Une main plaquée sur son chapeau de soleil, sa tresse française dans le vent poussiéreux, Tanya courra aussi vite que ses longues jambes luit permit de faire, sa vaillante ponyta dédiée porte-bagages à ses côtés. Heureusement qu’elle avait opté pour ses mini shorts en jeans déchiré, parce que sa jupe de dentelle n’aurait certainement pas tenu le coup! Fonçant à toute vitesse vers sa destination, l’adolescente se remémora tous les embrouilles stupides qu’elle dû surpasser pour enfin arriver à où elle en est maintenant. Elle avait renversé son déjeuner sur ses habits et dû se réinventer une tenue en 5 minutes, elle avait failli manquer son transport, son cartable photo s’était ouvert et avait renversé toutes ses dernières images dans son sac, Prada avait réussi à enrager le pokémon d’un passant en lui mordant une fesse, un les semelles de ses sandales c’était brisé dans son transport et a dû s’en racheter de nouvelles dans un magasin artisanal bondé, une de ses bouteilles d’eau s’était renversé sur le pavé brulant, bref! Tanya était plus qu’heureuse que son idée de partir 4 heures en avance eût valu le coup! Un rendez-vous avec une célébrité de la région, ça ne se manque pas! Surtout quand elle performe aussi bien dans le domaine dans lequel tu souhaites t’épanouir…

Cinq minutes avant l’heure, Tanya arrivait enfin dans le monde hostile et brûlant qu’était Herisis. Son corps en feu, sa gorge remplie de poussière et sa tresse en détresse, elle fouilla le désert à travers ses lunettes de soleil rondes, à la recherche de la starlette et son Feunard arctique. Prada, elle, loin d’être essoufflée, trottait joliment devant sa dresseuse, semblant adorer le soleil qui faisait briller sa robe encore plus. Même avec les sacs de réserves et d’équipement sur son dos, la pouliche avait encore l’énergie et la vigueur d’aller de l’avant et trouver ses homologues à la place de sa dresseuse. Oreilles dressées, elle s’arrêta un moment, humant l’air chaud à la recherche d’une odeur. Apercevant enfin un moment pour reprendre son souffle et s’hydrater, Tanya attrapa sa gourde d’eau et en bu un bout coup, éclaboussant quelques gouttes sur le visage de Prada pour la rafraichir. Désaltérée et moins exténuée qu’avant, la rousse se tâtonna frénétiquement, à la recherche de son miroir de poche. Son reflet en main, elle essaya d’avoir l’air présentable aux yeux d’une vedette. Elle essuya la sueur qui lui perlait au visage et à la poitrine avec sa camisole blanche, écrasa les grumeaux de son mascara avec ses doigts habitués, défit le bordel qu’était sa tresse et fit couler ses cheveux ondulés au gré du vent. Un dernier coup de gloss sur les lèvres et elle avait l’air d’une professionnelle, plus ou moins. Elle baissa ses yeux sur sa tenue pour s’assurer que tout était à sa place, s’assura que ses sandales étaient bien attachées, puis tourna son regard sur l’apparence de son pokémon qui…était déjà parti à la rencontre de Lise Gray sans elle. Fantastique!

Trottant aisément dans le sable ardent des dunes, Prada disparut à l’horizon orangé du désert, hennissant joyeusement durant tout son trajet. Exaspérée, Tanya suivit sa pouliche jusqu’en haut de la montagne de sédiments, espérant que celle-ci la mènerait bien à son rendez-vous et non à une oasis paradisiaque remplie de carottes et de lait meuhmeuh. Tanya avait toutefois raison de lui faire confiance à son pokémon! Car une fois au sommet, Tanya vit sa ponyta gentiment se présenter à la grande rousse et son renard bleuté, paradant devant eux avec son charme habituel. Relâchant un dernier soupir de fatigue, la photographe envoya la main à la vedette qui lui avait proposé son contrat et marcha dans leur direction avec un sourire timide aux lèvres.

Ensorcelée par le charme et le sourire de Lise, Tanya ne put que réciproquer les faits et gestes de  la célébrité avec la même énergie. Lui faisant la bise à son tour, elle ne put qu’apprécier la familiarité et le naturel de leur rencontre, comme si elle revoyait une bonne amie après un long voyage. Lise ne semblait pas le genre de vedette qui avait la tête enflée et le snobisme dans le sang, quel soulagement! Après leur embrassade, c’était comme si toute la fatigue et le stress du voyage se volatilisèrent en seul instant. Les joues en feu par la joie et la gêne, Tanya laissa transparaître un énorme sourire sous son nez. Elle retira ses lunettes de soleil, question de politesse.

