Lorsque l'on est lâché dans un lieu inconnu où tous les visages sont étrangers, il est important de se constituer un nouveau cercle social. Quoi de mieux pour ça que les réseaux sociaux pour s'incruster les événements populaires du coin ? Ma stratégie a rapidement porté ses fruits et me voilà à me dandiner sous les stroboscopes de la piste de danse. Un maquillage sombre pour faire ressortir mes yeux ambrés et une petite robe noire à paillette pour mettre mes hanches en valeur, l'esprit embrumé par les vapeurs de l'alcool alors que mon cœur bat au rythme des basses. J'aime cette ambiance décomplexée, c'est comme si je flottais entre les autres fêtards sans visage, porté par la fumée qui se dissipe peu à peu.

Puis je redescends brusquement sur terre lorsque la musique s'arrête et que les lumières aveuglantes s'allument. Nous ne sommes plus que quelques-uns sur la piste et tout le monde se dirige vers la sortie en riant pour aller terminer cette soirée chez eux. Je me dirige vers les vestiaires pour récupérer mon sac et ma veste, une longue veste sombre à fourrure plus longue que ma robe que j'enfile avant de sortir. Quelques clients sont encore devant pour se fumer une dernière clope et se dire au revoir. Je dois avoir l'air tellement pathétique à me retrouver seule et rentrer en bus… Comme un déclic, je regarde ma montre qui indique 4 h du matin. À quel point j'ai bu et à quel point je me suis amusée pour ne pas voir le temps passer de la sorte. Le dernier bus pour Nemerya est passé il y a au moins 3 h, mais je dois bien pouvoir appeler un taxis. Je cherche mon téléphone dans mon sac puis dans mes poches, mais il reste introuvable. Est-ce que je me retrouve vraiment seule dehors, en pleine nuit, sans moyen de rentrer chez moi ou de contacter qui que ce soit ? Je crois que je vais avoir besoin d'un café…

Non, je me refuse de retomber dans mes vieilles mauvaises manies, puis tout doit être fermé à cette heure-ci. Le froid me fait refermer ma veste sur moi en la maintenant, elle n'a pas de boutons pour le fermer, elle sert plus à avoir de l'allure qu'à être pratique et tenir chaud. Mes longues jambes tremblent légèrement alors que j'essaie de réfléchir malgré les effluves d'alcool qui circulent toujours en moi. Je l'ai peut-être fait tomber sur la piste de danse, c'est ça ! Je rebrousse les quelques rues que j'ai parcourues en déambulant maladroitement pour retourner vers le pub. Il n'y a plus personne devant, tout le monde doit être au chaud chez sois, dans un bon bain ou confortablement installé dans des draps duveteux. Qu'est-ce que j'en rêve à cet instant. Il ne reste qu'un jeune homme qui sort tout juste de l'endroit et semble fermer la porte derrière lui. Mes talons claquent sur le sol alors que j'accélère le pas pour aller à sa rencontre. Mes cheveux sont tous désordonnés et mon maquillage doit avoir légèrement couleur à cause de la chaleur. Je dois sentir un mélanger de sueur et d'alcool avec des effluves perdus un parfum de créateur. Un sourire dessiné par l'ébriété, je l'accoste en levant une main pour attirer son attention :

" Excusez-moi ! Bonsoir, est-ce que vous auriez trouvé un téléphone ? C'est un iphone 13 couleur or et en fond d'écran c'est une Mimiqui ? "