C'est une belle manière de montrer qu'elle n'a pas été aspergée. Je dois admettre, la robe est magnifique. Encore et toujours, la ville a fait un super taff pour tout ceci. Je suis sur qu'il y ait des couturiers ou d'autres professions du même genre qui doivent se faire un max d'argent.

"Bonne nouvelle si vous n'êtes pas tachée. Pour la tristesse d'un verre vide, je ne peux que la partager."

Surtout que ce punch est superbe. Je m'occuperai de deviner sa composition plus tard, mais c'est de la qualité. J'aurais aimé participer aux dégustations pour le tester.

Quant à l'escorter pour aller se resservir, il serait bien malpoli de ma part de refuser son offre... même si ce n'est pas vraiment mon style. Je comprends que c'est sympa, mais je ne suis pas vraiment dans ce genre de "fioritures".

"Ça n'est pas un problème, nous faisons tous des maladresses. C'set sur que la plupart des masques ne sont pas conçus pour aller avec des lunettes, mais je suis étonné que vous ayez du mal avec les lentilles."

Peut-être qu'elles sont plus anciennes, je n'en sais rien. Je ne vais pas juger, seulement constater. Tout comme je constate ses regards, qu'ils soient volontaires ou non. Est-ce qu'il en serait de même sans les masques ? C'est ceci qui est bien plus intéressant à savoir.

"Triste, véritablement ? Peu importe. Mais en tant que samouraï, ne suis pas  censé répondre que je viens d'un lointain pays du Nord, et que..."

La fin de la phrase se perd dans le brouhaha qui arrive en même temps qu'un groupe de personne. Et il n'est pas très compliqué de deviner celui qui a "créé" ce groupe. Je pense qu'il y a plus de "victimes" que d'ami dans ce groupe, mais suivons le flood. Dommage que celui qui nous propose de trinquer  semble déjà bien éméché.

"Je ne suis pas du genre à le faire avec des inconnus, mais je présume que je peux faire une exception, mon "ami"."

Je dois bien admettre qu'il m'énerve. Mauvais endroit au mauvais moment. Je pense que son petit numéro a l'effet inverse, faisant fuir ses partenaires de danse et de boisson un par un. En temps normal je pense que je l'aurai véritablement remis à sa place pour interrompre la conversation. Bref.

"Je pense que ton idée n'est pas parfaite et mérite d'être raffinée si tu veux mon avis. Forcer les gens à venir avec toi a souvent l'effet inverse."

Mais ça n'engage que moi. Je vais tout de même me retrouver à boire seul comme un con. Fais chier.

La solitude ne lui est pas inconnue. Depuis quelques temps, elle est son unique compagnon. Quoi que fasse Chaton, elle est là. Derrière chacun de ses pas. En ce jour des morts, c'est encore plus vrai. On nait seul, on meurt seul. Tout ce qu'il y a entre les deux n'est qu'illusion. Chaton le sait bien.

Le fumée des Takoyaki monte jusqu'à ses narines. Cette odeur la dégoute, et elle finit par jeter sa barquette derrière le banc. Indifférente au regard des autres. Qu'importe ce qu'ils pensent de toute manière, ils l'auront oubliée bien assez tôt. Dans quelques minutes au plus.

Elle se demande encore se qu'elle fait ici. Venir sur un coup de tête. Venir pour voir quelqu'un. Mais il n'y a personne. Personne pour s'asseoir entre elle et la solitude. Au loin, Chaton aperçoit une buvette. Des gens parlent fort autour. Peut-être la solution est là.

Une présence se fait sentir. Son visage dissumulé se tourne vers la silhouette maquée. Danser? Elle lui propose de danser? A quoi bon. Faire illusion. Donner l'impression que tout va bien. Pour tromper qui? Elle n'allait pas bien. Et elle n'avait personne à tromper.

Sa bouche s'ouvrit et se referma. Haussement d'épaule. Puis elle se lève.

« Pourquoi pas. »

Elle détailla l'inconnu. Elle imagine qu'il fait pareil. Elle chercha autre chose à ajouter. Lui dire qu'elle ne savait pas danser. Ce n'était pas vrai. Quant bien même. Il le verra bien assez tôt.

Chaton le trouve réserver. D'un geste las, elle lui prend le bras et le tire doucement vers la musique. Plus vite ce sera fait, plus vite elle sera libre.

Au milier des danseurs, Chaton essaye de prendre le rythme. C'est plus compliqué que ce qu'elle ne pensait. De danser avec la tête ailleurs.

J’enfile un manteau de laine rugueuse, élimée et décrépite. Le vêtement me serre au niveau des épaules, mais c’est le plus grand que possède le tailleur. D’un sourire et d’un geste de la main, je refuse le masque qu’il me tend. La capuche suffira, que je tire sur mon visage. Sans plus de cérémonie, je me joins à la fête.

Mes savates claquent sur les pavés. Je suis une simple montagne d’étoffe, de crin et de crasse. Je n’ai l’air de rien mais la foule s’ouvre naturellement devant mes pas. Les masques se lèvent pour voir passer ma sinistre silhouette. Et je ricane tout bas. Ils sont pareils à ces petits animaux qui guettent le danger, la truffe au vent.
Ces allures de croque-mort me divertissent.

Sans autre objectif que d’observer, je déambule dans les rues les plus fréquentées, quand on me saisit tout à coup par la manche.
J’écarquille les yeux et manque de culbuter en avant tandis qu’un étonnant Bouffon m’entraîne soudain à sa suite. Je perds un côté de savate dans l’affaire et me rattrape maladroitement au buffet.
"Ça vous dit genre on trinque tous ensemble ?”
Un rire frêle m’échappe.

“Eh bien chers inconnus, même si on n’se connait probablement pô, bah sachez que vous êtes des personnes exceptionnelles et que j’vous aime.”
Acceptant qu’on remplisse mon verre de punch, je m’adosse à la table longue et garde le silence. L’allégresse du Bouffon ne fait pas l’unanimité. Pourtant, je reste à ses côtés. J’attends que tous évacuent leurs griefs, que partent ceux qui veulent partir, que restent ceux qui veulent rester.

Et enfin, lorsque le Bouffon délaissé fait le compte des amis qui demeurent, je lève mon verre en sa direction. “Santé.” Lui dis-je posément.

L'air du soir apportait allègrement les rire et la joie des fêtards, rassemblés pour la nuit afin de célébrer les morts non pas dans la tristesse mais dans l'allégresse. Les notes de la musique entrainante rebondissaient sur les murs comme autant de balles lancées dans la foule. On venait en famille ou seul, se regroupait ou se séparait dans un va et vient incessant et braillard. Son, lumière mais aussi odeur était en rendez-vous. Celle des repas, et boissons servit dans d'inombrables futurs déchêts, mais aussi celle des humains et de leur Pokémons, celle de la sueur, celle du poils mouillés.

Masques et déguisements étaient de sortie, pour cette occasion unique de l'année pour les montrer à tous et à toutes et se faire complimenter, moquer ou simplement admirer. L'esprit frappeur effrayant cotoyait la sorcière peu vêtue et malade demain matin.

Dans cet étrange tableau nocture, tu te faufiles parmi les gens comme un rocher écarte le courant. Tu n'es pas venu pour passer inaperçu et tu as travaillé dur pour le fabriquer, le coudre, l'assembler. Tu as réfléchi aux couleurs, au draper, aux longueur et à la coupe. Maintenant, tu te pavanes et brille comme un soleil sous les éclairages artificiels. On se retourne à ton passage et les enfants restent bouches ouvertes, des gens s'offusquent là où d'autres admirent.

Tu portes un masque scintillant au long museau, de blanc et violet dégradés et aux grandes oreilles velues d'un doux poils, deux feintes noirs à la place des yeux dissimulent ton regard à celui des autres sans t'empêcher de voir. A la place de la bouche, un petit sourire se dessine donnant à l'ensemble un air moqueur, malin et séducteur, loin de toute méchanceté, juste un peu joueur. Le reste de ta tenue suit le même rythme, de blanc et de violet, variant les teintes et les dégradés, les draps s'agitant à chacun de tes pas, de tes mouvements comme une cascade ayant ses mouvements propres et indépendant. C'est une longue robe fendue, révélant tes jambes, elles aussi habillés d'arabesques et de spirales, rappelant le Pokémon de ton inspiration. Et derrière toi se dresse un voile irisé, des mêmes teintes et brillaint, figurant ta queue qui tinte à chaque pas, comme des cristaux de glace brillant dans la nuit. Tout en toi scintille sous les lumières artificielles et tu es comme le ciel étoilé que les lumières de la ville dissimulent au regard des hommes.

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Putain, fais pas l’con, mec.
J’te vois v’nir avec tes gros sabots. A rouler des mécaniques, ton rictus plaqué sur la tronche. Ouais, tu portes un masque, mais j’le vois quand même, ton air con. J’suis ton narrateur, couillon. Ubiquiste. Omniscient. Tout-puissant. Tu peux pas péter sans que j'te sente le fion. Me l’fais pas répéter.

