Le mal. Le mal est omniprésent. Il s'immisce insidieusement dans le quotidien, c'est une créature intemporelle et immuable, l'éternel compagnon d'une humanité en peine. Le mal est indispensable au monde, il s'abreuve de chaque malheur pour grandir et trouver sa place. Mais le mal est également intolérable. On ne peut l'anéantir, mais on peut le réduire à son minimum. On peut essayer de le faire disparaître, de l'aider à trouver sa voie. Le mal est une fatalité qu'il convient de dévorer jusqu'à ce qu'il disparaisse des songes. C'est là l'utopie d'un monde meilleur. Ainsi, comment le chevalier De Carteneau, protecteur des vertus et du bien en ce bas-monde, défenseur des opprimés et fervent ennemi du chaos, aurait t-il pu faire fi de l'arrivée d'un nouveau mal en Lumiris ? Point encore remis de son altercation avec le puissant capitaine Von Craite, il ne pouvait néanmoins pas laisser l'ombre du malheur planer une fois de plus sur cette luxuriante région. Il se mit alors en quête de trouver la fameuse Dragonlady : celle qui, selon les rumeurs, aspirait à la domination de toute chose. Et le voici, cheveux au vent, les yeux rivés sur l'autre côté du pont. Le dos droit, le menton relevé, il scrute l'arrivée de sa nouvelle némésis avec une assurance inébranlable. Oh, il se convainc que cette fois, il n'aura pas à sortir son épée : il pourra simplement persuader ce nouveau mal de se taire et de rejoindre la lumière, de croire en davantage que l'asservissement des plus faibles. Sa compétence en éloquence s'est développée, depuis ses échanges avec Mars. Il est sûr de lui. Et elle arrive, le pas fier, la tête haute. Son informateur avait raison. Sûrement un adversaire à sa hauteur, mais il se doit de tuer le problème dans l’œuf. D'un pas rapide, il vient se planter devant elle à bonne distance, il s'incline et lève la main au ciel. « Halte, Dragonlady. Je suis le chevalier De Carteneau, membre émérite de l'ordre de chevalerie de Kalos, défenseur des opprimés et gardien de l'harmonie en ce bas-monde ! J'ai ouï vos méfaits depuis votre arrivée en Lumiris, or je suis de ceux qui ne vous laisseront pas agir selon vos plans. Cela étant, je ne puis vous affronter sans sommation. J'aimerais régler cette dichotomie à l'amiable, car je suis persuadé que, en votre for intérieur, c'est la lumière que vous recherchez. Qu'en pensez-vous ? Peut-être pourriez-vous gagner le cœur du peuple sans ces terribles désirs d'asservissement ? La domination est un pêché qui a mené maintes fois au chaos, mais la confiance, elle, se gagne au travers du bien. Si vous le souhaitez, je pourrais vous montrer le chemin. » Il croise les bras. « Mais si vous refusez, je devrai me tenir face à vous et votre magie. C'est là le rôle qui m'a été attribué il y a fort longtemps. » |