Chapitre 0 : Retrouver ce qu'on a perdu

Le cœur battant la chamade sous le coup de l'émotion, tu fixes la porte qui se trouve en face de toi si intensément qu'on pourrait croire que tu souhaites la passer aux rayons x ou y mettre le feu.

Le frêle lézardeau d'eau à crête perché sur tes épaules se frotte alors à ton cou dans un geste de réconfort désormais bien ancré qui t'arrache un furtif sourire.

Dans le même instant, le bout de tes doigts frôle l'espace de quelques secondes l'une de tes balls dans un réflexe si ancré en toi que la peur qui te consume depuis cette nuit maudite n'a jamais pu l'effacer.

En même temps, comment effacer quelque chose d'aussi immuable que votre amitié ? Non, cette dernière a été certes fragilisée jusqu'au bord de la rupture, mais elle ne pourra jamais être complètement brisée.

Pour cette raison et parce qu'il te serait impensable de faire autrement, tu l'as quand même emmené avec toi pour cette rencontre.

Mais tu as conscience tout comme lui que la sphère métallique qui le contient est quand même plus que la bienvenue pour tenir à distance ta peur du feu.

C'est sur cette pensée et une dernière inspiration pour te donner un semblant de courage que tu rapproches tes doigts de la sonnerie.

Tu attends avec une certaine impatience mêlée de nervosité avant d'entendre le fameux grincement qui indique que la porte est en train de s'ouvrir.

Et tu te retiens de faire un pas en arrière, de fuir à toutes jambes.

Elle est là, juste en face de toi, bien plus petite que dans ton souvenir à moins que ce soit simplement toi qui as grandi.

Elle te sourit timidement, mais avec une tendresse toute maternelle et tu sens cette douce chaleur familière si différente des autres que tu as pu connaître et que tu avais perdue des années plus tôt t'envahir de nouveau.

- Bonjour, Noa.

- Bonjour... Maman.

Chapitre 1 : Le commencement

- Ta maman t'aime très fort, Noa. Ton papa aussi. Mais ils ne peuvent pas continuer à s'occuper de toi pour l'instant, tu comprends ? Ils doivent d'abord prendre soin d'eux s'ils veulent pouvoir un jour prendre soin de toi.

Bien sûr que maman et papa t'aiment, tu n'as pas besoin de l'entendre de la bouche d'un inconnu en costume pour le savoir.

Et non, tu ne comprends pas pourquoi ils ne peuvent plus s'occuper de toi et encore moins ce que tu fais tout seul dans cette pièce avec Apple, ton précieux doudou Verpom (Applin) et cet homme à l'air un peu trop sérieux à ton goût pour seule compagnie.

- Je veux maman et papa, insistes-tu en te mettant à pleurer et à serrer Apple tout contre toi.

Mais tu devrais savoir que les adultes ne se laissent pas attendrir facilement et qu'ils croient toujours détenir la vérité... qu'ils aient raison ou tort d'ailleurs.

Oui, tu devrais le savoir depuis le temps, Noa.

Tu n'as quasiment aucun souvenir de ce qui s'est passé juste après cette scène et ceux que tu as sont flous.

Tu te souviens cependant de l'essentiel.

Comme de ce moment où tu t'es réveillé quelque peu perdu et confus dans une nouvelle paire de bras plus athlétiques et confortables que les précédents, tes doigts toujours serrés sur les « feuilles » d'Apple, ton seul repère.

L'homme à qui appartient ces bras qui te tiennent a des cheveux blonds comme les blés et il t'adresse un sourire franc et communicatif en constatant ton réveil.

Tu regardes autour de toi et tu t'aperçois que vous êtes dans un hall d'entrée au style un peu vieillot qui t'es complètement inconnu.

Avant que tu aies pu poser des questions pour savoir ce que tu fais là et avec qui surtout, une vieille dame aux allures de mamie gâteau franchit la porte d'entrée et esquisse elle aussi un sourire en te voyant.

Elle s'approche et se présente comme étant la directrice de l'orphelinat public de Kickenham, ce qui te fait tiquer une seconde.

Comme s'il avait deviné ton trouble, ton gardien se présente à son tour et tente de te rassurer sur ton sort.

Il s'appelle Christopher et est l'un des éducateurs les plus anciens de l'orphelinat devenu depuis éducateur en chef même s'il n'est pas vieux pour autant, attention.

Quant à toi, il est vrai que tes parents sont encore en vie mais il a été décidé par les autorités compétentes de te placer dans un endroit sûr le temps qu'ils soient capables de faire correctement leur job de parents.

Et il se trouve que certains orphelinats publics de la région sont habilités à recueillir en plus des orphelins des enfants avec des problématiques sociales, ce qui explique ta présence dans le hall de celui de Kickenham.

Malgré ces explications, tu ne comprends toujours pas la raison de ta présence ici, mais tu comprends aussi que tu vas bien être obligé de l'accepter.

Une nouvelle routine s'installe ainsi pour toi après une transition en douceur et tu sembles t'y adapter mieux que ce qu'on aurait pu imaginer.

La directrice, Mme Brown - tu apprendras vite à la surnommer Madame Brownie comme les autres enfants - Christopher et le reste de l'équipe éducative notamment Simone et Julie qui gèrent ton groupe d'âge s'occupent très bien de tes camarades et de toi.

Quant à ces derniers, tu dois admettre qu'ils sont pour la majorité sympathiques et faciles à vivre même si certains sont peut-être un peu trop bruyants et chahuteurs pour toi.

Tu comprends rapidement pourquoi les plus anciens affirment que vous formez une grande famille même s'il te faudra beaucoup de temps pour arriver un jour à en faire de même.

Plus le temps passe cependant et plus tu commences à le trouver long et à vouloir rentrer chez toi pour retrouver tes parents.

Tu essaies donc d'en parler aux adultes mais ils éludent presque toujours la question et te redirigent rapidement vers un autre sujet moins sensible.

Christopher est sans doute celui qui se montre le plus compréhensif et le plus sincère, mais il n'a pas les réponses que tu cherches pour autant.

Ce n'est pas grave, tu essayes de te convaincre en te forçant un peu à faire bonne figure.

Ainsi, tu te joins à tes camarades pour manger à la cantine, jouer dans la cour ou encore écouter des histoires qui font peur juste avant de dormir.