« Haha! Enchantée, Lise c’est un vrai plaisir de faire ta rencontre en personne! J’ai vu des affiches de tes prestations dans toutes les villes que j’ai traversées pour arriver jusqu’ici. Félicitations, vraiment! »

À son tour, la plus vieille des deux rousses s’agenouilla dans le sable, grattant le menton du splendide feunard venu à sa rencontre. Elle avait bien fait de choisir Erisis comme arrière-plan, le pelage bleuté de la renarde complimentait parfaitement le sable et les alentours.

« Bonjour à toi aussi, Snow! Toujours aussi belle que dans les photos, on dirait. Ravie de voir tes belles queues en chair et en poil! Oh? Elle? Oui, c’est Prada! Ce ponyta est une vraie merveille, quand elle le veut bien. J’ai très hâte de l’entrainer pour les concours! »

Au son de son nom et de la remarque de sa dresseuse, la pouliche s’empressa de répondre, hennissant et acquiesçant d’un coup de sabot au sol. Décidément, elle avait la pêche aujourd’hui! Tapotant son menton de ses doigts, la photographe se remit sur ses deux sandales, à la recherche d’un endroit parfait pour les photos. Mais quand tout se ressemble, c’est difficile de trouver l’endroit « parfait ».

« Voyons, pas la  peine de s’excuser pour ça, c’est tout à fait normal! À 19 ans, les vouvoiements, ça ne m’intéresse pas trop… Et puis c’est un grand plaisir me faire tutoyer par une aussi jeune et talentueuse coordonnatrice que toi!  Le fait que tu n’as qu’un an de moins que moi et autant d’expérience sur scène me rend vraiment honorée! D’habitude, je ne suis qu’un œil supplémentaire qui dit aux autres comment se placer et on ne s’occupe pas vraiment de moi. Mais un accueil aussi chaleureux que votre ne sera jamais pris pour acquis, merci à toutes les deux! Vraiment, je vais me sentir utile aujourd’hui! Je ne vous promets rien de moins que mon meilleur travail! »

La plus vieille pointa une dune au fin fond du désert. C’était une dune bien banale qui ne présentait rien d’extraordinaire, mais les accumulations rocheuses qui l’entourait et les chaines de dunes qui la succédaient avaient toutes un petit quelque chose de spécial. La dune elle-même n’était peut-être pas le meilleur des endroits, mais les trouvailles qu’elles trouveraient en chemin seraient peut-être encore plus prometteuses que la destination.

« Tu vois cette dune, au fond? J’y vois beaucoup de potentiel, mais elle est très loin. Ça te dirait de nous y rendre tranquillement et de prendre quelques photos en cours de route? Bien souvent, les meilleures images sont prises sur le coup, sans directives ou pression. Et puis, si on se fatigue ou que le soleil devient trop fort, on aura qu’à revenir. »

Avant que le silence ne s’installe entre les deux femmes, Lise en profita pour bombarder Tanya de questions et de détails forts intéressants sur Lumiris et ses groupes. Hochant la tête nerveusement, elle tenta de garder le rythme en comptant les personnages importants des Pléiades sur le bout de ses doigts, essayant du mieux qu’elle le pouvait de relier le tout ensemble. Quand l’artiste crut enfin comprendre le tout, elle hocha la tête joyeusement envers sa copine.

« Hum! Oui, je suis des Pléiades! Comme toi et…Rin et Naika sa petite amie, qui est aussi ta meilleure amie, c’était bien ça? J’ai compris? J’ai compris! Je suis navrée de ne pas m’être plus informée sur les célébrités du groupe, j’ai eu tant à faire avec notre déménagement et mon retour à la danse… Prada et moi on arrive de Sinnoh, Unionpolis pour être plus précis. Bref, on n’arrive pas directement de Sinnoh, faut le préciser. Ma famille a fait beaucoup d’escales dans d’autres régions, avant de se poser ici, question de voir un peu plus du monde et tout le tralala… »

Un petit vent chaud se leva soudainement et empota avec lui des vagues de sable et des nuages de poussière bien irritants aux yeux. Portant ses bras à son visage et cachant sa pouliche derrière elle, Tanya s’empressa de remettre ses lunettes de soleil là où elles se doivent d’aller. Appareil photo en main, elle se tourna vers la starlette question d’estimer sa profondeur de champ et refaire sa balance de blanc.

