Le tonnerre tambourinait le ciel assombrit par les nuages qui venaient engloutir le soleil, laissant l’illusion qu’il n’était plus tard que l’heure ne l’indiquait. Au cœur de la place marchande de Voltapolis, tu te recroquevillais légèrement sur toi-même alors que tu te sentais impuissant. Le froid mordait tes maigres os; faisait trembler ton corps de tout ton être insignifiant. Tu sentais la pluie couler le long de ta nuque, tes cheveux retrouver leurs boucles en cette forte humidité. Il pleuvait des cordes, et évidemment, vous n’aviez pas de pluie. Tu avais seulement Gregory à tes côtés. Sous ton pauvre sweat à capuche, tu sentais tes frissons t’attaquer de plus belle alors que tu tentais de suivre le pas rapide de ton petit ami qui te guidait en cette ville qu’il semblait bien connaître. Vous ne saviez pas trop ce que vous cherchiez; probablement de quoi vous mettre sous la dent et un endroit où vous réchauffer. L’argent ne rentrait pas beaucoup, ça commençait définitivement à être un problème pour vous deux…
Mais comment en étiez-vous rendus là ? Récapitulons. C’était le 14 février. La Saint-Valentin. Et Aaron avait eu la brillante idée de ramener une fille à votre appartement, en vous imposant indirectement de quitter votre domicile pour la soirée. Il voulait de l’intimité, qu’il avait donnée comme excuse. Gregory et toi vous étiez donc retrouvés à devoir vous trouver une activité palpitante en cette journée de l’amour. Toi qui planifiais pourtant de lire un livre dans les bras de ton petit ami, dans la chaleur de ta chambre, dans votre lit, bien enfouis dans tes couvertures… Non, vous vous retrouviez à déambuler en Voltapolis en plein orage. Le vent de février était si glacial qu’il en était douloureux. Toi qui étais tellement frileux, tu te sentais terriblement impuissant en ce moment alors que tu étais complètement trempé. Tu t’efforçais de suivre Gregory, tu relevais les yeux pour voir sa tête rousse alors qu’il t’agrippait doucement la main.
« J’ai froid… »
Tu tremblais comme une feuille en automne qui s’accrochait désespérément à son arbre. Tu voulais tellement rentrer chez toi… À ta plainte qui était accompagnée de tes vifs frissons, ton petit ami te traînait un peu plus fermement dans un bâtiment qui semblait… Un peu louche. Mais au moins, vous étiez à l’abri de la pluie et du vent. Une agréable odeur venait ouvrir ton esprit alors que tu regardais autour. Vous étiez dans un restaurant; Gregory avait-il faim ? Sans doute, l’heure approchait. Tu n’avais pas vraiment l’habitude de supplier pour manger, ni pour quoique ce soit, tu n’aimais pas demander des choses. Mais en ce moment, le froid t’était surtout insupportable, Gregory avait trouvé le parfait entre deux qui saurait vous plaire. Tu portais attention aux détails. Le restaurant n’était pas des plus chics, le budget semblait assez maigre. Tu remarquais une fuite près d’une fenêtre, venant faire cliqueter l’eau dans un sceau. Au coin du restaurant, près des cuisines, tu voyais un enfant qui faisait ses devoirs, la tête plongée dans ses livres. Tu faisais un pas vers l’avant, et tu sentais le plancher… Coller ? Sous tes pieds. Même si la semelle de tes souliers était complètement trempée. Mais où étiez-vous passés à la fin ?! Tu relevais les yeux vers ton petit ami, le regard confus. Tu avais l’impression qu’il t’emmenait à l’abattoir.
« …Tu connais cet endroit ? »
Le restaurant était assez vide, en-dehors de cet enfant assis sagement, ainsi que d’un autre couple qui discutait tranquillement autour d’une assiette de nourriture qui te semblait étrangement appétissante, de l’angle où tu étais. Même si le look de ce restaurant semblait à revoir, tu acceptais simplement le fait qu’il ne fallait peut-être pas juger un livre par sa couverture. Tu avais faim, toi aussi. Et puis tu pourrais profiter de cet instant pour te réchauffer et te sécher le temps que l’orage ne passe.
Une jeune fille venait vous assigner une table, à Gregory et toi. Le plancher était moins collant dans le reste du restaurant que dans l’entrée. Elle venait déposer les menus devant vous que tu relevais les yeux vers Gregory. Tu étais timide, et tu hésitais un peu. Tu avais quelque chose à demander.
