Janvier 2021

C’est le début de l’année. Enroulée dans un gros pull, une écharpe, un grand manteau, des bas élastiques aussi confortables que c’est possible, le vent frais s’engouffrant dans les interstices que mon gros ventre crée, je me tiens sur le bord du chenal. Au loin, je regarde ma Crustabri jouait avec mon Lamantine. Il fait meilleur ici qu’à l’arène.

Je me suis encore disputée avec Leonard. C’est débile comme dispute. Et encore sur le même sujet. Comment on va appeler notre enfant ? Je ne sais pas. Et je ne veux pas écouter ses propositions plus absurdes les unes que les autres. Je ne veux pas choisir. Et si ça ne lui plait pas ? Et s’il ne le porte pas bien ? Et si les autres se moquent de lui ? Si on choisit mal ? C’est quoi la dernière trouvaille de Leonard ? Ange.

Ange ! C’est un prénom qui veut dire quelque chose. C’est horrible ? Et s’il est méchant ? Ou s’il veut être un peu méchant ? Il sera obligé d’être toujours gentil et niais. Comme son père. Et puis, On doit l’appeler comment ? Sextant ou Alambra ? J’ai rien compris à ce sujet. Qu’est-ce que ça change ? Et comment ça marche ? Comment on choisit ?

Et puis, il est toujours là, à m’aider. Je ne peux jamais rien faire toute seule, sans qu’il apparaisse pour m’aider. Et le pire, c’est que je ne peux vraiment rien faire seul. Parfois, même me lever seule est impossible. Dormir est compliqué, m’assoir est compliqué. Tout est compliqué. Même faire un câlin. Jamais je n’aurai cru que la chaleur humaine et surtout celle de Leonard me manquerait tant. Pire encore le fait qu’il soit là.

Je n’ai jamais rien à faire. Je m’ennuie. J’ai pu accueillir quelques défis dans mon arène, aller affronter, si on peut parler d’affrontement, Hayato. Une bonne chose, c’est que mon niveau de lecture s’améliore grandement. J’ai enfin fini le Petit Prince et je l’ai relu une fois pour bien le comprendre. Je peux enfin me lire les contes de Suicune, même si je préfère quand c’est Leonard qui me les lit, bien que je ne lui ai jamais dit.

HRP : Apparition svp avec encens poison.

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'Chromatique' :

La voix de Leonard me tire de ma contemplation. Je le regarde s’approcher. Je savais qu’il allait me retrouver, mais je ne pensais pas qu’il allait le faire si tôt. Il me retrouve toujours. Je ne sais pas comment il fait, mais il arrive toujours à me trouver, où que je me cache.

Et il s’excuse toujours. Il est toujours le premier à le faire ou presque et bien souvent le seul. Je me suis déjà excusée, parfois, peut-être une ou deux fois, avant qu’il ne le fasse. Un peu plus souvent après lui aussi. Mais c’est assez rare. Je n’ai pas grandi comme ça. Ce qui est fait et fait et s’excuser ne répare pas la faute. Je n’ai jamais compris à quoi ça servait. Peut-être parce que j’ai vécu seule, tout le temps, et que les sentiments des autres m’importent peu. Ce qui n’est pas le cas de Leonard.

Est-ce que je vais mieux ? Bien sûr que non. Pour m’enfuir, il m’a fallu un temps énorme, rien que pour quitter la maison. Pour venir ici, ça a été la croix et la bannière, alors qu’avant, ça m’aurait pris deux fois moins de temps rien qu’en marchant, et j’aurai certainement couru, ou fait du roller. Peut-être même je l’aurai fait en volant. J’ai mal au dos, j’ai mal au ventre, à la poitrine, aux jambes. Je dors mal et mes cheveux sont trop longs.

Je l’enlace sans dire un mot. C’est tellement compliqué. Tout est compliqué. Je me demande si ce n’était pas plus simple sans Leonard. Mais je n’arrive pas à me rappeler. Tout ce que je sais, c’est que j’étais seule, que je mangeais n’importe quoi, même chez Yokoss, que ma vie était toujours la même, dangereuse et violente. Maintenant, il n’y a rien d’identique. Même la ligue m’a félicitée pour mon nouveau comportement.

J’ai peur de me ramollir, et en même temps, est-ce que m’adoucir serait me ramollir ?