« Tu voudrais bien marcher devant moi s’il te plait? Avec tes cheveux dans le vent comme ça, c’est sublime! Ne te gêne pas d’amener Snow aussi. Une petite brise comme ça c’est parfait pour rajouter du drame à une photo, même si le sable est assez irritant merci. Marche naturellement, et si ça te dit de faire des poses, défoule-toi! Le plus important c’est d’avoir du plaisir. Allez, on sourit! Parfait!»

Après quelques clichés satisfaisants et une montagne de sable dans la bouche plus tard, la rousse à l’appareil s’empressa de demander un second avis face à ses dernières prises. Essayant de cacher l’écran numérique du soleil, à l’air de son chapeau, Tanya montra ses dernières images aux vedettes du jour. C’était leur avis qui comptait, après tout!

« Vous aimez? Ce n’est que le début, après tout! On aura surement beaucoup d’autres opportunités de prendre des photos en chemin. Si jamais t’a une idée de pose ou une certaine image en tête, Lise, n’hésite pas à m’en faire part! Une coordonnatrice sait comment se présenter devant une caméra, autant plus que le photographe sait comment prendre de bonnes photos! »

La plus vieille pinça ses lèvres, une question lui brûlait sur le bout de sa langue. Un drôle de goût amer lui revint.

« Dis, Lise? La coordo, c’est un métier comment? Depuis que je suis jeune, j’ai toujours voulu monter sur scène et danser avec mes pokémons, mais je n’en ai jamais eu la chance…C’est comment? Énervant, stressant, fantastique?»

Tanya souffla sur la lentille de son Kodak, le sable et la poussière s’en révélant dans l’air à chaque expiration. La description de Lise sur la coordo, ça lui rappelait bien son professeur de ballet. Un vrai zélé rempli de passion qui pouvait empoisonner avec ses critiques, puis guérir avec ses compliments. À ses yeux, si ce n’était pas fait à la perfection, à quoi bon le faire? C’était cet homme un peu efféminé qui lui avait appris le vrai sens d’être en équipe et de fonctionner en unissons et non en unité. Le corps de ballet est souvent bien plus important que la ballerine qui fait son solo, et ce n’est pas l’originalité d’une danseuse qui fait son talent, mais bien sa capacité à se fondre parmi les autres. C’était toujours comme cela que Tanya voyait les concours de pokémons ou, du moins, comment elle envisageait la faire. Se fondre parmi les siens et les guider durant le spectacle, tout en étant le spectacle elle-même. Elle rêvait les yeux ouverts, totalement distraite par ses rêves de scène. Puis, le son d’une ville familière lui ramena les pieds dans le sable.

« Hum! C’est pas vrai! On passait nos vacances d’été, à Rivamar, quand j’étais jeune! Le fait qu’on ait pu se croiser aussi jeunes me fait rêver! J’arrive pas à y croire…»

Elle recracha du sable, apparemment elle rêvait la bouche ouverte aussi.

« Wah, vraiment? Ça ce serait tout un honneur de monter sur scène avec toi et tes pokémons! Noël c’est tellement un thème magique, je suis sûre que Prada serait ravie de danser sur scène avec Snow! Je peux déjà voir ma mini Prada avec un bel attelage rouge avec des grelots et rubans de soie rouge autour des pattes! Ou peut-être une couronne de Noël autour du cou? Faut que je note ça avant d’oublier! Regarde, elle est déjà toute heureuse de monter sur scène! Elle est en train de répéter les pas que je lui ai appris sur la musique du Casse-Noisette. Parfois, elle vient me rejoindre dans ma chambre lorsque je fais mes pratiques de ballet. Prada a vraiment la danse facile, comme tu peux voir!»

La plus petite rousse désigna son ponyta qui bougeait déjà ses pattes en croisés en dandinant sur place au son d’une musique inaudible. Les mains dans son petit sac à bandoulière ultra léger, à la recherche de son petit carnet de notes et un stylo de quoi écrire ses idées, Tanya ne pouvait pas défaire son esprit de sa première prestation aux côtés de Lise Gray, une grande vedette des pléiades.

« Au fait, t’a une idée pour ta présentation de décembre? Un thème de couleur, une musique? Car c’est bien beau de faire un truc sur noël, il faut pas y aller super cliché non plus!»

Prenant quelques clichés additionnels de Lise et son pokémon couchées sur le sol, Tanya se donna une tape dans le dos imaginaire, appréciant nettement plus son œil pour les couleurs qu’au paravent. Les reflets bleutés de Snow contre les cheveux de Lise et le sable brûlant donnaient vraiment des images exquises. Un peu plus et les couleurs se mélangeaient en un petit mauve doux et lustré, qui faisait briller le sol comme des pacotilles. Une siffla Lise, la remerciant et la complimentant pour ses délicieuses images qui rendaient certainement service à eux deux.