« Gregory ? Tu as envie qu’on partage quelque chose ? »
Tu savais ton appétit si petit. Et ces portions, de ce que tu lisais et voyais, semblaient si grosses, tu n’arriverais jamais à finir tout ça par toi-même. Tu venais retirer ton sweat à capuche; certes il te garderait au chaud en temps normaux, mais il était complètement trempé, de quoi venir te frigorifier si l’on pouvait dire ainsi. Tu venais repousser tes indomptables boucles blanches vers l’arrière alors que tu suspendais ton hoodie au dossier de la chaise, dans le simple espoir qu’il sécherait un peu par le temps que vous ne finissiez de manger. Disons que c’était une drôle façon de célébrer la Saint-Valentin. Toi qui n’avais jamais ressenti le besoin de la célébrer… Et tu te demandais aussi si c’était le genre de Gregory de faire quelque chose en ce beau jour du 14. Pourtant, c’était toi qui avais refusé de sortir à un date, tu préférais toujours passer du bon temps dans le confort de votre appartement. Au final, la vie avait décidé que vous passeriez du temps ensemble. Que vous iriez à ce date involontaire ensemble. Tu souriais timidement pour toi-même. Cette pensée ne te déplaisait pas.
De tous les plans imaginables, me retrouver sous la pluie, la journée de la st-valentin, ne m’avait pas traversé l’esprit. Et honnêtement? J’étais encore pissed de me faire virer de mon appartement pour un one night du coté de mon autre coloc. Oui, l’autre, parce que mon second coloc était à mes cotés. À se les geler sur place, alors que j’essayais, en vain de m’allumer une cigarette. Spoiler, ça ne fonctionne pas sous la pluie. Dommage.
Enfin, coloc… L’albinos à mes cotés était plus qu’un coloc. Même si j’avais encore du mal à le réaliser, à l’accepter surtout. Mais… Bestie Lestie, ce n’était plus qu’un colocataire maintenant. C’était aussi devenu… comment on dit ça, sans que ce soit cringe? You know… ‘Petit ami’. … Qu’est-ce que c’est laid comme terme.
Oh très franchement, je n’avais rien de prévu aujourd’hui, je ne bossais même pas, on va prétendre être étonné de ce fait, non aujourd’hui je devais me reposer et m’occuper de Bonnie, ma Laporeille. Mais elle-même souffrait des choix de vie douteux de Aaron, alors qu’elle était dans mon sac à dos, la tête sortie et trempée, of course. Elle remuait la tête, dans l’espoir de dégager l’eau. Oh elle pouvait se cacher dans mon sac à dos, il était assez grand pour elle mais Bonnie aime voir le monde. Même si le monde lui pleut dessus en ce moment. Dans sa tête, peut-être que si elle se secoue assez, la pluie va cesser? Ah l’innocence…
J’avais beau ne pas être frileux de nature, la pluie un soir en plein cœur du mois de Février n’était clairement pas dans mes températures idéales. Et alors que je cherchais activement où emmener Lestat avec moi, ce dernier manifestait qu’il avait froid. Trop froid. Ce qui me poussait à m’arrêter net pour le regarder, non sans resserrer ma main contre la sienne. Le pauvre, il tremblait sous le froid.
T’es fier de toi, Aaron? J’espère qu’elle en vaut la peine, autrement tu vas perdre tes rotules.
« Ah… » Je soupirais, je pestais même. Ah pas contre Lestat. Ma colère du moment n’était strictement pas dirigé vers lui. Mais le temps pressait. Si bien que je me risquais en jetant mon dévolu sur un restaurant… Un peu louche. En entrant, je remarquais le décor un peu triste mais qui rappelait un resto très… Kantonnais? Pourquoi pas. Mais en posant le pied sur le plancher, je m’arrêtais net en fronçant les sourcils.
« What the… »
Le plancher. Il était collant. C’était… Un choix, je suppose. Mais le plus important, c’est qu’on était à l’abri, loin de cette satanée pluie. Je soupirais, j’en étais presque soulagé. Presque. Je ne pouvais toujours pas gouter à ma douce nicotine. C’était chiant ça.
« Non, j’espère que la bouffe est bonne parce qu’ils patent déjà avec un score douteux… »
Heureusement pour nous, l’attente fut brève, on était attablé assez rapidement, on avait même un verre d’eau! Et si j’en savourais deux gorgées, mon attention se reposait rapidement sur mon partenaire qui retirait son hoodie. Le pauvre, il tremblait encore? Un soupire s’échappait de mes lèvres, alors que je retirais d’abord mon manteau de cuir. Ce premier, je le posais contre le dossier de ma chaise. Puis je retirais mon propre hoodie, ce dernier était encore sèche, si on oubliait la capuche. Et voilà que je tendais le vêtement à mon albinos. Je survivrai mieux en t-shirt que lui.
