Une jeune femme entre en scène, tenant dans ses bras un petit Evoli qui tremble; c’est qu’il y a beaucoup de monde qui sont venus pour les voir, pour les juger, et lui il est bien timide. Qu’à cela ne tienne, son sourire à elle est égal et ses pas, assurés quoique courts, la mènent vers le centre du stage où ils devront performer. Il est difficile, voyez-vous, de faire de grands pas lorsque vous portez un kimono, habit traditionnel s’il en est un tout droit arrivé de Johto, comme la jeune femme également. Elle est vêtue d’un furisode, kimono à manche très longues frôlant presque le sol, d’un violet vif et joyeux, serti de broderie roses et vertes faits de ses petites mains. Elle se penche, quoiqu’un peu difficilement, pour poser le petit Evoli sur le sol; lui proteste, s’accroche, grimpe sur son épaule. On pourrait se demander ce qui ne va pas; mais elle sourit, elle rit, de son doux rire qui s’entent à travers cette pièce ouverte faite exprès pour porter la voix. Elle cajole, elle rassure; le petit pokémon prend place sur le sol, ses grandes oreilles pointées vers l’arrière. On se demande si cela fait parti du spectacle; si le pokémon réussira les prochaines épreuves.

Mais l’œil aguerrit voit; qu’en s’accroupissant, les longues manches de son furisode sont venues s’étendre élégamment sur le sol, comme de longues ailes qu’elle aurait étendue hors de son corps. La créature la regarde de ses petits yeux, inquiète, mais lorsque la jeune femme étend son indexe pour le poser en un mouvement du poignet sur le bout de son museau, un élan de musique traditionnelle se repend en ondée dans le dôme. Sur la première note, son indexe quitte le museau du Evoli; lorsque la guitare commence sa mélodie, la voilà qui se lève en tournant sur elle-même, libérant les rubans qui étaient accrochés à ses poignets pour les laisser la suivre dans son pivot.

(La musique, c’est par ici~)

Les oreilles de l’Evoli se dressent; ses yeux suivent les rubans avec intérêt alors que sa queue se mets à bouger au rythme de la musique qui anime sa dresseuse. Elle fait un pas sur le côté; pivote dans le sens inverse au rythme lent de la musique, mais cette fois-ci la petite chose se mets sur pied, puis se mets à courir après les rubans, autour d’elle, comme voulant les attraper au vent. Cela arrache un sourire doux à sa maitresse, qui continue sa dance sans s’arrêter. Tout cela fait partie du spectacle, après tout.

Pendant qu’elle accélère doucement le rythme de sa dance pour aller avec la musique, les manches violettes de son furisode prennent également leur envol, il semblerait, pour rejoindre les rubans roses qu’elle agite autour d’elle, passant ses bras de gauche vers la droite et de droite vers la gauche, prenant un pas vers l’avant pour faire reculer l’animal qui joue avec les rubans, oubliant le dôme, les spectateurs, la musique, même; ils jouent ensemble et sont seuls au monde.

Alors que la musique, très brève, arrive à son paroxysme, la voilà qui s’accroupie à nouveau, toujours en pivotant; le mouvement n’est pas facile, et manque de fluidité malgré les nombreuses heures de pratique qu’elle avait sous son obi. Elle avait lâché les rubans avant, et son Evoli, au sol, jouait avec, tandis que dans ce mouvement vers le bas elle le recouvrit des longues manches de son furisode; et lorsqu’elle se releva, toujours en pivotant sur elle-même, voilà que les manches se lèvent une dernière fois-

Et là où se tenant auparavant un Evoli, il y avait un petit Zorua, tout timide, qui s’était laissé convaincre de briser son illusion pour se montrer tel qu’il était. Et lorsqu’elle eut finit son pivot vers le haut, elle ouvrit grand les bras pour l’accueillir alors qu’il bondissait vers elle, son rire venant chatouiller les oreilles des spectateurs. Tenant fermement le pokémon dans ses bras, elle s’inclina, et la musique se termine. Leur danse n’aura du tout au tout duré qu’une minute; mais elle était confiante qu’elle les représentait bien, elle et lui. Ayant ainsi terminé sa prestation, elle retourna sur ses pas et laissa sa place à un autre.