Alors, ouais. Quand tu vas faire ton fouille-merde, j’te vois v'nir.
Fais pas craquer ton cou comme ça.
Commence pas à lever les bras.
Et lâche cette pokéball.
Lâche cette pokéball, bordel.

Tu vois pas qu'les gens y s’amusent, troufion ?
Tu peux pas leur foutre la paix ? T’as même pas l’excuse d’être plus bourré que d’habitude, t’as juste un pet au casque. Est-ce que ça t’fait chier de les voir danser ? Folâtrer ? S’gaver de petits canapés ? Tu peux encore rejoindre les festivités, et...
Oh, le con.

Tu balances ton Spectre dans le tas.
Si c’était du bowling, ce s’rait un strike.
T’as trois gus qui voltigent. Deux qui s’couchent. Deux qui roulent comme des quilles.
T’éclate de rire et tu sautes sur l’buffet. En faisant bien gaffe d’pas écraser la boustifaille : faut pas gâcher. Ta bestiole maintient tes victimes dans les airs, en Lévitation. Plus de peur que de mal, mais ta bêbête, elle enfume quand même sacrément la grand’place. Y’a un mouvement de foule, de la confusion. ‘faut que tu fasses gaffe. Si tu déconnes trop, y vont s’marcher dessus, ces cons.
Et maintenant quoi ?
T’as des otages qui pendouillent dans l’vide. Des ivrognes choqués qui applaudissent. Des mémères désespérées qu’appellent la sécurité. T’vas avoir des emmerdes bientôt, faudrait pas traîner. Mais tu les regarde ces troufions. De tout ton haut. Avec ton crâne d’ossatueur vissé sur la tronche, t’attends de voir si y’en a au moins un dans l’assistance qu’a des couilles.

T’éclate de rire, t’attends qu’on vienne te déloger.
T’éclate de rire, tu t’payes la tronche de ces mous du fion.
T’éclate de rire, mais tu t’amuses pas vraiment.

Une voix tremble dans l'obscurité, fragile, volatile dans l'atmosphère étouffante des festivités qui n'enchantent pas ton cœur solitaire. Si tu avais su apprivoiser le silence dans lequel tu t'étais muée, te soustrayant à la folie déraisonnée de ceux qui dérobent à la ville tout son charme funèbre, ces intonations incertaines étaient parvenues à t'atteindre. Brisant chaînes, bafouant solitude, tes prunelles se jettent dans sa direction avec une surprise qui se mue trop vite en intérêt presque avide.
Ses yeux…
Ses yeux te foudroient sur place. C'est comme prendre un coup, c'est comme sentir son souffle sursauter, c'est comme s'enivrer d'un vertige au sommet. Comme bousculée, tu te sens perdre l'équilibre. Mais tu ne t'effondres qu'en toi-même, secouée par ses prunelles qui ressemblent trop aux tiennes.
Un vide à combler, une absence qui déchire… Elle a le regard de ceux que le monde a déjà vaincus. Le regard de ceux qui sont déjà passé de l'autre côté, du côté de ceux qui savent.

Est-ce qu'on… se connaît ?

Triste inconnue, belle ébréchée, comment peux-tu ainsi t'éprendre d'anonymes masqués dont tu n'aperçois qu'un regard qui te fracture l'âme et la rage ?
Ta main, qui tremble comme en écho à celle de ce fantôme aux yeux perdus, s'étire en direction de cette jumelle tendue. Rien qu'un peu plus, et ce serait si simple de s'en saisir…

Et puis, presque si vite qu'elle était apparue, ta chance s'était envolée. Volatilisée, emportée par une autre, et aux éclats de voix soudains se succède un silence mauvais qui jure et maudit. Ta main, lentement, retombe dans le vide. Paume en direction du ciel, tes prunelles sonnées s'y échouent sans bien savoir ce qu'elles espèrent y trouver.
Vont-ils tous disparaître ainsi ?
Encore, toujours… Combien de fois laisseras-tu ces étincelles de vie t'être arrachées ?
(Pourquoi es-tu seule ici ; pourquoi as-tu cru qu'espérer suffirait ?)

Tes talons claquent contre le sol lorsque tu te redresses, les pas précipités et le cœur emballé. Pourquoi ? Pourquoi ça t'importe autant de la retrouver ? Pourquoi cette obsession, pourquoi cette douleur suffocante à l'idée qu'elle t'ait échappée ?
Les battements de ton myocarde emporté te guident au hasard de tes angoisses indociles. Difficile de trouver du sens à tes pas qui s'entremêlent et trébuchent. Ta poigne, ferme, retient contre toi cette cape dont tu crochètes les coutures avec nervosité. Où es-tu passée ?

…ou non consommer ce soir ?
Cinq petits mots, une voix qui surplombe les résidus d'un cœur de ville animé que vos trois âmes ont fui. Elle est là. Elles sont là.
Tes pas se taisent, et ta respiration vacille.

Pardon…

Tes prunelles inquiètes cherchent rédemption.

Je ne pouvais pas… te laisser partir.

Tu n'as d'yeux que pour elle. Celle qui a frôlé ton âme de si près que ton cœur imbécile n'a pu se résoudre à l'oublier.
(Tu n'as jamais poursuivi que ceux qui te ressemblaient.)

Mais je crois… Je crois que je n'ai rien à faire ici.

Elle n'est pas seule, on veille sur elle. Les étoiles se sont alignées au dessus de cette belle effacée… Et, toi, tu entends déjà sonner le glas des silences funestes. La solitude te murmurer de courir les retrouver.
Mais tout, en toi, refuse d'écouter.
Et tu restes. Tu restes, jusqu'à ce qu'on t'intime de renoncer.

Une nouvelle danse allait commencer. La musique, Chaton ne la connaissait pas. Elle en connaissait d'autres moins musicales. Plus violentes. Mais celle-là, elle ne la connaissait pas. Elle ne la connaissait plus. L'avait-elle connue par le passé? Elle ne savait pas. Tout était une erreur. La vie était une erreur et la sienne une succession de catastrophe. Elle regarda la personne qu'elle avait accompagné pour danser.

« Non. »

Elle avait changé d'avis. Elle avait accepté la futilité de son essai. Elle ne voulait pas danser. Elle ne voulait pas boire, pas manger. Elle ne voulait pas être ici. Elle repartit vers son banc. C'est là que le bruit lui parvint. Les cris, le désordre.

Grognement.

Rapide dans la foule, elle arriva sur place. Quelqu'un sacageait la fête et s'empiffrait en faisait du bruit. L'écho du passé. La force du présent. Le mal. C'est ce qu'elle faisait de mieux. Un Pokémon Spectre empêchait les gens d'approcher. Chaton ne ralentit pas. Elle marcha vers la table. Silhouette encapûchonnée de ténèbres. Le Pokémon se tourne vers elle. Il esquisse un geste d'attaque. Un éclair rouge surgit et le frappe. La tempête de flamme est sans merci et le Pokémon tombe. Chaton est déjà à la table.

D'un geste brusque, elle se détendit et bondit. Elle saisit le poignet du perturbateur et le tira hors de la table. La surprise joua pour elle. Le reste, ce fut la gravité. Elle accompagna l'inconnu et le planqua au sol. Toujours tenant son bras, elle le tordit dans son dos.

« Maintenant. Dégage. Avant que je me fâche. »

Elle le lâcha.

« Je… Bonsoir. Pardonne-moi, je sais que c'est idiot, mais… Je crois que la soirée est trop belle pour qu'on laisse nos démons nous la gâcher. »
C’est ainsi que t’approches celui qui se sait idiot.
Te voilà qui cille et qui sourit. Sous ton masque intégral, lui, ne peut voir les commissures de tes lèvres s’incurver. Mais ta posture est traîtresse, et tes émotions sont félones.
« Plutôt que d'être seuls chacun de notre côté, est-ce qu'on n'essaierait pas d'être seuls à deux pour la soirée ? »
Faible mouvement de balancier. Tu changes de pied d’appui.
La main sur ta hanche et la façon légère dont tu dodelines de la tête viennent suggérer l’amusement.
« Et comment fait-on, pour être seuls à deux ? »
Cette note de malice pétillante, dans ta voix, ne contredit pas ce sentiment.

Dans un murmure satiné, un frôlement de tes étoffes, tu te rapproches… non, tu contournes celui dont les yeux se confondent à la nuit.
Tout ton corps est un langage.
La danse de tes mains. L’élan arachnéen qui anime tes pas. Cette façon dont tu contemples. Dont tu promènes ton regard. Dont ta curiosité file et farandole avec la fraîcheur douce d’une brise d’été. Tu dis tant de choses sans mots dire.
Et si peu, quand tes dialogues s’étirent.

