sens. Forcément, encore une fois, tu hurles et tu reviens littéralement en courant vers ton compagnon de route pour t’accrocher à lui telle une véritable sangsue. « Fait quelque chose s’il te plait, on va finir dévorés par ces monstres ! »

HRP:

Et tu trembles. Et tu paniques. Et tu cries. Et franchement, tu n’arrives même plus à réfléchir correctement. Si tu avais été seule, tu te serais sans doute contentée d’aller te recroqueviller dans un coin en attendant que ça passe mais évidemment, vu que tu es accompagnée, c’est sur Shinichi que ça tombe et c’est lui que tu supplies presque de faire quelque chose. Quoi ? Aucune idée. Juste quelque chose. Forcément, le pauvre est pratiquement aussi paumé que toi, ou presque. Disons que lui au moins est capable de faire un choix … celui de courir, encore. Et ça te va complètement, étant donné que tout ce que tu veux pour le moment, c’est sortir de ce bois infâme pour retrouver la sécurité de civilisation. Quel n’est donc pas ton soulagement lorsque ton camarade t’annonce que le réseau fonctionne de nouveau. Il peut voir votre position maintenant, et vous guider en dehors de cet endroit. Du coup, après plusieurs minutes de course, tu t’arrêtes, tirant un peu sur le bras du jeune homme pour lui faire comprendre que tu es à bout de souffle. Tu doutes fortement que le Saquedeneu ait pris le temps de vous poursuivre … le Chenipotte de l’enfer encore moins et même si tu es loin de te sentir en sécurité, ces deux là loin de toi, tu peux quand même souffler, respirer. « Qu’est-ce que c’est que ces créatures affreuses … » Franchement, un Chenipotte qui mange un cadavre de Chenipotte, tu étais certaine que cette vision d’horreur allait te hanter un petit moment. Jamais tu n’aurais pensé cette toute petite chose insignifiante capable d’un tel truc.

Tentant de reprendre tes esprits … un certain sentiment de panique revient te saisir lorsque tu entends ce tout petit bruit. Les cris et les gémissements étranges semblent s’être arrêtés depuis une bonne minute entière et tu entends ce petit frottement, ou grattement non loin de vous. Et puis, de nouveau gémissements. Tu songes alors au portefeuille ramassé par Shinichi. « Tu entends ? » Cette fois, tu refuses d’avancer toute seule et de te laisser surprendre par le moindre Pokémon de ce bois, alors, tu attrapes la main du jeune homme que tu sers dans la tienne tout en avançant vers la source de ce bruit, ta lumière toujours dans ta main libre, le faisceau passe sur la silhouette d’un Teddiursa … c’est lui, la source du bruit. Il gratte, il gémit. Et tu constates avec à la fois horreur et tristesse que ce dernier gratte une tombe, une vieille tombe visiblement. Devant la scène, tu as presque envie de le prendre dans tes bras, il est mignon après tout, et il a l’air si triste … Seulement, voilà que cette étrange créature sort de nulle part, innocemment, le Zarbi s’approche de la tombe et alors qu’il effleure à peine la pierre, l’adorable Pokémon semblable à un peluche semble voir rouge et attaque. « O-Ok, on ne devrait pas rester là … » Qu’est-ce que c’était que cet endroit ? Tous les Pokémon de ce bois bizarre semblaient avoir littéralement perdu la boule à la nuit tombée. « On s’en va. » Et sans hésiter une seconde plus, toujours en serrant la main du petit blond dans la tienne, tu fais demi-tour pour retourner sur le sentier qui, tu oses l’espérer, va vous mener hors de ce lieu terrifiant.

Suivre le sentier. Juste, suivre ce maudit sentier, maintenant que vous l’avez retrouvé. Ne plus s’en éloigner, peu importe le bruit, ou peu importe ce qui peut encore arriver, jouer les chevaliers servants face à la détresse presque palpable qui peuple ce lieu c’est terminé. Tout ce que tu veux maintenant, c’est revenir à la civilisation, retourner auprès des êtres humains et des Pokémon normaux qui se contentent de bouchées cuisinées ou encore de croquettes et laissent les cadavres là où ils sont. Heureusement, les lumières de la ville ne tardent pas trop à faire leur apparition et quelques longues minutes de marche plus tard, vous êtes de nouveau en sécurité au beau milieu de Fort-des-Songes. L’endroit est bien différent de Ferranium d’ailleurs, c’est éclairé, mais ça l’est bien moins que la ville précédente, et bien moins qu’Illumis. Cependant, c’est toujours mieux que le bois et rassurée – un peu – tu éteins finalement ta lampe torche – ton meilleur investissement à ce jour – dans ton sac avant de soupirer et d’observer les alentours avec curiosité. Evidemment, il était tard et il était donc hors de question de se lancer dans une visite de la ville pour le moment, néanmoins, tu avais bien envie de faire tout ça dés le lendemain matin. « Drôle ? » Sérieusement … drôle ? Ce n’est pas le mot que tu aurais choisi et pourtant, tu es prise d’un léger rire nerveux en repensant à ta réaction face au Saquedeneu. Quand tu y repenses, et maintenant que tu es en sécurité et que ces bruits effrayants ont totalement disparus, ce n’était … qu’un Saquedeneu. « J’ai jamais eu aussi peur de ma vie … » Et maintenant que cette sensation de stresse et d’angoisse avait disparue, bon sang, ce que tu pouvais se sentir fatiguée. C’était comme si tu avais passé une journée entière à courir. « J’ai pas faim non plus … » Tu avais encore l’estomac complètement noué parce que tu avais vu là-bas, le simple fait de songer à une quelconque nourriture te donnais tout simplement envie de vomir. « T’es fatigué, toi ? Je t’avoue que je me sens épuisée de mon côté … » Cette fois, c’est toi qui sors ton téléphone de ta poche, il faut bien qu’il serve un peu et tout en empruntant une direction au hasard en marchant lentement, tu te mets à fixer l’écran à la recherche d’un endroit où dormir dans les parages. Contrairement à Ferranium, il n’y a pas grand-chose et pas énormément de choix. Du coup, tu t’arrêtes sur l’un des liens. « Mh … il y a visiblement une vieille dame pas très loin qui loue une chambre aux voyageurs. C’est écrit « A toute heure. » … ça vaut peut-être le coup de tenter, non ? A moins que tu préfères dormir dehors ? » Après l’aventure dans les bois, tu devais avouer que tu n’avais pas spécialement envie de dormir par terre et dehors. En plus, le prix affiché pour la chambre était clairement dérisoire, pratiquement la moitié par rapport à la chambre de l’auberge de Ferranium.