Oh merde, oh merde, oh merde.

Une douce mélodie qui se répétait inlassablement dans la tête d’Auguste. Pieds nus, pantalon remonté et manches retroussées, le voilà qui s’affairait à retourner chaque pierre sur laquelle il parvenait à mettre la main. Voilà bien une dizaine de minute qu’il s’échinait ainsi dans le but de retrouver sa montre, tombée dans l’eau un peu plus tôt. Ici, il avait de l’eau jusqu’au mollet et puisqu’en plus d’y avoir peu de fond, le courant n’était pas très fort, il espérait que son bien n’ait pas été emporté trop loin. Mieux, la montre s’était peut-être déposée au fond de l’eau, à quelques mètres de lui à peine. Cette idée le poussait à continuer, à ne pas abandonner les recherches.

« Vous trouvez quelque chose ? »

Les Pokémons présent, à savoir Laggron, Gardevoir et Dracolosse, répondirent en cœur d’un soupir ou d’un grognement signifiant que non, ils n’avaient pas retrouvé ce que leur dresseur cherchait. Chacun couvrait une zone bien définie et la fouillait avait minutie. Avec un peu de chance, ils finiraient tôt ou tard par la retrouver.

Au fond, ce n’était qu’une montre. Auguste en était conscient. Une montre qui avait eu un certain coût, certes, mais c’était surtout la valeur sentimentale de l’objet qui motivait le Pulsar à poursuivre les fouilles. C’était un cadeau reçu il y a quelques mois, offert par Sarah en guise de félicitations pour la réouverture de son arène. Le présent de la floriste lui tenait à cœur justement parce qu’il venait d’elle. Après tout, des montres, il en avait d’autres et, dans le pire des cas, son portable indiquait l’heure. Alors bon…

« Ah ! »

Là, sous ses doigts, un objet vaguement circulaire. Auguste l’extirpe d’entre deux pierres et le sortit de l’eau. L’espoir céda aussitôt place à la déception lorsqu’il s’aperçut que ce n’était pas une montre mais juste un vulgaire morceau de céramique. Il pesta intérieurement en fourrant le déchet dans sa poche. Ce serait dommage qu’un Pokémon sauvage ou un promeneur vienne se blesser sur le bord coupant de cet éclat. Puis, il replongea les mains dans l’eau avec une ardeur renouvelée.


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Tous ces remous finirent par attirer les petits curieux du coup. Auguste vit du coin de l’œil quelques Bargantuas, s’approchant un peu pour voir ce qui venait perturber leur tranquillité. Un humain, accompagné de ses Pokémons, voilà qui était à l’origine de cette agitation. La plupart, méfiants, restèrent à bonne distance et repartirent s’enfuir sous une pierre après quelques secondes mais d’autres, plus braves, prirent la décision de s’approcher un peu plus près. Auguste n’y voyait aucun problème, tant qu’ils ne le gênaient pas. Ses compagnons aussi le savaient. Inutile de les intimider ou de les faire fuir tant qu’il n’y avait pas de signe d’hostilité de la part de la faune locale.

« Coucou, toi. »

Les salutations étaient adressées à un Barpau qui s’était approché jusqu’à se trouver à portée de main du pulsar. Ces créatures n’étaient pas réputées pour leur bravoure tant et si bien que mettre la main dessus était un véritable calvaire dans leur région d’origine. Auguste avait un souvenir très clair d’enchères de Barpaux où ils étaient vendus à prix d’or ainsi que de scandales récurrents sur leur élevages intensifs dans le but de les faire se reproduire le plus vite possible. Sales histoires…

Le Pokémon gesticulait un peu dans tous les sens, comme s’il essayait d’attirer l’attention du Champion Psy. Ce dernier haussa un sourcil, sans trop comprendre quel était le message. En frétillant de la sorte, il donnait surtout l’impression de faire un AVC. Mephisto vint heureusement à la rescousse de son dresseur et entama la conversation avec le Barpau – avec de gros guillemets autour du mot « conversation ». Auguste les laisse à leurs affaires, n’ayant pas la moindre idée de ce qu’ils se racontaient, et continua les fouilles de son côté. L’endroit était étonnamment propre puisque, à part une canette, il ne trouva aucun autre déchet. Chose rare, surtout quand on savait à quel point le promeneur pouvait se comporter comme de gros dégueulasses.

Quel que fut le sujet de la discussion entre Laggron et Barpau, les deux Pokémons semblèrent arriver à un accord. Mephisto continua ses recherches là où il les avait laissées juste avant tandis que l’autre créature s’éloigna un peu et plongea tout au fond de l’eau. Lentement, il retournait une à une les pierres jonchant le lit de la rivière, là où aucun des Pokémons d’Auguste n’était encore passé. Selon toute vraisemblance, Laggron avait réussi à les rallier à leur cause. Tant pis. Une paire de bras – enfin, de nageoires – en plus ne serait pas de trop.