« Mets ça avant d’attraper la mort. »
Ah mais ce n’était pas une proposition. Je le fixais jusqu’à ce qu’il plis et mette mon hoodie, ce qui résultait en un soupire de ma part. Je n’aimais pas le voir si misérable. Alors si je pouvais le réchauffer d’une quelconque façon… Mon attention se perdait dans l’interminable menu. Heureusement, il y avait des traductions pour les esprits simple comme le miens. Je n’avais pas particulièrement envie de pratiquer mon dialecte Kantonnais. Mais voilà que Lestat se faisait entendre… Partager? Bah pourquoi pas? Déjà qu’il veuille manger c’était un exploit. Alors oui. Partageons! Je trouvais un sourire en coin, alors que je me pressais contre le dossier de ma chaise.
« Ya sure, why not? Tu veux quoi? J’aimerais bien tenter la crête au oignons verts. Tu veux essayer quelque chose toi? Ya quoi… Des rouleaux… des ramen… huh des… dump…ling? Du général tso… Ah du riz. Ah. Ya même du filet de Magicarpe. C’est un cho… Ah! Bonnie! »
Toujours dans mon sac, je la libérais assez vite de sa prison de tissu trempé, ce dernière se secouait rapidement avant de venir trouver refuge sur mes cuisses et sitôt se rouler sur elle-même. Sans doute pour préserver sa chaleur? Ou me réchauffer moi…? D’une main lente, je lui caressais la tête, alors que mes mirettes azurés cherchaient celles argentés de mon… Rah je déteste ce mot!
« Je vais prendre une salade on the side pour Bonn. »
Toi qui n’étais pourtant pas si familier que ça avec le concept d’être en couple. C’était encore nouveau, pour toi, peut-être comme pour lui. Mais pourtant ? Tu aimais ça. Tu aimais la compagnie de ton Gregory. Sa présence, elle t’animait, elle te donnait un semblant de personnalité et de valeur. Tu chérissais tellement la façon dont il te faisait sentir, ton petit ami. Mais pourtant ? Tu étais un peu secret.
Si vous étiez les deux en grand manque de nicotine, ce sentiment ne te dérangeait pas par rapport aux violents frissons qui secouaient ton corps si frêle. Et si Gregory te donnait son manteau de cuir, tu rougissais légèrement alors que tu te blottissais au creux de cette pièce de vêtement. Certes, tu flottais dedans, mais au moins, elle te tenait au chaud.
« Merci… »
Tu lui adressais un bref sourire. Rien ne te faisait sentir plus impuissant que le froid, et tu détestais ce sentiment. Il le savait, ton roux. Vous aviez porté attention au menu qu’il avait accepté ta proposition de partager, et ça te faisait toujours un immense plaisir de partager avec lui. Toi qui n’avais pas le plus grand des appétits… Et tu avais encore moins le réflexe de manger. Parfois, tu étais un peu trop dopé pour te rappeler de manger. Ou tu avais trop mal au cœur, au choix.
Gregory te nommait probablement trop de choix pour que ton cerveau ne puisse assimiler, que tu observais le menu pour essayer de le suivre. Enfin un menu qui était abordable pour votre maigre budget, tu te disais, vous ne sortiez pas souvent tous les deux… Et tu esquissais un sourire.
« Ah ! T’as envie d’essayer les dumplings ? Aaron m’en a ramené une fois, c’était bien. »
Tu ricanais légèrement, alors que tu prenais ton téléphone pour chercher rapidement une image et la montrer à ton copain, avec ce petit sourire taquin aux lèvres.
« Ça te dérange si on les prend végétariens ? »
Une texture qui t’insupportait, c’était bien celle de la viande. D’ailleurs, depuis que tu n’étais plus chez ta mère, tu avais officiellement arrêté de manger complètement de la viande, et c’était bien mieux comme ça. Les repas étaient plus agréables comme ça. Les autres choix du menu, en-dehors de la crêpe d’oignons verts, ne t’intéressaient pas tant que ça, étant tous basés sur un régime qui n’était pas le tien. Donc, Gregory pouvait bien prendre ce qu’il voulait, toi, tu voulais juste tes dumplings pleins de légumes que tu adorais. Et soudainement, tu remarquais que le sac de ton supposé coloc se mettait à bouger alors qu’il se rappelait de la présence de son précieux Pokémon. Vous la traîniez partout, cette Laporeille. Et si Bonnie semblait joyeuse à l’idée de sortir dans un nouvel endroit, tu souriais doucement en coin alors que tu te penchais contre la table pour venir caresser ses oreilles.
« Bon retour parmi nous, Bonnie. »
Tu ne pouvais pas mentir, tu aimais bien les Pokémon, particulièrement Bonnie. Lorsque Gregory n’était pas à l’appartement, et que tu n’avais pas de odd job à faire, c’était toi qui héritais de prendre soin de la Laporeille. Un vrai rayon de soleil, malgré son handicap qui se développait tranquillement. Mais tu sentais un regard soutenu sur toi. Tu levais les yeux, alors qu’ils croisaient ceux de ton amant. Des saphirs que tu n’oublierais jamais, car ils marquaient ton âme par une telle beauté. Nerveux, tu tirais l’ombre d’un sourire alors que tu te relevais.
