Vingt-cinq décembre au matin. Il fait sombre, beaucoup trop sombre pour le peu d’éclat de tes pensées. Dans le silence de la nuit et du jour qui menace de se lever, tu fixes les contours endormis d’Artiesta. Tu n’as pas trouvé le courage. Trouvé le courage de rentrer chez toi, de confronter les draps de ton lit. Tu viens de rendre Valencia à Kishika et, déjà, la solitude étreinte ton cœur comme une malédiction. La soirée était aussi belle que la nuit s’annonce horrifique. Tu aurais dû proposer à Ashura de rester chez elle, lui faire la promesse de partir au petit matin… Mais qui souhaitait te voir errer jusqu’à pas d’heure, trop inquiet à l’idée de rejoindre les bras de Morphée? Qui rêvait d’être réveillé par tes larmes et tes hurlements au cœur de la nuit? Personne. C’était une réalité – ta réalité – à laquelle personne ne devait être assujetti. Alors, voyant les heures défiler, tu avais prétendu que tout allait bien, qu’il était temps de rentrer… Et voilà jusqu’où cette mascarade t’avait mené.
Lumiris était belle de nuit. Loin de Voltapolis et des souvenirs dont elle regorgeait, loin de l’effervescence d’une ville qui ne dort jamais. Dans les rues de Artiesta, tu tentes d’ignorer l’ombre du dôme qui, de par sa simple présence, te garde les pieds bien ancrés sur terre. Même si l’hiver s’est installé, certaines choses n’ont en rien changer. Tu n’as jamais eu de nouvelles de Vai’ata, jamais connu le fin mot de votre histoire… Et c’est correct. C’est la vie; les gens viennent et partent comme l’orée du vent au soleil de midi – cette phrase ne veut rien dire. Les gens, toujours, ils disparaissent. C’est ce à quoi tu as été accoutumé, le genre de tristesse dans laquelle tu as grandi… Les gens, ils ne restent pas.
Valencia, Ashura, Lys, Lyanora… Ça ne durera qu’un temps. Et à cette idée, un sourire déchire ton visage.
Abandonnant les rues trop vivantes d’autres âmes, tu abandonnes les sentiers balisés par les touristes et les habitants. Instinctivement, tu sais déjà où tes pas te mènent. Même si tu refuses de l’admettre, même si tu n’as surtout pas envie de nourrir des espoirs qui ne prendront jamais racine dans cette réalité crûe, tu laisses ton cœur te guider dans les plus petites artères, dans les chemins plus sinueux. Jusqu’à arriver au pied d’un escalier. D’un interminable escalier. Tu te souviens. Tu te souviens du souffle court, des jambes tremblantes à l’arrivée. Tu sais que ça n’arrivera plus, que tu as bien changé.
Et c’est à la fois aussi effrayant que réconfortant.
Malgré tout, tu hésites. Tu ne veux pas mettre de mot, de nom, sur tes espoirs en cette nuit vide de toute entité. Les gens sont réunis dans le confort de leur foyer… Les gens ne sortent pas lorsque l’instant est aussi sacré. Et sinon, les plus égarés dorment sans doute déjà – mais pas toi.
Mais pas toi.
Pestant en silence contre ta propre naïveté, tu poses ton pied sur la première marche de bois. Tu t’abandonnes au craquement sous ton poids, à l’odeur d’humidité qui parcourt les silures ombragées. Tu soupires : certaines choses t’avaient manqué. Certains petits bonheurs t’avaient été arrachés, t’avaient trop tôt quittés. Cet endroit. Cet endroit gorgé de souvenirs, gorgé de sa présence. Sauras-tu un jour le confronter, lui demander pardon? Comptes-tu disparaître de la circulation, faire comme si de rien n’avait été? Votre amitié, mérite-t-elle d’être arrachée à ta lâcheté? Inquiet, tu plisses légèrement les paupières en entamant ta progression.
Tu ne veux pas formuler tes espoirs illogiques. Tu ne veux pas être confronté à la déception qu’il résultera de ta naïveté.
