Finalement, nos réactions et mots avaient réussi à instaurer une ambiance captivante à notre récit. Cette aventure avait été très formatrice, étant survenue seulement quelques mois après avoir reçu ma Tarsal. Ces deux éléments ont considérablement marquant pour la progression de mon parcours, principalement dans mes choix d'orientations. Je dirais même que cette aventure avait permis de me révéler. Je m'éclaircis de nouveau la gorge pour poursuivre le récit de cette aventure.

— Peu de temps après m'avoir recruté, un Ectoplasma nous a attaqué mais on a très vite compris qu'il n'était pas dans son état normal. Après l'avoir remis à sa place, il était étrangement apeuré. L'instant suivant, de mystérieuses personnes, portant le même uniforme, s'en sont pris à nous. Je ne me rappelle plus trop pourquoi, mais j'ai été obligé de fuir... et je suis tombé sur une autre sbire. Elle pianotait sur un espèce de post informatique avec une grande antenne. Grâce à la Nymphali de Lise Gray et Kyora, j'ai réussi à l'évanouir et approcher la fameuse antenne. Je me revois chercher des informations dessus, comprendre son mécanisme et potentiellement à quoi est-ce qu'elle pouvait bien servir et...

Mon assurance vacilla. Non pas à cause de la peur, mais plutôt à cause de l'oubli. Je ne me rappelais plus de certains passages. Je fermais douloureusement les yeux et des images avec un effet sépia m'arrivaient à l'esprit alors que j'essayais de me souvenir comment la Psychose s'était déroulée. Je revoyais l'explosion qu'avait provoqué le trou noir, le Noctunoir qui a fondu sur moi, le Spiritomb qui a pris le même chemin... et la délivrance. Je rouvris les yeux, l'air beaucoup moins assuré qu'au commencement du récit d'aventure.

— Je suis désolé. Je me rappelle plus forcément de tout. Après avoir pianoté sur l'antenne, il y a eu une explosion qui nous avait tous pas mal amochés. Puis, je me rappelle qu'une puissante dresseuse nous a attaqué et que son Noctunoir superpuissant a fondu sur moi et... les ténèbres. Je n'ai qu'un flash après ça, comme si j'avais apparu en pleine champ de bataille dans le complexe abandonné que nous recherchions avec les Rangers libérés. Je me souviens de les avoir libérés, mais incapable de savoir comment, et nous avons rejoint Lise face aux sbires gardant l'entrée...  

Je restais de nouveau silencieux pour retrouver mes mots, ou plutôt le fil de mes pensées qui se faisaient la malle. Mon cerveau avait fait un sacré tri pour me protéger. Je devais forcé pour me souvenir de la suite. La peur de Kyora s'était amplifiée, l'obligeant à se cacher près du canapé.

 

Je ne pensais pas que raconter cette histoire aurait été aussi éprouvant. Après tout, je devrais comprendre mon corps. Cette mésaventure ne s'était pas déroulée il y avait si longtemps, au contraire, elle ne datait que de quelques mois. Et malgré les zones d'ombre que mon cerveau avait jugé préférable de me faire oublier pour me protéger, j'avais paradoxalement l'impression que cette hantise s'était vécue hier. Quand j'avais revu Lise alors que l'on devait jouer au supers animateurs d'une soirée explosive, tout m'était revenu, mais je n'avais rien laissé paraître. Cette histoire m'avait beaucoup plus touché que je n'en laissais percevoir.
Après cette remontée d'autant d'émotions contraires et intenses, j'appréciais les coupures offertes par Akari. La première me fit rire et la seconde me soulagea. Voir que mon histoire l'intéressait et qu'il voulait trouver des solutions me faisaient chaud au cœur.

— Mais non ! L'intérêt est subjectif ! Peut-être que tu arriverais sans peine à m'intriguer sur tes histoires !

Répondis-je, d'un air tout aussi léger que lui, laissant échappé un gloussement franc. Cette petite blague avait permis de me détendre et détendre l'ambiance en générale. Même Kyora avait osé faire traverser légèrement sa tête, n'étant pas vraiment sûr de pouvoir reprendre sa place à mes côtés. C'était si mignon de la voir hésiter comme ça.
Ma foi, mon corps se tendit de nouveau face à ses spéculations et je ne pus répondre que d'une manière sérieuse.

— Bien sûr que je sais ça. Lise Gray m'a assisté tout du long et j'ai réapparu avec les rangers devant elle. Elle, elle sait ce qui s'est passée.  