« Les pléiades mettent le paquet quand ils font des projets, tiens! Je suis avec vous à 200%, vous n’avez qu’à demander ce dont vous avez besoin! Pour les arts et le spectacle, je me donne jusqu’à l’épuisement et rien de moins! »

Les deux rousses continuèrent à se suivent, l’une avec les poses et l’autre avec l’objectif. Son album n’avait pas loin d’une cinquantaine de photos, jusqu’à présent, et la dune au bout du désert était encore à une bonne heure de marche. Tandis que Lise continua de décrire ses plans pour le gala de décembre, Tanya en profita pour boire quelques gorgées d’eau et bien hydrater son ponyta assoiffée. Rattachant ses cheveux bombés par l’humidité, la photographe s’aspergea a nuque d’eau puis continua de prendre des clichés des demoiselles.

« Wow, avec autant de talent sur scène, j’espère ne pas faire trop de gaffes… Mais il faut commencer quelque part! Faites attention les pléiades... Un jour, je serais peut-être au même rang de notoriété que vous! Haha! Je vais devoir me botter les fesses et me trouver une équipe qui a du mordant, mais j’y arriverai bien un jour! »

Les genoux dans le sable, elle s’attaqua sur Snow particulièrement, espérant bien immortalisés les flocons bleutés de sa fourrure contre le sol jaunâtre. Puis, plus rien. Elle avait beau cliquer et recliquer, l’appareil n’en avait rien à faire. Un gros diagramme de batterie en train de surchauffer apparut à l’écran et fit grincer les dents de Tanya.

« Ah, ce n’est pas vrai! Je suis vraiment désolée, Lise! Mon appareil est en surchauffe, pas moyen de la faire fonctionner dans cette chaleur… Si ça n’avait été qu’un problème de batterie défectueuse ou en manque d’énergie, on serait couvertes pour 4 heures encore, avec mes précautions. J’ai même apporté 3 lentilles différentes, juste au cas où! Mais avec un problème comme la température, je ne peux rien y faire… On va devoir rentrer en ville se trouver de l’ombre puis revenir quand le soleil est plus bas. À moins…»

La mine un peu basse, la photographe se mordilla l’intérieure de la joue. Si c’était impossible de prendre des clichés le jour…

« Hum! En fait, je crois que ça va être encore plus beau, le soir! Si ta feunard voulait faire des attaques glacées, j’aurais qu’à demander à Prada de fournir l’éclairage nécessaire! Oh, je sens que ça va être magique! Avec les reflets de la glace, et le feu, et les étoiles, et toi! Je te promets que personne ne t’a jamais pris e photo comme je vais te prendre ce soir! En plus, ça donne le temps de faire le tour des magasins du coin! T’as envie d’un peu de magasinage, Lise? Allez, dis oui?»

Marchant dans le sens inverse vers la petite villa au loin, les filles se mirent à faire ce que les filles font de mieux. Faire la causette! Bras dessus bras dessous, elles se racontaient leur histoire de vie comme si elles se connaissaient depuis toujours, sans aucune gêne de demander ou de répondre.

« Oui! Tanya Amber, à ton service,  très chère! Mhh…Que dire sur moi? Je me considère comme une artiste expérimentale, vu que je fais beaucoup plus que juste de la photographie. Je fais du ballet, de la peinture, un peu de création d’accessoires et de la couture! Mais je peine à décider dans quelle voie je devrais me spécialiser…L’art c’est tellement vaste et grand! Comment oserais-je me limiter qu’à quelques médiums puis me consacrer pleinement qu’à un seul?! La voie la plus facile pour moi serait de faire de la coordo de pokémon, comme ça tous mes talents seront utilisés dans un seul but. Mais, bon! Les spectacles de ballet, ça me manque énormément aussi. Reste juste à retrouver toute ma flexibilité d’antan et rejoindre une compagnie qui voudrait bien de moi. Le gros point final serait que je m’adore! J’aime prendre soin de moi, parce que je le vaux bien et toutes les filles devraient s’aimer et s’accepter autant que je m’aime et que je m’accepte. Ceux qui n’aiment pas peuvent aller se perdre dans le désert! »

Elle ria de pleine voix, posant sa tête sur l’épaule de Lise et lui serrant le bras pour lui signaler que ce n’était qu’une vilaine blague. Se grattant le cuir chevelu sous son chapeau, Tanya regarda son ponyta valser sur les dunes comme si de rien n’était. Elle lui enviait ses sabots plats et sa résistance à la chaleur, un peu plus et elle fondait dans ses mini shorts.

