world away

Tu observes avec une curiosité continuelle le ticket entre tes mains. Tu l'as trouvé dans ton coffret, celui qui accueille généralement l'argent que te donne ton public. Il semblerait que quelqu'un te l'ai donné à défaut de pièces.
Tes yeux relisent, sans leur maladresse habituelle, les mots inscrits dessus. Ticket d'entrée gratuit au Safari. Tu ignores totalement ce qu'est ce safari, ni en quoi cela consiste. Le ticket indique une ville : Sunyra.
Tu hésites à t'y rendre. Ce n'est pas exactement à côté de Windoria et tu te sens toujours incertaine. Pourtant, il faut bien que tu bouges. Tu ne peux pas rester à Windoria pour toujours et ce ticket...
Peut-être que ce ticket est un Signe. Peut-être est-il là pour t'indiquer qu'il est temps de partir, et quelle est ta destination. Le Père dit qu'il faut croire aux Signes que l'on reçoit. Les ignorer pourrait avoir de terribles conséquences, et ces conséquences te terrifient bien plus que l'idée de te rendre dans un lieu inconnu.
Tu sers le ticket dans ta main, le froisse quelque peu. Lorsque tu t'en rends compte, tu tentes précipitemment de l'aplanir, d'effacer les plis. Et si ce safari n'accepte pas le ticket parce qu'il est abîmé ? Tu aurais raté le Signe ! Tu ne peux pas te le permettre.
Rassemblant l'argent que tu as pu gagner grâce à tes prestations, tu espères avoir assez pour payer le trajet menant jusqu'à Sunyra. Tu as déjà vu les véhicules qui passent par Windoria en direction des autres villes, mais tu n'as aucune idée du prix que cela peut coûter. Tu saisis le principe seulement depuis peu, déjà.
Tu tentes ta chance, à un moment où le guichet des transports est désert. Tu parviens à obtenir un billet à destination de Sunyra, mais une énorme partie de tes gains y passe. Tu devrais travailler dur une fois là-bas.
A l'intérieur du bus qui doit t'emmener - t'éloigner encore d'Exilar, réalises-tu - tu prends place aussi à l'écart que possible, les jambes ramenées contre toi sur le siège et tes maigres affaires déposées sur le siège à côté de toi. Tu ne veux pas qu'on vienne vers toi. Tu veux qu'on te laisse seule, tranquille. Rester en sécurité dans l'écart du monde.
La route est plutôt. Tu ne sais pas à quel moment cela se produit, mais tu glisses dans le sommeil. C'est une main qui secoue ton épaule qui t'en tire, et au-dessus de toi tu vois un homme penché. Ses lèvres bougent dans des mots muets que tu n'entends pas. Tu t'es figée, une vieille terreur glacée dans le ventre.
pas encore pas encore pas encore pas encore
A l'instant où il retire sa main, ton corps se délie, tu te redresses d'un bond. Tes mains attrapent des affaires et les serrent contre ta poitrine, sans que tu saches si tu les protèges ou si c'est eux qui te protègent. Tu t'éloignes, et de ton siège et de l'homme, dont la bouche toujours, obsédante et muette ne cesse de s'ouvrir et de se fermer. Tu fermes les yeux, ne veux pas la voir, le voir, les voir, et avances, t'éloignes. Tu traverses le bus jusqu'à en atteindre la porte et te jette à l'extérieur comme un animal bondit hors de sa cage.
L'air semble changer de température. Ton regard attrape un arbre au tronc large non loin. Tu t'y précipite, le contourne, te cache derrière en te laissant tomber au sol.
Ta respiration est courte, rapide. Peu à peu, ta perception s'éclaire et tu parviens doucement à reprendre pied dans une réalité où ta peur est absente. Il y a un ciel au-dessus de ta tête, de l'herbe sous tes fesses, un arbre dans ton dos. Il y a de la lumière, douce lumière, et tu es seule.
Tu as retrouvé ton calme lorsque tu oses jeter un coup d'oeil derrière l'arbre. Le bus qui t'a transporté n'est plus en vue, et l'homme encore moins.