Je pris alors un air lugubre, bien évidemment forcé pour remettre une ambiance horrifique.

— Oui, cela a tout l'air d'être de la téléportation. Mais, sois-en rassuré, c'était pire que de la téléportation.

Je repensais à la suite des événements avec la libération des Pokémons entassés dans des tonnes de cage, l'infiltration avec Lise Gray et les Rangers, avant d'assister au combat final où l'avenir des Pokémons enfermés se déterminait.

Mon air, mes paroles, et la nostalgie finirent par achever Kyora et celle-ci commençait à partir dans la chambre en moonwalk, les yeux exorbités.

 

Nous profitions de cette pause au sein de ce récit d'aventure pour chercher des réponses à ces zones d'ombre ou tout simplement interagir sur les réactions suscitées. Akari m'avouait à demi-mot que j'avais une version idéalisée de lui, donnée par erreur à cause de sa détermination d' "aventurier".

— Dans les fictions, il me semble que la plupart des héros n'ont pas la sensation, l'impression d'être un héros. C'est les personnes qu'il rencontre qui lui font prendre conscience de sa nature héroïque, de bienfaiteur. Et je pense que tu peux déjà être fier de pouvoir te lever chaque matin avec ton morceau de pain durement gagné ! haha.

Akari venait de me livrer des informations importantes. Le saviez-vous ? Les individus ont tendance à en dire beaucoup plus qu'on ne le croit en riant, gloussant, ou tout autre registre rythmant le non-sérieux. Je les glissais dans un coin de ma tête. Je restais toujours aussi optimiste et enthousiaste, et me promettais une voix encore de ne plus me plaindre de mes conditions de vie. Il y avait meilleurs que moi, certes, mais il y avait surtout pire. Et pour ces personnes, je n'avais pas le droit de cracher sur mon petit confort, même s'il était succinct. Je devais assumer mon choix, j'avais privilégié la liberté à la sûreté et il n'était guère le temps de se défiler.  

Bref, j'avais repris l'histoire la plus terrifiante de toute ma vie et les réactions du jeune brun me prouvèrent qu'il était parfaitement attentif et que non, il ne dormait pas les yeux ouverts. Je répondis avec ce même air sombre, satisfait de sa jugeotte impressionnante à cette heure-ci... même si intérieurement j'étais terrifié. Non, pas terrifié, je ne pouvais avoir peur d'une chose que mon esprit avait oublié. Je ressentais alors une émotion neutre face à ce passage, expliquant que la peur ne m'avait pas habité dans mes paroles, si ce n'était quelques brides d'indécision.

— Oui... Akari. Tu m'impressionnes. La dernière image que j'avais justement avant le "trou noir" et la réapparition face à Lise Gray... était le Noctunoir surpuissant. J'ai été absorbé et emmené quelque part, je ne savais où, mais je suis réapparu face à la Championne Spectre à l'entrée du complexe abandonné et les rangers se trouvaient à mes côtés. Ils m'acclamaient et dans les prises de décisions, ils semblaient plus de mon côté que celui de la Championne qui avait pourtant plus de sagesse. J'en déduis que je les ai sans aucun doute sauvé de... la simulation.  

Ca y était... le mot était sorti et les images de mes démons ressurgirent. La crainte livide réhabita mes yeux et je ressentis de nouveau cette peur intense et intarissable d'oublier qui on était vraiment, remplacé par des idées et pensées qui ne nous appartenaient point. Je clignais frénétiquement des yeux pour chasser ces mauvaises idées et envoyais une pensée impérieuse à mon cerveau "Reverrouille ça, maintenant." et je passais vivement à la suite du récit, en faisant comme si de rien n'était.
J'avais les yeux plissés de détermination, tâchant de me persuader que j'avais été vengé.
 
— Après avoir nettoyé l'entrée des sbires, nous sommes entrés dans l'immense pièce principale du complexe abandonné où des tonnes de cages étaient disposées et où des Pokémons étaient enfermés. Les cages étaient reliées à une machine, un incubateur, un... j'ai oublié comment ça s'appelle... arg. Tant pis. Et ces pauvres bêtes paraissaient épuisés... si tu savais ce que ce gang leur faisait... et pourquoi...

Je faisais volontairement duré car mon récit s'approchait de la fin et surtout parce que je ressentais encore la détresse et la compassion que j'avais ressenti pour cette abondance de Pokémons ainsi rassemblés dans les pires conditions possibles. Je réarmais ma voix de conteur pour lâcher cette dernière phrase pour préparer l'assaut final.