Tu participes aux corvées sans rechigner et tu proposes régulièrement ton aide.

Tu souris, tu t'esclaffes, tu rigoles.

Bref, tu t'intègres rapidement avec une aisance qui paraît complètement naturelle de l'extérieur.

En réalité, cela ne t’est pas si naturel que ça de faire des choses pourtant simples comme partager un repas, jouer à cache-cache, entendre les histoires du grand méchant Absol et de la sorcière Branette (Banette), donner un coup de main en cuisine, garder les plus petits ou même rire à des blagues.

Mais tu as toujours été doué pour t'adapter et te fondre dans le décor en toutes circonstances.

C'est d'ailleurs peut être dans les moments les plus difficiles que tu arrives le mieux à faire semblant comme si tu y étais déjà habitué.

Mais ne remuons pas le passé car l'important c'est que tu vas finir par apprendre que certaines des relations les plus fortes et indestructibles naissent quand on s'y attend le moins.

Oui, Noa, parfois c'est dans l'obscurité qu'on trouve les lumières les plus brillantes de sa vie.

Chapitre 2 : Ardentes Flammèches

Mais il faut peut-être déjà raconter que ta passion pour les pokémon n'a fait que grandir depuis que tu es arrivé ici.

Grâce notamment à Flash, le Fulgudog (Boltund) joyeux et inépuisable de Chris qui joue avec toi et les autres enfants dans la journée.

Mais aussi au Charmilly (Alcremie) des cuisines qui est toujours prêt à donner un peu de crème chantilly aux petits gourmands et aux nombreux Wimessir (Indeedee) qui aident pour les tâches ménagères et le service à table mais aussi à l'infirmerie et à la nurserie.

Sans oublier Tic-Tac, le Rongourmand (Skowet) de l'un de tes camarades de dortoir qui amuse toute votre chambrée ou le Laypro (Raboot) de l'un des grands qui se joint souvent aux parties de foot.

Et tu en croises également beaucoup d'autres quand tu as l’occasion de sortir de l'orphelinat.

Voir tous ces pokémon au quotidien a fait naître à force une vraie passion en toi et tu t'es mis à te prendre de plus en plus au jeu de les observer, d'interagir avec eux ou encore de les toucher quand c'est possible sans risque et qu'ils le veulent bien.

Et, évidemment, tu t'es finalement mis à rêver d'en posséder toi aussi.

Pourquoi pas par exemple un Verpom pour tenir compagnie à Apple qui reste ton meilleur ami même si tu le laisses de plus en plus souvent sur ton lit ou un Voltoutou (Yamper) vu que tu t'entends à merveille avec son évolution mentionnée plus haut.

Mais un Flamiaou (Litten) fera tout aussi bien l'affaire finalement.

Un matin alors que tu te rends aux cuisines pour y proposer ton aide, le Flamiaou en question te rentre dedans alors qu'il est en train de s’enfuir avec un énorme jambon très certainement dérobé qu'il porte dans sa gueule.

Le choc te fait tomber sur les fesses et lui en est un peu sonné, secouant la tête pour reprendre ses esprits avant de se dépêcher de reprendre son précieux chargement avec un miaulement menaçant et le poil hérissé en guise d'avertissement.

Vos regards se croisent alors et le temps semble se suspendre l'espace d'un instant que tu brises cependant rapidement.

- Ce n'est pas bien de voler, tu sais. Tu as si faim que ça ?

Le voleur soutient ton regard avant de lancer une attaque flammèche dans ta direction.

Instinctivement, tu te baisses rapidement pour l'éviter, mais tu te rends aussitôt compte que son but n'est finalement pas de s'en prendre à toi mais plutôt de briser la fenêtre qui se trouve juste derrière.

Fenêtre par laquelle il saute après un regard en coin presque provocateur dans ta direction, ce qui t'arrache malgré toi un sourire amusé alors que tu te relèves et suis des yeux sa silhouette courant sur l'herbe verte.

Apparemment les vols se reproduisirent dans les jours à venir d'après l'agitation et la mauvaise humeur régnant en cuisine.

Les humains et les pokemon y travaillant n'ont apparemment jamais réussi à prendre le chenapan sur le fait.

Et toi tu gardes le silence malgré une pointe de culpabilité sur la probable identité du voleur comme si tu voulais garder l’exclusivité de votre rencontre.

Impossible d'ailleurs d'oublier ce regard ardent et narquois qui as croisé le tien.

Et puis un jour, après avoir entendu la directrice interroger ses employés comme si elle les soupçonnait, tu te décides finalement à prendre le Tauros par les cornes.

- C'est donc là que tu te caches.

Le Flamiaou en train de manger avec satisfaction une saucisse qu'il vient tout juste de voler sous tes yeux sans le savoir se retourne vivement et crache en te voyant à l'entrée de son antre.

Tu le fixes sans prendre peur et fait un petit mouvement d'épaules nonchalant.

- Désolé, je t'ai suivi. Tu n'es pas le seul à savoir être discret. Bon, écoute, tu ne peux pas continuer comme ça. Tu embêtes tout le monde. Je ne crois pas que tu sois méchant. Je crois que tu essaies juste de survivre. Et que tu te peut-être sens seul... comme moi.

- Meow... ?

La perplexité et la curiosité qui s'emparent de lui après tes mots suffirent visiblement à faire retomber sa colère et le chaton de feu finit par s'asseoir, une certaine prudence teintée de méfiance dans le regard.

Regard qui suit attentivement la luxe ball que tu sors bientôt de ta poche et que tu lui présentes.

- Je l'ai volée moi aussi. Je n'en suis pas fier mais je crois que ça en vaudra la peine si tu acceptes de devenir mon ami. Je te laisse le choix, mais si tu décides de rester libre, tu dois me promettre de ne plus voler. Ce sera aussi ma dernière fois. Et si tu me choisis alors je ferais tout ce que je peux pour te donner une vie aussi bien et même meilleure que celle-ci. Alors est-ce qu'on a un accord ?

Le Flamiaou fixe la ball tendue avant de se retourner vers le fond de son abri, un vieux cabanon en ruines dans un coin abandonné du jardin, comme pour peser le pour et le contre avant de finalement plonger son regard dans le tien avec une intensité presque palpable.

- Meow.

