L'aéronef transperçait le ciel dans un vrombissement continue et le souffle du vent. Le vol n'allait pas être particulièrement long, mais l'impatience ambiante étirait chaque minute en heure. Les étudiants rassemblés dans le véhicule discutaient calmement, ou non, riaient aux éclats, parfois à une bonne blague, parfois à cause de la tension qui les habitaient. Certains restaient dans leur coin timidement, et d'autres préféraient qu'on les laisse tranquille.

C'était le cas de Capucine. La jeune Faunus à la paire d'oreilles de félin supplémentaire, ne voulait pas qu'on lui parle. Elle ne voulait même pas être ici, dans cet aéronef. Mais elle n'avait pas eu le choix, personne ne lui avait laissé. Elle s'était appropriée un coin, assise le dos au mur, le dossier à sa gauche, ses pieds sur le siège d'à côté, la tête sur ses genoux remontés. Elle ne voulait pas être là, et n'était pas non plus très à l'aise à l'idée de ses déplacer à grande vitesse dans les airs. Elle ne l'avouerait jamais, mais elle avait tout de même peur et espérait retourner au sol le plus vite possible.

Soudainement, il y eut un mouvement de foule, alors que les baies vitrées s'ouvraient pour révéler le décor aérien et l'approche de leur destination : Beacon Academy. Le rêve de tous les aspirants Hunters. Une école où ils allaient apprendre à se battre contre les créatures de Grimms afin de protéger la population. Devenir un gardien du monde humain, une protectrice des innocents. Devenir plus fort, plus rapide. Capucine ne connaissait pas la moitié des choses qu'elle aurait dû savoir sur l'académie. Elle était là où on lui avait dit d'aller, sous peine de perdre le peu qu'elle avait.

Une pensée ironique lui fit redresser la tête et foudroyer tout le monde d'un regard méprisant. En venant ici, elle avait déjà tout perdu. Et cette révélation ne fit qu'augmenter son amertume. Elle s'était faite avoir tellement facilement.

Elle n'était pas aller voir la vue sur son nouveau chez elle, car elle refusait de faire comme les autres et de s'ébahir sur l'académie. Toutefois, en descendant de l'aéronef, ce fut bien malgré elle qu'elle eut un mouvement d'arrêt devant les bâtiments. Son cœur s'émerveilla des lieux qui différaient énormément de tout ce qu'elle avait pu rencontrer dans sa vie. Il n'y avait rien de pareils à la Ménagerie d'où elle venait, ni à Mistral où elle avait passé ses premières années. Pas dans les lieux où elle allait en tout cas.

Elle se força à reprendre sa marche, dissimulant sa soudaine peur sous ses airs austères. Elle refusait de se laisser intimider par quoi que ce soit et n'accepta pas ce sentiment d'angoisse et de doute qui l'avait assailli. Elle ne se posa pas non plus les questions habituelles, d'avoir des amis, de se sentir bien ou autre. Elle avait réussi à se convaincre que c'était des choses sans intérêt et qui ne la concernait pas.

Elle était donc allée chercher ses affaires, et en prenant garde de ne regarder personne ni le décor, elle suivit le mouvement jusqu'au hall. Là le directeur fit un discours qu'elle n'écouta pas, juste assez pour comprendre qu'ils allaient passer la nuit tous ensemble et que demain, il y aura un test. Encore un. La Faunus avait déjà dû en passer un pour venir ici, voilà qu'elle devait encore en faire un une fois arrivée. Elle se demanda si elle échouait et était renvoyée chez elle, est-ce qu'elle aurait rompu l'accord qu'on avait passé avec elle.

Il y avait de l’agitation et du monde autour d’elle. Beaucoup de monde et beaucoup d’agitation. Capucine n’aimait pas ça. Elle ne voulait pas qu’on lui parle ou qu’on la regarde parce qu’elle ne voulait pas être là. Et, même si elle refusait de l’admettre, elle était intimidée et avait peur du regard des autres.