Mes bras essayent de l’entourer, mais je suis gênée, obligée de me tordre pour me coller à lui.

Je suis fatiguée. Je veux juste que ça cesse. Je ne fais rien et je suis épuisée. Il y a de l’agitation tout le temps, ou alors trop de calme.

J'ai l'impression que quelque chose est cassé entre nous. Ça me revient à chaque fois qu'il me prend dans ses bras. Il semble plus distant, moins pressant. Lui qui me collait avant et moi qui le repoussais, c'est comme si les rôles s'étaient inversés et je ne comprends pas pourquoi. Je ne suis pas en sucre.

Avec ce qu'il dit, je me demande si c'est en rapport. Il ne comprend pas et ne peut pas comprendre ce que je vis et ça doit le perturber. Lui qui veut tout savoir, tout comprendre, tout faire.

Lorsqu'il me repousse ça me fend un peu le cœur. C'est moi qui repousse d'habitude, c'est moi la fille distante. Maintenant, c'est lui. J'ai peur de devenir une larve, molle et craintive. Je suis une guerrière. Je ne veux pas être lâche à cause de l'enfant. Je lui en voudrai et sa vie comme la mienne deviendront des enfers.

Mais il me couvre, chose qui m'énerve au plus au point parce que je n'ai pas froid et pas besoin d'être maternée comme ça. J'ai déjà besoin d'aide dans bien assez de domaine. Mais il en profite pour m'enlacer par derrière et je me laisse aller contre lui. Cette étreinte est agréable et il m'a fallu du temps avant de l'apprécier. Personne ne touche mon dos, personne ne s'approche de moi par derrière. Sauf Leonard maintenant. Pas tout le temps, mais parfois.

Je me retourne brusquement. L'heure de la dispute est passée, mais je dois tout de même réagir. Il ne gagnera pas. Je lui donne un coup de poing dans l'épaule et le regarde en fronçant les sourcils.

Tu vas arrêter avec ça ! C'est un prénom débile. Ange. Personne ne s'appelle Ange et personne ne s'appelle Démon non plus. Alors c'est non. Fais-toi à l'idée. Et c'est mon bébé, c'est moi qui choisis le nom.

Ce sujet aussi ne lui plait pas. Mais Leonard est plus doux que moi, alors on ne se dispute pas sur ça. Et là, il sait bien que je me moque car un léger sourire fait vibrer mes lèvres sous mes sourcils froncés.

Je ne sais pas ce que je suis venue faire ici. Je suis allé loin, très vite. Ce qui veut dire lentement. L'eau c'est calme et ici par ce temps personne ne vient.

HRP : Capture du Tentacool please.

Evidemment que tu es venu par ce temps. Tu viendrais me voir par n’importe quel temps et surtout où que je sois. Je ne sais pas comment il fait, mais il y arrive toujours. A être là. Peut-être parce que c’est un idiot. Est-ce qu’il viendrait me retrouver au milieu d’une tempête ? Je ne veux pas le savoir. Je ne veux pas qu’il essaye, parce que si c’était le cas je suis sûre qu’il essayerait.

Cette réflexion me fait comprendre quelque chose. Et si ce qui m’attirait chez Leonard c’était une certitude. La certitude que Leonard sera toujours là. Je n’y ai jamais cru consciemment, car j’ai toujours été abandonnée par les autres, par les peu que je connais. Mais pas Leonard, quelque chose en lui, dans son regard, dans son sourire, dans sa façon d’être m’a fait comprendre que jamais il ne m’abandonnera. Je ne sais pas ce qu’il me trouve, mais je suis heureuse qu’il l’a trouvé.

Oui, je suis heureuse. C’est ça le cœur du problème. Je suis heureuse et maintenant j’ai peur que ça change et de tout perdre. C’est injuste. Et si le bébé changeait tout ? Et si c’était moi qui rendais tout le monde malheureux ?

Je hoche la tête à la suggestion de la voix dans mon dos. Je n’ai pas froid. Mais j’ai appris à apprécier ces moments de calme, après nos disputes. Je ne dis rien sur sa mièvrerie. Partager nos chaleurs humaines. Je n’ai toujours pas compris ce que ça voulait dire.