Et pourtant. Honteux, tu serres les dents. Que feras-tu, une fois au sommet du monde? Que feras-tu, une fois confronté à son absence? S’il n’est pas là, tu l’oublieras. Tu le sais. Tu sais que tu ne trouveras pas une seconde fois le courage de tenter l’expérience. Ça n’a rien avoir avec lui… Mais Lys et Ashura, c’était déjà trop pour le couillard dont tu prends les traits. Mais dis-moi, pourquoi avoir abandonné Hoenn si ce n’était pas pour réparer les pots cassés, pour reprendre ta vie où tu l’avais laissée?
Entre les mots et l’action, il y a plus qu’un pas. Il y a un gouffre dans lequel se noie toutes tes bonnes résolutions.
Le cœur battant – d’inquiétude et non pas d’épuisement –, tu t’avances dans ce sentier qui n’a pas changé. Quelques mètres plus loin, néanmoins, tu t’en éloignes sans l’ombre d’un regret. Tu sais ce qu’il te reste à faire, tu sais les pas qu’il te reste à franchir. Tapis dans le feuillage des arbustes, derrière le voile naturel qui te soustrait à Artiesta, tu écoutes les battements effrénés d’un cœur qui ne cesse de hurler.
Ta main tremble. Ton corps aussi.
Et lorsque, t’armant de tout ce courage que tu ne possèdes pas, tu dégages les branches, c’est pour réaliser ce que tu savais déjà : Il n’est pas là.
Qu’est-ce que j’espérais…, murmures-tu à la nuit, à ton ombre jetée contre Artiesta.
La vue te semble insipide en son absence. Moins jolie, moins vivante.
Ce n’est pas pareil, sans Damien.
(c) TakeItEzy (Ezekiel Fitzgerald)
Damien Delaunay
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Vingt-cinq décembre. Égarées quelque part entre l'aube et le crépuscule – des heures qui n'en finissent pas de s'écouler. Piégées dans la nuit – les mémoires tremblantes qui bousculent l'esprit qui ne s'endort pas. Victoria s'est assoupie il y a longtemps déjà, et j'entends papa et maman qui rient encore à voix basse devant la télévision dont ils ont baissé le volume. Il flotte encore dans l'air les odeurs réconfortantes de dinde et de pommes dorées, de chocolat chaud et de pâtes de fruits sucrées. Il faudrait que cette nuit soit sacrée – une parenthèse pour oublier tous les pas de côté. Il faudrait que cette nuit disperse juin, et la violence, et les orages ; il faudrait que cette nuit tamise novembre, et la douleur, et l'abandon. Il faudrait – qu'on s'abreuve aux histoires tendres de magie de Noël qui apaisent les cœurs brisées et les brûlures à vif qu'on s'est données. Il faudrait...
Il fait nuit depuis trop longtemps quand je m'arrache finalement au confort dérangeant de mes draps et que je me glisse sur la pointe des pieds jusqu'à ma chaise de bureau pour troquer mon vieux pull contre un haut et mon sweat, mon jogging contre une paire de jeans. Intrigués par mon agitation soudaine, Prisme et Rhapsodie relèvent la tête (Prisme étant perché sur celle de Rhapsodie, il l'aurait de toute façon dérangée). Je porte mon index à mes lèvres pour leur intimer le silence, et la petite Fantyrm s'en vient se percher sur mon épaule tandis que je m'installe au bord de mon lit pour enfiler mes chaussures. Bonnet enfoncé sur la tête, téléphone chargé, écouteurs et cigarettes dans la poche, sac à dos sur les épaules et planche sous le bras, j'attrape deux Pokéballs supplémentaires puis, m'armant de mille précautions, l'oreille tendue, j'ouvre la fenêtre. Les voix de mes parents n'ont pas diminué – leur conversation file bon train. J'esquisse un geste à l'attention de Rhapsodie qui me rejoint et, l'impulsion légère, il bondit du plancher au rebord de la fenêtre, du rebord de la fenêtre au jardin. Moins adroit – pourtant habitué –, je le suis après avoir griffonné un mot d'excuses sur un post-it abandonné sur ma table de chevet, puis je tire les battants de ma fenêtre et m'enfonce dans la nuit.
