Fier de m'avoir fait vivre une magnifique aventure lors de l'exploration de l'épave, Rouchon n'avait de cesse de se vanter d'être un bien meilleur danseur en plus d'être un bien meilleur nageur que moi. En même temps avec une bouée autour du cou, des nageoires et des hélices caudales, c'était tout de suite plus simple ! J'aurais pu le surnommer "Fanfaron" tiens... Enfin, il fallait tout de même admettre qu'il avait en partie raison : il était largement temps pour moi de faire un petit peu d'exercices si je ne voulais pas finir complètement largué ! En effet, je n'avais que trop peu recommencé à nager et je commençais à perdre la bonne habitude d'aller faire trempette tout les matins. Pourtant, ici à Sunyra, la mer n'était pas bien loin et je n'avais besoin que d'un peu de motivation pour reprendre une pratique assidue de la natation.

À vrai dire, c'était en me baignant que j'avais rencontré mon meilleur ami et grâce à cela que j'avais pris la plus grande décision de ma jeune vie : quitter Sinnoh pour rejoindre l'île de Lumiris et vivre une vie pleines d'aventures passionnantes. Cet été-là, j'allais chaque jour barboter sur la plage au lever du soleil, déserte à une heure aussi matinale. C'était sous ce soleil rosé que j'avais pris le temps d'apprivoiser un magnifique Mustébouée aux moustaches joyeuses et à l'oeil vif. Nous avions passé de bien longues heures à nager le long du littoral et cette petite tradition me manquait.

Une fois arrivé à Lumiris, j'avais malheureusement été rattrapé par la réalité : moi qui espérait pouvoir courir à travers monts et vallées aux côtés de Rouchon chaque jour, sans nous soucier du lendemain, je découvris que la nourriture, le matériel et tout ce dont nous avions besoin au quotidien ne poussait pas sur les arbres et que les petits boulots que j'effectuais pour gagner ma vie prenaient une large partie de mon temps et de mon énergie.

Je ne regrettais pas mon choix bien sûr, j'étais heureux de pouvoir vagabonder, changer de métier autant que je le souhaitais et me débrouiller au quotidien mais cependant, je ne pouvais nier qu'au fil des semaines, mon objectif initial se faisait de plus en plus discret dans la routine que je vivais depuis quelques mois. Le jour où Rouchon m'avait emmené voir cette épave, que nous l'avions exploré avec Nephele, j'avais retrouvé un plaisir qui me manquait : la sensation grisante de l'eau qui m'englobe, la joie de découvrir, la bonheur de rencontrer un nouveau pokémon et de danser avec lui... Tout cela nourrissait mon envie d'entreprendre un nouveau voyage.

Il était grand temps de remettre le matériel de plongée de seconde main que j'avais acheté pour l'occasion...

« Rouchon, il est temps de reprendre l'entraînement ! »

Le lendemain, dès l'aube, alors que les pêcheurs larguaient les amarres en emportant leurs filets, à l'heure où les allées n'étaient pas encore pleines de brouhaha ni de monde et que la lumière du phare déchirait la brume du matin, deux jeunes amis étaient assis au bout de l'un des pontons. J'avais enfilé mon maillot, mes palmes, mon masque et mes lunettes et Rouchon lui ... Et bien il s'était contenté de venir, la nature est parfois injuste. Nous étions prêt à commencer notre grande carrière d'explorateurs de fonds marins.

Toutefois, il fallait y aller étape par étape. Quand j'étais petit, les plus belles aventures que j'avais pu vivre étaient au fond du jardin, à la rigueur, de l'autre côté du sentier. Je ne voulais pas me précipiter et d'abord reprendre de bons automatismes, autant en natation qu'en plongée. C'est pour cela que notre première séance d'exercice était ici, à quelques pas de la maison et proche des quais...

«Il arrive que des marchandises échappent aux mains des matelots ou des dockers et filent vers le fond de l'eau... Le but du jeu, c'est de ramener chacun quelque chose d'en bas pour l''offrir à l'autre !»