Mon cœur battait très, très vite dans ma poitrine … j’étais si nerveux ! J’avais décidé de franchir le pas, timidement, et de m’inscrire à un concours, mais… je ne pensais pas que ce serait si tôt !
Forcément, je m’étais exercer avec mon Tournegrin, mais je n’étais pas sûr que ce soit suffisant, après tout il était encore bébé ! Moi, maladroit et pas habitué à la danse, les représentations.
Cependant … je ne pouvais pas me dégonfler, alors … j’allais devoir prendre mon courage à deux mains ! Même si je me sentait près à faire un malaise sous le poids de l’anxiété.
Surtout que …la Championne Coordinatrice, elle était si gracieuse ! Je doutait sérieusement de ma légitimité dans ce milieu.
Autre chose me perturbé, c’était la présence d’un autre candidat … ou plutôt candidate. Elle ressemblait trait pour trait à Kyo, pourtant c’était une fille ! Ce doute se confirma lorsqu’on nous appela … c’était bien la même personne ! Néanmoins, ce n’étais pas le moment d’éclaircir ça.

Anxieux, je serrais contre moi mon premier Pokémon, observant d’un œil admiratif la première représentation. C’était … très doux. J’aimais beaucoup ce que je voyais.
Je n’étais pas aussi gracieux qu’elle. J’étais un peu pataud, mais j’espérais … que ça le fasse. En espérant que mon nœud papillon jaune soit bien noué, et que ma chemise correctement boutonnée. J’avais vérifié plusieurs fois, mais quand même ! J’avais pris soin d’ajouter quelques broches à motif floral sur mon haut, ne serait-ce pour rappeler un minimum mon thème.

Puis, vint mon tour. Je pris une grande respiration, avant de m’avancer face à tout ce monde. Mon thème était le printemps. Ce n’étais sans doute pas … la chose la plus originale du monde, mais les plantes avaient toujours eu beaucoup d’importance à mes yeux. Le printemps, c’était la renaissance de la nature, et même … la renaissance tout courte. C’était un peu ce que je ressentait depuis que j’étais à Lumiris, et mon premier concours … était un peu l’accomplissement de cette renaissance.


♫ Musique ♫

Comme prévu, la musique se lança juste après que j’ai posé Grain-Grain au sol. Le Tournegrin paraissais bien plus détendu que moi. Je lui faisais confiance, on avait répété après tout. Et même si je n’étais pas habitué à la danse, j’allais faire de mon mieux.

Je me recroquevillais un peu, puis, peu à peu, me redresser pour tendre une main vers le soleil, la lumière éclatante du jour. Comme un bourgeon se réveillant après l’hiver. C’était … comme ça que je l’interprétait, en tout cas.
Ensuite, un petit tour, doucement. Je restait dans la lenteur. Mon Tournegrin, comme prévu, fit un tour dans l’autre sens. Lentement, il relâchais un peu d’énergie, comme une attaque Vol-Vie utilisée sans cible précise, alors que je tournais doucement sur moi-même. Quelques petits orbes lumineux, verts, montaient un peu, partant du Pokémon pour s’élever et s’éteindre peu à peu dans les airs. Ce n’était pas un Pokémon puissant, alors, je ne risquais rien. Je lui faisais confiance.  Les orbes verts m’éclairaient, de plus en plus nombreux, comme une nuée de lucioles.

Je me baissais, m’agenouillant au sol. Je fermais les yeux, reprenant mon souffle tout doucement. Je devais me détendre. Tout ce qui comptais, c’était moi et mon Pokémon.
Doucement, synchronisée, je levais les mains, gardant les bras arqués. Derrière moi, Grain-Grain faisait monter, avec lenteur, quelques racines, alors que les lumières flottantes s’éteignaient. Ça aussi, ça venait d’une de ses capacités. Mais ces racines ne le reliais pas vraiment au sol. C’était purement décoratif.  Néanmoins, je savais que la petite graine était entrain d’accumuler de la lumière, tout doucement. Elle ne connaissais pas Lance-Soleil, mais c’était tout de même un futur Tournesol.

Grain-Grain roula pour se retrouver devant moi. La créature avait déjà commencée à émettre une douce lumière verte. Lentement, prenant mon temps, je me relevais, prenant au préalable le Tournegrin dans mes bras. Il était très lumineux, m’éclairant d’un chaleureux éclat émeraude.
Croissance. La capacité, tout comme … le processus en lui-même.
Je le levais doucement, au-dessus de moi, avant de recommencer un déplacement. A un rythme tout aussi lent, des petits tours, entrecoupés de simple pas, en cercle. Je ne pressais pas.

Et enfin, le Tournegrin s’éteignait, effaçant cet éclat verdoyant. Je le baissais, le serrant contre moi. La fin approchais. A l’image de la fin des saisons chaudes, il semblait se rendormir. Je me laissais retomber une fois de plus à genoux, en flânant. Grain-Grain fermait les yeux, et moi, je lançais une nouvelle fois une main vers le soleil éclatant, avant de la laisser retomber.
La tête basse, j’attendais enfin quelque seconde … avant de considérer cette première partie comme terminée, pour moi.
Je soufflais une dernière fois, me relevant pour ainsi faire une révérence.