L'air est froid, la neige tombe en flocons légers bousculés par la brise – les routes et les trottoirs sont couverts d'une couche fine immaculée qui suffit à étouffer tous les bruits de la ville. Sunyra s'est endormie dans ses festivités – j'imagine que Nemerya, c'est différent. Éloigné du quartier, je fais claquer ma planche contre le sol et je file les rues silencieuses – les roulettes trahissent ma trajectoire qui s'éloigne et moi je songe aux autres ; je me demande comment va Arya, et puis Lauriane, je me demande où peut bien être Akari cette nuit, et puis Jenna, et Kaneo, et Mana'arii. Par ricochet, les présents s'effacent et c'est l'image des absents qui s'impose – et je songe aux Noëls passés à Hoenn et je me dis que ce doit être joli, là-bas, cette nuit aussi.
(Les crépuscules étaient magnifiques, mais as-tu jamais vu les aurores depuis tout là-haut ?)
De Sunyra à Artiesta l'heure file et les degrés chutent encore – mon souffle dessine des nuages opaques dans la nuit glaciale. Paisible et pas hostile – dans les rues presque vides j'ai le cœur un peu moins brouillon, les idées un peu moins indociles.
(J'espère qu'un jour, tes blessures se refermeront.)
Comme formatés par l'habitude, je sais où mes pas me mènent. Ils connaissent par cœur les trottoirs foulés, les allées empruntées – j'ai fait le même trajet trop de fois pour que les directions soient hasardeuses. C'est toujours le même espoir imbécile qui me guide, tu sais – cette promesse faite à un fantôme.
Au pied des escaliers, ma planche sous le bras, je lève les yeux et j'observe le sommet. Malgré moi, l'ombre d'un sourire au bord des lèvres – une première marche et la Pokéball roule au bout de mes doigts. Le silence est solennel, presque religieux, et c'est toujours comme ça. À chaque pas, Paradox me précède, et c'est comme s'il savait, lui aussi, comme cet endroit comptait pour toi. J'aime le libérer ici – c'est comme si l'on retrouvait tous les deux un peu de toi.
(J'emmènerai quelqu'un là-bas, à Artiesta, un jour, peut-être.)
Mon souffle est un peu plus court, parvenu à la dernière marche – le froid n'a pas épargné mes poumons, et j'adresse un regard mauvais aux escaliers mal intentionnés, comme si la faute leur revenait, à eux plutôt qu'à moi. Un prétexte parmi tant d'autres pour retarder l'échéance – l'instant où il faudra une nouvelle fois se confronter à ton absence envahissante. Je ne sais pas pourquoi je continue de venir ici, quand ça fait chaque fois plus mal que la fois précédente. Pourquoi je m'acharne. Pourquoi je continue d'y croire – rien qu'un peu, rien qu'un tout petit peu. Pourquoi six mois n'ont pas achevé la moindre once d'espoir que le vent aurait dû emporter.
(En attendant, je continuerai d'espérer t'y croiser.)
Je m'écarte bientôt du sentier – là où les passages humains ont doucement commencé à balayer l'herbe en direction des broussailles. Je me fraie un chemin entre les branches et les feuilles, et c'est comme si je retenais mon souffle – mon cœur bat jusque dans mes tempes son éternelle chamade un peu folle. Un pas, et puis deux – je ne m'immobilise que parce que Paradox s'est figé avant moi. À mes côtés, Rhapsodie a redressé les oreilles. Aucun d'entre eux n'a l'air hostile ou inquiet – alors, une inspiration plus tard, je contourne le spectre et m'avance. Trois pas, et puis quatre qui font craquer la neige – et puis le vide.
Une silhouette qui se découpe sur le paysage nocturne éclairé par une lune blafarde – si familière et si différente, irréelle et trop tangible. Je ne comprends pas, et c'est peut-être pour ça que je ne bouge pas – que je ne respire plus. Je ne comprends pas, et c'est peut-être pour ça qu'il n'y a pas le moindre mot qui m'échappe, pas le moindre geste à esquisser. Rien qu'un silence qui s'étire, un frisson le long de mon échine et puis, et puis quoi, maintenant ? Ça n'a pas de sens – je cligne des yeux, ma vue se trouble et c'est impossible ; ça faisait longtemps que je n'avais pas cru t'apercevoir – mais d'habitude, d'habitude c'est dans les foules, d'habitude c'est en plein jour, d'habitude c'est…
Cinq pas, et puis six ; Paradox et Rhapsodie sur les talons, Prisme sur l'épaule, et le premier me devance bientôt. J'avance jusqu'au bord, jusqu'au bord du monde et de nous. Ça ne fait pas sens.