Deux ploufs se suivirent rapidement, nous nous enfoncions dans l'eau fraîche et, après quelques minutes pour s'habituer à la température de l'eau et nous dégourdir les pattes, nous étions prêts à commencer la partie.

« Prêt ? Trois ... deux ... un ... »

Grande inspiration, fermer les yeux et ...

« GO ! »

Que pouvait bien cacher l'eau stagnant dans le petit port de Sunyra ? C'est ce que nous allions découvrir ...

Chacun de son côté, la recherche n'était pas simple ! Entre les petits habitants de la mer qui se reposaient sur les bancs de sables, les ombres des bateaux passant au dessus de nous et qui causaient des remous, ce n'était pas simple d'inspecter le fond de l'eau ! Rouchon était parti chercher vers un coin probablement plus intéressant que le mien qui ne semblait rempli que de caisses moisies, des bouts de verre et tout un tas de vieux déchets lâchés par des gros ... grotichons pour rester poli !

Quelle tristesse de détruire l'habitat naturel d'autant de jolis pokémons ; c'était bien plus triste que je ne l'aurais espérer. Enfin au moins, je savais que l'endroit n'était pas la mine d'or que j'espérais mais avec un peu de chance, je pensais qu'il était toujours possible de finir par tomber sur une pépite.

Entre les bruits des bateaux, de l'eau et des quelques créatures marines, j'avais pourtant décelé un son, un que je ne pouvais pas manquer. C'était Rouchon, il avait un problème ! Mon cœur s'emballait dans ma poitrine tandis que, aussi vite que mes bras et mes jambes me le permettaient, je me précipitai en direction de son cri d'alerte.

Si les Pokémons qui résidaient ici s'étaient montrés plutôt fuyant ou pacifiste, ça n'étais pas le cas de ce Crustabri au regard mauvais qui s'attaquait à la pauvre patte de mon ami. Ce dernier, pris de panique se débattait et agitait ses membres dans tous les sens en espérant le décrocher sans grand succès. Je n'étais pas vraiment plus rassuré, comment pouvais-je le protéger face à une énorme coquille affamée ?

Tout aussi démuni que lui, je restais un moment immobile face à la situation, incapable de prendre une décision. Je ne pouvais même pas lui dire quoi que ce soit, j'étais simplement là, à être témoin de l'agression et de la détresse de mon ami. Je voulais l'aider, je voulais faire quelque chose pour lui alors je nageais encore quelques mètres, pour arriver au plus proche de lui.

Je donnais quelques petits coups sur la coque de Crustabri mais sans grand succès, je tirais légèrement sur lui mais le couinement qui s'ensuivit m'indiquait que c'était encore une autre mauvaise idée. Je ne voyais plus qu'une chose à faire, aider Rouchon à se calmer pour remonter à la surface et l'amener après de quelqu'un qui pourrait nous aider à décrocher le parasite de sa patte.

Alors que je passais un bras autour de lui, je le vis lever le museau vers moi. Il venait enfin de lâcher son attention sur la situation qui l'effrayait pour partager un instant de regard avec moi, légèrement plus calme. Reprenant ses esprits, il secoua la tête et, une expression déterminée s'afficha sur son museau : il n'allait pas se laisser faire par un invertébré, aussi vilain soit-il !

Ses deux queues cessèrent de tourner comme des hélices et la fourrure rousse pris, à cet endroit, un éclat lumineux intensément blanc. C'était la première fois que je le voyais faire cela : c'était à la fois impressionnant et pourtant un peu inquiétant. Les pokémons avaient des facultés surnaturelles mais je n'avais jamais pris le temps de chercher à enseigner des attaques à Rouchon. Je n'avais aucune idée du plan qu'il avait en tête mais je le soutenais, l'encourageant autant que le contact entre nous me le permettait, sans même imaginer une seconde que je pouvais me transformer en dégât collatéral si sa manœuvre était réellement destructrice !