Tu ignores qui il était ainsi que ce qu'il s'est passé, et tu ne veux pas le savoir. Tu ne veux pas y penser. Tu relègues l'épisode au fin fond de ton esprit et te redresses sur tes jambes encore un peu tremblante.
Tu prends le temps de regarder autour de toi, et remarque enfin le large portail d'entrée surmonter d'un panneau sur lequel s'inscrit le mot safari. Tu es à destination, même si tu ignores toujours le principe de ce safari.
Doucement, tu t'avances. Quelques personnes dans des tenues particulières sont postées à l'entrée, et les visiteurs que tu vois passer leur donnent des tickets. Bien, tu supposes que tu n'as qu'à faire de même. Tu vas jusqu'à une femme et tente un sourire.
❝ B-bonjour.
Elle pose ses yeux sur toi et te souris d'un sourire commercial.
❝ Bonjour mademoiselle ! Avez-vous un ticket d'entrée ? Ou désirez-vous en acheter un ?
Tu prends dans la poche de ton gilet le ticket que tes mains ont froissé et le lui tend.
❝ J'ai ça. Mais je sais pas comment ça marche. Le safari.
Tu t'empresses de préciser, parce que tu sais comment fonctionne un billet. Ce n'est pas à ce propos que tu as besoin d'explications. La femme ne se départit pas un seul instant de son sourire et attrape ton billet. Elle y jette un coup d'oeil avant de le ranger avec d'autres et en retour te tend cinq pokéballs.
Tu te retrouves ainsi avec les mains pleines de pokéballs que tu ranges maladroitements dans ton sac, tandis qu'elle te donne quelques explications.
❝ Le Safari est un lieu de capture. Il y a de nombreux pokémons sauvages qui se promènent ici et vous pouvez tenter de les capturer. Mais vous n'avez pas le droit d'utiliser d'autres pokéballs que celles que je viens de vous donner. Et quand vous n'en n'avez plus eh bien, c'est terminé. Vous avez bien un pokémon pour vous accompagner ?
❝ Oh euh, oui ! Oui, j'ai est un, attendez.
Ta main replonge dans ton sac pour en sortir une pokéball rouge. Celle que t'a confié le Père. La femme hoche la tête en signe d'approbation et te laisse avancer.
Ton sac sur une épaule et la pokéball d'Agni dans les mains, tu te retrouves devant un vaste espace dégagé et herbeux. Tu pourrais te croire seule, mais tu ne l'es pas. De nombreux petits groupes de personnes gravitent autour de toi et tu t'empresses de t'éloigner.
L'évènement précédent plane non loin et, si tu as réussis à communiquer avec la femme, parce qu'elle était une femme et qu'elle était seule à ce moment-là, tu ne veux côtoyer plus personne avant que des heures ne se soient écoulées. Quand tu te juges assez à l'écart pour te sentir à l'aise, ton pas ralentis et tes yeux tombent sur la pokéball qui est resté dans tes mains.
Tu es donc dans un lieu de capture. C'est ici que le Signe t'a guidé. Cela signifie-t-il que tu dois à tout prix repartir d'ici avec un pokémon capturé ?

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Prise dans tes pensées, à la recherche de la bonne décision à prendre, convaincue, aussi, d'être à présent seule, tu ne fais plus autant attention à ton environnement. Cela ne signifie bien entendu pas que tu pourrais te prendre un arbre dans la figure par manque d'attention. Non, tu n'es pas absorbée à ce point-là. Mais il y a certaines choses que tu ne remarques pas, même si elles peuvent se montrer évidente.
Comme ce bruit léger de pas derrière toi, qui te suit, trahi par le bruissement de quelques feuilles mortes sur le sol.
Soudain, tu t'arrêtes. Il semble que tu aies prise une décision.
Oui. Si le Signe t'a guidé ici, alors tu feras de ton mieux pour t'y plier.
Tout aussi soudainement, quelque chose percute ton dos et tu pousses un cri de surprise. D'un saut, tu te propulses en avant dans un réflexe pour t'éloigner de ce qui t'a touché, quoi que cela soit.