« …huh ? Qu’est-ce que j’ai fait pour que tu me regardes comme ça ? »
Tu étais rapidement gêné, c’était dû à ta nature timide, si on pouvait dire ainsi. Ou peut-être ton manque de socialisation ? À toi de me le dire, mais même les mirettes de Gregory t’étaient oppressantes, si soutenues trop longtemps. Mais avant même qu’il ne puisse te répondre, vous étiez interrompus par la pauvre hôtesse, qui venait prendre votre commande. Et si tu regardais ton petit ami, il haussait les sourcils. Ah. C’était à toi de commander ? Tu sentais tes joues pâles se teinter de rouge.
« A-Ah ! Euh… oui… »
Un coup d’œil rapide au menu pour faire semblant de faire un choix, alors qu’en fait, tu cherchais juste comment formuler ta phrase.
« Nous allons partager les dumplings végétariens et une crêpe aux oignons verts… S’il vous plaît. »
Tu fronçais les sourcils alors que tu relevais tes yeux argentés sur ton roux.
« Tu veux autre chose, Gregory ? »
Un petit sourire taquin. Oh, vous étiez tous les deux ces jeunes adultes associables qui n’aimaient pas tant commander à manger. Et une fois que c’était fait, l’hôtesse reprenait vos menus, qu’elle s’éclipsait, vous laissant donc revenir à vos moutons. Et tu soufflais. Tes foutues boucles rebelles ne cessaient de revenir envahir ton visage.
« Tu parles d’une soirée pour nous foutre à la porte… T’as déjà pensé à un plan démoniaque pour se venger sur Aaron ? »
Oh, bien sûr, ce n’était que des taquineries entre colocs. Parce que vous vous aimiez autant que ça, et ça vous amusait, même si parfois vous vous faisiez de maladroits coups bas. C’était juste pour rire, et vous gardiez ça en tête pour vous éviter les grosses embrouilles.
Ah si je n’avais pas l’habitude d’être en couple, en vérité c’était mon premier truc qu’on pouvait dire un tant soit peu sérieux, je pouvais m’avancer sans gêne en disant le connaitre, mon albinos. D’ailleurs, il n’était pas rare que je le fixe simplement, sans raison autre que… Bah pour être honnête, il m’attirait… Énormément par son visuel si atypique. Était-ce la peau claire, les yeux clairs et les cheveux décoloré.
Serait-ce une façon pour moi de La retrouver au travers d’un autre corps…?
Je suivais ses moindres fait et gestes, sa façon de mettre mon manteau de cuir. Ah il ne voulait pas le hoodie? Pourtant il flottait dans le manteau. Mais à voir son petit sourire caresser ses fines lèvres, il avait l’air heureux. Ça m’arrachait un sourire, alors que mes mirettes cherchaient les siennes. Pourquoi évite-t-il autant les contacts visuels? J’ai toujours du mal à le comprendre et ce, même des mois plus tard. Je cherche en vain à forcer un contact visuel mais… Visiblement le menu est plus intéressant. Je faisais pianoter mes longs doigts contre la table recouverte de faux marbre douteux. Le son en est agressant même pour moi. Si bien que j’en arrête ma partition en relevant lentement les doigts les un après les autres avant de les refermer dans ma paume et poser mes jointures contre la table.
… Végétarien? Il parlait de quoi là? J’en secouais rapidement la tête, non sans longuement en cligner les yeux. Reviens sur terre un peu Gregory!
« Je m’excuse, j’étais dans la lune, tu disais quoi de végé? »
Ah oui, mon Lestat est végétarien. Un truc qui m’a un peu prit de court, moi qui est un assez grand amoureux de la viande. Je le prenais u peu de haut d’ailleurs à ce propos. Enfin, au début. Mais à force d’essayer des trucs végétariens ici et là… Ce n’était pas aussi triste et digne d’une nourriture d’Écremeuh que je le pensais à la base. Mais suite à un petit rappel à l’ordre, je comprenais rapidement qu’il me parlait de dumpling végé. Bah. Pourquoi pas? Je regardais rapidement les légumes choisi pour me faire à l’idée de ce que j’allais manger bien qu’au final, j’en haussais les épaules. Je n’étais pas des plus difficiles à vrai dire. Sans doute le manque de nourriture par le passé?
…
Ah. Ce n’était pas le moment de repenser à ce merdier.