Nous nous installons sur un banc un peu plus loin. Je m’assois avec précaution sur le banc. J’ai déjà eu la mauvaise, les mauvaises expériences de me laisser tomber sur une chaise et de la faire basculer en arrière, manquant de tomber ou me faire mal au dos en me cognant à un dossier. Une de mes chaises s’est mêmes cassée. Elle était vieille et en mauvais état, mais ça fait mal. Et de toute façon, si je vais trop vite je me fais mal aux fesses.

Collée à Leonard je regarde l’eau de chenal.

Est-ce que tu sais où tu veux qu’on habite ? Je veux dire… quand on aura le bébé ?

C’est un sujet qu’on a évite jusqu’à présent. Moi dans l’arène de Glace, forcément, c’est compliqué. Mais je peux aussi bouger mon arène, ou en changer. Mais est-ce que c’est ce que je veux ? Et que fera Leonard ? il ne restera pas à la maison ou juste dans un boulot stupide tout le temps. Moi non plus. On va parcourir le monde. Mais avec le bébé, ça sera compliqué non ?

Je ne sais pas.

HRP : une capture svp (2ème tentative)

Evidemment qu'il a déjà une idée. C'est Leonard. Si j'ai posé la question, c'est bien parce que je sais qu'il a des idées. Mais je ne sais pas à quoi je m'attendais. Peut-être que je voulais des idées fantasques, absurdes, faisant appel à l'imagination débordante de Leonard, une imagination dont je suis profondément dépourvue. Avec des trucs comme des châteaux, des voitures volantes, des tentes et dans un lieu improbable. Ce genre de choses qui m'aurait poussé un profond soupir et le traiter d'idiot. Alors est-ce que je veux un truc sérieux ? Quelque chose qui me rassure, de réel, qui plaira à Leonard, quelque chose qu'il m'apprendra à apprécier.

Il m'offre la deuxième solution. Evidemment, il ne sait pas si elle va me plaire. Et d'instinct, elle ne va pas me plaire. C'est son idée. Il faut que je dise non avant de dire oui, car sinon, il risque de croire que toutes ses idées sont bonnes.

Mais je l'écoute. Une grand maison, c'est moins bien qu'un château, mais c'est plus confortable. Quand je vois la maison de ses parents ou celle de Yokoss, les seules maisons que je connaisse. J'aime bien mon petit chez moi derrière l'arène, mais dès que nous sommes deux humains, on y est à l'étroit et dès qu'il y a plus de deux Pokémons de petite taille, c'est le bazar. Et une maison de la taille d'un château comme mon arène, ce serait trop grand, je m'y perdrai. Alors oui, une maison. Une belle maison.

Avec une forêt, oui, plein de forêt, avec des Pokémons. Ce ne sera pas mon arène, pas ma forêt de givre, mais pour Vulca ce sera mieux. Et puis il y aura Leonard et d'autres Pokémons. Peut-être un lac, avec une petite cabane, cachée, pour observer les Pokémons et peut-être Suicune qui viendra inspecter le lac.

Je l'écoute, et imagine dans mon esprit, l'endroit. Comme mon arène mais avec du vert, une maison plutôt qu'un palais de glace, un lac à la place des bois de glace. Une aile avec le laboratoire de Leonard, et un endroit pour que les Pokémons sauvages puissent s'abriter. Un abri pour eux. Pas une pension, pas un refuge pour leur trouver une maison. Juste un lieu pour récupérer. Un havre de paix.

Je ne me rends pas compte que c'est ce que je cherche aussi. Un havre de paix. Et pourtant, je l'ai créé à Windoria. Cet havre, que j'ai gardé, l'arme à la main. Maintenant, je cherche aussi la paix pour moi, plus pour les autres.

Ce sera bien. Dis-je d'un souffle. Oublier ma résolution de refuser tout avant de réfléchir. On pourrait même la construire nous-même. Je ne sais pas construire de maison, sauf en Glace, mais tu sais certainement. Et ce sera ma maison.

J'ai dit MA sans m'en rendre compte. Mais mon cerveau tourne lentement, je n'ai jamais été très rapide à comprendre les choses, mais j'y arrive. Ce qui est beau dans cette maison est que je n'y serai pas seule. Ce sera notre maison. La première chose que je construis avec quelqu'un d'autre.

Solitaire depuis toujours, j'ai toujours tout bâti seule ou avec mes Pokémons. Il n'y a eu aucun projet que j'ai fait avec un autre. J'ai imposé mes volontés, par la force et l'autorité.

