NOUVEAU STAGE AU CABINET MéDICAL, 14 ALLéE CHARMANTE.
FEAT EWAN A. BANNERMANN
A chaque fois que je m'apprête à affronter quelque chose de nouveau, je me retrouve parfaitement incapable de fermer l’œil. À six reprises, j'ai vérifié que ma tenue était bien repassée, vierge de toute tâche récalcitrante. A quatre reprises, j'ai vérifié l'adresse du Cabinet Médical où je m’apprêtais à entamer un nouveau stage de perfectionnement. J'ai également vérifié six fois le chemin sur une carte et le temps qu'il me faudrait pour m'y rendre à vélo. Par chance, la route six me mènerait directement à Sunyra. J'étais tellement impatiente ! Le Docteur Bannermann, avec qui j'avais eu l'occasion de dialoguer par téléphone, m'avait semblé être extrêmement sympathique ! Certes, il ne semblait pas convaincu à l'idée de m'accueillir comme stagiaire, mais avait néanmoins accepté de me rencontrer. J'étais tellement heureuse que, rien que d'y repenser, j'ai trépigné sous ma couette. Le pauvre Starlight couché à mes pieds avait soupiré avant de se cacher le museau de sa patte. Le pauvre... Avec toute cette agitation, je l'avais empêché de dormir une bonne partie de la nuit.
Vingt minutes avant mon réveil, je ne tenais plus en place ! Si bien que je décidais de me lever plus tôt. Ainsi, j'eus le temps de prendre un bain bien chaud, de sécher mes cheveux, d'y poser quelques pinces afin d'y retenir les plus longues mèches. Une fois vêtue de ma robe blanche d'infirmière, je descendis prendre le petit déjeuner auprès de mes parents. Enfin, je les ai regardé manger tout en leur racontant avec enthousiasme pour la douzième fois la conversation avec le Docteur, mes peurs, mes craintes et mes espérances.
A 7H30, je m'installais enfin sur mon vélo, un sac à dos sur le dos, un Lixy sur l'épaule. J'ai pédalé à toute vitesse, bravant murets et hautes herbes sans rencontrer d'imprévus. En moins d'une heure, je suis arrivée à Sunyra, mon cœur explosant de joie dans ma poitrine. Quelques minutes de plus sur mon vélo et enfin je pouvais lire de mes propres yeux les lettres sombres sur la plaque dorée : Docteur Ewan A. Bannermann. Dans un silence solennel, je descendis de mon deux roue, déposais Starlight sur le sol. Celui-ci semblait sentir l'importance du moment, car il était extrêmement calme, attentif à chacun de mes gestes. Le cadenas installé, j'avançais dans l'allée et sonnais enfin à la porte. J'espérais tant lui faire bonne impression, lui donner envie de me garder auprès de lui. La porte s'ouvrit, on m'invita à entrer. Enfin ! Le cœur battant, absolument ravie, je me présentais avant de franchir le seuil de la porte, mon Lixy sur les talons.
« Bonjour Docteur Bannermann, je suis Suzy Moon, infirmière. Nous nous sommes parlé au téléphone et c'est un véritable plaisir de me retrouver ici avec vous. »
Nouveau stage au cabinet médicalfeat SuzyJ’avais courbé le dos pour me pencher vers la vitrine, fronçant les légèrement les sourcils, comme si je cherchais à juger chaque pâtisserie à sa juste valeur. Je connaissais la douce saveur, la texture crémeuse et le parfum alléchant de chacune d’entre elles. Pourtant, avec la ferme attention de ne pas trop sombrer dans la maladie dans quelques dizaines d’années, je ne m’autorisais qu’à en acheter une, ou peut-être deux… Mon regard émeraude croisa celui du jeune pâtissier qui souriait toujours un peu trop dans des moments comme celui-ci. Ce garçon savait déjà toute la finalité de mon calvaire. Comme tu es faible, Ewan. Mon petit paquet à la main, j’avais quitté la charmante petite boulangerie-pâtisserie en laissant la petite cloche accrochée en haut de la porte adoucir la matinée de sa petite mélodie si caractéristique.
