Mark arpentait les rues du quartier des affaires qu'il connaissait si bien, vagabondant au gré de ses envies comme à son habitude. Avec lui l'infatigable (ou comment ne pas dire très chiant) Nuckles, le sabelette qu'il avait échangé contre Tropius. Première fois qu'il sortaient juste tous les deux et pour l'instant le loubard se sentait très fortement arnaqué en constatant à quel point le pokémon ne s'arretait JAMAIS de bouger. Il le perdait du regard un instant, le suivant il le retrouvait à barboter dans une benne à ordure ou encore à embêter un passant innocent. Pour ne rien arranger, le loubard vadrouillait librement au lieu de rechercher une nouvelle maison pour ses pokémons et lui ! Mark n'allait tout de même pas s'imposer comme ça chez Lise... Il en serait capable cela dit.

-Hey vous, oui vous ! L'interpella une voix étrange, un poil grotesque.
-Nan c'est gentil mais je suis pas intéressé.

C'était sa phrase type de quand on l'interpellait dans la rue, il ne jeta même pas un regard en direction de la personne et continua son chemin. On était à Voltapolis après-tout, il avait l'habitude des  clochards et des vendeurs insistants. Par contre, se faire attraper par l'épaule devint tout de suite plus dérangeant.

-Monsieur, je crois que vous m'avez misunderstand !!
-Tu lâches mon blouson de suite, sinon j'te promets que... Mark ne termina pas sa phrase, surprit par la tête qu'il aperçut en se retournant. Vous êtes qui et vous me voulez quoi ?

L'homme eut un hoquet de stupéfaction et lâcha le loubard pour montrer sa stupeur de façon théâtrale. Drôle de personnage : la PUTAIN de quarantaine, un costume chic blanc intégral un peu à la mafieux, un monocle argenté et de longs cheveux blonds lui tombant dans le dos.  

-Vous ignorez à qui vous avez affaire ?? Pauvre darling, it's me le seul, l'unique, le styliste de génie Karl Lagarchomp. Il prit une pause pour soupirer et passer la main dans ses cheveux afin de s'assurer qu'ils soient toujours bien coiffés. I just love ta Pompadour haircut, c'est perfect ne change rien.
-Merci, c'est vrai qu'elle est pas mal ! Rougit Mark en se frottant le crane.
-Vois-tu banana-boy, je cherche des people pour participer à mon défilé. Et - oh dear lord - ce pokemon est si precious !! S'exclama-t-il en attrapant le chapeau de sabelette et en le remettant un peu mieux sur son petit crane. C'est toi qui l'as habillé like that ?? J'A.D.O.R.E ton style baby, tu es engagé !
-Mais c'est génial, répliqua Mark dont le peu de défense n'avait pas tenu longtemps face aux flatteries et à la fougue du styliste.

C'est ainsi que par pure hasard, le loubard se retrouva soudain dans une salle d'attente dans le bâtiment où avait lieu ce fameux défilé. Il n'avait pas bien suivit l'histoire mais en gros : quelqu'un reconnaissait enfin la splendeur de sa banane ! Ah et aussi il manquait de personne donc il recrutait directement dans la rue. Ils attendaient d'avoir suffisamment de monde avant de les maquiller et habiller. Une autre nana dans la pièce s'était visiblement fait enrôlée, à en juger par son costard indiquant clairement qu'elle devrait être au travail à cette heure-là. Le loubard s’apprêta à essayer de commencer une conversation quand un autre bonhomme entra dans la pièce. 

Bien qu’inhabituel, le fait de se faire pomponner et maquiller par une professionnelle ne défrisa pas le loubard qui semblait surtout impatient de voir la gueule qu'il aurait. Une couche de fond de teint par-là, un peu de correcteur par ici sans oublier l'indispensable fond de teint. Bon il paniqua un peu et poussa une gueulante quand la maquilleuse s'empara d'un rasoir électrique pour s'occuper de ses cheveux et ce ne fut qu'après avoir obtenu la garantie qu'on ne toucherait pas à un poil de sa banane que le loubard se relaissa faire. 

Finalement la coiffeuse rasa seulement les cheveux qui entouraient la banane - drôle de coupe - mais il faut avouer que le style plaisait à Mark et surtout l'originalité du bousin ! Il se trouvait déjà parfait ; pas besoin de tenue, il pouvait défiler comme ça.

-Mmm il manque un peu de fard à paupières et nous serons bon je pense ! S'exclama la femme tout fière, en se détournant un instant pour chercher l'objet dans les tiroirs. Je pense que M. Lagarchomp sera ravi du résultat. 

Tandis qu'elle trifouillait le meuble, le champion entendit la remarque du gars louche pas très loin de lui. Lui qui n'avait pas braillé un mot depuis le début, voilà qu'il l'ouvrait enfin pour se plaindre de son costume. Pauvre gars, il n'avait toujours pas comprit que dans ce milieu tout était bizarre !

-J'pense que tu te prends trop la tête mon vieux, ça doit être fait exprès avec ce gars-là, balança le voyou en haussant les épaules. Ce serait stupide de nous faire défiler dans des fringues en mauvais état.

Il était d'humeur sympathique, assez pour essayer d'ouvrir la conversation avec cet inconnu en tout cas. Mark n'avait pas encore vu son futur costume et se demandait bien la tronche qu'il pourrait avoir. Pas de rose et de froufrou, c'est tout ce qu'il demandait.

-Ah là voila ! Qui a bien pu ranger le fard derrière tout le reste ? Oh peu importe, fermer les yeux et ne bougez plus.
-Okay, c'est vraiment obligé ce machin par contre ?
-Oui. Bon, clair ou foncé... Clair, ça ira mieux avec votre visage. Doucement...
-AAAAHHHHHH !!!

Mark se révulsa, repoussa la main de la femme et se releva immédiatement de son fauteuil. Il attrapa le premier coton disponible et s'essuya l’œil en vitesse. Quelle douleur affreuse ! Des larmes ne pouvaient s'empêcher de couler de ce côté. Quand il retira enfin le chiffon, il découvrit avec horreur son œil rouge, boursoufler et en larmes.

-Mais vous êtes complêtement tarés ??? C'est du putain de mannequinat, pas une séance de torture bordel !!
-Je-je ne comprends pas monsieur !... Vous faites peut-être une allergie...
-Allergie mon cul ! C'est votre machin qui défonce la paupière !!

-Je vais vérifier, dit la maquilleuse apeuré et se confondant en excuses. Du piment !.. Quelqu'un a dut mettre du piment dans le maquillage.

Mark la regarda dépité, tout en commençant à se dire que toute cette affaire sentait louche.