« …C'est encore plus beau sous la neige. »
Murmure étouffé, le regard porté loin – comme de crainte de tromper l'illusion j'ai peur de te regarder ; le paysage c'est plus sûr, moins fou et moins inquiétant. Tu peux pas être là – t'es parti, tu t'es barré comme elle, comme eux, comme tout le monde. Vous êtes partis, et moi je suis resté. Parce qu'on fuit pas ce qui nous a détruit – moi, je le sais, puisqu'Unys m'a suivi jusqu'ici.
Je ferme les yeux, et puis j'inspire. Je les rouvre, et je cherche les tiens.
J'ai besoin de savoir. Besoin de savoir si je deviens fou, ou si c'est bien toi.
« Ou c'est peut-être pas la neige, mais juste toi. »
Juste toi, au sommet du monde et au milieu du chaos. Juste toi, parti.
Juste nous, ici.
(J'irai admirer des aubes, plus belles que nos tragédies.)
Et les yeux qui ne quittent plus une Artiesta vidée de ses lumières, de ses quelques éclats de vie. Qui d’autre, à une telle heure, à une telle journée, souhaitait s’éloigner de l’amour des siens, de la chaleur d’un foyer? Tu étais naïf, Izaiah. Naïf de croire que tu n’étais pas le seul à nourrir de tels désirs, une crainte aussi sourde à la simple idée de dormir. Personne ne viendrait… Parce que personne n’avait envie de confronter sa propre existence à un vide aussi immense. Balayant distraitement les flocons qui tombent en continu sur les fils dorés qui composent ta chevelure, tu prends une grande inspiration.
Rien de ce que tu voyais ne t’avait manqué. Rien de ce spectacle silencieux, de cette scène illuminée, ne suffisait à réconforter ton cœur brisé.
Certaines absences ne se comblaient pas d’un simple spectacle à en couper le souffle. La beauté possédait ses propres limites, ses propres exploits irréalistes. Ce soir, Artiesta venait de se frapper aux siennes… Elle venait de te prouver que sa splendeur ne pourrait jamais réparer les pots cassés, combler un vide désormais trop grand. Elle regorgeait de souvenirs dont la simple existence creusait sans cesse le manque. Ce n’était pas ce que tu étais venu chercher.
Mais ta vie n’était pas un film de noël au scénario éclaté. Dans ta triste réalité, les amis égarés ne se retrouvaient pas sur les lieux de leur rencontre en un soir de réveillon. Et même si la scène était aussi féerique que les flocons étaient denses, ce n’était pas suffisant pour s’y méprendre, pour croire en cette magie de noël complètement cheatée.
Seulement, voilà, même si tu te répètes qu’il est temps de partir, d’anéantir une dernière fois tes espoirs démesurés, tu ne parviens pas à tourner les talons. Partir, oui, mais pour aller où? L’absence de ton ami ne chasse pas les démons, les insomnies. Tu es juste un peu plus paumé qu’à l’accoutumé.
…C'est encore plus beau sous la neige.
… Oui, c’est encore plus beau sous la neige qu’en été. C’était la première fois que tu admirais Artiesta sous son manteau blanc, dans les froideurs de saison.
Et si tu ne te retournes pas, c’est, entre autre, parce que tu n’y crois pas.
Ton cerveau te joue tes tours Izaiah. Il ne suffit pas de désirer ardemment quelque chose pour l’obtenir, pour caresser sa présence du bout des doigts. Il faut plus que ça, plus qu’un souhait pour faire apparaître les soldats disparus au combat.
Malgré tout, tu ne bouges pas. Ton corps est paralysé, tourné vers cette vie effacée. Parce que même si tout est faux, même si lui n’existe pas, sa voix, elle, est bien là. Et tu ne veux pas prendre le risque de vérifier derrière toi, de faire disparaître le mirage ou l’illusion.