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Un cri de victoire s’échappa des lèvres d’Auguste lorsqu’il leva le poing, l’air triomphant. Ah ah ! Enfin ! Le Pulsar exultait. Après plus d’une demi-heure de recherches, il avait commencé à croire qu’il ne retrouverait jamais sa montre. La mort dans l’âme, il réfléchissait déjà à la manière d’annoncer à Sarah qu’il l’avait égarée. Elle ne lui en voudrait pas mais serait assurément déçue et cette idée provoquait un pincement au cœur chez le champion d’arène. Leur amitié ne datait pas de hier et c’était une personne à qui il était très attaché.

« Je l’ai ! » annonça-t-il avec fierté.

Ses compagnons levèrent la tête et comprirent qu’ils pouvaient arrêter leurs fouilles. Rassurés de savoir que leur dresseur avait retrouvé son bien, ils n’avaient plus à s’esquinter le dos dans l’espoir de retrouver cette fameuse montre. Eux ne comprenaient pas la valeur de cet objet mais savait qu’il était précieux pour Auguste et cela avait suffi à les motiver pour mener ces recherches de manière consciencieuse.

« Merci à vous. Et à toi aussi, petit Barpau. »

Le Pokémon sauvage fut gratifié d’une caresse sur le dos en guise de remerciement. Barpau avait tenu à les aider, quand bien même il n’avait rien à y gagner et s’il n’avait pas retrouvé la monter, il avait néanmoins dégoté autre chose. Une pierre Feu. Pas nécessairement utile à Auguste, elle ferait néanmoins le bonheur de quelqu’un d’autre. Trouver une pierre feu dans une rivière avait quelque chose de cocasse et d’inhabituel mais le brun n’allait pas s’en plaindre, même s’il n’avait aucun compagnon susceptible d’évoluer au contact du minéral. Peu de Pokémons en avaient besoin, à vrai dire, mais on trouvait toujours un dresseur ayant un Goupix, un Caninos, un Evoli ou encore un Flamajou à faire évoluer.

« J’ai encore ça pour toi, tu l’as mérité. »

De son sac à dos, le Pulsar sortit un sachet de fruits secs. Trop gros et trop durs pour un Barpau, Auguste entreprit de les broyer dans le creux de sa main jusqu’à obtenir des petits morceaux adaptés au Pokémon à qui ils étaient destinés. Il les lança ensuite vers Barpau, qui frétilla et sauta de plus belle, visiblement ravi par la friandise.


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Bientôt rejoint par un Froussardine, Barpau faisait un tel festin de roi qu’il ne vit pas d’inconvenient à partager avec le nouvel arrivant. La totalité du sachet de fruits secs allait y passer, à ce rythme. Du moins, jusqu’à ce que d’autres Pokémons décident de s’en mêler.

Auguste sursauta. Il avait été surpris par cette arrivée soudaine ; ni lui ni ses compagnons n’avaient vu Roucarnage fondre depuis les cieux pour attraper Barpau. Un battement ce paupières plus tard et l’oiseau était déjà loin et hors de portée. Il n’en fut pas de même pour le second opportuniste. Bekipan, moins agile et moins rapide, avait peiné à reprendre son envol. Tant et si bien que cela laissa le temps à Levia pour lui asséner un grand coup de patte sur la tête. La puissance de l’impact lui fit recracher sa proie, qui plongea aussi profondément que possible dans l’espoir d’échapper à Bekipan dans l’hypothèse où il décidait de ne pas laisser s’échapper son repas. Le Pokémon hurla tant de surprise que de douleur et s’enfuit à tire-d’aile sans demander son reste.

Le silence retomba sur la scène et ne fut brisé que quand le champion psy soupira. Tout s’était passé très vite et ils avaient à peine eu le temps de réagir. Froussardine avait eu la vie sauve mais cela s’était joué de peu. Quant à Barpau, peut-être parviendrait être à se libérer des serres de Roucarnage mais Auguste n’y croyait pas vraiment. Ainsi allait la vie… Au moins, il avait eu droit à un véritable festin avant d’être lui-même dévoré. Même Levia, puissante Dracolosse toujours prêt à s’interposer en cas de besoin, n’avait pas daigné prendre son envol pour se lancer à la poursuite de Roucarnage. Il était déjà beaucoup trop loin. C’était peine perdue.

« Bon. Au moins, j’ai récupéré ma montre. » souffla le brun, dépité.

Ses compagnons ne semblaient pas plus affectés que cela. Ce n’était pas la première fois qu’ils voyaient une créature sauvage finir en dîner. Après tout, certains étaient eux-mêmes des prédateurs et ils comprenaient que cela était tout à fait naturel. Après un haussement d’épaules général, tous décidèrent de retourner à leurs affaires, jusqu’à ce que le Froussardine tout juste sauvé fasse sa réapparition.


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