« Bah pourquoi pas? ~ »
Un sourire et voilà que je reposais mon attention sur mon amie de toujours, ma douce et tendre Laporeille qui trouvait rapidement refuge sur mes cuisses. D’ailleurs, je me retenais presque de l’enlacer contre moi. Ce n’était pas le moment d’attirer niaisement l’attention. Puis, elle était bien et au chaud contre mes cuisses, à voir comment elle somnolait déjà. Enfin, c’était avant que Lestat ne tend la main pour venir lui caresser la tête. Et sitôt, elle couinait, non sans se secouer, alors qu’elle cherchait à monter sur la table pour aller rejoindre mon albinos. J’en soupirais, d’amusement, alors que je glissais délicatement mes mains autour de son petit corps pour mieux la tendre à mon partenaire. J’avais de la chance que malgré tout ses traumatismes, elle apprécie encore autant les gens. Enfin, surtout Lestat. C’était important son Lestat!
Et alors que mon beau décoloré s’occupait de ma lapine, j’en posais mon menton au creux de ma paume droite, sourire aux lèvres alors que je les regardais là. Était-ce ça, le bonheur? Simplement admirer l’être que j’aimais dans la vie de tous les jours?
…. Mais quelle connerie je disais là? Et si Lestat remarquait ma façon de le fixer j’étais sauvé par la cloche, alors que la pauvre hôtesse arrivait enfin. J’en soufflais un peu malgré moi, alors que je me replaçais proprement sur ma chaise. À ma grande surprise, bestie Lestie passait la commande pour moi? J’en trouvais un petit sourire en coin, il commençait à se dérouiller, enfin.
« Je rajouterai un bol de riz blanc avec votre sauce de général tso ainsi qu’une petite salade. Oh et deux bouteilles de Soju, merci. »
Ah mais après avoir été jeté à la rue, affectueusement, la journée même de la saint-valentin, j’avais bien l’intention de boire un coup. Bon, on n’était pas riche. Mais les cartes de crédit existent pour une raison, comme on dit. Et alors que mon partenaire proposait de se venger pour la connerie de Aaron, quelle idée de nous virer pour une meuf. Pfft. J’en ricanais, alors que je m’étirais un moment.
« Bah… Pourquoi ne pas lui rendre la pareille? C’est un petit jeu qui se joue à deux. ~ » Ma façon de ricaner démontrait que je n’étais aucunement sérieux dans mes ‘menaces’. Honnêtement, je le comprenais Aaron. J’aimerais bien passer plus de moment seul avec Les… Ah. La nourriture arrivait enfin! Je trouvais un petit sourire en coin, alors que je prenais une paire de baguette en bois.
« Tu as déjà mangé avec des baguettes ou je dois te l’enseigner ça aussi? » Tu lui tirais la langue, alors que je lui tendais ses ustensiles traditionnel.
Pourquoi pas ? C’était quelque chose que Gregory te répétait souvent. Une simple affirmation qui te faisait réaliser que la vie n’était pas si sérieuse. Que tu n’avais pas besoin de te justifier tout le temps. Et pourtant ? Et pourtant, ta mère te forçait à constamment te justifier. Toujours tu devais trouver des excuses, parce que ‘pourquoi pas’, ce n’était pas assez. Difficile d’exister quand tu devais avoir même une raison d’être… Une raison d’être qui t’avait été, d’ailleurs, si cruellement arrachée. Bonnie avait décidé de venir te rejoindre, un moment de douceur qui savait t’attendrir alors que tu la réceptionnais doucement, la cajolant gentiment. Tu avais un naturel talent avec les Pokémon, et Bonnie, tu l’adorais. C’était dommage. Ce que tu allais faire de ce talent.
Gregory commandait de l’alcool, du… Soju ? Tu n’avais jamais essayé. Toi qui avait fait attention d’être sobre pour votre date, tu rougissais légèrement. Par chance que ta tolérance pour l’alcool était assez haute, et que vous alliez manger, ça vous sauverait sans doute. C’était surtout que tu ne roulais pas sur l’or avec la quantité de weed que tu avais acheté la veille, mais c’était un détail. Les cartes de crédit existent pour une raison.
Tu tentais de dévier l’attention en parlant d’Aaron, et Gregory te proposait sarcastiquement de lui rendre la pareille, ce qui te faisait rire légèrement.
« Alors, on le jette dehors avec sa copine un dimanche pluvieux, qui fait un temps à ne pas mettre un Arcanin dehors ? Il va devoir venir manger au restaurant au plancher collant, hmmm, quelle belle idée… »
Tu penchais légèrement la tête sur le côté, faisant balayer tes boucles décolorées contre ton épaule gauche, alors que tu lui adressais ce petit sourire taquin.