Il y aura un lac. Et une école. C'est important l'école. Et puis, on pourra partir en vacances.

C'est aussi un rêve. Les vacances. J'ai eu des périodes sans travail, je suis allée dans un parc d'attraction, à la fête foraine, avec Leonard d'ailleurs. Mais je n'ai jamais eu le plaisir des vacances. Pas où ce plaisir du voyage.

Et une machine à barbapapa. Je ne sais comment ça fonctionne mais c'est quelque chose de magique.

Ma grossesse inverse vraiment les rôles de notre couple. Lui sérieux et moi rêveuse.

Je le savais déjà. Il n'était pas manuel. C'était un intellectuel. Il lisait les manuels, les modes d'emploi et tout ce qui contient des textes et ensuite, il essaye de faire ce qu'il a lu. Parfois on lui explique, comme moi quand je l'entraine, bien souvent, il n'arrive pas à reproduire et ça fini en catastrophe. Il s'en sort sur certaines choses. Si j'ai bien compris, il arrive maintenant à trouver des Mega-Gemmes et des Cristaux facilement, aussi facilement que cela puisse être. Mais pour le reste. S'il s'est tenir un marteau dans le bon sens, je ne suis pas sûre qu'il sache dans quel sens il faille frapper avec.

Je ne sais pas. Combien de temps ça prend de construire une maison ? Mon arène est reconstruite en trente minutes, une heure. Une vraie maison, ça ne dot pas être complètement différents. Peut-être une journée ? Deux ? Et je ne me suis jamais occupée d'un bébé non plus. C'est si compliqué que ça ? Elle pourrait nous aider non ?

Je ne sais pas du tout ce qu'il se passe avec un enfant sur les bras, mais pour changer nos vies, elle va bien les changer. Je vais passer de un à trois. Avant je ne devais m'occuper que de moi. Bien sûr, parfois je m'occuper d'Ethan ou de Leonard, mais l'essentiel de ma vie était tourné vers moi et mes Pokémons. Et maintenant, je vais devoir vivre en prenant en compte les réactions de Leonard et surtout en m'occupant du bébé. C'est beaucoup. Enorme, surtout pour quelqu'un qui n'a jamais eu d'exemple. Comment on s'occupe des gens ?

On pourrait mettre le toit très vite avec les murs et s'occupait de la décoration après. Mais si tu préfères une maison déjà faite...

Je m'en moque en réalité.

Où je voudrai partir en vacances ? J'ai déjà dit que je n'avais aucune imagination ? Que je ne connaissais rien ? J'ai déjà vu tout Kanto. Visiter serait un bien grand mot, car je n'ai fait que passer d'une ville à l'autre à la recherche de la vengeance. Pareil pour Lumiris. Concernant les autres régions du monde, je ne les connais pas du tout. J'ai entendu parler de Johto, parce que c'est pas loin de Kanto, mais c'est tout.

Je ne sais pas. Je n'ai jamais eu de vacances. Je suis déjà allée me reposer à la mer ou à la montagne, mais c'était surtout du camping en attendant de trouver du travail.

Puis ça me vient.

A la fête foraine. C'était beau, avec plein de lumière, plein de manège. J'aimerai y aller, et ne pas foutre la soirée en l'air. J'aimerai m'y amuser. C'est là qu'on a fait notre premier vrai rendez-vous. C'est un endroit fabuleux que j'aimerai revoir.

On pourrait aller à la fête foraine. Pour y rester plus longtemps et s'y amuser. Ce serait bien. Tu ne trouves pas ? Qu'est-ce que tu avais en tête?

HRP : Capture du Tentacool toujours en cours ^^

Pourquoi je ne suis pas surprise ? Pourquoi est-ce que je m'attendais à un plan quand il a posé la question ? Il me demande d'avoir de l'imagination et lui, il n'a même pas commencé à y réfléchir. C'est n'importe quoi, vraiment. Ce garçon est stupide. C'est terrible.

Oui, comment tu verrais tes vacances. C'est le thème, la question. Pas la peine de la répéter. Répond à la question. Qu'est-ce que tu veux faire pour tes vacances.

Et sa réponse est... Décevante. Non, il ne faut surtout pas lui dire, non surtout pas lui dire. Ne pas piétiner ses envies comme des fleurs dans l'arène d'Hayato. Il ne faut pas. Ce n'est pas bien et pas le moment.

