Le lit me parait tellement grand et vide. Depuis qu’il est parti, il ne reste plus rien de l’entrain qui animait la maison. A l’extérieur, mes Pokémons vivent toujours, jouent et s’entrainent. Je les rejoins régulièrement, car je refuse de me laisser dépérir et tout abandonner. Mais c’est difficile. C’est difficile de se lever le matin, de se coucher le soir. Mes nuits ne sont plus reposantes car le sommeil me fuit ou alors je me réveille toujours plus fatiguée Je me force à manger, car tout a un goût de papier, la texture en moins. Le seul rayon de soleil dans ma vie, je suis en train de le regarder dormir.

Allongée sur le lit, je contemple la seule chose qui compte au monde : Ange. Mon bébé, mon trésor. Elle est là et je serai toujours là pour elle. Même pour son horrible Funécire, qui dort à ses côtés, sa flamme basse, loin du visage de ma fille. Je ne l’abandonnerai pas. Je ne la trahirai jamais. Contrairement à lui, je resterai. Contrairement à l’homme qui aurait dû être mon père, je me battrai pour le bonheur de ma fille. Et contrairement à cet odieux souvenir, je ne la manipulerai pas pour mon propre bénéfice.

Elle est tellement belle. Elle commence presque à marcher, curieuse de tout et heureuse de jouer. Albio en est toujours ravi bien qu’il faille le surveiller pour éviter qu’il ne la blesse par accident. Vulca est redevenue possessive et surveille quiconque s’approche d’Ange sans ma permission ni la sienne. Incubus a cessé ses blagues dans la maison par crainte de la Goupix. J’entraine mes Pokémons avec encore plus de sévérité, pour garder tout ce que je veux bâtir. A Voltapolis, des travaux avance à grand pas. Bientôt, je pourrai aussi passer à autre chose dans ce domaine.

Alors que je contemple mon bébé, le téléphone de la maison sonne au loin. Je grogne mais heureusement, la porte est fermée et la sonnerie ne dérange pas mon enfant. Je ramène mon attention, en essayant d’oublier la sonnerie. La personne se lassera certainement. Elle rappellera si c’est important.

La sonnerie s’arrête. Pour recommencer de nouveau. C’est certainement urgent pour que la personne insiste même après être tombée sur le répondeur. Je me lève sans bruit, quitte la chambre.

Quoi ? Dis-je sèchement au téléphone. Non, c’est l’amicale de Fouinette. Bien sûr c’est moi. Qu’est-ce que vous me voulez. J’ai eu le droit à une question débile : Je suis bien chez Capucine Alambra ?C’est pas mon secteur. Demandez au champion du coin. Oui, bah moi non plus je réponds pas. Il y a un problème du côté d’Artiesta. Et les gars de la ligue ce sont dit que ce serait une bonne idée d’envoyer la championne de Windoria qui vit à Voltapolis sur le coup. Les débiles. Mais manifestement, les champions locaux sont injoignables. Mais là, on m’explique le problème. Quoi ! Vous avez attendu sept disparitions avant de vous réveiller ! Mais vous êtes une bande de crétins finis. Bon sang. Je me mets en route. Préparez une garderie pour ma fille sur place. Sinon je repars aussi sec.

Secteur ou pas, il y a des enfants qui ont disparu. Et on abandonne pas les enfants. Peut-être leurs parents sont des guignols, mais il faut protéger les enfants. Je donne des instructions. Je prends Incubus, Albio, Vulca, Spissé, Infera et Caecus. Je prends des affaires pour Ange. Je n’aime pas la laisser dans les mains d’étrangers, mais je ne veux pas la laisser seule.

Sur les lieux, il y a déjà les forces de l’ordre. Super, une autre bande d’incompétents en action. On forme des petits groupes, distribue des cartes du parc, et divise le lieux en secteur de fouille. Je confie Ange au bon soin d’une dame non sans la prévenir que s’il arrivait quoi que ce soit à mon bébé, je lui ferais la peau. J’embrasse ma fille tendrement puis m’arrache à elle à regret.

Il y a un garçon qui vient me voir. Je le regarde de haut en bas et grogne.

Si tu es décidé à pas emmerder le monde et faire le poids mort, tu fais ce que tu veux.

Je regarde le parc. J’aimerai tellement pouvoir venir ici pour m’amuser. Prendre le temps. Savourer les attractions et les jeux. Rire avec Ange. Mais elle est encore trop petite et je n’ai pas le cœur à rire. Mais ça viendra.