Avec un saut et une agilité digne de son espèce, il touche la sphère noire aux lignes écarlates et dorées avec le bout de sa longue queue avant de disparaître dans un flash rouge.

Et c’est probablement l'une des seules fois de ta vie que tu t'autorises à exploser de joie sans te retenir puisqu’après tout personne ne peut te voir.

Après t'être calmé, tu permets à ton nouveau compagnon de sortir et emporté par ton enthousiasme tu lui proposes de faire un hight five qu'il accepte de bonne grâce même si sa tête blasée prouve que c'est surtout pour te faire plaisir.

- Merci, Tora.

- Meow.

Avec une encore meilleure poker face que celle de ton toi futur, ton désormais starter commence à faire sa toilette sans montrer que ce nouveau nom à la signification puissante lui plait pas mal finalement.

Chapitre 3 : Douces Lumières

Tu ne t'attendais pas à être attendu devant le cabanon par Christopher.

Tes doigts se serrent par réflexe sur la luxe ball volée mais désormais vôtre et ton regard se fait défiant sans même que tu t'en aperçoives.

Que les adultes essaient de te prendre Tora pour voir.
Ils t'ont déjà pris tes parents mais tu ne les laisseras plus te prendre quoique ce soit auquel tu tiens.

Mais tu t'en veux aussitôt de t'être méfié de cet adulte-là en sentant sa grande main passer dans tes cheveux pour les ébouriffer et en voyant son sourire amical légèrement taquin devenu aussi familier qu'Apple le doudou.

- La prochaine fois que tu as besoin de quelque chose, demande-le-moi plutôt que de me l'emprunter en douce, je suis là pour ça. Et comme c'est mon rôle de protéger cet endroit, mais surtout de vous protéger, j’apprécierais d'être averti de l'identité du prochain voleur que tu démasqueras, ok ? Bien, maintenant qu'on a mis ça au clair, toutes mes félicitations pour tes débuts en tant que dresseur, Noa.

Tu esquisses un sourire reconnaissant et étrangement timide alors que la grande main atterrit encore une fois dans tes cheveux dans un geste affectueux presque paternel.

- Et donc, comment il s'appelle ton ami félin ? Que je sache qui je dois sermonner ou féliciter à partir de maintenant.

- Il s'appelle Tora, réponds-tu avec un sourire en coin.

- Très bien. Bienvenue dans notre famille, Tora.

La ball que tu tiens entre tes mains s'agite un instant comme si les mots de Chris avaient été entendus et peut être est-ce après tout le cas.

- Hé.

Tora désormais suffisamment domestiqué pour apprécier d'être lové sur tes genoux et toi redressez la tête presque à l'unisson pour apercevoir une fille de ton groupe que vous ne connaissez pas encore très bien puisqu'elle est arrivée il y a peu vous sourire avec bienveillance.

Tu n'as vraiment pas la mémoire des noms quand tu n'es pas proche de quelqu'un alors appelons-la Serena si elle le veut bien.

- Bonjour...

Tu n'es pas très à l'aise, mais elle ne semble pas en être offensée et continue simplement de sourire.

- Tu veux bien que je m'assois près de vous ? J'aimerais finir mon livre tranquillement et avec les autres ce n'est pas vraiment possible.

Elle désigne avec un grand geste du bras la moitié de votre groupe qui joue avec les jeux d'extérieur et l'autre moitié qui fait des parties de jeux de société autour d'une table.

- Leur seul point commun c'est d'être bruyants. Et d'habitude ça ne me dérange pas du moment qu'ils s'amusent, mais j'aime vraiment beaucoup ce livre et j'aimerais pouvoir avancer sans être dérangée.

Tu esquisses un sourire avant de jeter un œil à la couverture par pure curiosité.

- Alice au Pays des Merveilles ? Je ne savais pas qu'il y avait une version écrite.

- Oh, tu parles du Disney qu'on a vu l'autre soir ? En fait apparemment c'est une adaptation de ce roman de Lewis Caroll. J'aime beaucoup lire alors l'une des éducatrices, Simone je crois, a bien voulu me le prêter.

- Ah, d'accord. Ça ne nous dérange pas que tu le finisses ici... hein, Tora ?

Le Flamiaou hoche la tête avant de s'étirer de tout son long et de sauter dans l'herbe pour venir renifler prudemment mais avec curiosité Serena et son objet non identifié.

- C'est un Flamiaou, n'est-ce pas ? Tu as de la chance d'avoir un pokemon. Le mien me manque terriblement.

Tu ne lui demandes pas pourquoi elle ne l'avait pas avec elle dans ce cas car ce sourire triste tu ne le connais que trop bien.

Tu te contentes donc de poser ta main sur la sienne et de lui demander si cela ne la dérange pas que tu lises par-dessus son épaule.

Tu ne t'attendais certainement pas à ce qu'elle te propose de te le lire à voix haute et encore moins de ne pas avoir le courage ni même l'envie de refuser devant son enthousiasme et sa joie retrouvés.

Et tant pis pour le regard légèrement narquois de Tora que tu décides d'ailleurs d'ignorer.

Même si tu ne perdras pas l'occasion de le chambrer à ton tour une fois de nouveau seul avec lui pour avoir profité de tout son saoul des genoux et des caresses de la demoiselle.

C’est donc ainsi qu'elle entre dans votre vie à tous les deux.

A ses côtés, tu apprends le plaisir de lire des romans même si elle ne réussit jamais à te convaincre de la beauté de la grande littérature et tu lui montres en échange le plaisir de lire bandes dessinées et mangas.

Elle se joint à toi pour garder les plus jeunes, pour donner un coup de main en cuisine ou encore pour jouer au foot et faire des entraînements ou des combats pokémon en empruntant a l'occasion ceux de vos amis sans avoir peur de se salir comme d'autres filles.

Tu te joins à elle pour jouer aux élastiques avec ses copines et danser lors des soirées auxquelles vous avez de plus en plus le droit de vous attarder mais aussi pour faire des couronnes de fleur malgré tes joues rouges d’embarras et le regard irrité de Tora qui n'arrive cependant pas plus que toi à lui dire non.

Et elle est d'ailleurs probablement la seule avec toi à pouvoir obtenir qu'il se transforme à l'occasion en peluche sans qu'il n'arrive ou même ne veuille protester.