« Devons-nous nous installer et boire ? En feignant chacun d’ignorer l’autre, en ne prononçant des paroles que jamais sibyllines, pour parler sans se toucher ni se comprendre ? »

Tes paroles se réchauffent. Il y a cette cadence dans ta voix.
Qui va crescendo. Le simple fait de parler te ravive le cœur.
Il en a toujours été ainsi. Isolée, tu es cette étoile muette et contemplative. Tu t’abîme, solitaire, sur le velours de la nuit. Mais les étoiles jettent leur lumière pour qu’on puisse les contempler, et toi, un seul regard suffit à te faire briller. Et à te faire babiller.

« Devons-nous gagner la piste de danse ? C'est hors de question. Si je dois gigoter dans cette robe trop ample, mes chorégraphies n’auront pour grâce que celle du sac de pommes de terre qui dévale un escalier. »
Tu complètes, en dressant un index impérieux.
« Et je n’ai de valses à offrir aux inconnus. »
Car il serait impensable de laisser un étranger te toucher. Glisser ses doigts sur tes épaules ou contre ta taille, tu méprises cette simple idée. Sous tes airs affables, tu n’offres pas facilement ta confiance.
Ici, c’est toi qui mène la danse.

« Alors, dis-moi. »
Les mains dans le dos, le buste incliné vers le garçon, tu l’observes par en-dessous. A travers la fente de ton masque, vos regards s’accrochent. Et tu te répètes, suave et facétieuse.
« Comment fait-on, pour être seuls à deux ? »

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Qui es-tu, à présent ?
Toute ta vie, tu t’es battue contre le masque que le monde te fait porter. Une défaite silencieuse après l’autre. A chaque rencontre, un nouveau combat. Cette lutte te laisse lasse et essoufflée. Mais pas malheureuse, loin de là.
On s’habitue à se savoir incomprise. Et en vérité, tu possèdes déjà tout ce dont tu as besoin. Ce que tu nommes tes rêves et tes trésors, gagnés à la force de tes poings.

Certes, tes amitiés sont rares, sinon superficielles. Combien de ceux qui se la pensent acquise ignorent tout de la profondeur de tes états d’âme ? Combien, dès le premier regard, ont décidé tout savoir de la personne que tu étais ?  

Qui es-tu, à présent ?
L’inconnu face à toi ne sait pas, il n’a pas encore décidé. Puisqu’il ne peut pas voir ton visage, peut-être est-ce le sien qu’il projette sur ton masque ? Ses démons qu’il dessine sur tes ombres.
Que voit-il de toi, sans te voir ?
C’est ce que tu souhaites savoir.  

Elle portait si bien son nom, son pseudonyme, la Marigold.
Une grande silhouette fine, un teint de lait éclatant qui était complimenté par une fine poudre de paillettes Lise Watier. Une chevelure de braise qui vivait autant que le feu en son caractère, qui venait cacher ses délicates épaules. Son visage était si fin, une silhouette coupée par une élégante robe bleue qui venait cacher ce qu’elle désirait cacher.
Elle était en retard à la fête, cet événement étrange auquel elle ne voulait pas participer était commencé depuis longtemps. La cacophonie de ces personnes masquées qui l’entouraient la faisait passer complètement inaperçue, alors qu’elle se fondait parfaitement dans la petite foule qui s’était créée. Cachée derrière son éventail, elle ne pouvait qu’observer de ses grands yeux ambrés. Comme si elle était à la recherche d’une personne qu’elle connaissait ?
Sauf qu’il était impossible de reconnaître qui que ce soit en ce lieu. Masqués et déguisés, notre précieuse et fragile fleur était perdue au milieu de ce fiasco.
Elle se sentait toute petite, lorsqu’elle n’était pas dans son champ. Et surtout, lorsqu’elle était prise au dépourvu dans une salle remplie d’étrangers.
La soirée l’ennuyait un peu, mais l’anxiété que la solitude et la foule lui donnaient la rattrapait relativement rapidement. La pauvre Marigold se dirigeait donc vers le punch pour s’en prendre un verre, et à sa grande surprise, l’arrière-goût ne lui était pas inconnu. Pourtant, on lui avait dit qu’il s’agissait d’une fête sans alcool, non ? Peut-être était-ce pour cela que les gens devenaient fous.
Ils nous en faisaient faire, des drôles de choses.

Notre jeune fausse rousse soupirait légèrement, ne sachant pas vraiment où se placer dans cet infernal carnage. Elle n’avait jamais vraiment aimé les soirées, elle aurait sans doute préféré rester chez elle avec ses Pokémon. Prétendre d’être sociable, comme probablement tout le monde dans cette pièce, n’était pas du tout son fort.
C’est le risque d’arriver en retard à la fête; on se retrouve seul à dépourvu, sans cavalier, alors que tout le monde semble s’amuser.
À peine était-elle arrivée que notre petite fleur avait envie de quitter la pièce. Elle avait bu l’entièreté de son verre de punch qu’elle s’apprêtait à partir lorsqu’elle tombait nez à nez avec une jolie personne toute déguisée. Elle portait une robe, mais restait pourtant méconnaissable avec son masque de Lokrigan. Gênée, la rouquine baissait les yeux avant de murmurer tout bas.

« Pardonnez-moi, je ne vous avais pas vue… »

Elle se faisait toute discrète, elle parlait tout bas et elle évitait le contact visuel.
Comme si elle voulait éviter que l’on remarque qu’elle était accoutrée en le genre opposé.
C’était l’avantage d’avoir un corps frêle et un visage aux traits androgynes.

Solitude étrange et qui ne m'est pas familière. Le silence me ronge, les ombres dissémine leurs éclats de verre sur les rebords élimés de mon âme que les festivités, lointaines, ne savent plus réchauffer. Parcourue d'un frisson, je croise les bras, cherchant à rallumer les braises de flammes soufflées par la nuit. D'ici, les lumières n'effacent plus le ciel, et l'immensité des étoiles qui s'étire est étriquée entre deux rebords de toitures qui surplombent la ruelle où je me suis enfuis.
Je ne sais pas ce qui me prend, pourquoi je fuis la vie, pourquoi j'échappe au bruit quand c'est en son sein que j'existe le mieux. Quand je me fonds à ces foules anonymes qui m'aiment et me laissent briller, quand je me perds en extases alcoolisées qui me donnent à perdre la raison, quand je m'oublie entre leurs mains avides et passionnées…
Pourquoi, ce soir, leurs sourires masqués me laissent tremblante et esseulée ?

La lune veille et moi j'ai peur, peur que l'aube ne vienne jamais. Les légendes racontent, les légendes murmurent, ôtez vos masques et votre âme sera emportée, confondues avec toutes celles de ceux qui sont parties l'année passée. Moi, je n'ai personne à accompagner… Mais y a-t-il seulement quelqu'un pour me courir après dans le monde des vivants ? Quelqu'un pour me retenir, quand mes jambes vacillent et que je commence à trembler ? Quelqu'un pour m'attraper, quand moi, doucement, je commence à tomber…

Des pas dans mon dos, une présence qui m'est destinée, je frémis et je tourne le dos à la nuit pour faire face à l'éclat qui vient troubler la misère et l'ennui.
Des étoffes sombres, des boucles plus encore, une main gantée qui m'invite sans un mot, deux prunelles dont j'aimerais tant lire la clarté…
Y avait-il donc, en ce monde, vaillant ou malheureux héros pour me sauver ?

Mon sourire s'offre en offrande à la silhouette sacrifiée au jour pour se complaire à l'oubli. Deux âmes égarées… Ce qui luit dans son regard est différent de ce qui consume le mien. Je crois que ces instants volés sont vains, que nous nous serons déjà oubliés au matin. Que rien en ces iris aux couleurs dérobées ne ressemble à ce qui vacille en moi.
Mais qu'importe, pas vrai, qu'importe, puisque nous sommes masqués.

Je saisis cette main tendue, glisse la seconde sur l'épaule offerte, en un frôler gracile qui ne froisse pas les étoffes.
Fais-moi danser, qu'on oublie la disgrâce d'un monde de toute façon condamné.

« Vous êtes surprenante. »

Surprenante.
M'avancé-je ?

« M'auriez vous invitée à danser, si nous étions les mêmes, à visages dévoilés ? »

Ou bien était-ce l'audace d'être certains que l'aube volerait tout à nos absurdités nocturnes qui nous donnait l'élan d'oser ?

Peu importe, probablement…
Dansons, puisque c'est encore ainsi que les Hommes se parlent le mieux quand les mots viennent à manquer.

Il est dans votre nature humaine de dérober. Vous avez écrit les premières lignes de votre brillante histoire d'amour en vous faisant une place comme Mère Nature vous l'a ordonné de le faire, en exterminant et en chassant les locaux, en souillant et en détruisant leurs maisons pour faire couler vos atroces allées goudronnées et hisser votre merveilleux drapeau de paix. Vous êtes tous des pécheurs coupables d'un chef d'accusation à ne plus en finir, incapable de mener votre âme au tribunal de la raison, vous inventez de doux contes de fées mêlant divinités et prières échappatoires afin de poursuivre votre mascarade avec bonne conscience. Ce soir, tu as tant volé que tu t'en sentais presque accepté. Tu étais venue pour illuminé la tristesse de cette sombre parade, ton crime prémédité jusqu'aux moindres détails et possibilités, mais tu t'étais senti si humaine dans ton déguisement, que tu en étais devenu animal. Comble du comble, tu étais un prédateur.

