Ekaterina était là, au comptoir, seule. C'était comme si une bulle s'était formée autour d'elle et empêchait quiconque de pénétrer dans son espace vital, voir dans les dix mètres l'entourant. Aura glaciale, minois fermé et sérieux, doigts crispés sur son verre, le langage corporel suffisait et personne n'avait envie de tâter de son venin. Ainsi elle avait la paix et dégustait son verre d'alcool en toute impunité, le regard fixé sur le bois du comptoir. Rageuse, elle l'était ; celui qu'elle avait contacté pour avoir des informations à propos des Ruines d'Akeos lui avait faussé compagnie. Mieux valait pour lui qu'elle ne lui mette pas la main dessus, il passerait une très mauvaise heure à n'en point douter.

Elle abandonna son verre, ignorant Skelénox qui, invisible, restait à ses côtés, fidèle et silencieux comme à l'accoutumée. Lasse, la jeune femme se dirigeait en direction des toilettes afin de se passer un coup d'eau sur le faciès, se réveiller ; elle dormait si mal après tout. Ses cernes en étaient témoins et ses prunelles fatiguées tout autant. Alors elle pénétra le lieu, s'approcha de la longue rangée de lavabo et ouvrit l'un d'eux, passant ses fines mains sous le liquide frais, appréciant un peu le contact avant de se pencher légèrement, prête à s'envoyer de l'eau à la figure. Alors, du brouhaha. Une jeune femme chancelante, l'air hagard et prête à s'écrouler d'une seconde à l'autre. Saoul, certainement. Ekaterina décida de ne pas y prendre garde, ce n'était pas ses affaires. Mais alors, ça s'agitait drôlement. Un genre de chien semblait inquiet et surtout, surtout... Quelqu'un tentait de voler la demoiselle au bord de l'inconscience.

Mine de rien, mains dans les poches, Ekaterina approcha. Skelénox bloqua la sortie des toilettes en usant de ses ombres, empêchant la voleuse de fuir. Ekaterina conserva son air neutre, tendant une main, écartant et refermant ses doigts pour signifier à l'être de rendre l'objet. Regard hautain, négation ? La chercheuse eut un mouvement brusque et sa main emprisonna la mâchoire de la voleuse, la forçant à percuter la porte bien maintenue derrière elle. La surprise et le choc firent lâcher le portable qui, bienheureusement, tomba dans la main libre de la scientifique dénuée de sourire ou de satisfaction.

« Déguerpis. » Souffla t-elle alors que Skelénox libérait la porte et l'ouvrait en grand, laissant la voleuse filer sans un dernier mot. Ekaterina sa détourna alors et lança légèrement le portable qui atterrit sur la presque victime d'un vol. Puis, la chercheuse s'apprêta à quitter le lieu mais elle croisa le regard de Skelénox, puis, ses prunelles furent à nouveau attiré par la rousse presque inerte. Grognement, mâchoires serrées, Ekaterina se pencha vers la demoiselle et la releva un peu, l'approchant près d'un lavabo, elle ouvrit l'eau, passa une main dessous et rafraîchit le visage de l'inconnue tandis que Skelénox faisait voler le portable tombé au sol (pendant qu'Ekaterina avait soulevé la demoiselle) à l'aide d'Ombre Nocturne, le posant sur un rebord.

« Ça va aller ? »