Il était encore tôt et le soleil avait grande peine à se lever. Les magasins commençaient à peine à ouvrir, les vendeurs préparant leurs étalages de marchandises, ouvrant grand leur porte pour inviter les clients à entrer, saluant tout passant avec un large sourire et une voix enjouée. Tout le monde connaissait le Docteur Ewan Bannermann. Évidemment… Un médecin ne pouvait pas passer inaperçu, même dans une ville comme Sunyra. Comme à mon habitude, je m’étais contenté de lever une main gantée de blanc, les saluant en tirant un peu sur ma voix, de sorte à ce qu’ils puissent m’entendre même si je m’éloignais, trottinant doucement vers l’allée charmante, là où mon cabinet m’attendait.
J’avais fait une scène à ma secrétaire pour qu’elle accepte l’une des pâtisseries que j’avais acheté, la laissant me rappeler à quel point ce genre d’excès était mauvais pour la santé, et d’autres choses qu’il ne fallait surtout pas dire à un médecin. C’est finalement en voyant un adorable éclair au chocolat qu’elle accepta de me décharger un peu de mon pêché et fardeau. Victorieux, j’avais regagné la salle de consultation, là où se dressait mon imposant bureau et tout le matériel nécessaire pour diagnostiquer les maux de mes patients. Rangeant les sucreries pour plus tard, j’avais préparé la salle à accueillir les premiers malades. J’avais refait ma queue de cheval et changé ma paire de gants avant de donner le feu vert à la demoiselle à l’accueil. Allons-s’y !
La matinée de consultations sur rendez-vous avait commencé avec brio, avec cette efficacité maniaque dont je n’arrivais jamais à me passer. J’avais tout de même trouvé ça étrange qu’il y ait un trou d’une heure en plein dans mon planning, surtout un jour de forte influence comme celui-ci… Humm… Je m'étais alors convaincu que ce n'était probablement qu'un triste oubli de ma secrétaire… Rien de très méchant, je n’avais qu’à m’accorder une petite pause. Je m’étais frotté les mains à l’idée des jolies choses qui m’attendaient ! Pour une raison que même la raison ignore, même si les toquements à ma porte n’étaient pas comme d’ordinaires, je m'étais persuadé qu'il s'agissait de ma secrétaire. J'avais lâché un simple « Entrez ! » décontracté.
- « Bonjour Docteur Bannermann, je suis Suzy Moon, infirmière. Nous nous sommes parlé au téléphone et c'est un véritable plaisir de me retrouver ici avec vous. »
Cette… Cette jeune femme n’était aucunement ma secrétaire. Petite cuillère en bouche, jolie assiette débordante de douces pâtisseries colorées à moitié entamée devant moi, j’avais lentement cligné des yeux, n’osant pas faire le moindre mouvement, comme si j’avais voulu rester dans le déni jusqu'au bout, dans le doute où, la situation elle-même, hésiterait peut-être à s’installer pour ensuite disparaitrait d'elle même. Ce qui, n’arrive absolument jamais. J’avais retiré la cuillère de ma bouche avant de prendre la parole, hésitant.
- « Ah… C’est… Assez gênant. » Murmurais-je, passant une main sur ma nuque. - « Il se peut que j’ai effectivement oublié que le rendez-vous était pour aujourd’hui… Il n’était pas noté dans le planning et… Je pense qu’il est temps que je fasse un peu travailler ma mémoire… » Murmurais-je rapidement, un peu comme un enfant prit sur le fait d’une bêtise et cherchant, en vain, un début d’excuse. - « Enchanté, Suzy. Je suis le Docteur Ewan Bannermann, tu peux m’appeler simplement Docteur Ewan ! » :copyright:️ 2981 12289 0
NOUVEAU STAGE AU CABINET MéDICAL, 14 ALLéE CHARMANTE.
FEAT EWAN A. BANNERMANN
Je fermais la porte derrière moi avant d'enfin poser mon regard sur le Docteur. Instantanément, mon sourire laissa place à une expression de surprise. Pris sur le fait, le Docteur semblait bien embarrassé de ma présence. Je restais statique près de la porte de son bureau, ne sachant pas trop si je devais faire demi-tour ou rester.