Capucine Alambra. On va aller là où l’enfant a disparu pour essayer de retrouver une trace. Il nous faudrait un Caninos, ou un Arcanin. Ma Goupix et mon Feunard peuvent palier mais ne sont pas ce qu’il y a de mieux pour la recherche.

C’est toujours le même discours. Bien sûr que personne ne va emmerder personne, ni ralentir. Jusqu’à ce qu’ils le fassent. Ils sont lents, mous et refusent de le voir. Et puis quand l’accident arrive, c’est les premiers à être surpris du drame qu’ils ont provoqué. Les gens sont nuls, c’est un fait inaltérable. Et pour l’instant, ils ont l’air bêtes comme leur pied. Il n’y a rien de plus difficile à suivre qu’une odeur. On peut la sentir, mais va suivre la trace que quelque chose qui disparait au premier coup de vent.

Ouai, c’est ça. Et toi, tu as le nez fin pour traquer une odeur de popcorn à travers le parc. Si le truc qui prend les gamins sent le popcorn, on va devoir suivre une odeur. J’ai tellement hâte de voir comment vous vous en sortez. Abrutis.

Celui-là, il aurait été mérité, mais je le garde pour moi. Je lève les yeux au ciel et me rend sur les lieux de la dernière disparition sans demander leur avis. L’autre veut aller à la première, histoire de laisser refroidir les pistes encore tièdes et étudier un truc froid. Il n’a rien dans le crâne je vous jure. Ouai, ça sent le popcorn, mais si peu. Est-ce que je rajoute une couche sur le fait qu’on sent à peine ce qu’on cherche ? Sans compter qu’il y a des odeurs plus fortes depuis. Vulca sur place, se met à renifler l’air, tout comme Albio, à la recherche d’indice.

Bizarre ou pas, c’est une odeur de popcorn en effet.

Le truc qu’on cherche se cache peut-être dans une machine à popcorn ou à proximité et il a donc pris son odeur. Ou alors il fait claquer un pétard qui donne aussi cette odeur.

On devrait aller chercher dans leur stock de popcorn. On gagnera du temps peut-être.

Je suis vraiment obligé de me trainer ces deux boulets ? Ils ne vont servir à rien du tout. C’est chiant. C’est juste insupportable. Je n’en peux plus des gens. Et Capucine, n’oublie pas de sourire et d’être polie. Je vous emmerde. Je serai polie quand les gens arrêteront d’être débile et inutile. Quoi ? Ce n’est pas près d’arriver ? Alors subissez en silence.

L’odeur n’est pas difficile a toruver mais si mes Pokémons n’avaient pas été là, ça nous aurait pris encore plus de temps que ça pour réussir à suivre l’odeur. Les variations d’intensité ne sont pas si facile à suivre et on aurait facilement dévié de la piste. Heureusement, Vulca et Albio s’en sortent à merveille. Aucun problème pour trouver ce qu’on cherche.

Je crois.

En fait, on est juste devant un entrepôt. Il est fermé par un cadenas. Si les enfants sont dedans, on a pas de dans à perdre. Ou peut-être que si. Je sais pas. Si le kidnappeur est dans le coin, il nous a vu arrivés et donc va essayer de s’enfuir donc il faut faire vite. S’il n’est pas là, pas la peine de la jouer subtile, mais s’il est à l’intérieur et ignore que nous arrivons, forcer la porte va l’alerter et soit il va s’enfuir, soit il va se servir d’un enfant comme bouclier humain. Ou alors il va nous tendre une embuscade.

Je ne connais pas le terrain et je repousse mon instinct qui me dit de foncer. J’ai un très bon instinct mais je sais aussi distinguer celui qui en a marre et veut vitre rentrer chez lui de celui qui sent les choses. Foncer dans le tas, c’est clairement l’envie de retrouver ma fille qui parle.

Alors je fais le tour et trouve une petite trappe. Je peux m’y faufiler sans problème, et emmener Vulca avec moi. D’ailleurs, c’est elle qui passe en première. Mais d’abord.

Je passe en première, je vois ce qu’il y a à l’intérieur. Vous me suivez si vous voulez.

Bien sûr que non, je ne discute pas d’un plan avec eux. Rien à foutre de leur avis.

Avec prudence, je me glisse à l’intérieur après avoir rappeler Albio. La force de l’habitude et de l’entrainement me rendent cette tâche facile et je pénètre sans un bruit dans le bâtiment. Il y fait sombre et je reste un moment immobile, Vulca à mes côtés, sur ses gardes. Je tends l’oreille à la recherche d’un son étrange, d’un mouvement, d’un grincement. De tout élément suspect. Et je laisse mes yeux s’habituer à la pénombre. Je me tiens prête à tout.