Ou c'est peut-être pas la neige, mais juste toi.
Sauf que, dans ta poitrine, ton cœur a cessé de battre. Entendant ces paroles, tu ne peux réprimer le désir de faire volte face. Tu ne sais pas si tu as besoin de te rassurer, de connaître la vérité ou juste de savoir si tu es timbré… Mais tu ne peux réprimander le désir de mettre un visage sur cette voix si familière à tes pensées. Et lorsque ses prunelles croisent les tiennes sous le scintillement d’Artiesta, sous ses millions de paillettes illuminées, tu ne peux t’empêcher de sourire. C’est spontané, trop soudain, pour être fabriqué. Pour être faux.
… On est vraiment dans un mauvais film de noël en fait., murmures-tu, la gorgée nouée, mais les yeux rieurs.
Tu ne sais pas pourquoi ce sont les premiers mots que tu as pu prononcer. But it’s okay. Parce que c’est Damien… Parce que c’est vraiment lui, parce que les mèches plus ébènes que la nuit qui vous enlace ne mentent pas, parce que ces deux saphirs bien ancrés dans leur orbite ne peuvent être que les siens. Déglutissant, tu remontes légèrement ton foulard de ton unique main. Qu’es-tu censé dire?
À moins que ce ne soit une caméra cachée...
Sans préciser que ce serait ton pire cauchemar, sans pouvoir admettre que tu préférais encore perdre pied dans la colline de pierres et de neige que d’être filmé. Peut-être parce que ce ne serait pas assez romantique, parce qu’un tel commentaire ruinerait définitivement la beauté du tableau et du moment.
Peut-être.
Doucement, tu te permets de balayer Damien et les pokémons qui l’entourent du regard. En revoyant Paradox, c’est ton être entier qui menace de craquer sous le poids d’une honte on ne peut plus justifiée. Tu ne sais pas comment réagir ni quelle attitude adopter… Mais tu sais que tu ne veux pas les voir disparaître, que ton désir de les fuir une deuxième fois s’est évaporé à l’instant où il a parlé.
… Joyeux noël, au fait, Damien.
Instinctivement, tu mets l’emphase sur son nom, sur les six lettres dont se composent son identité. Comme si tu avais besoin d’entendre que c’était bien lui, qu’il ne possédait pas un jumeau maléfique quelque part. Juste pour convaincre que cet instant ne prenait pas place que dans ta tête.
(c) TakeItEzy (Ezekiel Fitzgerald)
Damien Delaunay
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Un mauvais film de Noël. Mon sourire s'élargit bien malgré moi, tandis que je bascule mon regard en direction de l'horizon. Artiesta n'a jamais été aussi silencieuse que sous la neige. On entend encore l'écho des festivités – ceux qui célèbrent dans les bars et les boîtes – mais tout est étouffé, tamisé. Presque rien d'autre que nos souffle, le craquement de la neige sous nos semelles, le souffle frais entre les branches nues des arbres qui nous entourent et qui s'écoule en contrebas en direction de la ville. Ma respiration est lourde – chargée de larmes qui ont de toute façon choisi de ne pas couler.
« Aucune caméra. »
Rien qu'un souffle – il n'y a que nous. Nous, mes Pokémon, et le tien – je lui accorde un regard en biais. Ç'a toujours été le tien. Je crois que Paradox, comme moi, t'a toujours attendu – c'était le seul, autour de moi, qui comprenait ton absence et comme elle me tuait à l'intérieur. Aussi longtemps qu'il était resté près de moi, nous avions partagé une compréhension mutuelle mais pudique – l'intimité de ceux qui savent mais qui n'y feront jamais allusion. Quelque part, il m'a aidé à tenir le coup quand t'es parti. C'était insensé, mais tant qu'il était là, je me disais qu'il y avait encore une chance que tu reviennes – ou, au moins, que tu reprennes contact, d'une façon ou d'une autre. Je lève la tête, observant la chute lente des flocons de neige depuis un ciel trop sombre pour qu'on y distingue quoique ce soit. Qui aurait cru que les étoiles entendaient les vœux...