— Nous avons alors écarter les sbires qui veillaient entre les galeries pour récupérer leurs uniformes et conserver l'effet de surprise sur les deux chefs qui se tenaient bien sagement  dans la salle de contrôle au centre, donnant sur cette immense pièce. Il était temps de libérer ces Pokémons et que le chaos cesse. Mais la Psychose ne venait que de réellement commencé...

Cette fois, Kyora termina son moonwalk et entra dans la chambre à coucher, se réfugiant sous la couette, lui partageant sa douceur et sa protection incontestée.

 

Akari semblait passionné par mon histoire, ce dont je ne pensais pas croyable. Durant toute mon existence, je n'avais été qu'une page blanche. A l'école, on n'intéressait que rarement à moi. Bref, toute ma vie on m'avait invisibiliser, alors malgré ce début difficile à Lumiris, je ne regretterais jamais d'avoir quitté la région de Sinnoh. Depuis que j'avais débarqué dans cette région nouvelle, j'avais commencé à vivre. Vraiment vivre.

Alors, être le centre d'attention me plaisait. Pour une fois que je ne tournais pas autour d'un noyau justement. Et, je remarquais que j'adorais raconter des histoires, suivre les expressions faciales des spectateurs et arranger ma vocalité, ma sonorité, ma gestualité en fonction de celles-ci. J'y prenais vraiment goût. Ah, et peut-être que cela pourrait être considérer comme du sadisme, mais j'adore ce fameux outil de narration que l'on nommait "suspense". Je jouais si bien avec qu'Akari n'avait daigné m'interrompre uniquement pour me demander de poursuivre avec un seul mot.

Où en était-je déjà ? C'était bien mignon, mais je ne pouvais perdre le fil. Je fis alors style d'être pris par mes tourments, donnant l'impression de chercher mes mots, tâchant simplement de me souvenir où j'en étais dans l'histoire. Ah oui ! Le combat final ! C'était reparti !

— Nous avions alors revêtu les uniformes pour berner les deux chefs de gang, préservés dans la salle de contrôle donnant un visuel sur tout le complexe abandonné. Nous pensions pouvoir le berner mais ceux-ci nous avaient devancé. La femme et l'homme aux commandes lâchèrent leurs six pokémons puissants pour retenir l'attention de Lise et ses Pokémons restants, c'est à dire trois, et des deux Rangers les plus forts de leur équipe.

Je fis une pause de quelques instants avant de reprendre mon souffle et poursuivre, d'un ton légèrement plus pressé, précipité.
 
— Comme si cela n'était pas suffisant, ils activèrent les ondes qui perturbaient tant les êtres psychiques et spectrales. Une invasion de spectres possédés a fondu sur les autres Rangers et moi-même. Dans l'assaut, j'avais été séparé de Kyora, qui elle était sensible aux ondes. Ne me demande pas pourquoi, mais son stoïcisme est si fort qu'elle réussissait à garder le contrôle d'elle-même sous cet état qui développait ses capacités, sa puissance. Si son esprit est suffisamment puissant pour résister à l'emprise de ces ondes, le mien n'était pas doté de cette force mentale...

Je m'arrêtais, sans intention volontaire d'instaurer du suspense. Les nerfs de mes tempes se serrèrent et, limite, une goutte de sueur perla à cet endroit.

— Un Spiritomb contrôlé par ces ondes m'a... possédé. Et je suis devenu une bombe à retardement, manquant de détruire tout ce qu'il y avait autour de moi. Si les équipes des chefs ont pu être écartés rapidement, j'étais désormais devenu notre propre ennemi à abattre.

La figure même de la hantise venait d'habiter mon visage. Autant par crainte de mon vécu que par potentiellement les réactions de mon interlocuteur, mais j'étais bien trop emballé pour évité certains détails. C'était mon attention à la base, de ne raconter que ce que je voulais, mais l'esprit de la narration m'avait possédé et il ne m'était plus possible d'omettre certains détails pour ne pas dénigrer ma personnalité, il n'était plus possible faire machine arrière.
Cette possession était l'expérience la plus dérangeante de toute ma vie, autant négative que positive. Mais pour y voir le positif, il faudrait passer au récit du dénouement de toute cette histoire troublante.

