Et c’est gagné, il fait une tête d’idiot. Je ne peux m’empêcher de rire. Il est tellement ridicule. Comme si c’était si surprenant. Ce n’est que de la glace.

Je n’y ai pas pensé. Mon équipe a fait l’essentiel du travail. Creuser un trou n’est pas difficile pour Oster et Pouiky. Le palais de glace est littéralement en glace. Rien de compliqué à faire grimper avec une équipe comme la mienne. Bien sûr, il a fallu faire plusieurs tentatives parce que ça se casser la figure. Mais maintenant, ça va très vite. Généralement, l’arène doit être reconstruite un combat sur trois. Si l’adversaire est un peu puissant, on détruit l’arène pendant le combat. Mais ce n’est pas un problème. Ça donne l’impression que l’Arène change avec le temps. J’aime beaucoup.

En revanche mon regard se vide après avoir répondu parce que je viens de finir de traiter tout ce que Leonard a dit. Construire mon rêve ? Mais ici, ce n’est pas mon rêve. Je ne sais pas si j’ai un rêve en réalité. De quoi est ce que j’ai vraiment envie ?

Je dévisage Leonard. Est-ce que j’ai envie d’être avec lui ? Tout le temps ? Je ne sais pas. Je me sens bien quand il est là. Mais je ne sais pas vraiment ce que je ressens. Je n’ai jamais connu ça et cela fait longtemps que je ne me demande plus ce que je veux vraiment.

Je secoue la tête et saute sur le changement de sujet.

Des braconniers. Il en passe souvent dans la réserve. Il chasse les Pokémons, pour leurs fourrures, leurs griffes, dents, plumes ou le plaisir. Je ne sais pas pourquoi ils font ça. Mais généralement, ils ne ressortent pas de la forêt. Ça prend du temps mais j’y arrive toujours. A protéger ma forêt.

Je pousse un soupir.

Tu sais que tout le monde me considère comme une spécialiste du type glace. On vient me voir pour des conseils sur l’élevage des Pokémons Glace. Sauf que j’en sais rien moi. Je connais que les Pokémons sauvages, et leur mode de vie. Je ne sais pas les soigner spécialement. On me dit aussi que ce type me correspond. Alors qu’en réalité… Ce n’est pas dans ce type où je suis la meilleure. Enfin, maintenant si, mais à l’origine, ce n’était pas ça. Parmi le peu de choses que je connais, je maitrise le type Poison plus qu’autre chose. J’aimerai beaucoup être championne Poison. Même si j’aime la Glace et mon arène actuelle.

J’ai dû me battre ? Non. J’ai passé ma vie à me battre mais là, pour devenir championne, j’ai du faire un truc bien plus nul.

Il n’y avait personne à ma place. J’ai pas dû me battre pour devenir championne, j’ai dû… discuter. Je dis ça comme si c’était écœurant. Je ne vois pas de quoi tu parles. Ma situation était bien pire avant et me demander plus d’effort. J’étais serveuse et il fallait que je m’occupe des gens. C’était tellement nul. Et les gens sont tellement… des gens.

J’étais une très mauvaise serveuse mais je ne savais pas faire autre chose. Et même ça je ne savais pas le faire.

Mais Leonard ne peut pas s’en rendre compte. Il a toujours eu une maison, il a pu aller à l’école. Pour lui, la moindre chose difficile est un effort. Quand je vois ma vie maintenant et ma vie avec lui, en comparaison à mon passé, c’est le jour et la nuit. Je n’ai plus faim, plus besoin de rien. Je suis à l’abri et j’ai un boulot qui paye bien pour finalement peu d’effort. Je comprends pourquoi les gens sont si mous avec des vies comme ça.

J’y pense parfois. Mais pas pour le côté violet. Pas seulement pour ça. Disons que c’est mon type de prédilection. Oster et Incubus, sont les deux premiers Pokémons que j’ai attrapés. Testa m’a été donné et Vulca… disons que nous nous sommes apprivoisées. Elle n’a pas connu de Pokéball. Et les Pokémons poisons m’ont été d’une grande aide, bien souvent.

Pourquoi j’ai dit que je voulais être championne Poison. C’est complètement faux. L’arène est déjà prise et surtout, elle est en pleine ville. Et puis… j’aime bien finalement, le type glace.

Je ne sais pas vraiment. J’aime mon palais de glace. Et surtout, j’ai un devoir pour cette forêt. Qui la protégera si je ne suis plus là. Je plante mon regard dans celui de Leonard. Et qui pourrait bien reprendre ma place. J’ai rencontré un prétendant. Il est complètement pourri au mieux. Une catastrophe. Ce mec a appelé son Givrali Blizzy. Comme le Pokémon. Et il était convaincu d’avoir raison. Je crois qu’il est éleveur. Ce mec est un danger ambulant. Même si je devais lui céder mon badge, il est hors de question de lui laisser mon arène. On est parti dans les bois, je lui montre des Pokémons s’entraidant, et le voilà qui libère toute son équipe. Bien sûr ça a fait peur aux Pokémons sauvages et Pouiky a dû venir en aide aux plus faibles. C’est un boulet cosmique ce type. Pour l’instant je vais rester ici. C’est déjà bien.