« Joyeux Noël à toi aussi, Izaiah. »
J'ai fait tout comme toi – les syllabes soigneusement articulées pour rendre ta présence un peu plus tangible. La vérité, c'est peut-être que j'ai glissé sur du verglas quelque part en venant ici, me suis cogné la tête, et que tout ceci n'est rien d'autre qu'un délire enfiévré. J'ai pourtant pas eu l'impression d'avoir l'esprit aussi clair depuis longtemps.
« …Donc, là, c'est le moment où tu me fais une déclaration enflammée, en me disant que ta vie n'a plus aucun sens sans moi et que tu veux qu'on fonde une famille dans notre petit patelin hivernal qui célèbre Noël mieux que nulle part ailleurs et qu'on ouvre une boutique de jouets qu'on transmettra de père en fils ? »
Mes prunelles au fond des tiennes et – ce sont quelques secondes en suspens, une hésitation palpable, une inquiétude idiote ; c'est la peur du moindre geste, qu'il suffise d'un rien pour que tu disparaisses et que j'en revienne à la solitude des heures que j'ai pu tuer ici à attendre, un signe ou quoique ce soit. Mon équilibre balance, d'un pied sur l'autre, et puis j'esquisse un pas, et puis deux dans ta direction. Je connais pas ces gestes-là, moi, tu sais – très peu, trop peu pour n'être pas maladroit, trop peu pour savoir très bien comment on y fait. Mais j'en ai besoin, je crois – alors… Alors, au diable les terreurs qui n'ont plus lieu d'être puisque tu es là, mes bras t'enlacent, et j'enfouis mon visage contre ton col – et le reste importe peu puisqu'on est de toute façon que tous les deux.
« Putain, t'es chiant. »
C'est rien qu'un murmure mais c'est suffisant – ma fierté vacille, mon ego boîte quand ma voix tremble mais on s'en fout pas vrai ; tout ce qui se passe sur cette colline reste ici, comme un secret bien gardé. J'ai tellement de fois conté au vent ton absence injuste – ton échappatoire illusoire. Je savais déjà qu'on n'échappe pas au boucan de nos insomnies. Je le savais mais toi t'es quand même parti – et si t'es revenu… Si t'es revenu, si t'es ici, ce soir, cette nuit, c'est bien que t'as pas trouvé ce que tu cherchais par delà les continents, pas vrai ?
Je m'écarte, lentement – regard en biais porté loin sur la ville en fête.
« Tu reviens vraiment ? »
Sois franc – que je n'ai pas l'audace de me réjouir de ton retour s'il n'est qu'éphémère ; je préfère l'amertume de quelques heures comptées que l'espoir bientôt soufflé.
Si tu peux rester, reste ; pars, s'il le faut.
Mais ne laisse plus le silence ni l'absence me faire croire que je n'ai pas vraiment compté.
Un mauvais film de Noël. Parce que tu ne voyais vraiment pas ce que ça pouvait être. Il n’y avait que dans les films que les protagonistes, séparés par les années et par les épreuves, se retrouvaient en temps et en heure sous un fin rideau de neige… Si Damien avait été l’élu de ton cœur, tu aurais sans doute imaginé que la scène avait été scénarisée… Ou que quelqu’un avait lu dans tes pensées. Mais Damien n’était pas Hazel et, tout compte fait, c’était mieux ainsi. C’était pour lui que tu avais monté quatre à quatre l’escalier, pour lui que tu avais osé te présenter sans même t’annoncer… Finalement, avait-il osé partager votre oasis? La question te brûlait les lèvres, mais il était trop tôt pour la formuler.
C’est mieux ainsi…
Tu aurais été déçu d’apprendre que la scène était orchestrée, que votre surprise avait été volée...
Laissant ton regard épouser la forme de Paradox, tu sens ton cœur se serrer imperceptiblement. Et si, finalement, il avait toujours été une promesse silencieuse? La promesse de ceux qui n’entendent qu’à revenir, mais qui ne savent comment l’exprimer… La promesse des gens qui partent avec l’amertume encrassé au fond du cœur et avec la peur de ne jamais être capable de se séparer. Lumiris et toi partagiez les tumultes d’une relation toxique, d’un amour néfaste… Mais tu ne parvenais pas à t’en détacher. Il y avait trop de gens, trop de souvenirs… Il y avait aussi bien Damien que Lys ou Ashura : les liens ne se fanaient pas comme fleur en automne.