- « Vous êtes surprenante. »

Tu acceptes le compliment et épouses toute sa maladresse. Il ne peut être réel, cette apparence enflammée et passionnée que tu abordes ce soir n'est qu'une illusion montée de façon théâtrale, mais son murmure avait été si innocent, si soufflé, si sincère... Qu'il avait réussi à réchauffer ce que tu es réellement. Ta forme était plus haute que la sienne. Tu la dominais sans effort par ta carrure et ce rouge si sanglant dans ce détachement où personne ne viendra avant l'aube. Cette soudaine proximité, qu'offre charitablement la valse, te satisfaisait dans ton élan de prédation. Que comptais-tu faire au juste de cette âme errante ?

- « Vous êtes fascinante... »

Ta bouffée de velours aurait presque été qu'un compliment poli, qu'on adresse en remerciement à un cadeau, si ton regard voilé d'un vert volé ne l'avait pas ainsi transpercé jusqu'aux os. Danser n'est qu'une transe que tu enclenches dès qu'une partenaire est trouvée. C'était comme si c'était naturel chez toi, comme si cela ne te demandait pas le moindre effort. Tu ne danses qu'avec des femmes. Tu as l'habitude de mener, de guider dans la nuit, d'aller là où il fait le plus noir, comme si tes prunelles connaissaient tous les secrets de l'obscurité, comme si tu souhaitais ne pas être dérangé. Tes pas sont d'une légèreté fascinante, c'était comme s'il n'existait rien entre toi et le sol. Tu n'as pourtant pas l'habitude des talons. Tes mouvements sont exécutés avec une maîtrise si souple, qu'ils en devenaient fantomatiques. On prêterait volontiers cette valse à celle d'une Magirêve ayant comme réalisé, subitement, ô combien elle était morte de solitude.

- « M'auriez-vous invitée à danser, si nous étions les mêmes, à visages dévoilés ? »

La question t'avait surprise. Ta bouche avait formé un étonnant « o » avant de fleurir en un sourire carnassier. Elle était ta partenaire de danse. Elle s'était offerte à l'écarlate en acceptant à bras ouvert ce qui pouvait arriver de pire... Alors, le mensonge n'y avait plus de trône. Il n'y avait plus qu'un pacte entre vous, une complicité malade annonciatrice d'un drame, des aveux lâchés aux creux d'une oreille frissonnante, la danse de deux fantômes ayant fui la parade noire.

- « Je ne l'aurais pas fait. Je joue ce soir à être quelqu'un d'autre. Je suis mon propre fantasme. »

Tu avais modifié ta voix, l'hésitation s'était faite frémissante sur une si longue réplique. Tu suivais le vent de cette tradition insensée qui ordonnait de mentir aux autres, lorsque toi, tu portais à tes doigts cette cruelle vérité qui contraint toujours à faire couler le rouge. Mais cette âme errante était-elle réellement une proie ? Tu oses penser qu'il n'y avait rien de tout ça. Pourtant, tu l'avais repéré puis traqué. La réalité est que tu ne savais pas jusqu'où tu irais ce soir, tant tu t'étais abandonné à la dérive, barque ramant d'elle-même vers la tempête et le désastre.

- « À mon tour de vous poser une question... Si vous étiez un conte de fée, lequel seriez-vous ? »

En dépit de la fraîcheur de la nuit, la foule présente emplie l’air d’une chaleur différente. Alcoolisée par endroit, sucrée à d’autre, animal finalement, lorsque des danseurs passent près de toi, l’odeur de ce soir terrifiant était bien loin d’être dans le thème, à moins que tu ne ressentes cette peur oppressante dû à la proximité de la foule. Non, pas ce soir. Tu es autre, scintillant d’un éclat unique et polaire, et d’un sourire futé du légendaire, ce soir, tu n’es pas toi, tu es qui tu veux. Conquérant, maître des lieux, artistes, danseurs, chanteurs, scientifiques. Tu es ce que tu veux. Tu es libre.

La chaleur lourde de l’endroit ne va pas de paire avec ton costume. Le port du masque ne t’aide pas à trouver de la fraîcheur tant espérer ni ton épaisse chevelure blanche et violette. La soif accompagne ce besoin de froid et tu te diriges d’un pas aérien vers le buffet, tes talons et plateformes te donnant des enjambées plus grandes que tu n’en as l’habitude. Tu flottes parmi les gens, ton costume chamarré et scintillant. On te remarque, on te regarde, c’est ce que tu veux et ce pourquoi tu es là. Briller resplendir devant le quidam sans talent. Tu exagères certains de tes mouvements, donnant de la langueur à certains gestes, de la souplesse à d’autre.

Ta vision est étriquée à cause de l’étroitesse des fentes de ton masques te servant d’yeux. Difficile de voir où tu poses les pieds exactement, et ce qu’il y a devant toi. Si quelqu’un décidait de se dresser subitement devant toi sans prévenir, tu ne le verrais qu’après l’avoir percuté. Mais tu as une taille si jouissive, si grande par rapport à d’habitude, si tellement agréable, si supérieure. Tu te sens majesté, reine de la soirée.

Tu t’apprêtes à atteindre ton objectif lorsqu’un mouvement te fait cesser ton pas, juste à temps. Quelqu’un que tu n’avais pas vu se tient juste devant toi. Tu fais un pas en arrière, baisse un peu la tête, puis, comme un géant filiforme se penchant vers un enfant, tu te plies, descendant sur les genoux, baissant le buste pour rapprocher ton visage du sien. Ton masque souriant de Lockrigan la dévisage, cette personne si petite et inquiète et tu penches la tête dans un sens, puis dans l’autre.

Ainsi, elle ne t’a pas vu. Toi non plus tu ne l’avais pas vu. Après un moment court d’un silence étrange, tu te redresse légèrement.

« Ce n’est rien. »

Ta voix est caverneuse, le masque amplifiant l’effet. C’est une voix râpeuse, qu’on dirait tirer d’un autre âge, prononcée par une personne fumant depuis sa plus tendre enfance. Sans l’amortissement du masque, elle pourrait faire crisser des dents.

« J’ai soif. Viens boire avec moi. »

Bien qu’impératif, c’est une invitation polie et majesté à cette inconnue à te joindre à toi. Tu ne la connais pas, mais tu ne penses pas vouloir passer la soirée juste à déambuler au hasard. Pas seule en tout cas. Alors tu l’invites à te suivre, elle qui semble si perdue.

Ses mots semblent faux, mais je préfère ne rien dire. Personnellement, je suis ici pour m’amuser, mais si je dois payer presque le double du prix pour tenter de gagner une peluche qui en vaut sans doute beaucoup moins en magasin, mais ça ne me dérange pas. Après tout, on ne jugerait qu’un faux médecin de l’ancien temps et non moi directement.

D’ailleurs, plus mon interlocuteur me parle et plus j’ai l’impression de l’avoir déjà croisé quelque part, mais je n’arrive pas à mettre le doigt dessus. Je reste muette comme une tombe lorsqu’il me dit que son plaisir personnel serait de se payer la tête de leur hôte. Je dois bien dire quelque chose sinon il va penser que je ne l’écoute pas ou qu’il parle tout seul.

- C’est… Plutôt étrange comme divertissement.

Heureusement que mon masque me donne une apparence stoïque, car depuis tout à l’heure je tente de percer l’identité de mon interlocuteur, mais son nom me reste sur le bout de la langue. Après un moment de réflexion, un flash me vient enfin à l’esprit!

- Depuis tout à l’heure, j’ai l’impression de vous avoir déjà vu… Ne seriez vous pas…

Je n’eus pas le temps de finir ma phrase qu’une Sorcilence géante s’était approchée pour nous demander si elle pouvait elle aussi participer. Comme il y a encore de la place de libre et que nous n’avons pas encore débuté la partie, elle a tout le plaisir de pouvoir jouer contre nous.

- Bien sûr! Plus on est de fou, plus on rit!

D’ailleurs, l’hôte explique les règlements du jeu : Nous avons chacun un pistolet rempli d’eau et devant nous, des clowns effrayants. Nous devons tirer dans la bouche des clowns pour faire gonfler un ballon et le faire éclater. Le premier qui fait éclater son ballon dans le temps imparti gagne un lot!

Expliquer comme ça c’était simple, mais il était connu que les pistolets étaient truqués et ne tiraient pas en ligne droite, se qui rendait la précision presque nulle à ce genre de jeu! Nous prime place devant nos pistolets respectifs. L’Hôte activa un gros minuteur au-dessus du jeu que nous pouvions tous voir en évidence. Une musique effrayante se mit à jouer et on nous donna enfin le signal de départ.