« Mais, ma priorité reste le bonheur de Prada et de mes prochains coéquipiers! Je passe toujours en second quand ça vient à Prada…Elle coute vachement cher à garder de bonne humeur, cette petite chipie!  Mais je l’adore c’est bien drôle à voir. Mais assez de moi! Assez! À toi, maintenant! Déballe-moi ta vie. Ton passé, ton présent ton futur. T’as un copain? C’est clair que si! On se ressemble tellement, y’a pas un homme intelligent sur terre n’oserait nous refuser avec nos corps de déesses. C’est quoi son nom?»

Cachée sous son gros chapeau de soleil et ses lunettes fumées rondes, seul un sourire curieux semblait transparaitre sur son visage de rouquine. Curieuse et assoiffée de détails sur la vie personnelle de sa nouvelle amie, ne pas lui demander quelques détails sur sa vie sentimentale serait un gaspillage cruel de leur temps. Après tout, elles ne deviendraient jamais « meilleures » amies sans parler de garçons au moins une fois. Herisis et ses maisons de béton étaient encore à une bonne vingtaine de minutes de marche, alors aussi bien commencer la conversation avec un sujet intéressant.

C’était bien drôle à voir, des rousses de la même taille ou presque qui parlaient de leur passé et leurs plans pour le futur. Une plus jeune et plus grande avec beaucoup de vécu pour son âge, l’autre plus vielle et plus petit qui écoutait la bouche et les yeux grands ouverts. Lise semblant lui venir d’une autre planète, une fille qui sortait de l’ordinaire, c’était le cas de le dire! Faire de la coordo pour devenir gym leader, c’est du jamais vu. Tanya fit un petit sourire coquin, quand les détails juteux de la vie amoureuse de Lise vinrent lui chatouiller les tympans.

« Je vois…Eh ben, un gros félicitation ma belle! L’amour c’est beau quand c’est vrai! Je vous souhaite que le bonheur! Mais t’as toute une vie, toi! Phobie de pokémons, une foule de connaissances qui sont champions d’arène, star des pléiades et de la coordo, puis tu penses tous laisser tomber pour avoir ta propre arène?! Je n’y aurais pas cru si ça ne venait pas de ta bouche! À côté de toi, ma vie semble si normale! Haha!»

Se tapant le menton du bout des doigts, Tanya regarda son ponyta d’un œil intrigué. Quels pokémons verrait-elle à ses côtés, hormis son poney adoré? La question était difficile, mais loin d’être sans réponse.

« Hum! Quoique je n’aie pas un plan de match définitif, je peux clairement te définir les pokémons que souhaites fortement rajouter à mon équipe. Mon but principal est de mélanger la surprise à la grâce et l’adorable au puissant! Pas question d’avoir une équipe de concours typique! Et bien entendu, ça commence par faire évoluer ma chère Prada en une superbe Galopa à époustoufler tous les juges! Après ça, je serais à la recherche d’un Couaneton de quoi faire faire un merveilleux Lakmécygne. J’entends qu’ils dansent bien, ses petites bêtes! Un bon ajout à mes performances artistiques. Après le cygne, c’est le caniche! Un beau Couafarel bien taillé à pavaner dans les rues d’Artiesta. Quoi d’autre? Le reste m’est un petit mystère, en toute franchise. Je n’ai que des noms intéressants, mais peu de mérite à les choisir autres qu’à leur beauté ou leur originalité… Je dirais Nymphali,  Dragmara, Kungfouine…Persian? Peut-être un Grahyèna, pourquoi pas. Bien entendu, j’adore les pokémons comme Gardevoir, Milobellus, Momartik et Fragilady, autant que n’importe quelle autre dresseuse! Mais je les trouve… trop utilisés? Et puis les Feunard Alola sont superbes aussi, hein, Snow? Ouuuuiiii! Mais je ne voudrais pas te voler la start de ta future arène. »

Regardant et taquinant la Feunard à travers les jambes ambulantes de sa célèbre dresseuse, Tanya manqua de foncer dans une affiche de rabais d’une boutique artisanale d’Herisis. Un peu surprise, mais loin d’être impressionnée par sa bourde, elle traina sa copine à l’intérieur, qu’elle le veuille ou pas.

« Bon, allons voir ce qui se trouve dans le magasin #1! »

Un drôle de couinement sorti de la bouche de Tanya, lorsqu’elle vu la Mélofée se dandiner vers les pierres évolutives. Les pokémons adorables, c’était bien une de ses multiples faiblesses émotionnelles! Elle peinait toujours à se garder en place lorsqu’elle en voyait dans les plaines ou dans les vitrines de toilettage. Captivée par la petite bête rose sur l’épaule de son amie, Tanya ne pouvait s’empêcher de pincer les joues de Mélofée en crispant son nez et ses lèvres en une drôle de grimace joyeuse.