Même s'il finit quand même souvent par lui envoyer son regard le plus larmoyant ou à miauler de manière déchirante quand il en a par exemple marre de se retrouver affublé d'une couronne de fleurs, d'une clochette, d'un costume ou d'être poursuivi par une meute d'enfants réclamant des caresses ou une partie grandeur nature de chat version Flamiaou et ce sous ton regard blasé et peu dupe.

Votre trio est inséparable et quand enfants, adolescents et adultes vous taquinent à l'occasion, elle se contente de sourire, toi de hausser les épaules et Tora de balayer l'air de la queue d'un geste dédaigneux parce que vous vous savez que votre lien est juste celui de l’amitié.

Tu n'as en tout cas désormais plus rien du garçon résigné qui n'avait de vivant que le nom et qui attendait juste de pouvoir rentrer chez lui.

Non, maintenant tu profites vraiment de la vie et tu acceptes l'idée que tu as bel et bien une nouvelle famille.
Bien sûr, tu as toujours une pensée pour tes parents et tu continues d'espérer les revoir un jour, mais tu te sens enfin chez toi ici et tu rejoins vraiment de plus en plus tes camarades quand ils affirment que vous formez tous une famille.

Les mois continuent de passer avec cette nouvelle routine et ce sont certainement les plus beaux de ta vie, n'est-ce pas Noa ?

Mais toute chose a une fin c'est bien connu.

Et la nouvelle lumière sur le point de te frapper n'est pas aussi douce que celles que tu as appris à apprécier et qui réchauffent désormais ton cœur, hélas.

Chapitre 4 : Il n'y a pas de fumée sans feu

Ta main tient fermement la sienne.

Tu la sens un peu tremblante malgré ses efforts pour se contenir bien qu'elle soit moins habituée que toi à cet exercice, ce qui te permet de le remarquer et tu veux qu'elle sache que tu ne la lâcheras pas.

Ta prise se resserre d'ailleurs légèrement comme pour lui rappeler ta présence.

Tora qui marche à vos pieds de son pas vif et sûr miaule d'ailleurs avec assurance pour rappeler également la sienne.

Autour de vous les adultes et les pokemon employés s'affairent à rassembler les enfants de ton groupe et des autres de l'étage.

Ton regard de plus en plus attentif et perçant avec les années balaye le couloir et ses occupants pour essayer de comprendre.

On vient de vous tirer de votre sommeil, de vos chambres et on vous incite maintenant à vous diriger vers le rez-de-chaussée pour pouvoir sortir du bâtiment principal.

Pourquoi donc ?

Tu entends des aînés murmurer derrière toi et se demander s'il s'agit d'un exercice mais toi tu n'y crois pas.

Tes yeux se posent sur le Wimessir mâle en chef devant lequel vous passez et qui est facilement reconnaissable à l'insigne qu'il porte en collier.

Son visage est étonnement grave, lui qui a normalement toujours une aura presque aussi apaisante que celle de Christopher.

Pareil pour Julie ton ancienne éducatrice que tu aperçois plus loin et pour les autres humains et pokemon autour de vous.

Évidemment, ils se forcent pour la plupart à sourire et à paraître détendus pour donner le change mais tu es trop observateur pour ne pas remarquer qu'ils semblent se forcer.

Ton regard croise alors celui de Christopher qui semble patrouiller pour vérifier qu'aucun d'entre vous n'est resté derrière.
Il semble deviner que tu n'es pas dupe et t'adresse un léger signe de tête auquel tu réponds tout aussi discrètement.

Vous avez construit une relation de confiance depuis le temps et tu sais qu'il te fait confiance pour garder le secret et ne pas créer une panique inutile.

Mais tes doigts se serrent quand même encore un peu plus sur les siens.

- Noa, ça va ? Tu es pâle... Et ton regard...

Merde.

Tu te forces à lui sourire en essayant de ne pas laisser transparaître tes propres sentiments

Ta propre peur.

Ses yeux sont déjà trop inquiets à ton goût.

Ton starter de feu te jette un regard indéchiffrable, mais ne vend pas plus la mèche que toi.

- Tout va bien, je réfléchissais juste. Ne t'inquiète pas.

Elle ne semble pas convaincue mais garde le silence et serre à son tour ses doigts sur les tiens comme pour te protéger à son tour.

Vous finissez par sortir dans le jardin noir de monde.

C'est que l'orphelinat a accueilli beaucoup plus d'enfants que d'habitude ces derniers mois.

Et ce n'est pas comme s'il y en avait tant que ça qui avaient eu la chance de pouvoir repartir.

Tu t'es toujours efforcé de ne pas être trop curieux mais tu as entendu comme beaucoup d'autres les bruits de couloir sur les problèmes et difficultés qui traversent votre maison.

Il est facile de deviner que l'orphelinat est surchargé en plus de manquer de moyens humains, pokémon et matériel et que la construction des annexes n'a pas suffi à régler le problème.

Mais tu n'as pas le temps de te poser plus de questions puisque tu vois Chris passer entre vos rangs avec Flash son fidèle Fulgudog en interpellant toujours discrètement certains grands.

Tu hésites, puis tu te décides et lâche sa main.

Elle te regarde de suite avec inquiétude, mais devine ta résolution après un échange de regard et se force à sourire, un éclat de tendresse et de fierté dans les yeux.

- Vas-y, je ne sais pas ce qui se passe mais si tu peux aider... Ne t'inquiète pas pour moi. D'ailleurs, si je peux faire quelque chose...

- Tu peux aider à apaiser les plus jeunes, tu es douée pour ça. Tora va rester avec toi et t'aider.

- Meow...

Visiblement partagé entre vous deux, ton Flamiaou se frotte à tes jambes avant de finalement hocher la tête avec un air solennel comme s'il comprenait l'importance de la mission que tu lui confies sans vraiment le dire.

Tu le remercies d'une rapide caresse sur le crâne après lui avoir adressé à elle un sourire qui se veut rassurant avant de tourner les talons sans tergiverser plus longtemps.

- Noa !

Tu sens une prise sur ta manche et sa présence contre ton dos, mais tu ne te retournes pas.

- S'il te plaît, sois prudent. J'ai un mauvais pressentiment...

Moi aussi.

- C'est rien, je vais juste voir si Chris a besoin d'aide. Je vais sans doute vite revenir. Et en un seul morceau.

Malheureusement non.

