Encore ce rêve… Ce rêve forgé par de douloureux souvenir. Être encore prisonnier dans son propre corps de 5 ans, devant un mur de flamme enveloppant une maison. De crier le nom de sa mère emprisonnée dans l’incendie en pleurant, sa petite sœur à côté de soi. Être petit et faible de nouveau… Bien qu’en grandissant, je me sentais toujours aussi faible. Mais c’était surtout à ce moment précis que j’avais mesuré ma faiblesse… je n’avais pas pu sauver ma mère et son Nymphali… Même si l’histoire recommençait aujourd’hui, je serais toujours faible. Je ne saurais protéger le peu de personne qui m’étaient chers…

Le monde est rempli de fort et de faible. Les forts doivent protéger les faibles. Mais, ne devraient-ils pas les aider à devenir fort à leur tour ?

Puis soudain, au loin, j’entendais un petit bruit. D’abord, je n’en fis rien, mon attention étant porté sur les flammes. Mais, le bruit devenait de plus en plus fort et donc de plus en plus audible. Il s’agissait d’un autre cri. Un cri non humain. Un cri de Pokémon. Lorsque je me retournais, une lumière éblouissante m’aveugla et je me retrouvai sur une plage. Mes petits pieds mouillés par les vagues. Le soleil tapait sous le ciel bleu. Le paysage m’était familier. C’était l’île où je vivais auparavant dans la région d’Aloha. Devant se trouvait un Pokémon qui me tournait le dos. Il était face à un raz de marée et ne semblait pas flanché. J’essayais d’appeler ce Pokémon, mais ma voix ne sortait pas. Le Pokémon se retournait et, tout d’un coup, je le reconnu. Comme si je venais de réaliser de quel Pokémon il s’agissait. C’était un Lucario. Il me tendit son bras/patte. Comme s’il m’invitait à le rejoindre. Mais, j’avais plus envie d’aller le sauver. Je fonçais sur lui, mais c’était trop tard. Une énorme vague nous avala. Et me voilà en train de flotter sous un océan profond, au-dessus d’une ville ressemblant fortement à Artiesta. Les bâtiments étaient éclairés. On aurait dit un ciel étoilé sous la mer. Autour de moi nageaient des Pokémon de type eau. Je reconnu certain : des Magicarpes, Psychokwak, Léviator, Carapuce, Stari, Mustéflott, des Lamantines… et d’autres dont leurs noms m’échappaient. Ils ne faisaient pas attention à moi, qui coulait de plus en plus vers la ville. Je tombais de plus en plus rapidement et lorsque je percutais une rue, je sentis mon corps se brisait en mille morceaux pour se reformer en chute libre à travers les nuages en plein jour. J’avais retrouvé mon corps d’adulte. Bien que je semblasse tomber rapidement vers l’océan, j’avais l’impression de faire du surplace. A ce moment-là, je voulais qu’une autre personne soit là, avec moi. Qu’elle m’attrapait les mains pour ne jamais être séparées. Mais j’étais seul. Et la nuit tomba soudain et les ténèbres m’enveloppèrent. Je ne pouvais plus respirer. Que quelqu’un me vienne en aide…

- AAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAAHHHH !!!!

Je crus faire un arrêt cardiaque lorsque je vis la gueule de Riolu près de mon visage. Instinctivement, je poussai un cri de peur qui l’effraya.

- Putain ! Ne me fais pas peur comme ça !!!

Riolu me répondit en me pointant sa patte et en me gueulant dessus à son tour. Vraisemblablement, il m’en voulait de lui avoir fait peur aussi. Je repris mes esprits et je remarquai que j’étais sur mon lit rempli de magazine et de bouquin sur les Pokémons. Ah oui, je me rappelle ! Après avoir fini le boulot, je m’étais plongé dans la lecture pour apprendre à mieux les dresser. Voilà quelques mois que j’avais décidé de garder Riolu, mais n’ayant jamais eu envie de devenir dresseur, je ne m’y connaissais pas trop en la matière. J’avais dû m’assoupir et faire ce rêve étrange. Un rêve à partir d’un souvenir… J’aurai préféré ne jamais revivre ce traumatisme.

- Il est quelle heure… ?

Je regardais mon portable. 14h30. Merde, j’avais dormi autant que ça ? Je me levai en grattant ma tête et allai faire ma toilette après avoir donner à manger à Riolu. Tout était calme depuis que je l’avais rencontré. Enfin, rencontré… J’avais été témoin de sa naissance. Il s’était passé des choses à ce moment là et ces évènements m’avaient poussé à devenir un détective. Pour le moment, on me demandait surtout de retrouver des bijoux ou des Pokémons disparus. Rien d’intéressant pour le moment, mais au moins, j’étais payé et cela me permettait de vivre. Je n’avais pas trop à me plaindre, pour l’instant. Mais, je savais qu’il me manquait quelque chose. Après être sorti de ma salle de bain, alors que je versais des céréales dans un bol, Riolu sautilla partout en agitant un papier dans ses pattes.