Les deux appendices caudaux battirent alors à grande vitesse dans l'eau, en direction de l'agresseur de Mustébouée, et laissèrent échapper deux bruits cinglants, courts mais intenses et qui firent apparaître deux ondes sonores se propageant sous l'eau et fonçant droit sur la coque de Crustabri. Avec le flou de l'eau et les remous causés par l'attaque, je ne parvenais plus à distinguer si le coquillage avait enfin lâché sa prise mais je l'espérais sincèrement !

Le temps se figea, le temps que les vaguelettes subaquatiques se dissipent et que nous puissions constater que le vilain coquillage avait lâché la patte de mon meilleur ami pour se refermer sur lui-même et se laisser tomber jusqu'au fond de l'eau, s'enlisant dans la vase pour se protéger, craignant la puissance d'un magnifique mustélidé au pelage fauve !

Toutefois, le pauvre chou était toujours blessé, un filet de sang se répandait même autour de nous. Il était largement temps de remonter à la surface, l'entraînement était fini pour aujourd'hui et Rouchon avait bien mérité une grosse séance de câlins une fois de retour sur la terre ferme. À vrai dire, il était toujours dans mes bras et, gonflant la bouée autour de son cou, il nous amena hors de l'eau, blottit dans mes bras et la tête sur mon épaule. Il y avait eu plus de peur que de mal mais c'était la première fois que nous nous étions retrouvé dans ce genre de situation... Courage Rouroux, on allait vite être de retour de à la maison !

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'Chromatique' :

« Tout va bien aller Rouchon, n'aies pas peur, je suis là. »

Maintenant que nous avons littéralement sorti la tête de l'eau, je peux lui adresser ces mots rassurants à l'oreille. Il a les yeux fermés, contre moi, mais je peux sentir qu'il est encore tout crispé, il lui faudra un moment avant de se détendre... Tandis que je le caresse du bout du doigt sur l'arrête du museau, j'aperçois une petite tâche rose se ruer sur nous.

Très rapidement, ce tout petit pokémon se met à tournoyer autour de nous, comme s'il voulait attirer mon attention et, il fois qu'il s'arrête, je reconnais sa forme de coeur. Lovdisc est bien connu de tout un chacun, il est un signe heureux qui me fait sourire. Je n'avais peut-être pas pu amener de cadeau à Rouchon, mais j'avais été là pour lui quand il en a eu besoin et je savais qu'il serait là pour moi le jour où j'en aurais besoin.

Comme pour encourager Mustébouée à se sentir mieux, le poisson rose se colla presque à la patte orangée et, d'un mouvement de nageoire transforma l'eau autour de cette dernière en un cercle turquoise qui entourait la plaie. Cette dernière avait cessé de saigner et je senti que la peur de Rouchon retombait petit à petit.

Lovdisc quant à lui, continuait de me regarder avec ses yeux noirs, ouvrant et fermant sa bouche alors qu'il maintenait un faible mouvement de nageoire pour simplement faire du surplace. Avec une si petite taille, ce bébé devait probablement avoir du mal à lutter contre un courant, même s'il était faible.

Il me fallu un moment avant d'interagir avec lui tant j'étais surpris de faire la rencontre d'un pokémon aussi peu farouche, d'habitude, les pokémons sauvages, même curieux, ne se montraient pas aussi calmes devant des dresseurs inconnus. Toutefois, si je devais croire ce que l'on racontait au sujet du poisson-coeur, c'était là un événement bien plus rare et plus beau que toutes les babioles que nous aurions pu trouver échouées dans le sable.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, Rouchon les écarquilla rapidement : lui avait grandit aux côtés de la faune marine et ce rare évènement le touchait encore plus. Il fit quelques bulles sous l'eau, en direction du bébé qui nous observait toujours, avant de venir me taquiner du bout du museau. Après quelques petits coups, je sentis qu'il cherchait un objet dans ma poche...