« Ah… C’est… Assez gênant. »
Je suivis sa main du regard, l'observant dans ses mouvements. Il se frottait la nuque, bien embarrassé, pendant que son autre main déposait une fourchette. Je pouvais découvrir devant lui, sur son grand bureau en chêne massif, une assiette blanche décorée de milles couleurs, de fruits, de pâte et de crème onctueuse. Il n'était pas 9h et pourtant, le Docteur se permettait une collation plus que copieuse, très certainement à des années lumières de ce qu'il devait conseiller à ses patients.
« Il se peut que j’ai effectivement oublié que le rendez-vous était pour aujourd’hui… Il n’était pas noté dans le planning et… Je pense qu’il est temps que je fasse un peu travailler ma mémoire… »
Sa voix n'était que murmure et soudainement, je m'en voulais de l'avoir interrompu en pareille situation. De toute évidence, c'était son pécher mignon, son petit secret honteux, une part de son jardin secret. De plus, il était bien embêté d'avoir oublié notre rendez-vous. Tout ceci me fit sourire de compassion, pris la main dans le sac et pourtant, on lui donnerait le bon Dieu sans confession.
« Enchanté, Suzy. Je suis le Docteur Ewan Bannermann, tu peux m’appeler simplement Docteur Ewan ! »
« Enchantée, Docteur Ewan ! »
Je n'étais pas du genre à faire passer les conventions et règles de politesse avant tout, aussi l'appeler par son prénom ne me perturba pas plus que cela, d'autant que ce prénom était très joli. En silence, je m'avançais vers la chaise occupée habituellement par sa patientèle, lui laissant ainsi le temps de finir ou ranger ses pâtisseries.
« Puis-je m'asseoir, Docteur ? »
Je posais mes fesses sur la chaise en cuir en face du docteur. Starlight, lui, s'installa sous la chaise, en boule, cachant son visage entre ses pattes. Je faisais preuve d'une grande force pour réprimer mon envie de sautiller partout et de lui poser un millier de questions. J'étais tellement heureuse et impatiente de commencer mon stage à ses côtés. Pouvoir soigner des gens, apprendre de nouvelles choses, de nouveaux gestes. Je désirais devenir la meilleur infirmière qui soit et ferai tout ce que je peux pour y parvenir.
« Docteur Ewan, je suis tellement heureuse de vous rencontrer. Si vous saviez comme je suis contente d'envisager des stages en dehors d'un hôpital ! Certes, dans les hôpitaux, il y a tant de choses à faire et je les ai apprise avec beaucoup d'application, de méthodologie et de passion, mais j'ai le sentiment qu'il y a bien d'autres choses à apprendre à l'extérieur, au cabinet, mais également chez les patients. Les patients ont besoin de personnes disponibles et à l'écoute, et j'ai bien l'intention de devenir une merveilleuse infirmière ! »
Je reprenais enfin ma respiration, un peu gênée d'avoir finalement laissé mon enthousiasme parler pour moi. Je pouvais entendre le Lixy soupirer sous ma chaise, il savait bien sûre que je ne saurais parfaitement me tenir. Tout à coup silencieuse, le rose aux joues, je me pinçais les lèvres avec un regard d'excuse.