Je suis bien trop concentrée à vouloir réussir à faire éclater le ballon de mon clown que, lorsque j’entends des cris de peur, je sursaute et perd le contrôle de mon fusil pour aller arroser par accident Bandit. Le compte à rebours prend fin peu de temps après et malheureusement, je n’ai pas réussi à faire éclater mon ballon.

- Dé… Désolé… J’ai été surprise…

Par quoi? Je ne suis pas certaine, mais j’entends d’autres personnes costumées parler d’un fou qui tente de gâcher la fête au stand de boisson. Le cri qui m’a fait sursauté provenait sans doute de là… ou de la maison hantée aller savoir…

- J’espère que ce n’était pas une location… Pour me faire pardonner, je vous invite à la maison hantée? Demandais-je à Bandit. Je tournais mon attention vers la Sorcilence. Tu peux nous accompagner si tu veux.

Je me surprenais moi-même à être aussi entreprenante, sans doute était-ce parce que ce soir je n’étais plus moi physiquement, mais quelqu’un d’autre et qu’on ne pouvait pas me reconnaitre. D’ailleurs, je me demande s’il a pu venir à cette soirée…

Je parle, je parle, et je dois briser sans forcement le vouloir les rêves de la jeunesse. Je n’y peux rien si je suis un être cynique. Heureusement ça ne semblait pas véritablement atteindre notre chère médecin de la peste.

"C’est un sport comme un autre. Un prêter pour un rendu. Tout le monde s’en remettra."

J’ai décidé que ça sera le cas, tout simplement. Dans le pire des cas, la victime est blessée dans son ego, j’ai connu plus grave.

"Je ne suis personne, un bandit doit rester masqué pour garder sa tête."

Avec la bruyante interruption de la nouvelle venue, je pense que ma phrase s’est perdue dans le brouhaha général. Peu importe.

"Aucun souci, vous pouvez nous rejoindre."

Un changement de plan était de mise, je suis désolé pour notre chère abeille, mais elle n’aura pas l’occasion de gagner à ce stand. J’en ressors vainqueur, mais trempé suite à une maladresse de ma partenaire de crime.

"Il n’y a pas de mal, ce n’est que de l’eau."

Et le liquide n’est point coloré, ce qui aurait été ennuyant.

"Le karma qui me punit du larcin, peut-être."

J’en profite pour donner à la jeune femme le fameux butin : la peluche togepi. J'espère que le jeu en vaut la chandelle.

"J’accepte l’invitation, mais ne comptez pas sur moi pour rassurer l’une ou l’autre."

D’une part parce que je ne sais pas faire ça, d’autre part parce que je serai trop occupé à garder la face. Une lampe torche ne devrait pas être de la triche dans une maison hantée plongée dans le noir. A quoi ca sert de se faire peur, franchement ?


.

Un battement de coeur plus fort que les autres – tu l'avais senti dans tout ton corps, toute ton âme et ton esprit. Elle t'avait répondu. Elle te posait une question des plus légitimes, et pourtant, tu ne savais y répondre. Tu ne pouvais connaître la réponse. Vous étiez des gens masqués, vous étiez...
Des étrangers. Des étrangers parmi le monde. Des étrangers pour une nuit. Cette nuit était plongée dans l'inconnu ; dans cet océan de fantômes.

« Je... ne sais pas. Peut-être bien ? »

Puis une voix. Une voix inquiète et insistante.
Une voix qui t'avait arrachée à elle. Bébé... C'était toi, bébé ? Tu étais dans l'incompréhension la plus totale. Qu'essayait-elle de faire ? Elle voulait t'aider, ou s'aider elle-même ? Avait-elle besoin de faire semblant de connaître quelqu'un pour fuir quelque chose ?
Tes prunelles s'engouffraient dans une vision floue et tes idées se perdaient dans la nuit. Tu sentais tes jambes vaciller et tes bras se remettaient à trembler. Que faisais-tu dans le monde ? Dans cet univers que tu ne savais pas affronter. Tu ne savais qu'exister et subir le poids de l'humanité. Tu étais un cas désespéré.

« Consommer... ? »
Cette question était comme une claque violente et imprévisible. Est-ce que... tu donnais cette impression ? Si égarée et affolée qu'on te croirait sous effets quelconques ? « Non... absolument pas. Je ne connais pas très bien Fort-des-Songes, il faut croire que je me suis égaré. Il y a beaucoup de monde, ce soir. » Tu ne connaissais pas les intentions de cette personne. Tu ne savais pas si elle était digne de confiance. Mais tu voulais le croire. Tu voulais le croire parce que tu osais encore espérer qu'il y avait du bon en chaque être humain. « Est-ce que... toi aussi, tu es seule ? Et cette fille là-bas, elle était seule, elle aussi... On doit la retrouver ! »

Pleine de bonnes intentions, tu avais entamé quelques pas, avant que celle que tu recherchais ne vous retrouve d'elle-même. Tu étais soulagée, bien que surprise. Tu ne t'attendais pas à ce qu'elle vous suive. Elle ne pouvait pas te laisser partir ? Ainsi, elle avait peur de la solitude, comme toi ? Tu ne connaissais pas ses raisons, mais tu savais que ton instinct ne t'avait pas menti. Cette personne, elle n'était pas apparue devant tes pupilles sans raison. Il fallait que tu la rencontres.
Pensée magique ou simple spéculation ?
Tu t'en fichais. Tu avais pris ses mains dans les tiennes et... tu avais souri.

« Reste avec nous... d'accord ? »

Tu avais tourné la tête en direction de ton autre interlocutrice, celle qui avait cru bon de te protéger à sa manière. C'était comme si... tu lui demandais son avis ? Et pourtant, tu n'avais pas besoin de demander la permission. Tu voulais qu'elle reste. Tu voulais que les deux restent près de toi. Ton esprit semblait vouloir dissiper le brouillard et tes mains ne tremblaient plus. Tu avais besoin d'elles.
Tu avais besoin d'elles pour ne pas flancher dans cette foule. Tu ne pourrais te pardonner d'être aussi faible.
Et les âmes perdues qui flottaient dans la ville pourraient cesser de te tourmenter. Tu les sentais, trop. Elles t'envahissaient plus que jamais. Tu avais peur mais maintenant tu n'étais plus seule. « Je ne m'y connais pas beaucoup en cette période... Que doit-on faire, exactement ? J'ai enfilé ce costume et on m'a donné ce masque... Mais après ? »

Devais-tu réellement chercher une logique à tout ça ?
Devais-tu absolument trouver des réponses à toutes tes questions ? Avais-tu à ce point le besoin de comprendre les choses pour ne pas te perdre dans tes propres incompréhensions ?
Tu voulais peut-être simplement respecter cette fête étrange, cette fête qui ravivait de mauvais souvenirs, mais qui semblait vouloir te tendre la main. Certaines blessures ne pouvaient être guéries, mais peut-être pourrais-tu apprendre à vivre avec elles, et à les accepter.

Plus la soirée avançait et plus notre jeune protagoniste avait du mal à suivre, tout se passait tellement vite, tellement… Flou. Garder un œil sur les actions de chaque était pratiquement impossible. La zone était tellement vaste et malgré les lumières ici et là, l’environnement se voulait assez sombre. Entre la pénombre, la foule, le brouillard, le brouhaha constant, les rires, les cris, les injures, les Pokémon présent ici et là. C’était la recette plus que parfaite pour une crise d’anxiété. Le cocktail que notre nouvellement blonde essayait tant bien que mal de s’éviter.

Plus facile à dire qu’à faire, me diras tu Invité.

Telle une voie perdue dans la nuit, elle l’avait entendue, son supplice, alors qu’une étrangère se voyait approcher… Par une autre source d’énergie inconnue. La confusion ne cessait de croitre alors que les minutes avançaient. Les énergies se contredisaient l’une et l’autre, notre jouvencelle avait du mal à suivre. Du mal à respirer. Tout se bousculait dans sa tête. Alors qu’elle pensait avoir fait une bonne action en sauvant cette âme perdue. La confusion devint plus grande. Plus étouffante. Elle ne comprenait pas.

Sa voix était faible, déchirée même, alors que notre protagoniste venait l’enlacer de ses bras, non sans relâcher un profond soupir. Le contraste entre l’air ambiant froid de la nuit et la respiration chaude de la jouvencelle créait cette légère fumée blanche. D’une lenteur presque excécrable, elle laissait glisser ses fins doigts le long de sa crinière, comme si elle cherchait réellement à la réconforter. À la mettre en confiance. Elles ne se connaissaient pas et pourtant, la blonde se sentait inlassablement attirée par cette étrangère. Qui était-elle? Pourquoi se sentait-elle aussi attirée, comme un Magnéti.