 
Le dénouement avait sonné. Le clap de fin résonnait en écho. Les rideaux allaient tombés. Bref, l'histoire touchait à sa fin. J'eus presque un sentiment de peine, comme l'envie de faire durer ce récit le plus possible, pour profiter encore de cette sensation exquise d'être écouté, d'être écouté par quelqu'un qui semblait nous vouloir du bien. Mais, conter était épuisant, conter en puisant dans son for intérieur son vécu et les émotions d'un moment aussi intense épuisait deux fois plus. Je ne pouvais durer, et chaque bonne chose avait une fin. Et dire que je venais de dire qu'avec cette histoire, j'arrivais à en tirer du positif, celui de me sentir reconnu. Je ne savais pas avec quelle valeur, mais au moins je l'étais. Bref, je repris mon léger sourire exprimant ce sentiment de bonheur pour me remettre dans ma position de conteur. Je n'avais pas le droit de détruire l'effet, l'ambiance, l'atmosphère que j'avais réussi à créer. C'était le grand final, je lui offrirais un grand spectacle. La détermination pétilla alors mon regard et je repris, serein.

— Je n'étais devenu que l'ombre de moi-même, enfermé au sein de mon propre corps, impossible de communiquer, impossible d'agir sur les événements, et dans un premier temps dans l'incapacité de voir ce qui se passait à l'extérieur... tandis qu'une force vorace s'imprégnait de mon être pour instaurer le chaos. La Championne Spectre lança alors sa Gardevoir contre moi, tâchant d'arrêter ce que l'on avait fait de moi à tout prix. Seuls deux Rangers avaient également tentés d'arrêter les ravages du Spiritomb possédé lui aussi. Par ailleurs, Kyora avait fini par succomber aux ondes psychiques, mais son état la poussait à devenir la plus forte, et comme j'étais l'être le plus puissant de la salle... elle s'est alliée aux autres pour vaincre l'entité.

Je m'offrais une respiration, fermant les yeux, brièvement. Ensuite, je repris plus calmement, d'un air plus narratif pour raconter une scène qui se passait en parallèle, comme pour marquer une distance par rapport à cette période de tension auquel j'avais indirectement contribué. Mon enveloppe corporelle y avait contribué, même si je n'étais pas aux commandes.

— En parallèle, les Rangers se donnaient corps et âme pour libérer les Pokémons de leurs cages... que je voulais pourtant libérer en priorité mais le groupe a préféré attaquer d'abord. Tout en libérant les cages, ils les détachaient du grand générateur pour le priver de son alimentation... et libérer les Spectres contrôlés qui voulaient les empêcher d'accomplir ce devoir. La plupart des Pokémons sauvages a pris la décision de s'enfuir du chaos approchant et, seuls les plus motivés et les moins martyrisés ont décidé de se lier avec les Rangers en luttant contre les Spectres ou libérant leurs camarades, leurs familles. Maintenant que j'y pense, cet acte de solidarité était magnifique.

Ma dernière phrase était dite en souriant, les yeux brillants d'émotion. Nous étions prêts du but, les dernières phases devaient être conter et que ce livre soit fermé une bonne fois pour toute.

— Puis, au moment où Spiritomb contrôlé allait lancer sa plus puissante attaque, lançant des lasers spectrales, lumineux, et explosifs de partout, les Pokémons alliés tentant le tout pour le tout pour minimiser les dégâts,... J'eus une révélation. Ma détermination m'avait permis de reprendre une place au sein de mon esprit, voyant le désastre à l'extérieur. Et je me suis dit une chose déterminante : "Je ne peux pas avoir un mental si faible pour permettre une possession." Et j'ai lutté au plus profond de moi pour reprendre le contrôle. Par chance, l'alimentation du générateur était suffisamment basse pour que je puisse remarquer l'ascendant du Spiritomb diminuer considérablement... jusqu'à ce qu'il disparaisse totalement. Kyora comme moi, nous nous écroulions au sol, morts de fatigue.

J'instaurais un silence volontaire pour marquer le coup de cet événement et ce qu'il impliquait pour la suite, marquer un changement, et officieusement pour reprendre mon souffle qui était devenu bien plus rapide. Je reprenais avec un petit effet, moins sombre, moins prenant de tension, sur la première phrase.

— Enfin... pas moi, je tombais plutôt d'inconscience... ou au contraire, je reprenais le sentier de la conscience. Le Spiritomb retrouva ses esprits et, au sein de notre bulle onirique, nous avons beaucoup parlé, en l'occurrence de notre sentiment de culpabilité face aux événements. Avant que ce gang ne l'intrumentalise, il était et est le Protecteur de ce lieu abandonné, offrant refuge aux Pokémons sauvages ou non-sauvages martyrisés par l'humain ou les éléments. Puis, désireux de se venger autant que moi de nos ravisseurs, nous avons conclu une alliance. C'était donnant-donnant, le laisser dans mon corps m'apportait la force et surtout me permettait de tenir debout et pour lui, je lui apportais la philosophie humaine et surtout la faculté de communiquer avec notre espèce. Et, même si la Championne Spectre ne lui faisait pas confiance, avec l'aide des deux Rangers, nous avons rapidement retrouvé les chefs qui... tentaient de se faire la malle. Avec tous les pokémons résistants, nous les enfermions dans une tornade multi-élémentaire. Puis...