Mais intérieurement, je hurle. C'est débile. Une cabane dans les arbres ! Je vis dans une cabane en plein milieu d'une forêt. Qu'est-ce que je voudrais faire dans une cabane dans un arbre. Surtout si en plus on nous file la bouffe. C'est débile. C'est absurde. Il n'y a rien qui va. Ça voudrait dire rester toujours enfermés ? Mais pourquoi ? Si on ne sort même pas pour profiter des bois, pourquoi aller dans les bois bordel ! C'est ça ses vacances ? Enfermer dans un arbre à manger des sandwichs et des bocaux ? Non merci, mais je fais déjà ça à l'arène.

En revanche, planter la tente près d'un lac. Ce serait bien et... Oh merde.

Quoi ? Mais... Il est pas encore né que tu veux déjà en avoir un autre ? Je t'aime Leonard et camper près du lac a été un moment merveilleux mais non. Calme-toi.

Il m'a bien expliqué comment on fait les bébés, mais je n'ai toujours pas tout compris, parce que je n'ai pas vraiment tout écouté, et aussi parce que tout se mélange dans ma tête. Mais là, c'est clairement une réclamation. On voit bien que c'est pas lui qui le porte pendant neuf mois le bébé.

Quoi quoi ? Il ne me croyait pas capable de comprendre le sous-entendu ? Oh attends, il est vraiment surpris. Il ne pensait vraiment pas à ça. Alors quoi ? On allait vraiment avoir un nouveau bébé par erreur, parce qu’on aurait recommencé tout comme au lac. Si on doit retourner au lac, on y restera bien plus longtemps, pour que ça en vaille la peine.

Bah oui, crétin. Il faut…

Il m’embrasse sans que je puisse lui répondre. Dans ce baiser je souris. Il est idiot et naïf. Mais il est vrai et honnête. Il est quelqu’un à quoi se raccrocher quand tout le monde part en sucette. Il est toujours à s’émerveiller de tout, et à rêver, à voir le beau partout.

Notre baiser s’arrête.

Tu en doutes vraiment ?

Ce n’est pas dit méchamment, mais parfois j’ai l’impression qu’il est toujours surpris que je le dise. Parce que je ne le dis pas très souvent peut-être. Je ne suis pas quelqu’un de très tactile, de très démonstratif, même si ces derniers temps, j’ai envie de ce contact, pour m’aider à porter le monde nouveau qui me tombe sur les épaules, parce que j’ai peur de l’affronter seule.

Je l’embrasse encore. Je sens la chaleur se répandre dans mon corps. Ainsi qu’une douleur dans le bas ventre. Mais ce n’est rien. Je profite de l’instant.

Noël pour un enfant. Il doit bien savoir depuis le temps que ça ne veut rien dire pour moi. Bien sûr, j'ai vu les enfants tout compter à l'approche de Noël mais je n'ai jamais connu ce sentiment personnellement. Plutôt le contraire. Tout le monde heureux pour quelque chose que je n'ai jamais eu, et que je ne peux pas comprendre. Mais si Leonard dit que c'est agréable, je vais lui laisser le bénéfice du doute.

Contre lui, je sens sa chaleur. C'est bien. C'est agréable. Mais pas que ça chaleur. Ma crampe d'estomac se fait plus forte, et pas dans l'estomac. Mais je la dissimule. Ce moment est trop bon, trop agréable. Notre enlacement est si doux. Ce n'est pas si souvent qu'on peut faire ça.

Mais un nouveau coup me fait grogner et me force à m'écarter pour m'appuyer sur le dossier du banc. Ce n'est vraiment pas agréable. Je me redresse.

J'avais mal au dos, maintenant, j'ai mal au ventre. Et dire que tu veux en faire un autre. Je ne suis pas taillée pour porter les enfants. Pas assez grosse. Faut être une girafe ou être en fauteuil roulant pour que ça soit pas trop désagréable.

Une nouvelle douleur me fait pousser un gros grognement. Là, c'est pas normal. Elle n'est pas censée venir aussi fortement pas à-coup cette douleur. Ce n'est pas un coup de pied du bébé.

Je pousse un juron lors d'une nouvelle douleur. J'ai mal. Ce bébé aura ma peau s'il continue.