Heureusement, j’avais réussi à canaliser mon stress. Je ne devais pas me laisser emporter par mon flot de sentiment, car ce n’étais pas encore fini.

Malgré moi, je tremble. Pour la énième fois, je regarde derrière moi pour apercevoir Kyo qui me donne des encouragements. Si elle a réussi à calmer mes peurs quant à cette foule qui a su me prouver qu’elle pouvait être discrète, douce, presque invisible, il reste que j’appréhende la suite de ce concours. Quelle idée, des concours, quelle idée de sa pavaner comme si on savait ce qu’on faisait. Mais Kyo a l’habitude de se pavaner, de danser, de se montrer en spectacle. En la regardant, on pourrait croire que c’est facile, même. Je veux y croire, mais moi je ne crois pas avoir l’âme d’un poète. Je me souviens de ses instructions données un peu plus tôt. C’était de prendre un gros risque, je le savais, mais elle a changé le plan d’attaque pour cette partie du concours, l’avait adapté à notre l’environnement. Tant de choses pouvaient mal aller; et si j’oubliais un mouvement que je devais faire?

Si je continuais mon chemin vers le centre du dôme, c’était parce que j’avais une certitude : que peu importe si je réussissais ou non, Kyo serait là pour moi, avec son sourire habituel. Si j’oubliais, elle serait là pour m’encourager. Et ça me donne beaucoup de force, d’y penser comme ça. Une petite prestation pour un beau sourire -oui, ça en vaut la peine.

Je l’aime, ma Kyo.

Alors une fois bien installé dans le sable, je me mets à former un grand arc, une ronde, un cercle dans le sable qui prend forme sous mes pattes. Je regarde quelque chose au milieu du cercle, quelque chose que je suis seul à voir. À fixer le vide comme ça, ma tête se fit plus calme. D’ici on ne voit pas la foule, on ne l’entend pas non plus; elle se fait calme. Je me doute que ce n’est pas un hasard si Kyo a dû choisir de se présenter en spectacle ici. Peu importe; il est temps de commencer, vraiment.

Je laisse mes griffes se frotter contre le sable, comme si j’avançais d’un pas lent, paresseux. Mais ne soyez pas dupes; le long bruit un peu métallique que vous entendez, c’est celui de mes griffes qui s’aiguisent, à frotter contre les grains de sable ainsi. Un bruit aigue qui parcours le dôme comme une plainte déchirante. Peut-être trouvez-vous le bruit inconfortable, mais moi il me donne du courage. Mon pas s’accélère d’un coup, et je me mets à courir, à bondir tout en suivant cet arc que j’ai dessiné plus tôt dans le sable. Je bondis, me cambre sur place et laisse sortir un « Zo! Zo! » bien sonore. Tout de mon langage corporel devient agressif, chose qui surement doit en choquer plus d’un dans les estrades. Après tout Kishika s’adonne plus facilement aux choses mignonnes, je crois. Peu importe; Kyo a choisi cela, et c’est cela que j’offrirai.

Continuant ma ronde, j’agresse verbalement cet ennemi imaginaire que personne d’autre ne peux voir. Juste moi, juste Kyo. Et juste comme mon étrange danse se termine, voilà que je me recule pour faire un bond prodigieux avant d’utiliser mon Vibroscur. De là où je suis, l’attaque forme un rond plus petit à l’intérieur de mon premier rond, et je suis très satisfait de la précision de mon attaque ; pas étonnant, direz-vous, puisque j’ai bien aiguisé mes griffes! Là où mon attaque a fait mouche, les pétales de Florge prennent leur envol, remplissant l’espace de leur douce danse contre la gravité.

Et moi, je ne perd pas de temps. Je m’élance à l’intérieur de ce cercle, me dresse sur mes pattes arrière et me mets à fait des confettis de ces pétales, usant de mon redoutable combo-griffe pour les hacher menu. Alors que les pétales ainsi déchirés tombent sur moi comme des paillettes, je me repose au sol, satisfait et attendant les applaudissements de la foule. Après tout j’ai été bon garçon -allez, félicitez-moi!

Une pétale vient se poser sur mon nez; et moi, j’éternue, faisant se soulever les pétales et le sable au sol près de moi.

Derrière, j’entends Kyo qui rit. Moi, je me retourne vers elle et, sans plus attendre, m’élance dans ses bras pour réclamer mes câlins. Elle me félicite, me cajole, mais ce qui me touche le plus c’est ce sourire fier dont elle se vêtit.

Un sourire rien que pour moi.

[Les attaques utilisées, dans l’ordre : Aiguisage, Tourmente, Vibroscur et Combo-Griffe.]