Lorsqu’ils étaient vrais, ils persistaient… Et la présence de ton ami ne faisait que confirmer tout ce que tu redoutais. Lumiris était ta maison et ses habitants, ton foyer.
Grimaçant doucement, tu ne peux toutefois t’empêcher de pouffer légèrement devant les sombres présages de Damien sur votre avenir. Les films de noël avaient pour particularité d’être particulièrement cucul… Mais là, c’était pire que tout.
Ça t’avait manqué.
Manqué d’être en sa présence, manqué de l’entendre se moquer.
Ça dépend… On aura le plus gros sapin du village dans notre boutique? Naturel, bien entendu... Et, également, le mieux décoré.
Le plus beau, le plus gros et le plus cucul de tous les sapins. Mais, si c’était pour être avec Damien, l’idée ne te semblait pas complètement dégoûtante. Dégoulinante de mièvrerie, mais certainement pas horrifique au point de lui préférer toute autre existence… Et c’est un sentiment qui se raffermie, qui se creuse une place à même l’organe qui te sert de cœur, lorsque le jeune homme esquisse un pas dans ta direction. Le temps s’arrête juste un peu. Juste assez longtemps pour lui permettre de refermer ses bras autour de ta personne, pour lui permettre d’enfouir son visage dans le col de ton manteau. Incapable de la moindre moue étonnée, tu l’étreins alors de ton unique bras. Tu fermes les yeux, laisse un sourire fuir le sérieux de tes traits lorsqu’il murmure. La culpabilité ne t’a jamais quitté. Le fait de partir loin d’eux, loin de lui, a été la décision la plus déchirante que tu aies pris de ta vie… Et pourtant, à cet instant, tu as l’impression que les mois de silence de sont dissipés. Comment as-tu pu, Iza? La question est complète, elle te torture… Mais le savoir prêt au pardon t’enlèves un écharde du pied.
Et si on reprenait les choses exactement où on les avait laissées…?
Je suis désolé…, réponds-tu simplement du même murmure que le sien.
Tu ne sais pas quoi dire de plus, tu ne penses pas que te réduire en plus plates excuses saurait tout effacer. Malgré la sincérité du moment, tu es réalistes. Tu as merdé… Et tu n’as même pas été fichu de le lui en parler de vive-voix, de confronter ton regard au sien. Craignais-tu de revenir sur ta décision, de te laisser influencer si tu venais à les croiser? Sans doute. Tu n’étais pas quelqu’un de bien fort… Et même l’amour ne te rendait pas moins faible à l’amitié qui grouillait pour toi dans les entrailles de Lumiris.
Le relâchant finalement, tu prends une grande inspiration. Acquiesce doucement.
Oui...
Tu reviens réellement. Ce n’est pas une bêtise, ce n’est pas éphémère… Tu n’es pas revenu pour repartir, pour répéter des dizaines de fois la même impardonnable erreur. Et s’il n’est pas trop égocentrique de penser ainsi, alors tu n’as plus envie de souffrir ou de faire souffrir.
C’était pas ce que je croyais… Hoenn, tout ça. C’était pas comme je l’imaginais.
C’était pas mieux ailleurs. Parce que, ailleurs, eux n’y étaient pas.
J’ai crû que, loin de tout ça, j’arriverais à oublier… Mais ça n’a pas marché. Il manquait quelque chose là-bas, quelque chose que je ne trouve qu’ici.
Vous, que tu aimerais dire, mais que tu n’oses pas prononcer. Comme si tu n’étais plus en droit de parler d’amitié après les avoir honteusement abandonné.
Dis, Damien, est-ce que tu sauras me pardonner…?
Parce que moi, je n’y arrive pas.