Petit silence.

Tu veux faire quoi après ?

Cette question est floue. Je lui demande ce qu’il veut faire en sortant du sauna. Mais je me demande s’il ne va pas me répondre pour un avenir encore plus lointain.

Tu veux que je te montre la forêt ?

Je ne remarque pas le rougissement de Leonard. Ou plutôt, si, je le remarque mais je mets ça sur la chaleur ou de sa stupidité habituelle.

Bah oui la forêt. Tu t’attendais à quoi ? Il n’y a pas de balling dans le coin.

J’avoue habiter dans un trou perdu, mais c’est volontaire. Mais du coup pas de balling ou d’autre truc comme on avait fait quand j’ai rencontré ses parents pour la première fois. Il y a la forêt et c’est déjà bien. Il y a plein de chose à voir dans les bois. Les Pokémons sont un spectacle permanent et plein de surprise.

Très bien, est-ce que tu souhaites voir des Pokémons en particulier ? Ou alors… j’ai peut-être quelque chose qui pourrait te plaire, mais il va falloir marcher. Longtemps. Et peut-être devoir dormir dehors.

C’est mignon qu’il veuille m’aider à protéger la forêt mais un peu blessant qu’il ne veuille pas vivre ici.

Tu n’es pas le seul à vouloir vivre dans un endroit plus chaud. Vulca n’aime pas trop le froid bien qu’elle adore la neige. Et tu ne m’aideras pas à protéger la forêt. Parce que tu n’es pas capable de te protéger tout court.

Je le regarde avec froideur et une pointe d’agressivité.

Cela n’a rien à voir. Je n’en ai rien à faire des Pokémons Feu. C’est juste qu’ici on peut me laisser tranquille normalement. Et puis les Pokémons glace sont gentils, en général, pour certains. Enfin c’est pas la question. Je n’ai pas de problème avec les Pokémons Feu. Arrête avec ça. Qu’est-ce que vous avez tous, avec les Pokémons feu ? Ils sont méchants et dangereux. Et on dirait que vous ne leur voulez que du bien.

Je regarde le sablier.

Il faut qu’on sorte. On doit prendre une douche.

Je sors et récupère un seau plein d’eau et le jette sur Leonard quand il sort et referme la porte. L’eau est froide.

C’est pour ton bien. Dis-je en rigolant.

Mon fou rire est terrible et c’est avec peine que j’arrive à articuler ma réponse à son triste pourquoi.

C’est pour ton bien. Ça aide à faire circuler le sang.

Mais mes mots sont peut-être difficile à comprendre tant je ris. Le voir grelotter nu, serrant ses bras contre lui et un spectacle à la fois pitoyable mais drôle car il me fait penser à la blague que je viens de lui faire.

Je me saisis d’une serviette en essayant de calmer mon rire et lui passe sur les épaules, l’enroulant dedans.

Pauvre petit Miaouss. On dirait que toute la misère du monde vient de te tomber dessus.

Je lui dépose un baiser sur la joue en me mettant sur la pointe des pieds.

C’est pour te préparer à la tempête de dehors.Et je rigole encore. Tu devrais vraiment voir ta tête. A croire que je viens de tuer quelqu’un devant tes yeux.

Je lui prends la main et l’entraine doucement vers la douche. Allez viens, on va se rincer. Quoi qu’on fasse après, on ne peut pas le faire avec de la transpiration sur soi.

Je souris à Leonard. Il a l’air d’un bébé Grelaçon, tout juste sorti de l’œuf. Ce n’était que de l’eau froide, certes après avoir eu bien chaud, mais tout de même. Il est si doux, si tendre et si fragile. Pourquoi cherche-t-il toujours à se battre ? Il n’est pas fait pour ça. Il est fait pour son arène absurde, avec des câlins et de l’amour. Il fut un temps où j’aurai jugé ça complètement stupide tout le temps. Et même son idée est toujours aussi débile, le fait que cela vienne de lui la rend très précieuse. Très touchante.

Je lui prends la main et le tire doucement vers la douche. A sa demande, je viens me glisser sous la serviette.

Elle est un peu petite tu ne crois pas ? Je la lui retire des épaules et l’emmène vers la douche. Il parait que prendre sa douche à deux permet des économies d’eau. On peut essayer.

De quelles théories est-ce qu’il parle ? Quel genre de recherches ? Dépêche toi alors de me les montrer, j’ai envie d’une douche. Plus vite il aurait lâcher son sac plus vite nous serons nus l’un contre l’autre.

Après la douche, je laisse Leonard s’habiller dans la douche et remonte m’habiller. Je m’équipe pour sortir comme prévu pour une balade. J’aimerai montrer des choses incroyables. Mais surtout un endroit particulier.