Dans le mouvement, la pokéball que tu avais en main à libérer le pokémon qu'elle contenait. Agni se retrouve donc devant toi, légèrement tremblant et à peu près aussi perdu que toi.
Ton regard cherche frénétiquement ce qui a bien pu te percuter, jusqu'à ce que tu discernes une épaisse boule de poils blancs dissimulé (plus ou moins bien) derrière un rocher. Un pokémon. Tu as été percutée par un pokémon.
Un soupire de soulagement passe tes lèvres et tu te laisses tomber au sol. C'est la deuxième frayeur que tu subis aujourd'hui. Tu as l'impression que c'est trop. Cela fait longtemps que tu n'as ressentit ça, de façon aussi intense et en si peu de temps.
Agni se rapproche timidement de toi, incertain quand à la marche à suivre. Il est ton pokémon. Il n'est pas très fort, c'est vrai, mais il est censé te protéger. Alors que faire ? Doit-il attaquer le Moumouton caché un peu plus loin ? Ou rester près de toi ? Il ne sait pas.
Et toi non plus à vrai dire.
Tu regardes le Rozbouton sans savoir quoi faire de lui. Enfin, il pourrait t'aider, peut-être ? Avec cette histoire de safari.
Tu lèves ton visage vers le pokémon sauvage. Vos regards se croisent l'espace d'une seconde, et soudain tu le vois s'enfuir plus loin encore.
Tu ne comprends pas.
Tu ne comprends vraiment pas. De moins en moins.

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Ton regard reste un instant fixé sur le point où vient de disparaitre le pokémon, puis se pose sur le Rozbouton debout devant toi. Il te regarde, sans que tu puisses identifier ce qu'il ressent.
Tu soupires. Puis inspires profondemment. Tu vas t'en sortir, de ce safari. Tu as seulement besoin de calmer ton coeur et de mettre de côté les actions étranges du pokémon sauvage. Une fois cela fait...
Tu te secoues un bon coup et te relèves. Tu ne vas pas certaiement pas rester plantée là pendant des heures. Tu dois avancer et agir. Fouillant dans ton sac à dos, tu en retires l'une des safariball qui t'ont été données à l'entrée. C'est ton meilleur atout pour le moment.
Tu regardes Agni.
Ton meilleur atout avec ton Rozbouton.
Au moment où tu t'apprètes à repartir en quête d'un pokémon, tu sens quelque chose, près de toi. Ca te frôle. Tu te raidis. Puis ça s'efface. Tu ne te détends pas pour autant. Tu regardes avec prudence autour de toi, mais il n'y a rien.
❝ Tu. Tu as vu ce que c'était ?
Tu t'adresses à ton pokémon, mais à part te suivre de près en tremblant il n'y a pas grand chose qu'il puisse faire pour toi pour l'instant. Et s'il a vu quelque chose, il est probablement encore plus terrifié que toi.
Tu te remets en route, et à nouveau quelque chose te frôle. Instinctivement, tu te retournes et sans réfléchir davantage tu jetes la pokéball que tu avais dans la main. Dans le même temps, la présence disparait.
Il semble que c'était un pokémon.

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La safariball s'est refermée sur un pokémon. Ce n'était pas exactement prévu, tu as réagis par instinct. Tu observes avec une espèce de surprise incrédule la pokeball s'agiter doucement. C'est la première fois que tu assistes à ce genre de phénomène. Jusqu'à présent, tous les pokémons que tu avais pu rencontrer avaient déjà été capturés. Et tu n'avais jamais assisté à une capture.
C'est la première fois, et c'est de ton fait. Certes, involontaire, mais c'est ta capture. Alors tu te prends à observer le balancement de la pokéball avec une sorte d'impatience trépignante, bien que tu ignores totalement quel pokémon il y a à l'intérieur.
Au bout de deux secousses cependant, la pokéball s'ouvre et le pokémon inconnu s'en échappe. C'est un échec.
Tu découvres ainsi un pokémon volant, d'une petite cinquantaine de centimètres et de couleur verte. Sa... Queue ? Est ornée de piques et sa tête triangulaire est ornée de deux grands yeux jaunes pâles qui t'observent.