Tu te forces à garder le silence et à avancer pour ne pas risquer de te trahir, ce qui l'oblige à te lâcher malgré elle.

Tu sens son regard et celui de Tora sur toi, mais tu disparais bientôt dans la foule en cherchant ton responsable que tu finis par apercevoir.

Ton ventre se serre en surprenant l'instant où il s'autorise à montrer sa vulnérabilité qui semble si similaire à celle que tu as toujours caché au fond de toi.

Il passe une main lasse sur son visage aux traits tirés comme s'il était épuisé alors que tu l'as toujours aussi infatigable que son fidèle compagnon électrique qui l'avertit d'ailleurs de ta présence d'un bref et étonnamment discret jappement.

Les yeux noisette se posent sur toi et vous vous fixez sans essayer de vous dissimuler à l'autre.

- Noa ? Tu as besoin de quelque chose ? Demanda finalement l'adulte en retrouvant son aura et son statut d'adulte référent inébranlable.

- Non, je voulais juste savoir si tu avais besoin d'aide. Je t'ai vu parcourir les rangs et parler aux grands...

Le blond semble surpris puis hésitant avant de fermer les yeux un bref instant comme pour faire le point avec lui-même et de finir par prendre la parole.

- On ne trouve pas Tara, une des minis. Mais vous êtes si nombreux maintenant qu'on l'a sûrement juste ratée. C'est rien, on va la retrouver.

Mais tu devines que son assurance et sa désinvolture ne sont que façade cette fois et ton ventre se serre encore une fois.

- Je vais vous aider à la chercher.

- Hum... d'accord. Mais sois discret. Et Flash va t'accompagner.

- Inutile, garde-le, ça va forcément se remarquer qu'il m'escorte et comme ce n'est pas habituel, ça ne nous aidera pas à nous fondre dans le décor.

Tu essaies de ne pas penser que Chris a sans doute le même mauvais pressentiment que le vôtre.

Parce que si c'est le cas, ça commence à faire un peu trop de coïncidences à ton goût.

Et en parlant de fumée sans feu...

Tes yeux se plissent alors que tu regardes dans la direction de l'une des annexes au loin.

C'est discret et dans l'agitation ambiante presque personne ne semble encore le remarquer surtout avec les efforts des adultes et des pokémon employés pour distraire tout le monde mais toi tu remarques le nuage de fumée qui s'en dégage.

Ton nœud dans le ventre se serre encore plus et après un dernier regard vers Chris et Flash mais aussi vers tes camarades dispersés aux quatre coins jardin tu te décides à partir.

- Surtout, pas d'imprudence, t'arrête un instant ton référent. Tu m'as bien compris ?

- Oui, j'ai compris.

Tu t'éloignes pour de bon cette fois en sachant que tu es prêt à ne pas tenir ta promesse suivant le degré d'urgence qui risque de se présenter à toi.

Après tout, pas besoin d'être une lumière pour comprendre ce que cette évacuation et cette fumée cachent et toi tu es loin d'être stupide.

Après quelques minutes de recherches dans le jardin de la taille d'un petit parc pendant lesquelles tu essaies d'être le plus naturel possible pour ne pas attiser encore plus la curiosité et l'angoisse de tes camarades, tu entends un petit cri de pokémon et sens quelque chose te sauter d'un coup sur le dos.

Surpris, tu perds un instant l'équilibre mais tu te rétablis vite et t'aperçois de la présence d'un Rongrigou familier plutôt dodu bien qu'en forme à l'air plus alarmé qu'à son habitude.

- Tic-Tac ? Qu'est-ce qu'il y a ? Thomas va bien ? Et toi ?

Le Rongrigou de ton camarade de chambrée que tu connais bien t'escalade sans scrupule en s'agitant et en désignant avec frénésie et insistance la fameuse annexe de laquelle tu t'es bien rapproché sans t'en rendre compte.

Ton sang ne fait qu'un tour alors que tu comprends enfin la raison de son agitation.

Une lueur résolue apparaît dans tes yeux alors que tu te tournes brusquement dans la direction du dortoir pour lui faire face, manquant de faire tomber ton passager clandestin.

D'ailleurs et sans t'excuser car le temps presse, tu l'attrapes et tu le reposes par terre en lui adressant un regard si sérieux que son début de protestation a à peine le temps de commencer.

- Retourne vers Thomas, il doit s'inquiéter et c'est de toute façon trop dangereux pour que je te laisse y retourner. Je vais m'en m'occuper tout seul.

- Grigou...

- Ne t'en fais pas, je te promets de la trouver et de la ramener saine et sauve. Il n'y a pas tant de fumée que ça. Allez, file.

L'écureuil hésite encore quelques secondes avant d'accepter à contre cœur de t'abandonner pour rejoindre son maître.

Tu le regardes courir sur l'herbe verte et te sens soulagé de l'avoir convaincu car tu te doutes que ce qui t'attend ne sera pas forcément aussi rose que ce que tu prétends pour rassurer les autres et pour te rassurer toi.

Pas d'imprudence, hein...

Navré Chris.

Tu attrapes une grosse pierre sur le sol et brises la vitre d'une fenêtre en espérant que tu sois suffisamment éloigné des autres pour que le bruit passe inaperçu.

Tu ne veux pas que d'autres personnes et pokemon se retrouvent impliqués si tu peux l'éviter.

Avec un peu de chance tu vas trouver Tara rapidement et la sortir de là rapidement avant que... ça ne dégénère.

Et si ce n'est pas le cas et bien tu es plutôt doué pour improviser et t'en sortir coute que coûte, non ?

Certains adultes diraient sûrement que ce n'est pas à un pré adolescent de se mettre en danger à leur place mais si tu peux éviter à d'autres des souffrances inutiles alors...

Raison pour laquelle tu t'es d'ailleurs arrangé pour que Tora reste avec votre meilleure amie en commun.

Et ce n'est pas comme si tu n'étais pas concerné.

Tara est non seulement la sœur de sang de l'un de tes meilleurs amis, mais c'est aussi une membre de ta grande famille de cœur.

Et personne ne le sait mais tu t'es juré de toujours veiller sur cette famille qui t'a offert une nouvelle vie, bien plus stable que l'ancienne il faut l'avouer.

Mais trêve de bavardage, Tara t'attend.