Sans m'en rendre compte, j'affichais une tête sombre, presque sadique... Comme si le Spiritomb n'était pas entièrement parti, comme s'il m'avait laissé quelques cadeaux spirituels...

— En tant que maître des lieux des plus chaleureux, et ne voulant point nous fatiguer, les "invités alliés", il envoya les Spectres du complexe abandonné se charger de les garder dans la tempête de leurs tourments, de leurs cauchemars.

Je soupirais, soulagé, apaisé. La tension s'était abattue, et pour de bon. Le grand final était tombé, j'espérais qu'il avait eu du grand spectacle.

— Puis, voilà, les policiers sont arrivés pour les arrêter et nous avons été pris en charge par des soins médicaux. Pour l'anecdote, nous sommes revenus sur les lieux et le complexe abandonné, si tu voudrais le voir, n'existe presque plus. Les réfugiés se sont réappropriés leur chez eux en développant un Jardin d'Eden ou siège, pile entre les murs du complexe abandonné, un immense arbre de vie.

Je le laissais digérer toutes ces informations et je conclus avec cette dernière phrase, autant apaisé que fatigué.

— Voilà, telle était l'histoire de la Psychose... J'espère que ça t'as plu. Si tu as des interrogations, hésite pas. Et, tu es libre de croire ou de ne pas croire mon récit, je pourrais très bien faire entrer de la fiction pour étoffer la réalité... il me semble que c'est plutôt coutume chez les charlatans, les diseurs de bonnes aventures ?

 

Le récit de cette histoire touchait à sa fin. Finalement, ce récit avait eu une vocation libératrice dans sa finalité. Je me sentais beaucoup plus détaché de cet événement, aussi troublant soit-il, après l'avoir raconté. Savoir qu'Akari appréciait ma manière de raconter flattait mon ego et en contre-partie j'essayais vraiment de suivre ses expressions faciales pour continuer à donner du rythme au récit. Comme par exemple,  le moment où j'avais vu un sourire lorsque nous avions libéré les Pokémons des cages.

J'étais rassuré qu'il ne me décrédibilise pas, d'une part par les actes que j'avais commis et d'autre part en croyant à mon récit, en ne l'associant pas le moins du monde à la fiction. Même le moment de la discussion avec le Spiritomb... après tout, les Spectres n'étaient que des humains ou des Pokémons décédés... alors pourquoi n'auraient-ils pas droit à la parole, au langage humain ?

— Wooow j'ai réussi à obtenir la crédibilité d'Akari, celui qui croit peu en les récits des autres, wow ! Encore mieux que me discerner une médaille haha !

Il osa ensuite une petite blague, comme quoi un écrivain se chargerait du charlatanisme de ma mésaventure.  
—  Ah bah carrément que je devrais faire ça ! en l'associant aux autres péripéties qui me seront arrivées dans mon existence et que je n'ai pas encore vécu, haha. Et à moi à coup sûr le best-seller... non  mais t'as raison, faut trop que j'engage un "auteur fantôme".

Les ghosts authors étaient les auteurs engagés pour écrire dans l'ombre une histoire... Exemple concret : Ils étaient la plume de nos politiciens "favoris" ou certains de nos influenceurs. Akari m'avoua aussi, avec une pure honnêteté qu'on ne pouvait lui enlever, que cette histoire l'avait captivé et cela m'alla droit au cœur.

— Merci, je suis vraiment content que ce récit de cette mésaventure t'ai plus, vraiment ça me touche. D'ailleurs, si tu veux aussi me partager une histoire, tu peux, cela serait même avec plaisir. A moins que tu ne préférerais aller dormir ? Personnellement, je ne compte pas faire long feu.

 
Voilà mon récit terminé, je devais me libérer de ce regain d'ondes négatives... enfin nostalgiques, enfin je ne savais pas vraiment mais je voulais me dégager de ce sentiment. Par chance, nos discussions légères permirent une légère redescente et j'espérais vraiment retrouver une sérénité remarquable.