Fort heureusement pour elle, personne ne vint la voir. Peut-être à cause de son regard noir qui semblait foudroyer quiconque s’approcher un peu trop d’elle, ou parce qu’elle avait réussi à se mettre dans un coin, partiellement protéger des regards. En tout cas, rapidement, l’extinction des feux fut imposée et la lumière disparut pour ne laisser qu’une mince pénombre pour les voyages nocturnes liés aux besoins naturels. On entendait encore chuchoter, parfois bouffer et rire, puis des chuts leur répondre. Des petites lumières s’allumèrent par endroit, où certains élèves regardaient leur scroll.

L’obscurité n’était pas un problème pour Capucine, qui voyait très bien dans le noir. Elle ne dormit que d’un œil, assise le dos au mur, à l’affut de chaque bruit, chaque mouvement. Ce n’était pas un bon sommeil, mais elle en avait l’habitude. Cela faisait longtemps qu’elle ne dormait plus profondément. Autant par besoin que par peur. N’ayant pas de chez elle, elle dormait là où elle trouvait un abri et devait rester sur ses gardes pour éviter les attaques d’autres rôdeurs ou parfois, simplement de Grimm. La jeune Faunus était tellement pleine de colère, de rage et de peur, qu’elle était un aimant un Grimm en terre sauvage. Et puis, il y avait aussi les cauchemars qui venaient dès qu’elle dormait trop profondément.

Puis le nouveau jour se leva, le jour de l’épreuve, la dernière épreuve avant de devenir élève à part entière. Encore une peur dissimulée à elle-même. Si Capucine échouait ici, comment est-ce qu’on l’accueillerait là-bas, de retour à la Ménagerie. Aura-t-elle rompu les termes de son contrat ?

Là-bas, sur l’île où elle vivait maintenant depuis sept ans, elle n’avait rien et n’était personne. Elle avait survécu en voler sa pitance, avec de plus en plus de réussite. On ne l’avait jamais vu faire, mais l’île n’était pas très peuplée et personne ne la connaissait ni l’avait vu travailler. Cette situation aurait pu durer longtemps sans ce Monsieur Justicier Bien Propre Sur Lui, qui avait voulu lui venir en aide. Mais il avait décidé que la jeune faunus ne pouvait pas continuer à vivre en marge et faire tout ce qu’elle voulait. Elle devait respecter la loi.

C’est ainsi qu’à l’aube, Capucine se réveilla dans la même position dans laquelle elle s’était endormie, semi-assise. Personne ne bougeait encore, mais elle savait que ça ne tarderait pas à changer. Un réveil sonna et l’activité des étudiants commença. Certains furent prompte à se lever, d’autres eurent besoin de plus de temps, et certains préférèrent ne pas prendre de petits déjeuner, pour gagner quelques minutes de sommeil supplémentaires, se concentrer, préparer leurs équipements ou simplement parce qu’ils avaient la boule au ventre.

Capucine était la première à être arrivée à la cantine, et avait pu réquisitionner une place au fond du réfectoire. Son plateau n’était pas très rempli. Loin de ne pas avoir faim, mais la plupart du choix qui était disponible lui était soit inconnu, soit qu’elle n’en avait jamais mangé et n’avait aucune envie de faire une expérience malheureuse un jour comme celui-ci.

Pour le reste du temps, elle se terra dans un coin, loin de tous. Elle n’avait pas besoin de se changer, n’ayant pas mis d’autres tenues pour dormir que ses vêtements de la veille et du jour. Elle préférait être habillée pour se défendre d’un potentiel agresseur que de se battre avec un short à cœur rouge et un T-shirt lapin.

Elle observait discrètement les autres se préparaient, caressant distraitement les tubes métalliques accrochés à ses cuisses et à sa ceinture. Elle n’avait pas besoin de vérifier son arme. Elle l’avait déjà fait et refait et ne voulait pas montrer à ses adversaires potentiels ce qu’elle utilisait. Elle ne savait rien de l’épreuve mais ne voulait rien laisser à personne.