L’absence de consommation soulageait la blonde, qui soupirait malgré elle sur le coup.
Hypocrite va.
Heureusement, elle n’avait pas succombée à la tentation du diable. Ce genre de fête était le moment propice pour prendre une boisson de trop, un bonbon de trop. Être trop bruyant, trop voyant, trop joueur, trop… Trop.
Un regard vers la piste de danse suffit pour rappeler à la blonde pourquoi elle s’éloignait autant de cette zone. Telle la peste.
Elle n’avait aucunement envie d’être près d’une telle cacophonie. Rien que d’y penser, elle en avait mal à la tête.

« Tu m’en vois soulagée alors… »

À son grand étonnement, voilà qu’elle apprenait que cette autre jouvencelle était perdue. Qu’elle n’était pas originaire du coin. Comme quoi, elle était véritablement une âme perdue. S’en était presque triste. Mais d’instinct, Hirondelle vint doucement glisser ses mains contre les siennes, liant même leur doigts ensemble. Malgré la pénombre, elle cherchait un contact visuel avec elle.

«  Je ne suis plus seule, tu es là, avec moi… »

L’ombre d’un sourire voulait se dessiner sur les lèvres rouges de la blonde. Mais il fut que trop bref pour être aperçu, en réalisant qu’elle recherchait… cette autre personne?
Une lèvre inférieure mordue, un soupir par le nez relâché, un sourire forcé.
Sois gentille.

« Allons la retrouver, oui. »

Heureusement, ou non, les recherches ne fut que très brève.
Cette fameuse étrangère n’avait pas tardé à retrouver le duo que formaient maintenant Hirondelle et Abysse. Et si la dernière semblait soulagée de la retrouver, la première ne semblait que trop peu partager cette joie. Malgré un grand sourire et une caresse sur la main de Stardust.

« Je connais bien les environs, restez près de moi, je vous en prie. »

Ruse ou vérité, difficile à dire avec la blonde.
Mais visiblement, elle n’avait pas la tête à la fête, si bien qu’elle invitait ses deux ami.es à l’accompagner pour prendre place sur un banc, déjà occupée par un Chacripan endormi. À l’approche des humains costumés, il se redressait lentement, non sans s’étirer de part et d’autres, puis se secouer pour finalement mieux les saluer. Pile au moment où Hirondelle venait prendre place sur le banc et sitôt devenir le nouveau lit de fortune du Pokémon Ténèbres.

« Halloween, la Fête des Morts, la journée du 31 Octobre à plusieurs noms et significations, dépendant de votre culture je dirais. D’où je viens, c’est une fête pour se costumer et récolter des bonbons. Mais ailleurs, c’est une journée spéciale pour connecter avec les âmes qui nous ont quittés par le passé. Je trouve la seconde option plus agréable, bien que déchirante… »

Ses mains caressaient distraitement le félin qui semblait ravi d’avoir un peu de compagnie ce soir.

« Mais je sais aussi qu’il ne faut pas déranger la mort. Essayer de communiquer avec l’audela est difficile et risqué. Bien que beaucoup ignore les dangers d’une telle pratique… Personnellement, je préfère m’abstenir. Je sais mon énergie trop… Négative. »

Les deux amis avaient acceptés que la sorcière se joigne à eux. Le forain expliqua les règles du jeu. C’était en soi un jeu très simple, mais lorsque vint le temps de commencer. La jeune femme, sorcière pour un soir, fut surprise de la difficulté à viser. Le jet du pistolet n’est pas droit, impossible de remplir correctement le ballon pour le faire exploser.

Du grabuge avait lieu plus loin, mais la cause ne l’intéressait pas. Elle préfère ce tenir loin des ennuie, après tout elle était ici pour essayer de s’amuser et de décompresser de son quotidiens chargé, surtout émotionnellement, depuis quelque temps.  Les cris semblaient aussi avoir déconcentré ce médecin de la peste, qu’il envoya le fusil à eau dans la direction de Bandit.

La jeune femme espérait y voir une occasion de rattraper son retard sur le remplissage de son ballon. C’est à peine qu’elle avait pris le tour que le ballon de l’arrosé par l’arroseur éclata. Le faisant ainsi gagner.

Elle était déçue de ne pas avoir gagné, en même temps, pourquoi voulait-elle une peluche? Parce qu’elle en a jamais eu a elle et parce que tout jeune fille se respectant en possédait une? D’un simple soupir elle se résigna, elle ne gagnerait pas à ce jeu.

‘’Vous sortez ensemble?’’

Sorcilence n’avait pu s’empêcher de poser la question, en voyant Bandit offrir à abeille la peluche, alors que celle-ci l’avait tout juste arrosé à l’instant, bien que c’était un accident. Pour ce faire pardonner, le médecin au bec d’oiseau, l’invitait à la maison hanté.  Elle était également invitée.

‘’Je n’ai jamais été dans une maison hanté, c’est amusant de jouer à se faire peur?’’

Chose qu’elle ne comprenait pas, après tout, il en fallait beaucoup pour l’effrayer.  Il faut beaucoup plus que des gens costumés pour l’effrayer, surtout qu’en ce moment, tout le monde est costumé. Ceci-dit, elle était tout de même intriguée de vivre cette expérience.

‘’ Je veux bien venir, après vous pourrez me montrer d’autre jeux? ‘’

Normalement, elle n’aurait jamais demandé de continuer à jouer avec des gens, préférant s’arranger seule. Peut-être était-ce le fait de tous être costumer, ou alors espérait-elle, elle aussi se faire offrir une peluche? Finalement, elle n’en démord pas, elle veut un des ces pokémons rembourrer. Un caprice d’enfant qu’elle n’a jamais pu faire.

Le trio ce rend donc vers cette fameuse maison hanté. Dans la file d’attente, on peut clairement entendre les cris de terreur provenant de l’intérieur. La musique qui y joue est également propice à l’atmosphère horreur. Lorsque qu’arrive le tour des personnes devant notre drôle de trio, on dirait que l’ambiance à eu raison de leur motivation à y entré.

‘’C’est notre tour, vous n’allez pas vous dégonflés, pas vrai?’’

La jeune sorcière à déjà vécu des situations bien plus effrayante et elle ne semble pas apeuré  pour le moins du monde.

Une fleur délicate perdue dans un champ d’épines. Sa fragilité en lieu public ne lui échappait jamais, et elle la ressentait pire que présente au bal de ce soir.
Notre Marigold avait l’air d’une jeune fille fragile se faisant aborder par un grand monstre, la taille imposante du Lockrigan et la peluche du masque rappelait les costumes de mascottes dans les festivals de la région exotique d’où elle venait. La rouquine ne pouvait s’empêcher de rougir en ressentant une forme de vulnérabilité. Elle ne reconnaissait pas la voix de la personne qui se trouvait sous le masque.
Après tout, c’était le but du bal masqué. Être quelqu’un d’autre.
Elle repoussait une mèche ébraisée qui gênait son visage, dégageant aussi l’éventail qui cachait le bas de son visage, révélant des lèvres rouges qui venaient complimenter son teint pâle. Elle n’avait jamais été aussi belle, peut-être était-ce pour cela qu’elle ressentait autant de timidité ?
Le Lockrigan à la voix caverneuse devait aussi la trouver jolie, puisqu’il l’invitait à boire avec lui. Chose à laquelle Marigold se sentirait mal à l’aise de refuser… Tant qu’à être coincée au milieu d’une foule effrayante, mieux valait-il prendre la main qui se tendait à elle pour s’éclipser.

Ça ne valait rien d’être une proie coincée au centre d’une pièce remplie de prédateurs.
C’était un défi de se sentir aussi seule.

« Avec joie. »

Elle se glissait aux côtés de cette personne excentrique avant de la guider au buffet, non sans glisser sa main frêle contre la sienne. Étonnant, ce n’était pas le genre de Marigold d’être aussi physique, mais ce soir, ce n’était qu’un jeu. Même si cela l’écoeurait un peu.

L’étrange duo s’était déplacé au buffet, où la rousse avait servi un verre de punch à son nouvel accompagnateur, esquissant un sourire avant de lui tendre son verre.

« Cheers. ~ »

En espérant que cela puisse satisfaire la soif de son cavalier, elle prit place sur un banc qui n’était pas trop loin, en venant doucement croiser les jambes. Pas trop l’habitude de porter des talons hauts, et heureusement que non, c’était une vraie torture.

« Par votre accoutrement, je me doute qu’il s’agisse de votre première fois dans un événement de la sorte. Quel masque incroyable… »

Etrange soirée où chacun est une autre personne et se sent libre de vivre une vie qui n’est pas la sienne, porté par l’illusion que tout est permit et celle de leur apparence différente. Libre d’être autre chose le temps d’une nuit, convaincu que cet autre disparaitra avec le lever du soleil, ne laissant aucune trace si ce n’est du regret de ne pas être ce que leur rêve désire, oubliant que s’ils peuvent l’être un soir, ils peuvent l’être quand ils veulent, à quelques exceptions près.