Je caressais sa tête avec un grand sourire : mon ami était du même avis que moi. Je pris l'une des balls que j'avais emmené avec moi pour l'ouvrir à ce signe du destin. Nous étions prêts à accueillir un nouvel ami dans notre équipe...

Ambroise a écrit:

Tentative de capture !

Le petit poisson avait eu peur de me voir m'approcher de lui avec ce drôle d'objet. Il est vrai que pour un pokémon complètement sauvage et aussi jeune, cela pouvait être surprenant, même si mon but n'était en aucun cas de lui causer la moindre frayeur. Heureusement, il ne s'en était pas allé trop loin et il était bien vite revenu en frétillant ses fines nageoires. Pour l'amadouer un peu plus, je tendis ma main vers lui, lui laissant le temps de venir s'habituer un peu à ma présence et de prendre le temps dont il avait besoin pour s'approcher et venir découvrir la mystérieuse pokéball.

« Tu as envie de nager avec nous petit Lovdisc ? Je t'aurais bien donner à manger mais je n'ai rien avec moi. »

En effet, j'avais prévu que nous prenions une glace sur le port une fois sortis de l'eau et n'avais pas emporté de nourriture ni pour moi, ni pour pokémon. Peut-être que cela aurait pu aider ce petit bonhomme à venir avec nous...

Une fois qu'il semblait plus à l'aise, ce qui n'est pas simple à voir sur le visage d'un poisson tout plat, je décidais de lui présenter à nouveau la ball : me faisait-il confiance pour embarquer avec nous dans une grande aventure ?

Ambroise a écrit:

Seconde tentative de capture !

Intrigué plus qu’apeuré, le Lovdisc fit quelques cercles autour de la pokéball et de mon poignet. Il observait l’objet sous tous ses angles et, alors qu’il s’apprêtait à rentrer en son sein, Rouchon et moi fûmes témoins d’un spectacle absolument ébahissant ; à couper le souffle. Nous qui avions les yeux rivés sur le bébé rose, nous nous laissâmes surprendre par un évènement à la fois rare et magnifique : si le Lovdisc que nous avions vu était caché derrière une petite caisse en bois, je n’ai encore aujourd’hui aucune idée du lieu où s’étaient cachés tous ses petits congénères. Tout un banc de cœurs et d’amour se fraya un chemin à travers l'écume jusqu’à nous, l’eau grisâtre passant au rose le temps d’un éclair. Notre tout jeune ami fut bien vite entouré de ses deux parents et du reste de sa famille qui l’emmenèrent avec lui.

En quelques secondes, le calme revint et la marée rose bonbon laissa place à l’eau stagnante du port. Le petit Lovdisc n’avait pas besoin de nous, il devait encore grandir auprès de ses parents. Quand il serait grand, il allait sûrement rencontrer un autre duo avec un lien fort, aussi fort que celui que Rouchon et moi avions tissé. Nous avions conscience de la chance que nous eûmes ce jour-là : les Lovsdics nageaient derrière ceux qui partageaient un amour sincère et véritable ; en voir autant dans une situation de détresse était là un cadeau bien plus beau que tout ceux que nous aurions pu faire. Un feu d’artifice sous-marin qui nous avait laissé des étoiles plein les yeux.

La patte de Rouchon lui faisait encore mal mais il ne s’en souciait plus vraiment : la douleur allait vite passer, alors que ce souvenir lui, était indélébile. De retour sur le ponton, nous jetâmes un dernier regard à l’horizon avant de repartir vers la maison. La journée, tout comme notre aventure ne faisait que commencer.

« Ça te dit qu’on fasse des pancakes Rouchon ? En forme de cœur et avec de la confiture de baies, ce sera joli… »

Le cri enjoué qui s’échappa de la bouche de mon ami gourmand et gourmet me fit sourire : les pirates allaient fêter leur victoire…