« À voir à quel jugement la bouffe se plie, savoir si c’est réellement une punition, ou si on vient de trouver une onzième nugget dans notre boîte de 10 McNuggets… »
Tu te redressais alors que l’hôtesse vous ramenait votre buffet. Woah, tu ne t’attendais pas à d’aussi grosses portions, et tu n’avais jamais vu quelque chose d’aussi frais en un restaurant ! Tu sentais ton ventre gronder sous la famine, vous aviez fait la bonne décision de partager, finalement. Tu remerciais la jeune fille alors que tu venais doucement relever les yeux sur ta moitié, qui te tendait des baguettes. Ah. Des baguettes. Tu n’avais jamais mangé avec des baguettes, ce n’était sans doute pas ta folle de mère qui t’aurait montré comment. Tu arquais un sourcil alors que Gregory te taquinait en sous-entendant que c’était visible que tu ne savais pas comment.
« Non ! Bien sûr que non. Je… »
Tu sentais les rougeurs te mordre les joues alors que tu déviais les yeux. Tu te sentais tellement… Embarrassé, soudainement.
Tu levais timidement les yeux sur ton roux que tu lui adressais ce sourire gêné, et tu lui tendais lesdites baguettes, ta main gauche qui venait avec.
« Je t’en prie, apprends-moi, Gregory ! »
Après tout, tu aimais bien quand ton roux prenait soin de te montrer des trucs ou t’enseigner des choses basiques que ta mère ne t’avait jamais montrés. Au final, tu en avais appris plus de cet homme que tu appelais ton petit ami en quelques années, que ta mère ne t’avait jamais apporté en dix-huit ans. Tu ne savais pas trop pourquoi. Peut-être que l’amour te rendait aveugle. Peut-être que c’était la maturité, alors que tu grandissais en tant que petit être en société. Qui sait. Mais tu aimais ses petites attentions. Tu aimais qu’il s’assure que tu sois le mieux placé possible pour t’intégrer et te débrouiller proprement dans ce monde trop grand que tu occupais.
Ah Lestat, Lestat, Lestat… Que ferais-tu sans moi Lestat? Tu est tellement… Dépendant.
Mais honnêtement? J’aime bien ce coté.. Clingy qu’il a. Est-ce une façon pour moi d’oublier que je n’ai jamais été la première option convoitée? Serait-ce une façon pour moi d’oublier que j’ai été oublié par celle que j’estimais le plus? Mon sourire se crispait, alors que je faisais au mieux pour ne pas laisser ma soudaine confusion déborder sur mon visage. Ce n’était pas le temps de penser à ça Gregory, ne gâche pas tout, encore une fois.
Tu gâches toujours tout.
Heureusement, notre buffet arrivait plus vite que prévu, ça tombait bien, je mourrais de faim. Ça faisait longtemps que je n’avais pas savouré un vrai repas consistant. Oh je cuisine bien à la maison. Mais disons que je ne suis pas assez riche pour acheter fruits, légumes et viandes surtout. Enfin, la seconde option n’est pas réellement un soucis pour Bestie Lestie, il est végé. Mais pour moi…. J’ai besoin de mes protéines. J’suis pas assez riche pour les variantes végé. Puis je n’ai pas le bon mind set pour considérer la chose. Mon seul intérêt en ce moment c’est de rester en vie.
Le reste lui…
Mes mirettes azurées cherchèrent celles argentées de mon partenaire, alors qu’il… me demandait mon aide? Quoiqu’il avait plutôt l’air de me supplier. Ça m’arrachait un sourire, alors que je m’accoudais sur la table, le fixant de haut.
« Oh? Burton à encore besoin de moi? Mais qu’est-ce que c’est mignon. ~ »
Un rictus m’échappait alors que je me redressais pour passer derrière lui. Oh j’aurai très bien pu rester face à lui et lui montrer comment user de ses baquettes mais… J’aime un peu… Beaucoup (trop) les contacts physiques avec lui. Je ne saurai expliquer pourquoi. Moi qui déteste être touché. Avec lui c’est… Différent? Et justement, en venant me presser contre son dos, je glisse ma main contre la sienne. N’oublions pas qu’il est gaucher, alors que je positionne ses doigts contre les baquettes, non sans soupirer, volontairement, contre son oreille. Est-ce que je cherchais à le provoquer? Peut-être.
« Me cite pas sur ma méthode, suis pas de Kanto. Mais glisse ton index comme ça. Et ton majeur juste ici. Et tout doucement… »
Je le guidais vers son premier dumpling. Oh il l’échappait à quelques reprises, ce qui me faisait doucement ricaner. Mais après quelques erreurs, il parvenait enfin à goûter à son premier dumpling aux épinards. Ce qui me poussait à tourner la tête vers lui pour capturer sa réaction. Et sitôt venir l’embrasser sur la joue.
… What the heck am I doing?