Toi, par exemple, tu ne pourras pas rester Lockrigan toute ta vie, mais tu pourrais être cette personne brillante, scintillante, lumineuse que tout le monde admire, juge ou simplement regarde et conserver sur toi l’attention de la foule, même quand tu descends la rue, à la recherche d’un nouveau vêtement. Tu pourras être et rester plus que tu n’es et vivre pleinement ce que tu veux. Mais tu préfères profiter de ce soir pour être un autre, pour jouer une autre personnalité, pour te mettre dans la peau d’un grand mythe.

Ta voix sonne étrange, même à tes oreilles. Mêlée à ta taille réhaussée, tu te sens géante parlant par orage et tonnerre. Ta proposition, tu l’as jetée comme on laisse tomber une pièce dans un puit, dans l’espoir de voir son vœu en jaillir. Tu ne savais pas quoi attendre de la réponse, un oui gêné ou poli, un non tout aussi aimable, mais pas à cette réponse qui résonne dans ton masque avec engouement. Ce masque qui ne change pas d’expression, pas une seconde, ne laissant à cette rousse inconnue, aucun moyen de savoir ce qui se passe dans ta tête. Même tes yeux lui sont hors de vue.

Tu la suis donc, quand elle se met à côté de toi, pour te mener jusqu’au buffet. Le monde est si bas pour toi, pas tant que tu le dépasses, mais que tu domines ta propre hauteur dont tu as tant l’habitude. Tu explores la foule lorsqu’une main se glisse dans la tienne, gantée. Pas un morceau de peau n’est visible à travers ton déguisement et même les formes de ton corps sont amoindries par le draper de ta tenue. Tu tournes lentement ta tête vers l’inconnue qui te tient maintenant par la main et répond à son geste, par un léger serrement de tes doigts. Ce soir, tu peux être qui tu veux, un Pokémon légendaire, quelqu’un de tactile, de chaleureux.

Quand elle te tend le verre, impossible de savoir pour elle, si tu réponds à son sourire, en tout cas, tu saisis le don par le bout des doigts, redoutant un éclat sur ton tissu immaculé. Tu lèves ton verre à son exclamation et suspend ton geste. Boire ne fait pas partie des choses que tu as prévu dans ta tenue et tu te retrouves piégé par ton propre déguisement. Levé le masque pourrait nuire à ton immersion, à ta personnalité et à ton mystère. Ne pas boire serait triste et pour trop peu poli envers ta compagne.

Celle-ci s’éloigne déjà pour prendre place sur un banc. D’un pas plus lent et plus élancé, tu la suis, découvrant par là-même, un nouveau dilemme. Ta tenue ne te permet par de prendre la position assise sans risque. Cette solution, tu l’as déjà et tu reste debout, devant ta compagne du soir, sans avoir touché à ton verre encore, car la solution ne t’est pas apparue.

Tu la laisses parler, et laisses un temps de silence, le temps pour toi de te concentrer pour produire de nouveau ta voix de ce soir. D’une grande respiration, la voix rocailleuse, quelque peu brisée, âgée et caverneuse sors de nouveau de ton masque.

« Merci. Mais pas vraiment. Je n’ai pas cette forme d’habitude. »

Ta voix est lente, la prononciation est nette.

« Mais c’est la première fois que je porte quelque chose d’aussi complexe. Et vous ? Vous sembliez si seule ? »

Pas de chance pour cette fois… Je me sens mal pour le costume du bandit, mais ça ne semble pas le déranger. Contre toute attente, c’est lui qui est parvenu à faire éclater son ballon malgré le petit désagrément avec mon pistolet. J’aurais pu lui dire qu’il était défectueux, mais j’ai préféré être franche avec lui. D’ailleurs, je le vois récupérer la grosse peluche de Togepi qu’il me tend. J’hésite un moment à accepter, c’était bien lui qui l’avait gagné et pas moi! Selon ses dires précédents, il ne semblait pas intéressé par la peluche, je décide donc de prendre le Togepi géant et le serre contre moi.

- Merci… Murmurai-je.

La sorcilence nous demande contre toute attente si moi et le bandit formions un couple. Heureusement que je porte un masque qui recouvre toute ma tête / visage compris, car sinon tout le monde saurait que j’aie le visage rouge pivoine. Une vague de chaleur m’envahi et j’ai du mal à articuler des mots simples.

- N… Non! Nous ne sommes pas ensembles! Je … Je ne sais même qui s’est! Dis-je, même si j’ai quelques doutes sur l’identité du bandit.

Enfin, tout le monde a accepté ma proposition d’aller dans la maison hantée. Par contre, une fois en file, mon enthousiasme s’estompe graduellement que nous avançons et très vite notre tour arrive. Je serre la peluche de Togepi contre moi en espérant qu’elle me réconforte. Ce doit être étrange de voir un médecin de l’ancien temps serrer une peluche de Togepi contre soi… Des cris de peur venant de la maison hantée me font sursauter. La sorcière est prête à entrer et espère que nous n’allons pas nous dégonfler. Je déglutis et fait un signe négatif de la tête. Nous entrons dans la maison hantée.

À l’intérieur, il fait sombre et il y a des couloirs étroits décorés de toile d’araignées, de poupées au regard vide et de sourire effrayant et tout ce qui peut être digne d’une maison d’horreur! Le planche craque sous nos pas, à moins que ce ne soit des effets sonores, je n’arrive pas à le savoir.

Nous avançons à pas lents à moins que la personne en tête de groupe fasse exprès pour avancer lentement pour profiter plus longtemps du suspense. Mon cœur bat fort dans ma poitrine et même la présence du Togepi géant contre ma poitrine n’est pas suffisante pour atténuer ma nervosité. Tout à coup, une ombre bouge sur ma gauche et lorsque je me retourne, une petite fille aux longs cheveux noires jaillie d’un faux miroir en poussant un cri de mort qui me fait pousser à mon tour un cri. Quelle idée de les avoir invité à visiter une maison hantée!!

La remarque de la sorcilence - qui est tout sauf muette - me fait presque exploser de rire alors que ma partenaire d’arnaque est en train de mourir de gêne. Tant d’innocence, c’est chou et mignon. Mais non, je n’ai pas vraiment prévu de sortir avec elle. De plus, ça serait un peu creepy pour différente raison. Restez célibataire les gars, c’est bien moins fatiguant pour tout le monde. Surtout pour moi. Mais ça n’est pas le sujet.

"Comme elle l’a dit, non, pas vraiment, et ça n’est pas prévu non plus de mon côté."

Si elle avait des espoirs, tant pis. Je n’aime pas m’amuser avec ce genre de chose, et je ne vais pas lui mentir plus longtemps que nécessaire (et le temps nécessaire est de 0 seconde). On ne joue pas avec les sentiments ! Du moins, dans une telle fête déguisée...

"Pourquoi une telle question ? Une sorcilence serait jalouse d’une humaine ?"

Un prétest pour un rendu, je pense qu’elle a surtout dit ça pour s’amuser ou par naïveté. Ou les deux. Dans tous les cas, ça m’a bien amusé donc je ne vais pas me plaindre.

"À toi de me dire ça, je ne comprends pas trop l’intérêt non plus, mais je présume que si ça marche, c’est pour une raison."

Je ne suis juste pas le bon client. Je suis rationnel, je sais ce qui est vrai et ce qui est faux. C’est vraiment le fait que c’est un endroit sombre qui me stresse...

"Je n’ai pas de soucis à ce que tu restes avec nous, c’est comme tu veux."

Tout est plus sympa en groupe dans ce genre d’évènement, ce n’est pas ça le principe ? Et si la sorcilence semble prête pour la maison hantée, ça n’est pas la même chose pour celle qui a proposé cette activité : son stress est palpable et de plus en plus intense alors que nous ne sommes même pas rentrés.

À l’intérieur, ça devient pire. Sans surprise, la sorcilence dirige la marche. Pour l’autre, c’est pire et de mon côté, je deviens parano (ou alors plus parano que d’habitude). Il faut tout surveiller, tout analyser. C’est du faux sang, ce membre découpé est plutôt bien foutu, et dieu merci les zones d’ombre ne cachent pas grand-chose.

Par contre, je vais devenir sourd si elle continue de me hurler dans les oreilles. Pas grave, on ferme les écoutilles et je vais me concentrer sur une seule chose : sortir d’ici. Le reste, on verra plus tard.

Et c’est donc costumé, habillé, tête aux pieds, que Dragon rejoint les festivités. Malheureusement, Dragon n’avait pas eu le temps de se coordonner au préalable avec des amis et avait finalement rejoint la scène, bien que tardivement. Son costume ? Celui d’un péché capital. Lequel ? A vous de trouver. Mais il le remplit bien et à mis un certain effort dans les dernière touche. Le masque à été fait sur mesure, commandé à une jeune artiste qui avait monté son stand. La partie où l’oeil s’allumait en rouge quand il tournait la tête était particulièrement cool.