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Messages : 1289 Née le : 29/12/2002 Age : 21 Région : Hoenn Pokédollars : 763 Stardust : 4132 Stardust utilisés : 3405 Equipe pokemon : Aventure
C’est si simple, c’est trop facile, tu sais, de dire je suis désolé – les mots sont souvent menteurs mais, pour cette fois, je baisse les armes. Pour cette fois, ça ira – pour cette fois, j’accepte et m’en contente. J’ai envie d’y croire, de me dire que ces mots-là ne fabulent pas, que ces mots-là ne me trahiront pas. Ton pardon, ton oui qui murmure que cette fois, tu ne partiras plus. Je ne sais pas, Izaiah ; je crois que quand on commence à fuir on ne s’arrête plus jamais – je le crains, tout du moins. Je ne veux plus… Je ne veux plus revivre ça, cette dernière lettre laissée à mon attention, lâche, lourde de non-dits et de promesses bafouées. Je ne veux plus. J’en peux plus, d’être celui qu’on laisse de côté en se disant que la douleur finira par me passer.
Je détourne le regard et il s’en revient toujours sur les mêmes horizons paisibles d’une nuit profonde et sans fin. Un frisson remonte le long de mon échine et je rentre un rien la tête dans les épaules en remontant le col de mon blouson. Je souffle sur mes mains mordues par le froid en t’écoutant parler d’Hoenn – la terre sainte qui me manque un jour sur trois mais qui, aussi belle soit-elle, n’effacera jamais rien des fêlures à nos âmes. Quelque chose que tu ne trouves qu’ici, et je relève les yeux dans ta direction. Je crois que je comprends, dans tes interlignes, tout ce que tu refuses d’avouer. À la façon dont Unys n’a jamais été chez moi parce que mon coeur était à Hoenn, je crois que je ne pourrais plus quitter Lumiris – je ne pourrais plus tourner le dos à cette région où j’ai l’impression d’avoir enfin grandi. Enfin avancé… Qu’importent tous les coups manqués, toutes les opportunités loupées, tous les échecs cuisants – j’ai trouvé ici des regards qui ne condamnent pas mes erreurs.
« Je t’en ai jamais voulu, Iza. » Mensonge. « … En fait, si. Je t’en ai voulu à en crever pendant un moment. À toi, à Hazel… J’vous en ai voulu parce que ça fait mal, de voir ses meilleurs amis se barrer et réaliser qu’on n’est pas assez pour retenir les gens pour qui on croyait compter. Et parce que… Parce que je savais que de toute façon vous trouveriez pas que ce vous cherchiez. Que vous vous étiez barrés pour rien. » Je vous en ai voulu parce que je savais que c’était vain et que moi je restais – amputé pour des espoirs creux.
Je soupire, baisse les yeux en direction de la neige chavirée sous nos pas. « Je t’en ai voulu longtemps, puis… Je sais pas. Ça m’est passé. J’me suis dit que j’étais personne pour savoir mieux que toi ce qui était bon pour toi. Et j’ai juste espéré que ça fonctionne pour vous, que vous avanciez et… Je sais pas. J’ai juste fini par lâcher prise, je crois. » Parce que j’ai compris que je ne blessais que moi, que j’étais seule victime de ma rancoeur et de mon fiel. J’avais besoin de détester, d’en vouloir au monde entier – j’avais besoin de ma colère comme essence mais ça ne pouvait durer qu’un temps. Il a fallu qu’elle se tarisse – il a fallu que moi, d’une façon ou d’une autre, j’avance. « Je t’ai pardonné. »
Rhapsodie s’est approché de moi, glissé contre mon mollet tout en observant Paradox dans nos ombres. Je suis son regard, et l’esquisse d’un sourire s’étire au coin de mes lèvres. « Tu sais, je crois qu’il t’attendait, lui aussi. » J’attrape mon sac, humide à cause de la neige dans laquelle je l’ai laissé tomber, et en tire une Pokéball que je tends dans ta direction. « J’en ai pris le plus grand des soins, mais je crois qu’on n’est pas faits pour évoluer ensemble, lui et moi. » Je crois que tu es aussi particulier à ses yeux qu’il est cher à ton coeur – il n’y a qu’avec toi que ça peut fonctionner.
▬ jtm ptn ♥
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