La safariball git au sol, inutilisable. Tu n'as pas réussis ta capture. Cependant, il reste encore quatre safariballs dans ton sac, et le pokémon devant toi est clairement celui que le Signe veut que tu captures.
Le Signe t'a guidé jusqu'au safari et t'a fais jeter ta première pokeball sur lui. Aussi, une détermination monte en toi de le capturer, quand bien même tu ignores totalement à quelle espèce il appartient.
Alors tu t'empresses de prendre une autre pokeball dans ton sac et de l'envoyer sur le pokemon, en priant pour réussir.

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Le pokémon inconnu disparait à l'intérieur de la safariball, qui tombe ensuite au sol et commence à se balancer. Une fois. Deux fois. Trois fois.
Puis elle s'immobilise et plus rien ne se passe durant quelques secondes. Tu attends, immobile et attentive, mais non. Rien. Alors ta voix éclate d'une joie enfantine et tu te précipites sur la pokeball pour la récupérer.
❝ J'ai réussi... J'ai réussi. J'ai réussi !!
Un sourire immense dévore ton visage. L'enthousiasme, la joie et l'excitation balaient tous les autres sentiments comme un raz de marée et font briller tes yeux d'une lueure rare. Emportée, tes mains fragiles attrapent Agni et le serrent contre ta poitrine.
❝ J'ai réussi Agni ! J'ai capturé un pokémon par moi-même ! J'ai suivis le Signe et ça a fonctionné ! Le Père serait fier de moi. Oh, tu crois qu'il le serait ?
Le doute plane, au loin. Mais il le serait sans doute. Le Père est toujours fier et heureux quand tu parviens à faire quelque chose de nouveau par toi-même. Et avant ton départ, il t'a indiqué qu'une équipe complète de pokémons pourrait t'être utile.
Bien que tu ne sois pas certaine d'en quoi consiste exactement une équipe complète, tu es prête à faire de ton mieux pour suivre ce conseil.
Pressé contre tes seins, Agni couine de façon adorable bien que tu n'es aucune idée de la signification de ce son. Tu l'éloignes légèrement et le calle dans un de tes bras. De ta main libre, tu brandis la safariball qui contient le pokémon mystère.
❝ Je me demande ce que c'est... Voyons voir.
Ton doigt appuie sur le bouton d'ouverture de la pokeball, et le pokémon surprise apparait dans une lueur rouge.
Tu n'as aucune idée de ce qu'il est, de son espèce, de son type, de son sexe.
Il ouvre la bouche et émet un son qui te rappelle un grincement, avant de venir se blottir contre ton cou. Apparemment, il t'apprécie déjà. Ca te rassure quelque peu. Qu'aurais-tu fais avec un pokémon qui ne voulait pas de toi ? Tu ne sais pas.
A l'apparition de ce pokémon, Agni s'est collé contre toi, cachant son visage contre le tissu de ta veste. Même si tu as du mal à comprendre ce qu'il peut ressentir ou exprimer, tu as au moins compris qu'il était un pokémon timide. Très timide. Au moins ne l'est-il pas (ou plus) avec toi, et tu ne peux qu'espère qu'il surmontera cette timide en présence de tes autres pokémons, présents et futurs.
Puisque ton nouveau compagnon semble décidé à rester coller à toi, tu le laisses libre tandis que tu déambules dans le safari. Tu as fais un long chemin pour venir ici, alors autant en profiter. Ta promenade dure une paire d'heures, et tu croises plusieurs pokémons que tu ne connais absolument pas. C'est à la fois fascinant et un peu effrayant.
Au bout d'un moment, tu finis par fatiguer cependant, et tu n'es pas la seule. Ton nouveau pokémon s'est endormi sur tes épaules et commence à peser lourd. Il est temps pour toi de faire demi-tour et de quitter le safari. Il faut aussi que tu penses à te rendre dans un cente pokémon, pour te renseigner sur ton nouveau compagnon.
Tu ne peux pas rester ignorante à son sujet trop longtemps.