« Elle. Est. TROP. ADORABLE! Je ne peux pas m’en empêcher! Argh!»

Certes, il était vrai que rien d’intéressant ne se trouvait dans ce magasin. Apercevant le regard du commis un peu irrité, les deux touristes qui auraient pu être confondues comme des sœurs quittèrent tranquillement la place. Tanya lui esquissa un petit sourire charmant, en guise de pardon. Ce qu’elles avaient vraiment besoin

« Désolée, je crois que je me suis emportée en rentrant dans cette boutique, au hasard! Le plus important, c’est de trouver de quoi de chaud pour nous couvrir ce soir. Il doit bien y avoir une boutique de vêtements dans les parages…Oh, y’en a une juste là! »

Tanaya les guida vers une grande baie vitrée qui affichait quelques mannequins en bois habillés de grands châles et autres accoutrements typiques d’Herisis. Les couleurs étaient vives et le tissu souvent magnifiquement orné de paillettes et de coutures extravagantes. Leurs bijoux, eux aussi, étaient d’une extrême beauté, probablement faite à la main de pierres semi-précieuses de la région. Certes, ce n’était pas les habits dont elles avaient besoin, mais c’était un bon début. Un beau début, plutôt. Elle regarda son amie du coin de ses lunettes.

« Woah, t’as vu comment c’est beau? Faire un concours dans une telle tunique serait sublime! J’espère qu’ils sont ma couleur préférée! Et que les prix ne sont pas trop chers…  Tu veux rentrer?  Sinon, je crois qu’il doit avoir ce que l’on cherche à la boutique de l’accueil touristique. Moins flashionista, mais probablement plus pratique. À toi de choisir, Lizy! »

La ballerine afficha un grand souvenir à la coordonnatrice, étrangement fière de lui avoir trouvé un surnom aussi rapidement.

Hypnotisée par les broderies de tout genre, ce n’est qu’au son de la douce voix de Lise que la petite rousse put se détacher les yeux d’une belle étoffe noire aux fleurs rouges brodées à même le tissu. Parcourant les rayons à la recherche de son amie, elle la retrouva dans une section du magasin relativement luxueux et bondé de manteau fait en peau et en suède. Charmée par l’idée, Tanya copia sa nouvelle meilleure amie, prenant le même chandail de la même couleur et de la même taille. Et puis, le blanc se retrouve toujours mieux dans le noir! Touchée par l’offre de lui payer ses habits, Tanya serra bien fort la taille de sa pote, se demandant bien ce qu’elle avait fait pour mériter une aussi belle journée en la compagnie d’une vedette hyper charitable et amicale.

« Oh, merci Lise! Je te promets de te le repayer, un jour! Promis!»

Arrivées au petit comptoir de bois travaillé qui servait de caisse, les demoiselles présentèrent leurs emplettes à la dame âgée occupée à coudre deux pans de chandail ensemble. Incapable de retenir sa curiosité plus longtemps, la plus vieille des deux se pencha presque au-dessus du comptoir, fixant ses mains ridées et habiles faire leur travail.

« Bonjour, madame! Est-ce qu’il aurait un moyen de parler à votre couturière, s’il vous plaît? Celle qui confectionne vos saris et vos tuniques, oui. C’est vous? Madame, je dois absolument vous le dire! C’est impossible de ne pas complimenter votre travail.  Vos coutures et vos choix de couleur sont SU-PERBES! J’ai rarement vu autant de détail et de perfectionnisme dans une robe du genre. Tous vos détails minimes, toutes les textures du matériel, c’est absolument extraordinaire! Quand j’aurais les poches remplies, je vous promets que je viendrai vous en acheter! Juré! Votre costume rouge et noir, au fond, sort de l’ordinaire.»

Les joues rougies et un gros sourire aux lèvres, la dame âgée pressa la main de Tanya entre les siennes, la remerciant avec humilité en hochant la tête sans cesse. Durant toute la durée de l’échange de monnaie, de l’emballage et des politesses d’au revoir, la vieille couturière sourira aux deux rousses avec un air charmé. Décidément, elle ne se faisait pas souvent complimenter sur ses créations, une chose bien dommage, aux yeux de Tanya. Les trois femmes s’envoyèrent la main, lorsque les rousses quittèrent la petite boutique traditionnelle. Tanya en était encore transformée, elle ne pouvait toujours pas s’arracher les yeux des vêtements dans la vitrine.