— Haha ça serait si beau si j'étais aussi bon manipulateur ! Mais hélas, ce n'est pas le cas. On ne m'a pas donné le don de mentir. Et face à quelqu'un d'aussi observateur que toi, impossible de dissimuler quoi que ce soit !

Malgré tous ces bons moments, aussi captivants que dynamiques, je commençais à avoir sommeil. Après tout, ce récit et cette soirée au Centre Pokémon et au Commissariat, nous emmenait très tard dans la nuit... peut-être que même nous étions plus proche du matin que de la nuit, allez savoir. Et, pour sûr, je n'allais pas vérifier l'heure pour autant.
Tout en écoutant Akari, je venais de prendre mes pieds sur le canapé et les rapprocher l'un contre l'autre, formant ainsi un triangle en élevant mes genoux, comme un enfant. Alors comment ça il n'avait rien à raconter ? Mouais, valait mieux attendre qu'il continue de parler et ainsi dévoiler de précieux dossiers chevaleresques.

— Ah, mais vraiment, si tu n'as rien à raconter, ne te force pas haha... mais, cette forêt, cette forêt que tu dois voir... Un arbre mort t'y a attaqué ? Je savais qu'il s'y était passé des choses !Tu en as trop dit, maintenant, je veux savoir ! Même si je sens que tu vas me sortir un truc pas terrible en guise d'excuse haha...

Cette phrase vint à me donner un regain d'énergie, faisant élever ma malice, mon amusement. La soirée ne faisait que commencer, je le voyais bien...
De même, pour exprimer cette excitation soudaine, une lueur enflammée avait repris mes yeux précédemment fatigués, et je déboutonnais les deux boutons en haut de mon maillot de corps.

 

Alors que je m'apprêtais hâtivement à rejoindre ma Tarsal après mes modestes performances de conteur éprouvantes, les lèvres d'Akari avaient décidé de se délier, et visiblement bien malgré lui. Je souris et gloussais amicalement et je ne pus m'empêcher d'ajouter :

— Haha mais t'inquiète pas, justement, n'ai pas peur de parler avec moi. Autant que tu as aimé m'écouter, j'aime bien t'écouter haha.

Ensuite, il s'échauffa les membres, les détendit, et ainsi il s'apprêta à me livrer l'une des aventures que lui-même n'appelait pas cela aventure parce qu'il était bien trop modeste ou alors parce qu'il avait une assez faible estime de lui-même. Alors qu'aujourd'hui -ou peut-être hier avec l'avancée de la nuit -, c'était clairement grâce à lui si la jeune femme était libre et si je n'avais pas fait n'importe quoi et aggraver la situation en voulant bien faire. Il était mon allié, je lui portais une certaine confiance, en l'occurrence parce qu'il était plus expérimenté que moi en termes de combat Pokémon ou même seulement en termes de gestion Pokémon.

Akari me révéla alors qu'il avait la sensation d'avoir oublié quelque chose dans l'une des forêts alentours de Kishika. Il ne savait pas ce que c'était mais il savait de source sûre qu'il avait oublié, ou égaré plutôt, quelque chose. Comme si... oui, comme je le pensais, on aurait dit une sensation. C'était le même principe dans les rêves. Parfois au réveil, on ne se souvint pas de tout mais seulement de ressentis du genre "Je savais que j'étais en présence d'un ami... mais je ne me rappelle plus lequel". Je pensais ici que c'était le même principe mais... cela voudrait dire que... Non ! Je devais en avoir le cœur net si jamais il confirmait mon hypothèse.

— Tu penses que tu as égaré quelque chose dans cette forêt ? Une impression, tu dis ? Du genre... tu te bases sur une sensation ? Un souvenir enfoui qui serait altéré ?

Puis après cette mise en contexte, Akari me raconta alors la venue de cet arbre mort. Un Spectre avait donc infiltré l'arbre mort et celui-ci avait tenté de porter atteinte à son existence. C'était si triste tout de même, mais la morale de cette histoire disait tout de même qu'il avait grandi, qu'il avait développé son équipe et qu'il se sentait prêt à faire face de nouveau à cette forêt pour récupérer son bien... s'il y était toujours, ma foi.

— Aaaah mais c'est horrible ! J'avoue que même moi avec ma Tarsal, j'oserais pas non plus aller n'importe où ! Trop peur de tomber sur un Pokémon trop puissant ! Un Pokémon possédant un arbre mort, d'ailleurs, ça ne serait pas un Désséliande ?