Une sonnerie puis une voix invita les étudiants à se rendre à l’aérodrôme pour le départ, et la tension grimpa d’un cran chez Capucine. Où les menait-on ? De grands écrans à l’extérieur indiquait la répartition dans les différents aéronefs. Les machines volantes n’étaient pas assez grandes pour embarquer toutes les premières années en un coup. Un frisson remonta dans le dos de Capucine. Elle n’aimait pas voler. Elle n’aimait pas non plus être enfermée dans un petit espace sans savoir quand elle allait en ressortir. Encore moins quand il y avait du monde.

Elle prit une grande respiration et chercha son nom. Une première épreuve qui ne fut pas simple que la faunus aux connaissances académiques parcellaire. Finalement, elle trouva son nom et se rendit à l’aéronef où on lui tendit un paquet de cartes. Elle devait en tirer une et elle s’exécuta. Le 7 de piques.

Dans l’aéronef, on leur expliqua ce que tout cela devait signifier. Ils formeront des équipes de quatre personnes, avec qui ils évolueront pendant leur scolarité. Et pour trouver leurs partenaires, chacun était muni d’une carte à jouer. Et ils allaient devoir trouver les trois autres personnes possédant la même valeur.

Pour les aider, le symbole pointera dans la direction approximative de leur partenaire, celui qui aura la même couleur. Le cœur avec le carreau, le trèfle avec le pique. Puis les deux cartes réunies orienteront vers l'autre paire. Si elle s'est réunie. Plus les étudiants seront proches de leur double, plus la carte sera précise, sinon, elle bougera dans une direction générale.

Capucine ne comprit pas tout exactement. Elle avait une carte qui montrait une direction. C'était le point principal. Et au bout de cette direction, il y avait quelqu'un à trouver. Ce n'était pas bien sorcier.

Le vaisseau survola la forêt de l'automne éternel. Les portes latérales s'ouvrirent et Capucine s'agrippa à son harnais. Elle prit cette ouverture pour un malfonctionnement et commença à s'inquiéter, convaincue qu'ils allaient s'écraser au sol. Mais elle était la seule à stresser. C'était normal et on leur demanda sauter. Dans le vide.

La jeune Faunus laissa les autres s'engager dans le vide avec un regard ahuri. C'était le folie. Mais son tour vint et il était hors de question de faiblir. Les derniers passagers prirent l'élan de la jeune faunus et sa course pour du courage, de la témérité ou une démonstration de force. Ce n'était qu'un moyen de se jeter dans le vide sinon elle ne l'aurait pas fait.

Pendant sa chute elle réfléchissait à toute vitesse. Comment arrêter sa course ? Comment survivre ? Elle vit quelqu'un ralentir sa chute par magie. Un autre sortir un drôle d'objet et s'en servir pour s'accrocher au branche. Il y eu des explosions mais Capucine venait d'avoir son idée.

Sa main se porta à sa ceinture où elle saisit un tube métallique. Elle le décrocha, ce qui déclencha une série d'événements. D'autres tubes se libérèrent de ses cuisses et de sa ceinture, relier par un filin solide. Le filin se rétracta et les tubes s’emboîtèrent pour former une longue lance. Toujours tombant, Capucine avisa une branche et attendit.

Elle saisit finalement le bout de sa lance et comme un pêcheur lançant sa ligne, elle déploya son arme. Les tubes se séparèrent de nouveau et le filin se détendit. La point vint s'enrouler autour de la branche, et la rétraction rapprocha la faunus de l'arbre. Puis les tubes lâchèrent la branche et Capucine la lança sur une seconde branche puis finalement se poser, un peu rudement, sur le sol.

Ses bras lui faisaient mal à cause du choc, mais au moins était-elle en vie. Son arme se libéra et reforma une lance. Sur ses gardes, à pas lent et régulier, l'étudiante s'avança dans les bois d'abord à l'aveugle avant de se rappeler de regarder sa carte. La pointe du pique balayer une zone sur sa gauche, avec de grand mouvement. C'était certainement par là.