Mais bon, ce qui nous intéresse surtout, ce sont ses actions. Car en bon tardif qu’il se doit, Dragon se trouve être quelque peu… étourdis. Enfin, rien de bien méchant, mais bon… Il s’est retrouvé dans la ligne de la maison hantée alors qu’il cherchait un endroit où danser…

Et à votre avis, une fois qu’il s’en est rendu compte, qu’a t’il fait ? Et bien la réponse est simple : rien. Pire encore ! Puisque c’était une maison hantée et qu’il s’était donné tant de mal pour son costume, pourquoi ne pas en profiter ?

Après avoir fait le tour deux fois, Dragon avait repéré l’endroit idéal pour son petit plaisir : un des couloirs approchant de la fin avait une petite niche obscure juste à côté du plancher s’effondrant. Il allait donc s’y cacher et surgir alors que les prochain clients tombaient des nues…

D’ailleurs, vite ! Il pouvait déjà entendre le cri de ses “poursuivants” d’ici. Et avec une voix pareille, les choses allaient être hilarantes !

Et prenant place et ne faisant pas de bruit, Dragon attends ses proies avec délectation.

Et au moment précis ou le faux plancher s’affaisse devant lui avec les trois inconnus dessus, Dragon surgit avec un rire glauque et mauvais venant de la gorge.

L'idée de Bouffon refroidit certaines âmes. En effet, il a beau l'oublier mais les gens ne partagent pas toujours ses centres d'intérêt. Piqué dans son ego, le Hyottoko dévisage Macaron et Hirondelle qui prennent la fuite en abandonnant leur verre. Seuls deux braves individus restent à ses côtés, mettant du baume au petit cœur fragile du clown. Le rejet et l'inconsidération : voilà les hantises de notre protagoniste. Ce dernier, alcoolisé, aurait pu insulter stupidement les étrangers qui sont partis sauf que ça n'arrangera en rien les choses. Le fou ne peut que tchiper avant de vider le verre de Macaron.  

“ ... au moins, y'a que les vrais qui restent. ”

Un goût amer reste en travers de sa gorge. Il marmonne dans sa barbe quelques injures indiscernables à l'oreille. Puis, l'un des derniers survivants tend son verre, acceptant dans sa grande générosité de trinquer avec bouffon.

“ Santé à vous ! ”

Les poivrots cognent leur verre avant de s'enfiler la boisson dans le gosier. Le bouffon pousse un soupir d'aise et se vautre sur le comptoir comme à la maison.

“ Ah, sacrée soirée ... faut en profiter avant que Le Dieu punissent les habitants. Qui seront les prochaines victimes de la malédiction ? ”

Le timbre de notre protagoniste se fait plus grave et sérieux. Ce soir, c'est la nuit de toutes les frayeurs et pour rester dans le thème, sans le demander à ses partenaires, Bouffon leur raconte une légende.

“ Vous connaissez l'histoire de la malédiction d'Oroshisama à Fort-Des-Songes ? ”

Sa phrase peut prêter à rire, or ce n'est pas le cas pour le Hyottoko. Il avale la dernière goutte sucrée de son punch avant de poursuivre son histoire.

“ Y'a fort longtemps, une divinité régnait sur le village. C'est grâce à elle que les villageois avaient richesse et prospérité, elle était vénérée par tout l'monde ! Sauf qu'un jour, la team Mistral décida de foutre la merde à Fort-Des-Songes en voulant capturer la déesse. Leur mission avait malheureusement réussi et les sbires Mistral torturèrent la créature jusqu'à la transformer en véritable machine de guerre. Un jour, elle trouva le courage de se rebeller. Mais ce n'était plus là déesse sage et généreuse d'autrefois : elle était devenue un monstre impitoyable, semant la misère là où elle passait tellement elle était remplie de rancœur. Alors qu'elle retrouva les habitants du village, ils décidèrent de l'emprisonner dans une vieille demeure aux abords de la ville en espérant limiter ses pouvoirs dévastateurs. ”

Sans modération, le bouffon se ressert de l'alcool. À force d'en boire, ses gestes deviennent incertains et il finit par renverser du sucre sur son drapé. Heureusement, il en a rien à fiche.

“ On dit que chaque année, à cette période d'Halloween, elle ressurgit pour apporter le malheur à quiconque osant pénétrer dans la maison hantée. Et si vous avez le malheur de ma croiser ... ”

D'un coup, le conteur reste statique, sans un mot. Une fois que ses interlocuteurs sont suffisamment plongés dans son récit, il hurle en levant les bras :

“ FUYEZ ! Ou elle vous réduira en poussière dans d'atroces SOUFFRANCEUHS ! ”

Évidemment, c'est du pipeau et ses amis vont vite s'en rendre compte. Ne pouvant pas les laisser dans le doute, Bouffon finit par rigoler en se délectant des réactions même les plus minimes.

“ Vous la notez combien mon histoire ? ”

L'alcoolo s'abreuve de son verre à moitié plein. Les yeux tout petits, il fixe Nagoriyuki et Een avec un grand sourire dissimulé sous son masque.

“ J'adore les histoires qui font peur. Y vous êtes déjà arrivé des choses paranormales dans votre vie ? ”

Bien assis sur son tabouret, Bouffon pose sa tête sur sa main, gourmand d'histoires vraies et flippantes.

Les deux amis du moment, admettons qu’ils le sont pour cette soirée, confirmait tout les deux par la négation, à la question de la sorcière. -Étrange comportement- Ce dit-elle. Qui donnerait un cadeau à quelqu’un qu’il ne connaît pas? Les actions des gens la laissaient parfois dans l’incompréhension.

‘’La jalousie existe chez tout les êtres vivants, humains comme pokémons, mais non, je ne suis pas jalouse.‘’

La Sorcilence n’est pas vraiment honnête envers ses sentiments, elle ne sait pas les identifier tout simplement. Alors oui, elle est peut-être un peu jalouse. La jeune femme aurait bien aimée avoir une peluche aussi. Ce sera pour une autre fois.

Après ce petit papotage, le trio prend la direction de la maison hanté. Juste avant d’y entrée la Sorcilence s’assura que ses compagnons ne lui feraient pas faux bond. Elle ressent une pointe d’hésitation venant de leur part, mais ils s’enlignent pour tout de même tester leur courage. D’un naturel plutôt calme et non anxieuse, c’est elle qui ouvre la marche.

Tout est faux, les décorations, le sang, les têtes d’animaux mythiques, les différentes parties du corps démembrées. Sachant tout cela, sa brise le réaliste selon elle et vraiment, elle ne ressent même pas la peur montée en elle. Pour le coup, ce n’est pas tant effrayant pour une maison hantée. Les seules choses qui lui on fait faire le saut était les marionnettes avec les détecteurs de mouvement. Elle s’y est fait prendre deux fois, mais pas devant les autres. Trop de poupées de ce style brise un peu de leur effet et à force, elle fini par les distinguer avant même de passer devant.

Elle prend quand même le temps d’admirer le décor et le souci du détail dans chacune des décorations. Les organisateurs on quand même été minutieux. Ce n’est pas parce qu’elle n’est pas effrayée que ce n’est pas une ‘’bonne attraction’’ pour d’autres. La preuve est là, les deux autres qui l’accompagnent n’ont pas l’air aussi détendu qu’elle. La sorcière ne le voit pas dans leur visage à cause des masques, mais la gestuelle parle d’elle même.

Elle voudrait bien marcher plus vite, mais comme elle n’a pas l’habitude des talons hauts, surtout de cette hauteur, elle marche lentement. Donc c’est après un certain temps de marche a travers ce faux labyrinthe qu’est la maison des horreurs, que le groupe a presque atteint la sortie.

Seulement, la jeune femme ne s’attendait pas à ce qui allait se produire. Surgissant devant le trio, riant d’un rire glauque, la sorcière fit le saut en poussant un léger cris de surprise. Sous ce même effet de surprise, elle avait reculé d’un pas en arrière et l’un des talons se brisa la faisant tomber au sol.

La Sorcilence a eu toute une frousse, mais sa prochaine réaction n’était probablement pas ce a quoi les gens présents ce serai attendu de voir. Elle éclatait de rire, pas juste un petit rire, mais vraiment un rire qui venait d’un réel amusement.  Elle riait à l’éclat au point d’en avoir des larmes aux yeux.

Lorsqu’elle reprit contrôle de ses émotions, elle enleva ses talons et se remis debout. Essuyant les larmes qui avaient coulées, elle adressa ensuite quelques mots au comédien.

‘’J’ignorais qu’ils avaient engagé un comédien pour faire peur aux gens, je me suis bien fait prendre. J’ai eu une belle frousse, bien joué!’’

La jeune femme tapota l’épaule amicalement du comédien pour l’encourager puis repris sa route pieds nue vers la sortie de la maison hantée. Sa bonne humeur venait d’augmenter, c’est la première fois que quelqu’un arrivait à la surprendre de cette façon et elle en était amusée.