J'ajoutais, ensuite, plus serein, plus apaisé :

— Au moins, l'avantage, c'est que maintenant t'es prêt à y retourner, prêt pour une vengeance symbolique en revenant sur ces lieux. Ces lieux qui, comme tu le dis, garde un de tes biens. Et j'imagine que tu dois y tenir puisque tu veux le récupérer maintenant que tu es beaucoup mieux préparé.

Je soupirais ensuite avant de passer ma main dans mes cheveux bicolores en fixant mes yeux dans les siens. Si je tâchais d'être encore attrayant à cette heure, je me fourvoyais peut-être avec cette fatigue grandissante qui dysfonctionnait mon self-control. En effet, mes actions étaient soigneusement et ardemment contrôlées, mais avec cette fatigue grandissante, certaines qui ne devraient pas passer en temps normal osaient quelques apparitions. Akari me faisait un certain effet, et je n'avais même pas comment le désigner, l'analyser. Je n'avais jamais ressenti ça - ou alors très peu, en réalité. Mais, je se savais pas, cela m'avait l'air juste physique, ce qu'il dégageait par mes yeux.

 

Akari m'avait alors livré quelques précieux détails sur son existence actuelle. Même si cela restait treès flou et mystérieux encore et toujours. J'imagine que cette aura de mystère n'allait pas s'évaporer avant longtemps. C'était bizarre, mine de rien, de faire relativement confiance à quelqu'un ou ressentir une potentielle sympathie avec quelqu'un que l'on ne connaissait que si peu. "Si peu", je ne parlais pas du tout en temps mais bien en informations. On pouvait très bien trouver son meilleur ami en seulement deux heures, après tout si les discussions étaient rythmées et qu'un feeling miraculeux s'était ressenti. Pour Akari, c'était un feeling subtil, justement basé sur des ressentis et certaines réactions ou actes. Après tout, les actes déterminent ce que nous sommes, non ?

Toutefois, il me partageait son hypothèse comme quoi il ne pourrait très bien ne rien avoir dans la forêt et que cette expédition risquée de prime abord pourrait être inutilement tentée. une forêt abritant des fantômes ? Nous avions déjà eu notre comtpe avec Kyora de ce genre de choses, mais pour lui, en guise de reconnaissance, je pourrais clairement le faire. Il me partageait ensuite qu'il devait rendre visite à une connaissance à lui, et sa manière de le dire me fit glousser à certains moments, et je ne pus qu'hocher la tête lorsqu'il parlait de venir préparer. Il avait raison.

— Il est vrai que si tu penses avoir égaré quelque chose, cette pensée restera tenace jusqu'à ce que tu l'assouvisse. Donc même si cette expédition ne mène à rien, tu peux au moins essayer d'y aller pour faire taire l'obsession. Et tu connais du monde ici ? Oui, j'imagine, je crois que tu m'avais dit que tu venais d'ici. Après, si je te connaissais et que tu ne viendrais pas me voir alors que j'habiterais dans un coin aussi paumé, je comprendrais qu'elle puisse t'en vouloir haha !!

Désormais, j'avais compris les risques, les objectifs, alors j'ajoutais avec un étrange sérieux auquel je n'usais que peu. J'allais lui exposer ma dévotion.

— Tu as bien raison de bien te préparer. Mieux vaut être trop préparer que pas assez. Sinon... je sais que c'est dangereux, que c'est une quête personnelle, mais... sache que je peux t'accompagner. A deux, on est plus forts, non ? Et au moins s'il y arrive un problème mieux vaut être à plusieurs que seul. Autrement, j'aurais aussi besoin de quelques jours pour me préparer à une expédition d'une telle envergure.

S'il acceptait, cela voudrait dire qu'une nouvelle aventure venait à moi. Nouvelle aventure disait action & dynamisme et donc nouveaux frissons ! Ouhouuu Kyora allait adorer. Surtout que durant les prochains jours dits de "préparation" je lui proposais aussi de nouvelles sensations.

 

Les choses devenaient de plus en plus intéressantes. La soirée s'avérait beaucoup plus captivante qu'elle ne le laissait présager au départ, en ce début de journée parfaitement banale en tout point. Après un récit qui pourrait s'apparenter à de la fiction mais qui était pourtant bien réel, j'allais potentiellement bénéficier d'une nouvelle aventure dans des bois dangereux non loin du village paisible et serein qu'était Kishika.