« Waah, je me sens transformée! Parler avec une artisane aussi talentueuse et charmante m’a vraiment touchée! J’espère pouvoir revenir un jour et lui demander comment elle coût sa dentelle, je n’y arrive jamais. Bon, il est…presque midi selon mon téléphone! Tu veux manger quelque chose Lizy? Il doit certainement avoir de bons restos dans le coin. Aller, c’est moi qui paye ce coup si! J’ai le goût d’un petit quelque chose exotique, pas toi? T’aimes le piquant?»

Guidée par Lise, Tanya fut surprise de voir qu’Heresis était bondé de toutes sortes de boutiques et de restaurants traditionnels. Considérant la vitesse à laquelle elle avait couru à travers la rue principale, afin de se rendre à leur rendez-vous à temps, ce n’était pas surprenant. Maintenant capable d’apprécier la ville et ses belles vues, l’artiste se permettait bien de regarder d’un côté et de l’autre, à l’affut des couleurs et des compositions intéressantes. Une simple salade? Hmm, avec ce que l’étoile venait de lui payer, pas question de lui offrir qu’une simple salade!

« Waaah! Moi aussi, j’ai un œuf! Un évoli avec parents chromatiques. J’ai laissé l’honneur à Prada aujourd’hui, elle semble toujours heureuse de garder mon petit œuf au chaud. Il est dans le grand sac avec mes lentilles de rechange. Nos petits cocos doivent être bien joyeux au chaud, dans le désert! Déjà que je peine à m’en occuper d’un, je n’imagine pas avec deux! T’es forte, Lizy, bravo! C’est des œufs de quoi? Attends, on en parlera pendant le lunch! »

S’avançant vers le comptoir en dévorant tous les plats des yeux, la photographe commanda une salade copieuse et un soda pétillant pour Lise, ainsi qu’une eau citronnée et un sandwich à la viande épicée sur pain frais pour elle. Avec course qu’elle avait entamée en début de journée et la marche dans le désert de tout à l’heure, elle en avait toute une faim de loup. Rapportant leurs mets à la table que Lise avait choisie, Tanya se tira une chaise et lui séparant leurs plats.

« Voilà pour toi, ma chère! J’espère que j’ai commandé la bonne chose. Et quoi qu’il arrive, ne te bourre pas trop l’estomac, j’ai commandé une belle petite surprise le désert! Ils vont nous l’apporter, une fois qu’il sera sorti du four. Ma petite façon de te dire merci pour avoir été aussi fantastique et sympathique aujourd’hui et de m’avoir payé notre superbe habit de jumelles! Bon appétit! »

Retirant les cure-dents de son mets bien chaud, la plus vieille en profita pour glisser les olives sous la langue de Prada. Petite gâterie pour la remercier d’être aussi patiente et bienfaisante en ce grand jour important.

« Alors, les cocos! Y’a quoi dedans? »

Essuyant le coin de ses lèvres avec son napperon, Tanya regarda la rousse assise devant elle avec de grands yeux perplexes. Rassemblant et superposant leurs ustensiles et assiettes souillés afin d’accommoder le serveur, Tanya se pencha vers Lise, zyeutant ses pokémon de type fée.

« Woah, super! J’imagine que tu veux un Nymphali, toi aussi? C’est un superbe pokémon, autant pour le combat que les concours! Mais pourquoi autant de secrets autour de tes œufs? Tu veux garder ça une surprise pour les filles ou t’as peur de leur réaction? Et pour le coco surprise, tu n’as absolument aucune idée de ce qu’il pourrait renfermer? J’imagine que tu souhaites bien qu’il soit un type fée pour ton équipe d’arène! »

Avant qu’elle entende une réponse de son amie, les filles se firent poliment interrompre par le serveur. Plateau de bois en main, il vint débarrasser la table de la vaisselle excédante et déposa le superbe volcan au chocolat et à la framboise, que Tanya avait commandé pour eux deux. La photographe sentait déjà les yeux de Prada lui quêter un peu de fruits, les framboises étaient un de ses fruits préférés. Souriant de toutes ses dents, la plus âgée agrippa sa fourchette avec impatience, invitant la célébrité de la table à faire de même.

« C’est tout pour nous! Je l’ai vu dans la vitrine tout à l’heure et je n’ai pas pu résister! Allez, sers-toi! Je ne pourrais jamais finir ça toute seule! Ça va nous prendre de l’énergie pour remonter les dunes du désert et prendre des photos à couper le souffle! J’espère que t’es pas trop du genre à constamment regarder ta ligne…tu serais probablement superbe pareil, même avec quelques kilos en plus!»