Nouveau stage au cabinet médicalfeat SuzyC’était, ce qu’on appel dans le métier, « l’effet Ewan »… Il suffit toujours qu’un petit quelque chose soit mal planifié pour que l’effet domino opère, et que tout se ramasse joyeusement la figure devant moi, sans que je ne sois capable d’arrêter l’enchainement vertigineux, au risque, de faire voltiger maladroitement les pièces du jeu dans toutes les directions possibles, aggravant davantage la situation. Que ce soit ma secrétaire ou les autres intervenants du secteur médical, on en ait tous venus à chérir mon inaction plus que mes interventions… Si j’étais sans conteste un médecin brillant et d’une efficacité relativement pointilleuse, j’étais également le plus maladroit et le plus mou des hommes. Un enfant dans le corps trop grand d’un adulte, c’est ainsi qu’on me décrit, quand on essaye inutilement d’être gentil avec ma pauvre personne… J’aurais bien aimé proposer un gâteau à la jeune femme, mais… C’était quand même mes gâteaux, à moi… Mon regard allait des merveilleuses pâtisseries à la jeune femme. Non pas, que je puisse éprouver la moindre affection ou un semblant de sentiment de culpabilité, je tenais seulement à m’assurer qu’elle ne suivait pas de trop près le fil de mes pensées par mes gestes et par mes regards. C’était cramé… J’avais doucement secoué la tête de gauche à droite. J'irais en acheter d’autres, quand la secrétaire sera en congé… En cachette…
- « Je vous en prie Suzy, prenez place. Les chaises sont là pour cette raison… » Lui répondis-je dans un premier temps, la voix chaleureuse. - « Puis-je vous proposez une pâtisserie ? Je vais me préparer un café, je me sentirais moins seul si vous m’accompagnez en acceptant également une boisson chaude… Il me semble que j’ai un peu de tout... »
Sur ces mots, j’avais quitté mon trône de fortune pour filer vers la cafetière et le nécessaire pour faire chauffer de l’eau ou du lait, attendant le retour de la jeune femme pour que mes mains se mettent à l’ouvrage. Je devais impérativement terminer les gâteaux à la crème pâtissière, car elle risquait de perdre en qualité gustative le temps du rendez-vous et des consultations qui suivraient… Effectivement, c’était ma priorité absolue. Les gâteaux à la crème. Néanmoins, je me plaisais à me dire que si, déguster des pâtisseries avec une boisson chaude m’était agréable, alors la jeune Suzy trouverait également ça relaxant et appréciable. Cependant, la jeune femme n’était pas venue jusqu’ici pour manger des pâtisseries… Elle…
- « Docteur Ewan, je suis tellement heureuse de vous rencontrer. Si vous saviez comme je suis contente d'envisager des stages en dehors d'un hôpital ! Certes, dans les hôpitaux, il y a tant de choses à faire et je les ai apprise avec beaucoup d'application, de méthodologie et de passion, mais j'ai le sentiment qu'il y a bien d'autres choses à apprendre à l'extérieur, au cabinet, mais également chez les patients. Les patients ont besoin de personnes disponibles et à l'écoute, et j'ai bien l'intention de devenir une merveilleuse infirmière ! »
Un gentil sourire s’était alors dessiné sur mes lèvres, tandis que mes mains terminaient de suivre leurs petites habitudes avec la cafetière.
- « Quel enthousiaste ! » M’exclamais-je. - « C’est le genre de choses que j’aime entendre... » La motivation étant le premier pas vers l’expérience. Sagement, j’avais apporté notre semblant de commande sur l’imposant bureau, reprenant place sur ma chaise. - « Si je dois comparer mon milieu de travail à celui hospitalier… Je dirais que dans mon cadre, c’est plus intrusif. Nous pénétrons parfois chez les gens. Nous nous devons de connaître une part de leur intimité. Nous sommes comme des invités, comme de la famille éloignée, à qui on ose se confier… En venant au cabinet, mes patients ne se sentent étrangers que dans la salle d’attente, ils reprennent tous leurs moyens et toute leur personnalité une fois la consultation lancée… Quand je travaille à l’hôpital, j’ai l’impression que les patients sont les invités, c’est plus difficile de diagnostiquer leurs maux et de les entendre efficacement, car l'endroit comme ses occupants sont des étrangers... Ah la, la, je m’égare... Je pense néanmoins qu’un médecin doit être le même qu’importe le milieu où il opère, mais il faut aussi prendre en considération que le changement d’environnement peut influencer les patients… » Terminais-je en portant ma tasse de café fumant à mes lèvres.
Même si la jeune Suzy l’ignorait, l’entretien avait déjà commencé. Malgré mon apparence tranquille, j’étais parfaitement attentif à ce que voulais bien laisser paraître la jeune femme. Il ne s’agissait pas de l’évaluer, je souhaitais simplement connaître davantage la personne avec qui j’allais partager mon petit espace personnel, ma salle de consultation, durant les semaines à venir. :copyright:️ 2981 12289 0
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