Une fois à l'intérieur, tu explores l'endroit en vérifiant chaque salle et recoin de manière méthodique tout en l'appelant à tue-tête pour être sûr qu'elle t'entende, ton cœur battant à tout rompre dans ta poitrine à cause de l'effort fourni mais aussi des craintes qui te traversent de plus en plus.

En même temps, plus tu avances et plus tu te mets à tousser, ce qui n'est pas très rassurant.

Tu arrives finalement à l'étage et remarques que la fumée semble y être plus dense mais aussi que des flammes bien réelles et qui te font transpirer aussi bien de chaleur que d'appréhension sont également présentes bien qu'elles ne soient heureusement pas très hautes.

Évidemment.

Tu as été bien naïf de croire que ce serait aussi facile qu'une balade de santé.

Tu sens ton cœur s'accélérer, ton ventre se nouer presque douloureusement et une dose d'adrénaline te traverser.

Mais tu n'as pas le temps de t'attarder sur tes peurs puisque tu entends des cris aussi bien humains que pokémon au-dessus de toi te faisant brusquement lever la tête.

La mezzanine, nom d'un Caninos !

Tu cherches tant bien que mal l'escalier en essayant de ne pas respirer trop de fumée ou de te brûler même si tu ne peux pas complètement l'éviter et, après l'avoir trouvé, tu commences à grimper.

- Meow !

Le cri d'avertissement si familier te permet d'avoir le réflexe de te baisser et tu sens quelque chose passer au-dessus de toi avant de s'écraser sur l'escalier juste au-dessus de ta tête.

Tu fixes un instant le trou dans le bois causé par une substance violette quelque peu inquiétante avec stupeur avant de sentir un frisson te traverser.

- De l'acide... Que...

Les bruits s'intensifient à l'étage et tu y jettes un regard inquiet mais tu te tournes quand même rapidement vers le couloir, histoire de ne pas tourner le dos à ce qui se trouve derrière toi sans savoir exactement ce que c'est.

Tora car c'est bien lui qui vient de te prévenir y fait d'ailleurs face, l'échine complètement hérissée et tous crocs et griffes dehors.

De toute évidence, il t'a désobéi en ne restant pas avec Serena mais vu qu'il vient de te sauver la mise tu serais bien bête de lui en vouloir.

Le Tritox (Salandit) car c'en est bien un qui vous menace siffle méchamment avant de répliquer avec une nouvelle attaque de type poison qui se fait brûler en plein vol par une réplique de ton starter.

Tu hésites encore une fois, mais ton inquiétude pour ta très jeune camarade livrée à elle-même au-dessus de vos têtes prend le dessus sur le reste.

- Tora, tu vas t'en sortir tout seul ? Vérifie quand même par acquis de conscience.

Un miaulement affirmé te répond et tu hoches la tête avant de commencer à grimper, jetant néanmoins par-dessus ton épaule dans un réflexe de dernière minute.

- Essaie de ne pas utiliser tes attaques feu si tu peux faire autrement ! Il faut éviter de propager l'incendie ou d'enflammer les gaz toxiques ! Et enfuis toi si ça tourne mal !

Un nouveau miaulement te répond alors que tu arrives sur le palier de la mezzanine mais cette fois tu n'y réponds pas trop occupé à fixer ce qui te tourne le dos.

Des sueurs ironiquement froides vu la chaleur ambiante te parcourent et tu t'efforces de rester discret vu que miraculeusement tu n'as visiblement pas été encore repéré.

Tout au fond, Tara est recroquevillée contre le mur, sanglotant de peur et protégée tant bien que mal par son Bibichut qui semble avoir réussi à dresser un Mur Lumière qu'il renouvelle régulièrement en plus des Choc Mental qu'il lance à répétition pour essayer de maintenir à distance leurs agresseurs sensibles aux attaques psychiques.

La Malamandre (Salazzle) encadrée de ses deux sous fifres Tritox semble commencer à s'impatienter de leurs échecs et s’apprêter à s'en mêler mais elle se détourne de ses proies pour se tourner vers toi en remarquant enfin ton arrivée.

Ses yeux se plissent méchamment et tu plonges sur le sol par réflexe, esquivant ainsi les boules de feu qui foncent désormais vers toi.

Tu roules sur le plancher et te relèves rapidement en essayant de ne pas penser que bois et feu ne font pas bon ménage.

- Noa, au secours, sanglote Tara, te faisant serrer les dents.

Comment faire pour vous sortir de là sain et sauf ?!

Tu as vraiment été stupide sur ce coup-là et tu le sais.

Tu aurais dû aller chercher de l'aide au lieu de t'obstiner à y aller tout seul.

Mais pas le temps de te lamenter sur ton sort.

Un grincement de la Malamandre plus tard et un Tritox fonce sur toi.

Tu évites sa première morsure de justesse et continues d'esquiver ses coups de crocs et de griffes tout en essayant de ne pas perdre complètement de vue ses congénères mais aussi Tara et Bibichut pour pouvoir prévenir d'éventuelles catastrophes.

Tu te doutes que la moindre erreur pourrait avoir des conséquences dramatiques.

La tête te tourne, ton souffle devient de plus en plus irrégulier mais tu tiens bon grâce aux flots d'adrénaline dans tes veines ne sentant d'ailleurs même pas tes probables brûlures et blessures.

Mais tu comprends quand même que si le combat s'éternise, ça va mal finir et tu te mets à regarder un peu plus frénétiquement autour de toi pour tenter de repérer une autre porte de sortie au sens métaphorique du terme puisque celle de l'escalier semble compromise.

Tu repères alors une fenêtre sur le mur contre lequel Tara et Bibichut sont réfugiés et tu hésites.

Même si par miracle tu arrives à les attraper et à sauter sans que vous soyez attaqués la chute risque d'être violente...

Mais est-ce que vous avez vraiment le choix ?

Tu grimaces de douleur quand les crocs du Tritox serrent ton bras et commence à tourner de l'œil sans doute à cause du choc, de la douleur et du poison.

L'adrénaline aidant tu arrives quand même à rester conscient et tu propulses le lézard contre le mur pour l'assommer et l'obliger à te lâcher.

En temps normal, tu as plus d'état d'âme que ça mais là tu dois même te retenir de lui donner un coup de pied.

C'est que ça fait mal, merde !

La légitime défense, ça vous parle ?