Lui affichant un clin d’œil honnêtement, Tanya pris une petite fourchette du gâteau et la glissa dans la bouche de son poney. Curieuse de l’état de son propre œuf, l’artiste ouvra le pan d’un des sacs de voyage accrochés au dos de son pokémon. Il était toujours là, bien emmitouflé dans une douillette propre, entouré d’objectifs de caméra tous aussi fragiles que sa coque tachetée. Elle laissa Lise la chance de regarder pour elle-même.

« Je ne sais pas encore comment je vais l’appeler…mais je veux lui trouver un beau nom. Quelque chose de chic et de distingué. J’espère que l’inspiration me viendra, quand je lui verrai le museau! Et toi? T’as des idées de prénoms pour tes futurs bébés? »

Flattée et honorée par les commentaires de Lise, Tanya peinait à contenir sa joie et ses larmes. Elle n’avait pas l’habitude de se faire des amis aussi facilement, encore moins d’en impressionner une la première journée de leur rencontre. Un chandail de laine blanc contre un beau repas avec Lise, ça avait bien valu le coup! Tanya se félicita pour son choix de dessert fait à la hâte. Elle avait tout un instinct pour les sucreries. Applaudissant à son tour, la rousse appela poliment son ponyta, espérant que cette dernière ne la déteste pas trop de lui avoir donné autant de gâteau à en avoir mal à rester sur pattes.  

« Vraiment?! Oh, merci! Attends que j’écrive ça, je dois m’en rappeler, pour la prochaine fois! »

Fouillant dans son sac, à la recherche de son petit carnet chéri bien barbouillé d’une couverture à l’autre, Tanya remarqua quelque chose doit elle avait complètement oublié l’existence. Balançant son petit livre rempli d’autocollants, de notes écrites, de pages déchirées et de photos de tous genres, la photographe ressortit son appareil photo polaroid. Pourquoi elle n’y avait pas pensé plus tôt, elle n’en savait rien. Ces bêtes n’étaient pas aussi fragiles que les grosses caméras de professionnels, tant que les bacs pour l’encre et le papier étaient bien remplis, l’appareil n’avait pas tendance à surchauffer. La petite fenêtre carrée devant l’œil, elle imprima un beau portrait de Lise, en souvenir de ce merveilleux repas bien mangé. Autocollants placés à ses quatre coins, la photo fut bien collée sur une page lignée vierge et rapidement accompagnée de quelques notes écrites, de la part de la propriétaire du carnet.



Satisfaite de son résumé, Tanya tourna son carnet vers son sujet du jour, lui laissa la pleine liberté de feuilleter entre les pages.

« C’est mon petit chouchou, j’y mets tout dedans! Des idées de robes, des photos d’amis, des observations de pokémons, des mémos, des autocollants, des coupures de magazines, des morceaux de tissu, ma liste de buts et tout ce genre de blah blah. C’est un vrai bordel créatif! Je m’y retrouve rarement, mais c’est quand on ne sait pas ce que l’on cherche que l’on trouve la vraie inspiration. Je ne t’ai pas déballé ma vie aussi longuement que tu l’as fait…Pas que c’est une mauvaise chose! Je t’assure que j’ai tout écouté! Mais bon, je croyais que ça serait juste pour toutes les deux si je te laissais fouiller dans mon petit journal intime. Je n’ai pas l’habitude le montrer à n’importe qui, mais je sens que je peux te faire confiance, Lizy. Allez, n’ai pas honte! Regarde autant que tu veux! Je n’ai pas honte de ce qui s’y trouve.»

Laissant pendre son petit appareil photo autour du cou de sa pouliche, Tanya se leva et s’étira les membres un peu. Avec autant de gâteau dans le corps, le retour à l’activité serait encore un peu difficile. Un gros sourire aux lèvres, l’artiste se tourna vers la mère poule et ses œufs, cajolant la tête flambée de son ponyta en surdose de gâteau.

« Je vais allez me commander un petit café glacé. Je sais que t’a pris ta dose de caféine ce matin, mais si t’a encore un peu de place pour un digestif, fais-moi signe! On est à l’air climatisé ici, mais je n’ai pas du tout hâte à retourner à l’extérieur. J’ai encore de la poussière dans les cheveux, beurk…Après, on pourra se faire quelques selfies comiques avec mon polaroid, si tu veux! Bientôt, tout le monde aura vu les photos que j’ai prises de toi, à Herisis. J’ai bien le droit d’être égoïste et d’en garder quelques-unes pour moi, non? Faut immortaliser une aussi belle rencontre! Haha!»