Tandis que je voyais Akari réagir favorablement à mes propos par des signes physiques, sa réponse m'apporta de nouvelles émotions et sensations au sein de notre conversation. Cet objet égaré... il concevait que cela pouvait être une arme, c'est ça ? La perplexité s'afficha durant mes quelques secondes d'émotions spontanées avant que mon air sérieux et réfléchi ne prenne le dessus. Une arme ? Non, cela ne voulait pas dire qu'Akari était un tueur. Il pouvait y avoir mille explications pour qu'un type porte une arme sur lui. Beaucoup de riches hommes et femmes d'affaires pouvaient porter des armes pour se défendre lorsque qu'il n'y avait pas leurs trois gros-bras pour les escorter partout.

— Et toi ? Tu penses vraiment qu'il pourrait y avoir une arme là-bas ? D'ailleurs, je ne sais pas depuis combien de temps cet objet est égaré, mais peut-être que les autorités locales ou des promeneurs ont déjà pu tomber dessus.

Sa question était tendancieuse. Il essayait de me tester. Peut-être qu'il cherchait à voir si j'étais apte à l'accompagner ? Après tout, mes tentatives d'action avaient prouvé mon immaturité, même si j'avais le sentiment de bien faire. Je réfléchis et exposais alors ma vision des choses avec le regard le plus lucide que je pourrais avoir dans ce genre de situation.

— Je pense que si c'était une arme, je me poserais des question et j'essayerais de trouver des réponses. C'est illégal d'en posséder une, mais je ne compte pas en posséder et peut-être qu'actuellement, tu ne veux pas en posséder non plus. En clair, j'essayerais d'éclaircir l'affaire pour comprendre. Et après, j'aviserais avec les informations retirées.

Voilà, je ne pouvais être plus clair. Par ailleurs, lorsque-celui-ci bailla, je ne pus m'empêcher de bailler à mon tour. Foutu mimétisme inconscient !

 

Je ne savais pas comment prendre ses questions à première vue. Etait-ce un test de sa part ? Je ne savais pas vraiment. En outre, à sa manière de parler, on dirait qu'il y avait toujours ce mystère, ce trouble, sur son visage, comme s'il ne façonnait pas cette hésitation, ce non-savoir sur l'objet égaré auquel il était question. J'avouais tout de même que je ne m'étais pas véritablement mouillé pour répondre à la question. J'étais généralement dans le camps de la neutralité et je comptais le rester ; même si avouons-le qu'il était bizarre de traiter de ce genre de questions, surtout avec un inconnu et qui plus était un inconnu avec qui on avait été dans un commissariat. Mais voilà, je préférais réfléchir plutôt que de faire des conclusions hâtives, comprendre avant d'agir.

J'acquiesçais alors lorsqu'il éclaircie certaines de mes idées. Cette forêt était si dangereuse que cela ? Et il n'y avait pas tant de gardes champêtres dans les environs. Je n'en avais pas entendu parler mais je restais surpris de l'existence d'un endroit aussi dangereux qu'il ne le dit aussi près d'un village aussi paisible et serein. Après tout ce qui s'était passé ce soir, plus rien ne devrait pouvoir me surprendre. Par ailleurs les tournures de ses phrases me confirmèrent presque clairement qu'Akari avait des problèmes de mémoire. Mais, pourrais-je le juger ? Moi-même il m'arrivait d'oublier des trucs. Mais lui, se souvenir de source sûre d'avoir égarer un objet mais être incapable de se souvenir ce que c'était ? J'imaginais que c'était possible... je n'étais pas penché sur le sujet de la psychologie cognitive ou la neuroscience.

— Je ne me mouille pas trop car je préfère réfléchir et comprendre avant d'agir. Mais il est sûr que mon corps réagirait illico presto face à un quelconque danger. Même si mon subconscient peut être un imprudent, il ne me laissera pas mourir.

Je me mis, bien malgré moi à bailler. Nous décidâmes tout deux d'aller dormir. Je passais dans la salle de bain pour boire une gorgée d'eau et m'essuyer avec la serviette de douche. Je lui souhaitais bonne nuit en retirant mon T-shirt, histoire d'être plus à l'aise pour dormir, démontrant un corps en V bien tracé... mais pas assez musclé à mon goût, en me dirigeant vers ma chambre.

— Haha, tu m'as embarqué là dedans. Tu peux plus te défiler. Bonne nuit, Akari. J'espère que le matelas ne sera pas trop dur... ou trop mou.

Je lui souris et me dirigeais vers ma chambre, jetant mon T-shirt et mon short dans un coin de la pièce. Je me jetais dans mon lit, réveillant quelque peu ma Tarsal qui somnolait encore, et je m'endormis autour d'elle.