Tenant ton épaule avec ta main valide tu poses un regard ardent sur la Malamandre, plus résolu que jamais.

Et tu t'élances pour essayer de la prendre par surprise.

Cela semble marcher sur le Tritox restant qui se fige mais sa patronne se contente de plisser ses petits yeux mauvais.

Néanmoins elle ne bouge pas et tu en profites pour ramasser des débris par terre en ignorant la douleur causée par leur chaleur sur tes doigts et de les lancer en guise de diversion.

Mais au moment de bifurquer pour te diriger vers tes protégés, tu glisses, ton corps commençant à sérieusement dépasser ses limites.

Tu essaies de te rétablir et tout concentré que tu es, tu ne vois pas le danger arriver.

Ton hurlement de douleur retentit dans toute la pièce et tu portes tes mains à ton visage gravement brûlé.

Sans savoir comment, tu arrives néanmoins à rester conscient et à tituber en avant.

La Malamandre retente de t'attaquer mais l'attaque Choc Mental plus puissante que les précédentes la propulse en arrière suffisamment loin pour que tu aies le temps d'atteindre Tara et Bibichut qui viennent sans aucun doute de vous sauver.

Tu voudrais d'ailleurs les remercier et féliciter le pokémon pour la puissance qu'il a réussi à concentrer dans cette ultime attaque, mais tu n'arrives pas à parler et c'est à peine si tu es conscient et si tu tiens debout.

Tu les prends tous les deux dans tes bras et te diriges vers la fenêtre en ignorant la partie de ton cerveau qui essaie de rester logique et qui se demande comment tu peux encore trouver la force alors que la douleur de ton visage, de ton bras et de tes poumons est aussi insoutenable.

- Bibi... chut... amortis... nous...

Ta voix saccadée semble quand même être comprise et après avoir cassé la fenêtre sans te rappeler comment tu as bien pu faire tu sautes à travers en espérant que le jeune pokemon psy a encore assez de force et surtout assez de puissance pour réussir à amortir votre chute.

Vous lévitez deux trois secondes seulement car le pauvre utilise comme toi ses dernières forces mais c'est suffisant pour qu'avec l'aide des buissons miraculeusement placés sous la fenêtre vous vous en sortiez avec juste quelques bleus supplémentaires.

Mais...

- Noa... ? Noa, allez, réveille-toi, s'il te plaît ! Au secours ! Grand frère, quelqu'un ! Il m'a sauvée, il faut l'aider, s'il vous plaît !

Tu entends la petite voix et les pleurs de Tara, puis des bruits de course, des cris d'humains, de pokémon...

La voix de Christopher et sa voix à elle pleine d'inquiétude et de chagrin...

Puis les miaulements déchirants de Tora...

Et puis plus rien.

Juste du noir.

Et cette douleur lancinante qui persiste.

Partie 5 : Se reconstruire une deuxième fois...

- Vous avez eu de la chance, jeune homme. Vous avez avalé pas mal de fumée toxique, mais de toute évidence elle n'était pas assez concentrée pour causer des dégâts irrémédiables à vos poumons. Pareil pour votre bras, le Tritox qui vous a mordu devait être jeune car sa morsure a été superficielle et son poison peu puissant. Avec du repos et les soins appropriés, tout devrait rentrer dans l'ordre dans quelques semaines ou au plus tard dans quelques mois comme pour la plupart de vos autres brûlures et blessures. Croyez en mon expérience, vous vous en sortez bien.

- Et mon visage ?

Ta voix est inexpressive, tu attends la réponse officielle mais en vérité tu la connais déjà.

Ce n'est pas bien sorcier à deviner.

Et tu as eu le temps d'y penser et de te préparer à tous les scénarios possibles vu que tu réfléchis vite.

Le médecin assis sur une chaise à côté de ton lit d'hôpital semble mal à l'aise mais finit par prendre la parole sans réussir à te regarder en face.

- Je suis navré, comme je le disais... Vous avez eu de la chance... ça aurait pu être bien pire... Mais... votre visage... Et bien... J'ai bien peur que... vu l'intensité de l'attaque qui l'a brûlé directement...

- J'aurais cette cicatrice et cette douleur pour toujours, j'ai compris.

Tu détournes la tête vers la fenêtre et fixe le paysage derrière alors que tes mains se crispent sur les draps et que ton esprit se met à dériver en occultant tout le reste.

Tu penses à ton sauvetage héroïque mais inconscient qui t'aura couté encore un peu plus d'insouciance.

Tu penses à l'incendie provoqué par cette Malamandre et ces Tritox et à leur attaque sur une enfant innocente.

Tu te demandes s'ils l'ont fait gratuitement ou s'ils avaient de bonnes raisons que les humains ne peuvent comprendre.

Tu penses à Tara que tu as sauvée mais qui est désormais traumatisée tout comme son Bibichut et ce pour un certain temps sans doute.

Tu penses aux autres enfants et pokémon victimes par ricochets malgré les efforts des adultes pour ne pas les inquiéter.

Tu penses à Apple le Doudou Verpom posé sur la table de nuit à côté de toi qui aurait pu brûler comme ses camarades de l'annexe.

Tu penses à elle qui a bien cru te perdre en te voyant blessé et inconscient dans ce buisson et qui ne te lâches plus d'une semelle depuis.

Tu sais qu'elle culpabilise tout comme Christopher, Tic-Tac le Rongourmand et Tora de t'avoir laissé y aller seul.

Tora...

- Noa ? Noa, ça ne va pas ?

Évidemment, c'est elle qui remarque en premier tes sanglots étonnamment silencieux.

Tu sens ses bras t'attirer contre elle et tu t'autorises à craquer pour la première fois depuis ton réveil deux jours plus tôt.

Parce que tu te rends compte maintenant que tu n'arrives pas à être aussi optimiste que le médecin à côté de toi ni à accepter aussi bien la situation que tu l'aurais pensé.

De la chance ?

De la chance ?!

Tout sera rentré dans l'ordre dans quelques semaines ou dans quelques mois ?!

Tu t'en sors bien ?!

La bonne blague !

Tu es désormais défiguré et tu dois supporter cette douleur pour le reste de ta vie.

Et même si tu arrives à guérir un jour complètement sur le plan physique comment ça pourrait aller alors que tu as tellement peur du feu désormais que tu n'arrives même plus à regarder et approcher ton propre pokémon ?!