« Tu vois? Ce n’était pas si terrible. ~ »
Un rictus, encore et toujours, alors que je le relâchais pour reprendre ma place, face à lui, alors que je prenais mes propres baguettes pour prendre une part de riz, quelques dumplings et quelques morceaux de poulets. Histoire d’avoir une assiettes bien pleine. J’en oubliais pas Bonnie, qui venait montrer le petit bout rosé de son nez, elle avait sentie la salade commandée exclusivement pour elle. D’ailleurs, je poussais le bol en question au décoloré pour l’inciter à s’en occuper, comme elle semblait tant le réclamer en ce moment.
« Fais toi plaisir, tu vois bien qu’elle ne demande que ça! »
Et alors que Lestat s’occupais de nourrir ma Laporeille, je m’occupais d’ouvrir nos bouteilles d’alcool. On méritais bien un petit break après une aussi longue et chiante semaine.
La dépendance. Tu dépendais de… tellement de choses. De cette si courte euphorie que les substances illicites pouvaient t’amener. De ce sentiment grisant lorsque tu mettais ta propre vie en danger. De l’amour que Gregory t’apportait. Parce que tu dépendais tellement de ce sentiment de validation qu’il t’apportait; l’illusion pourtant utopique d’être le centre de l’univers d’un pur étranger duquel tu étais tombé amoureux. Tu avais besoin du contact physique, de la chaleur de sa peau, une chaleur terriblement particulière que tu pouvais distinguer de celle de n’importe qui d’autre, car Gregory était sans doute la première personne à t’avoir fait connaître la douceur du contact physique. Entre toi et moi, Lestat, une caresse se prend beaucoup mieux qu’une claque. Il ne t’en faut pas trop pour te sentir valorisé, aimé même. Malheureusement, tu ne sais pas connaître tes limites. Et tu sombres. Tu sombres dans ton obsession.
Lestat Burton, toi, obsédé ? On te connaîtrait mal, à en dire le contraire. Ta personne préférée, c’est ton roux. Parce que tu as mis une étiquette sur Gregory et qu’il est sujet de ton amour malsain. Tu reconnais sa voix à des kilomètres, son accent, sa manière de parler. Les expressions qu’il utilise. Tu reconnais son odeur, tu irais jusqu’à dire que tu sais différencier même son toucher et la texture de sa peau à celles de n’importe qui. Tu anticipes souvent ce qu’il va dire, comme une prédiction trop familière, tu connais Gregory par cœur. Quand te rendras-tu compte que ta façon d’aimer n’est pas normale ? Que toi-même tu ne l’es pas, que tu ne l’as jamais été et que tu ne le seras jamais ? (Jamais tu ne t’en rendras compte, à ta propre perte, Lestat.)
Il te disait que tu étais mignon, tu rougissais alors que l’embarras venait te mordre les joues. Gregory forçait un contact physique entre vous, et comme à ton habitude, tu te laissais faire. Tu le laisserais faire n’importe quoi de toi. Tant que ça peut le satisfaire. Tu voulais seulement être aimé.
Gregory était sans doute trop tactile, mais toi, tu avais terriblement besoin du contact physique. (Le tragique résultat d’un enfant qui n’a jamais connu la chaleur de l’amour parental.) Et au final, la démonstration n’avait servi à rien puisque tu avais été complètement distrait par ton partenaire, avant de te retrouver avec un dumpling dans la bouche, que tu savourais enfin. Ils étaient délicieux, ces fichus dumplings. Une fraîcheur surprenante pour un restaurant aussi douteux, mais tu souriais légèrement avant de te retourner vers Gregory.
« Merci, je vais essayer. »
Tu déviais timidement les yeux après avoir eu l’attention des siens, comme si ton objectif était accompli. Il te provoquait visiblement, ça fonctionnait, mais Lestat, tu étais réservé, sans doute secret, même. Tu étais malade, vraiment. Continue de manger et essaie d’oublier ces étranges sentiments accaparants. La Laporeille de ton partenaire semblait te réclamer de la salade, et bien évidemment, tu demandais la permission à te petit ami, qui te l’accordait chaleureusement. Elle n’attendait que ça, que TU la nourrisses. Elle t’aimait tellement.
Tu cherchais une fourchette des yeux, en vain, dommage pour toi, tu allais devoir t’exercer aux baguettes. Et si tu te faisais maladroit, tu te doutais que Gregory se faisait un malin plaisir à te regarder aux prises de ces fichues baguettes, mais au bout d’un moment, tu finissais par y arriver, même à bout de patience. Et Bonnie pouvait finalement profiter de sa salade, tu partageais son petit sourire satisfait.
« Il y en a une qui est fan de la mayo japonaise… »
Et un peu sans prévenir, tu venais lui piquer un morceau de sa salade pour y goûter. Et bien évidemment, leur vinaigrette venait égayer agréablement tes sens… Sauf que la Laporeille n’était visiblement pas d’accord, qu’elle couinait de façon mécontente alors que tu lui avais volé une précieuse bouchée de SON repas !