Je jette un grand manteau bien épais à Leonard et lui propose de larges bottes fourrées. [color=#9900ff]Je n’ai pas de pantalons pour toi, mais je pense que ça suffira. On ne sortira pas trop longtemps. [/color

Et sans attendre plus en avant je sors. Je récupère Pouiky et Testa et grimpe sur la première avec Leonard. Nous traversons les bois sous la neige, les arbres. Quelques Pokémons s’enfuient à notre passage. Le décor est parfaitement blanc, et nos traces marques profondément le chemin immaculé.

Finalement, ma Mammochon gravit une colline et révéla ma surprise. La forêt de pin laissa place d’abord à une vue dégagée. En contrebas, la forêt reprenait. Mais ce n’était plus qu’une simple forêt. Les arbres étaient transparents, brillant et cristallin. Le froid avait cristallisé la végétation jusqu’à ce que tout ce qui n’était pas d’eau tombe et tout ce qui était eau gel. Le soleil faisait briller des milliers d’arc-en-ciel à travers le bois. C’était une merveille sur laquelle je suis tombée une fois par hasard. J’avais déjà vu des arbres par hasard qui avait cet aspect-là, mais tout une forêt ? Est-ce que le bois allait entièrement devenir de cristal ? A cause de la présence de trop de Pokémon Glace ?

Je me suis perdue dans la contemplation du paysage. Jusqu’au deuxième wouah de Leonard. Je souris doucement. Oui, c’est wouah. C’est magnifique et surtout, il n’y a pas d’humains dans cet endroit. Même moi, je n’y vais pas. Je n’ose pas de peur de perturber l’équilibre qui est en train de s’y créer. Qui sait ce qu’il se passerait si un peu de chaleur y pénétrer. Il n’y a que des Pokémons gelés qui vivent dans cet endroit. Pas de Lamantine, pas de Marcacrin. Des Hexagel, des Stalgamin, des Sorbouboul et autre. Juste ceux-là. Ils génèrent un froid constant, de plus en plus important. Même d’ici, on peut ressentir la chute des températures alors que nous sommes à plusieurs centaines de mètres des premiers arbres de cristal.

Je me tourne vers mon amoureux. J’ai l’impression que c’est la première bonne chose que je lui montre. Pas quelque chose de méchant, de cruel, de blasé. Quelque chose de joli et qui vient de moi. D’habitude, c’est lui qui me montre les merveilles du monde. Je suis fière de moi et la réaction de Leonard me rend encore plus heureuse. Je ne suis pas qu’un monstre après tout. Peut-être.

Je vois la main de Leonard venir doucement à mon visage. Je retiens un mouvement de recule et de répulsion. Malgré l’affection que j’ai pour Leonard, j’ai toujours du mal avec son contact physique. Le fait qu’on me touche me révulse. L’impression de n’être qu’un petit Pokémon à caresser, ou un être à prendre en pitié. Je déteste la pitié. S’il y a bien quelque chose que je sais, c’est que le monde n’a pas de pitié et que pour vivre, il ne faut pas en avoir non plus. Et Leonard en a. Il en a beaucoup trop. C’est pour ça, j’imagine que je n’en ai aucune. Pour compenser. Peut-être aussi pour ça qu’on est si bien ensemble. On comble tous les vides de l’autre. Ou plutôt il comble mes vides de ses excès.

Le baiser est doux, mais ce sont les paroles qui me font légèrement rosir. Heureusement, le froid mordant le dissimule, mais je sens une petite chaleur me parcourir le corps en partant de sa main gantée et de mes lèvres. Je me crispe en entendant son mot doux. Il me dit souvent que je suis belle. Mais je ne sais pas s’il dit la vérité. Je n’ai jamais réfléchi à ça, à la beauté. Je me suis toujours trouvée trop petite, trop infantile. Personne ne me prend au sérieux. Est-ce que Leonard me trouve belle parce que j’ai l’air d’une enfant ?

Mais je n’ai pas le temps de répondre. La suite me fait froncer les sourcils. Il change d’avis facilement. Il ne voulait pas vivre ici avec moi et maintenant pour une forêt, certes jolie mais impénétrable, il est prêt à le faire. Et pour la protéger ? Je pousse un soupir. C’est comme parler à un caillou. Lui dire qu’il n’a pas à protéger les autres parce que je suis là pour ça ne veut pas rentrer dans sa tête.

Mais il ne s’arrête pas là. Il continue de parler et là pour le coup, c’est trop niais pour moi. Là, on nage dans la bêtise nulle. Comme dans ces films ou série que je voyais sur l’écran de certains cafés quand je travaillais. Des trucs avec des promesses absurdes et des images floutées et rosées. Des trucs bien nuls.

Là, tu passes de mignon à idiot. Je te propose de rentrer. La nuit va bientôt tomber et sans le peu de soleil qu’on a, on va mourir de froid. Surtout toi, car tu n’es pas aussi bien équipé que moi. Sans oublier les Pokémons glace.

Comme l’aller, le retour se fait sans encombre et nous arrivons à l’arène à la nuit tombée.