Tu n'oublieras jamais la tristesse et la douleur dans le regard de Tora quand tu l'as repoussé en hurlant à ton réveil deux jours plus tôt.

Non, tu ne l'oublieras pas et tu ne te pardonneras jamais de lui avoir infligé cela même si à ta décharge tu n'es plus vraiment toi-même.

Ce n'est pas comme si tu pouvais oublier le souvenir de ces flammes tout autour de toi et juste devant, sur ton visage d'un claquement de doigts.

Tu en avais déjà entendu parler mais si tu n'as pas réalisé dans le feu de l'action à quel point c'était effrayant c'est uniquement grâce aux hormones dans lequel baignaient ton corps.

Et maintenant que la crise est passée, elles t'ont lâché et tu es obligé de réaliser à quel point tu as été traumatisé physiquement et psychologiquement.

Et tu ne sais pas comment guérir ni si tu vas y arriver, mais pour une fois tu t'autorises à demander de l'aide.

- Bonjour, Noa. Sois le bienvenu.

Tu hoches la tête en silence avant de regarder autour de toi pour jauger la pièce dans laquelle se passent les séances de médiation pokemon organisées par l'hôpital.

Tu es accueilli par Stefan, un psychiatre du service pédiatrique de l'hôpital qui s'avère être aussi le mari de Christopher, ce qui te rassure il faut l'avouer.

Car même si ce sont surtout les pokemon feu et poison qui te terrorise, ton entourage et toi vous êtes rendus compte que tu n'étais plus très à l'aise avec les autres pokémon non plus même si ta peur et tes réactions ne sont heureusement pas aussi vives qu'avec les premiers.

Tu as même pu laisser Tic-Tac venu te voir avec Thomas son dresseur et d'autres de tes amis grimper sur ton lit et le caresser un peu.

Mais tu es quand même désormais toujours sur le qui-vive et en hyper vigilance même s'il paraît que ça va passer avec le temps.

En tout cas ces séances de médiation pokemon organisés deux fois par semaine devraient te faire du bien.

Au moins ça te changera les idées car à part te reposer, regarder la télé, jouer à la console, lire et avoir des visites tu ne peux pas faire grand-chose pour le moment.

Stefan te laisse observer et s'éloigne un peu avant de revenir avec un pokémon dans les bras en veillant à ce qu'il soit bien visible pour ne pas te surprendre.

Mais tu te détends sans même t'en rendre compte.

Pas de risque d'être brûlé avec un type d'eau surtout s'il ne peut pas apprendre Ébullition.

Le Larméléon thérapeute te regarde avec ses grands yeux humides et tu le fixes aussi.

- Je te présente Bubble. Je pense que c'est le partenaire de thérapie pour toi, mais si le feeling ne passe pas on pourra changer à la prochaine séance.

- Je pense que ce ne sera pas nécessaire.

Et effectivement, ça ne le fut pas.

Chapitre 6 : Et maintenant ?

- Je vois, il s'appelle donc Bubble, sourit ta mère en regardant le jeune Larméleon aujourd'hui tien endormi sur tes genoux alors que vous êtes installés dans des fauteuils de son salon. Tu as continué ces séances longtemps ?

- Pendant plusieurs mois intensivement, puis elles se sont espacées de plus en plus avant de s'arrêter... un an et demi plus tard.

Tu es gêné et regardes ailleurs mais ta mère ne te juge pas et change plutôt de sujet.

- Et à côté de la thérapie, il s'est passé quoi ?

- Et bien... J'ai pu quitter l'hôpital au bout de quelques semaines... Mais on s'est rendus compte que j'étais incapable de retourner à l'orphelinat... Donc Chris et Stefan ont décidé de m'accueillir chez eux en attendant de trouver une autre solution après avoir vérifié auprès de leurs enfants que c'était ok pour eux.

- Sauf qu'ils ont fini par t'adopter.

Tu regardes ta mère qui s'est tourné vers la fenêtre et tu te demandes ce qu'elle ressent exactement.

Tu ne lui en veux pas de ne pas avoir réussi à t'élever et tu te doutes que ça ne doit pas être facile pour elle de savoir que des étrangers ont réussi là où elle a échoué.

Mais elle se retourne bientôt vers toi avec son sourire habituel et aucune trace de son trouble à part une trace d'humidité dans ses yeux comme si elle ne voulait rien laisser paraître aussi tu décides de continuer comme si de rien n'était.

Tu te doutes après tout que ta pudeur n'est pas née de nulle part.

- Oui, ils ont fait un conseil de famille avec mes... les enfants et ils étaient tous d'accord alors ils m'en ont parlé et j'ai accepté. Les démarches ont mis un peu de temps mais ça a fini par suivre après le déménagement à Lumiris.

- C'est à cause de moi, je pense. J'ai reçu une lettre et des papiers à signer tu sais. De leur part... Pour me parler de toi et de leur démarche d'adoption... Mais même s'ils avaient l'air d'être des gens bien, de t'aimer et que tu avais l'air heureux... C'était dur tu sais. D'accepter que tu pouvais avoir besoin d'autres parents que moi... Que ton père...

- Alors pourquoi l'avoir finalement fait ?

- Parce que je voulais que tu sois heureux. Et regarde-toi aujourd'hui... Tu as deux pères pour le prix d'un, beaucoup plus présents et responsables que ce que le tien ne sera jamais. Tu as de nombreux frères et sœurs. Et des amis comme cette adorable jeune fille. Mais aussi des pokémon. Tu ne manques de rien au niveau matériel. Et ton travail... Si tu savais comme je suis fière... Te voir sur toutes ces couvertures de magazines... A la télé... Avec ces coupes et ces médailles... Et cette satisfaction dans ton regard à chaque fois... Je voulais que tu sois heureux, même sans moi alors j'ai signé.

La gorge serrée, tu ne réponds pas et vous échangez juste un sourire, les yeux quelque peu humides.

- Et ma cicatrice, ma peur... Tu ne les trouves pas affreuses ?

- Oh, mon chéri... Tout ce que je trouve c'est que tu mérites de t'aimer comme tu es, mais aussi de te pardonner. Et, qui sait, de quoi l'avenir est fait. Peut-être qu'un jour ce ne seront plus que des souvenirs eux aussi...