« Mais ! Il faut toujours faire un contrôle de la qualité avant de nourrir une reine, Bon-Bon… »
Tu reprenais de la verdure pour venir la lui tendre pour qu’elle grignote, puis ensuite, tu te prenais un dumpling. Et tu venais relever les yeux vers Gregory, qu’il t’accorde son attention le temps que tu parles.
« Tu sais quoi ? On a vraiment trouvé la onzième nugget, j’ai pas trop envie de partager avec Aaron, au final. »
Tu ricanais timidement, alors que tes yeux déviaient sur la bouteille de Soju fraîchement ouverte. Et tu questionnais ton petit ami du regard.
« Tu n’avais pas dit que tu préférais rester dans la sobriété, ce soir ? »
Ah les joies d’être avec deux âmes en manque d’attention. Avec deux âmes qui n’ont jamais connu l’attention, l’affection, l’amour. Deux âmes qui n’ont jamais connues la douceur d’une main, simple, douce, bien intentionnée.
Oh le reconnaitre serait trop difficile. J’ai… Beaucoup trop d’orgueil pour ça. Je n’aime pas paraitre dépendant. Mais pourtant.
Je suis dépendant. Je suis dépendant de mon albinos. Enfin, j’aime surtout qu’il puisse dépendre de moi. Serait-ce un petit power trip de ma part? Possiblement. J’aime quand il me dévore du regard, cette façon qu’il a de boire mes moindres mots. Il me suit aveuglément. Ah certains diraient qu’il est trop naïf. Mais j’aime ce coté quelque peu… Obsessif qu’il a? J’aime être celui qu’il désire aussi passionnément. Aussi malsain que cela puisse paraitre. Si je peux me sentir important aux yeux de quelqu’un, autant en profiter. Je serai le pire des idiots de ne pas le faire.
D’autant plus que… Bah je l’aime bien mon albinos. Il a ce coté un peu concon sur les bords. Mais nous sommes tous stupides à notre façon. Et sa façon de faire le rend… adorable? Je m’en mords l’intérieur des joues rien que d’y penser.
Pourquoi est-ce que je me sens comme ça? Ce n’est pas sensé se dérouler ainsi.
Et pourtant…
« Tu vois, c’est pas si terrible. ~ » Un rictus accompagne ses tentatives seules d’utiliser ses baquettes. Oh sans être un expert en la matière, je m’en sors un peu mieux que lui. Surtout qu’il a l’intelligence d’essayer de prendre de la salade avec ses baguettes. J’en lâche un soupire d’amusement, alors qu’il essaie. Il essaie fort. Oh tellement fort, d’attraper sa verdure. Et tout ça pourquoi? Pour Bonnie. Je la vois suivre chacun de ses faits et gestes. Elle le regarde avec une certaine admiration tellement belle à voir. Oh elle l’aime son Lestat. Ça fait tellement plaisir à voir, il y a longtemps que je l’avais vu se prendre d’affection pour un autre humain. Briser sa crainte envers le genre masculin est tellement difficile. Et pourtant, elle est là, à grignoter ce qu’il lui offre. Et grognasser en le voyant lui voler quelques feuilles à son tour. J’en éclate de rire. Décidément, difficile de s’ennuyer avec ce duo.
« Contrôle de la qualité dis-tu? Et puis quoi encore? ~ »
Oh sans être pauvres, nous ne sommes pas riches et profiter d’un tel repas pour si peu semble être une véritable bénédiction. D’autant plus que voir Lestat manger, enfin, avec autant d’appétit ne manque pas de me faire sourire. Il est tellement… Mince. Je me revois souvent au travers de ses actions. Serait-ce pour cette raison que je m’intéresse autant à sa personne?
« La onzième nugget? Ah j’ai envie de nugget maintenant…. Mais j’suis d’accord, pas question de ramener Aaron ici. Gaslight, gatekeep, girl boss! » J’en échappe un rire, alors que je repose mon attention sur ma bouteille d’alcool… Ainsi que la sienne que je viens lui tendre.
« Ah j’ai dit ça moi? Meh il n’y a que les fous qui ne changent pas d’idée! Puis, autant souligner cette fameuse st-valentin non? J’aimerais profiter de cette première fois avec la personne que j’affectionne le plus actuellement… ~ »
… Pardon? Mais qu’est-ce que tu dis là Gregory.
On trinque ensemble, puis je porte enfin cette boisson à mes lèvres, savourer une gorgée ou deux avant de me crisper et grimacer.
« … Mouais peut-être pas finalement. » Un léger rire accompagne ma déception, c’est un peu trop fort à mon gout mais bon… Au prix payé, on a intérêt à les finir ces fichues bouteilles.
Rejoins la famille !
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