La salle est très silencieuse. Il n’y a pas grand-chose à voir. Deux chariots avec des trucs bizarres dessus. Je pense que ce sont des chariots, à cause des roues qui dépassent mais en vrai, j’ai jamais rien vu de pareil. C’est un genre de voiture avec une forme bizarre et des couleurs flashy. Et plein de pièces détachées autour. C’est super bizarre. On dirait un garage mécanique, mais je sais pas à quoi ça doit vraiment ressembler.

Une fois ma vue adaptée à l’obscurité, les détails se précisent, et je ne comprends toujours pas où je suis vraiment. C’est un hangar, et on y répare des trucs. C’est tout ce que je sais avec certitude. En revanche, ce qu’on y répare est un mystère. C’est peut-être illégal et c’est peut-être pour ça qu’il y a un cadenas à l’entrée. Si on avait demandé l’autorisation, on nous aurait certainement dit non et d’oublier ce qu’on avait vu et pas vu.

En tout cas, rien ne semblait m’avoir découverte. L’infiltration était réussie. Jusqu’à ce que j’autre débile décide de faire n’importe quoi. Son Pokémon tombe comme une masse de la fenêtre en faisant valdinguer tout ce qui était sous l’ouverture et son dresseur suit avec la même discrétion.

Mais chut ! Tu peux pas faire moins de bruit. Chuchote-je. Qu’est-ce que tu fous là ? tu vois bien que tu passes. T’es débile ma parole.

J’hésite un moment, mais de toute manière, le mal est fait. Je pourrais le pousser vers l’extérieur, mais il serait capable de faire du bruit dehors. Mais l’emmener avec moi, c’est m’assurer qu’il fasse du bruit dedans. Bon sang, ce n’est pas vrai. La galère. Cependant, je préfère connaitre la source de mes emmerdes plutôt que ne pas savoir où elle est.

Arrête de gigoter dans tous les sens comme ça. Mais t’es vraiment coincé dans les deux sens. Mais t’es le roi des incapables.

J’essaye de le décoincer mais en vain. Je tire une Pokéball et libère Spissé mon Grotadmorv.

Tu vas passer un mauvais moment. Mais tu l’auras bien cherché.

Mon Pokémon remonte le mur et se glisse le long du corps de l’homme. Son corps gras et liquide enveloppe Frédérick et se place entre lui et le bord de la fenêtre. C’est une fine couche glissante qui le sépare maintenant de l’obstacle. Pour l’aider à passer, le Grotadmorv comprime un l’humain légèrement.

T’es bon pour une douche et un bon moment d’irritation.

Je lâche cette phrase en tirant le garçon à l’intérieur. Même moi et mon immunité aux poison accrue j’évite les contacts avec le Pokémon Boue. Et les plaque d’irritation qu’il aura, c’est s’il a de la chance. Moi, je penche plutôt sur un empoisonnement et quelques temps dans un lit, à se vider par tous les orifices.

Mais tu vas te taire.

Je râle en chuchotant. C'est vain de lui demander le silence, avec tout le bruit qu'il a fait pour entrer, mais si quelque chose sait qu'on est là, j'aimerai qu'on évite de la guider jusqu'à nous dans le noir. Et je garde espoir qu'on puisse de nouveau se dissimuler pour surprendre quoi que ce soit qui viendrait vérifier qui nous sommes.

Hélas, c'est raté puisqu'il y a un truc blanc qui bouge dans le coin de mon regard. C'est un truc à plume mais j'ai pas le temps de bien voir à qui il ressemble. Une violente odeur de pop-corn m'arrive dans les narines. Ça ne sent pas spécialement mauvais. C'est du pop-corn et j'ai connu pendant longtemps des odeurs pires. Mais c'est tellement fort que ça en est écœurant et je dois retenir à haut le cœur avant de réfléchir à une course poursuite quelconque. Mais le choc me fait perdre la possibilité de suivre facilement.

Au lieu de m'élancer dès que je me suis ressaisis, je réfléchis un bref moment. Je ne connais pas les lieux, je ne connais pas l'adversaire et je ne connais les lieux. S'il veut me tendre un piège, il sera parfaitement à l'aise.

Je tire mon couteau, cette grosse lame de guerre qui ne me quitte jamais depuis que je l'ai. C'est une arme trop grande pour moi, mais c'est avec elle que j'ai appris à me battre et je n'ai pas mon égal quand elle est dans mes mains.

J'envoie Spissé en éclaireur, pendant que je suis discrètement avec Vulca après avoir fait signe à l'abruti de rester là. Je n'ai pas besoin d'un boulet bruyant avec moi.