Evidemment que je parle de Yokoss. Evidemment qu'elle va bien madame parfaite. Je suis sûr qu'elle faut de la sorcellerie ou qu'elle fait semblant d'être enceinte. Juste parce que je le suis. Pour pas que je la double de trop loin.

Qu'est-ce que je n'aime pas ? Aller à l'hôpital ? Bien sûr que j'aime pas ça. Qui pourrait aimer ça ? On y va pas pour le plaisir là-bas. C'est souvent parce qu'on a un truc grave. Ce serait débile d'être heureux parce qu'on a un truc grave, comme un membre cassé ou un intoxication par son propre Pokémon.

Encore un coup. Il me prend la main avec douceur. Mais il est sérieux là, j'ai mal et il me dit que ce n'est certainement pas grave.

Je lui jette un regard énervé. Il n'y a aucun froid dans mon regard, comme d'habitude. Cette fois c'est un brasier qui pourrait consumer quiconque n'est pas prêt. Je lui presse la main.

Crétin. Bien sûr que c'est grave. Le bébé arrive.

J'aurai bien voulu lui ordonner de m'amener à l'hôpital mais une nouvelle contraction me fait pousser un grognement. On m'a dit que ça ne faisait pas si mal que ça. Si c'est le maximum, c'est déjà pas mal. Mais je crains que ça ne fasse qu'empirer.

Hôpital. Maintenant.

On m'a aussi dit que ça pouvait être compliqué parce que j'étais petite et pas bien grosse. Et nom de nom, je sens que je veux regretter ma nouvelle vie, si fort.

Et merde il panique. Qu'est ce qu'il a à s'agiter comme ça. Même s'il y avait quelque sur la plage, ils ne sont pas docteurs. Ils ne pourront pas nous aider à part en appelant l'hôpital à la place de Leonard.

Ton putain de langage Leonard !

Je crie ça plus pour me détendre. Arrête de paniquer. Il n'y a pas raison de paniquer. Je hurle ma phrase au bord de la panique.

Il ne me faut pas grand chose pour que je sombre dans l'hystérie et la terreur. Alors je ne veux pas que Leonard panique et m'emmène avec lui. Il faut que je respire calmement. C'est ça. Alors pourquoi est-ce que je respire rapidement ?

Mais tu vas te grouiller à appeler l'hôpital. Ma voix est énervée, tendue, pressante. Il ne faut pas mettre la pression à Leonard sinon il fait n'importe quoi. Dommage, j'excelle seulement dans ce domaine là. Lui mettre la pression.

Nouvelle contraction.

Je n'ai pas vraiment mal entre les contraction, et il n'y aurait techniquement aucune raison de paniquer. Quelqu'un de cultiver, d'intelligent, de sachant, nous dirait qu'on aurait le temps de rejoindre la route, prendre une voiture et d'aller à l'hôpital par la voie normale et d'y être pris en charge tranquillement.

A la place, on panique. Tous les deux. Parce qu'il est un idiot et que je ne suis pas futée.

Ce que je veux ? Accouche à ma place. Fais sortir le bébé maintenant. Fait apparaître l'ambulance. Je ne sais pas moi.

Ils arrivent vite en effet. L'ambulance arrivent quelques minutes plus tard et on met sur une civière. On fait signe à Leonard qu'il ne peut pas monter. J'attrape en me redressant un des infirmiers.

Je suis Capucine Alambre, la championne de Glace. Si tu laisses pas entrer mon homme dans cette ambulance, je te jure que je ramène les Pokémons de mon arène et on vient geler l'intégralité de votre putain de ville et je m'occuperai personnellement de vous casser les genoux, à chacun d'entre vous. C'est clair.

Cela pourrait passer pour une menace de femme en panique. C'est une menace de femme enceinte en panique. Mais cette femme, c'est moi. Et j'ai une réputation. Pas de celle qu'on prend pour des mythes ou des exagérations. De celles qui font trembler les enfants. Parce qu'on a des preuves de ce dont je suis capable et la certitude que je tiens toujours parole.

Après m'avoir regardé avec des yeux ronds, il a autorisé Leonard à monter. Je lui attrape la main.

Tu ne me lâches pas. D'accord ? J'ai peur. Je suis terrorisée. Je vais donner la vie et je ne sais pas comment faire. Je ne sais même pas comment j'en suis arrivée là.