- Qu’est ce que c’est que ça ?

Je lui pris le papier et reconnu le flyer du parc d’attraction de la ville que j’avais ramené l’autre jour. Oula, j’étais vraiment mal réveillé… C’était vrai, j’avais promis à Riolu que j’allais lui emmener là-bas. Je comprenais mieux sa réaction. Il avait hâte d’y aller. C’était le week-end. Il y aurait du monde à cette heure-ci, mais une promesse était une promesse. Et puis le faire sortir un peu lui ferait beaucoup de bien.

- Bon laisse-moi le temps de manger et m’habiller et on y va.

Les yeux de Riolu brillèrent et il sauta de joie. Je ne pus m’empêcher de lâcher un petit sourire en le voyant ainsi. Après avoir fini de manger mon petit déjeuner, j’enlevai mon pyjama pour porter un sweet bleu, un jean gris foncé et des baskets blancs. Faisant frais dehors, je mis une veste blanche et des mitaines marrons avant de sortir avec Riolu en direction du parc d’attraction.

Je ne mis pas longtemps pour y arriver à moto. Par contre, pour y rentrer, c’était une autre histoire. Des habitants d’Artiesta et des touristes voulaient profiter du beau temps, même s’il faisait frais, pour entrer au parc. J’avais dû poirauter pendant une heure avec Riolu pour enfin entrer. Je n’imaginais le temps d’attente pour les attractions. Ce n’était pas la première fois que je venais ici. Quand j’étais petit, mon oncle et ma tante nous avaient emmené, ma sœur et moi, pendant les vacances. Ils avaient beaucoup économisé pour pouvoir venir ici. Malheureusement, on n’avait pu faire que des attractions pour les petits, vu que Laura et moi étions des enfants. Et aujourd’hui je ne pensais pas pouvoir faire des attractions à forte sensation avec Riolu. D’ailleurs, il était content d’être là. Ses yeux étaient remplis d’étoiles. Il était émerveillé par tout ce qu’il voyait. D’un côté c’était la première fois qu’il venait dans un parc d’attraction. J’entendis soudain son ventre gargouiller.

- Ok, toi t’as faim. Viens, il y a un stand de crêpe là-bas.

Riolu me suivit en sautillant et fit la queue avec moi. Il y avait environ cinq personnes qui attendaient. Ça va, je n’allais pas attendre longtemps. Je regardais la foule qui passait. Des enfants avec leurs parents, tout joyeux. Des adolescents venus en bande, n’ayant pas honte de montrer leur amitié. Tout ce que je n’avais pas. Quand c’était enfin mon tour, je pris deux crêpes au chocolat et lorsque je m’apprêtai à les donner à Riolu, je ne vis le Pokémon nulle part.

- ?! Riolu ?!

Je regardais les alentours mais il y avait tellement trop de monde qu’il était impossible à le retrouver. Tenant mes deux crêpes à la main, je me mis à sa recherche en l’appelant. J’eus la même sensation que dans mon rêve. Lorsque les ténèbres m’avaient aspiré. Je crus que je n’allais plus respirer et rester seul. Heureusement, il m’a fallu un petit moment pour le retrouver auprès d’un Rocabot et un jeune homme. Riolu semblait vouloir jouer avec l’autre Pokémon. Mon dieu, c’était la deuxième fois de la journée qu’il me faisait peur comme ça.

- Riolu ! Ne t’éloigne pas comme ça ! Je me suis inquiété !

Mais il avait les yeux rivés sur la crêpe. Je rêve ou il se foutait royalement de mon sermon ? En soupirant, je lui donnai la crêpe. Je l’avais bien payé pour lui, à la base.

- Ce n’est pas comme si tu la méritais après être parti comme ça…

Je me tournai ensuite vers le blondinet, qui devait être le dresseur du Rocabot. J’avais oublié mes manières… Quoi que, je n’en avais pas vraiment. Légèrement gêné, car je l’étais un peu, je lui dis :

- Désolé si mon Riolu vous a dérangé. C’est la première fois qu’il vient dans un parc d’attraction et il n’a pas l’habitude de voir d’autre Pokémon.

Franchement je ne saurais vous dire si j’étais poli ou pas.

Le jeune homme à qui le Rocabot appartenait était un blond aux cheveux longs, les yeux verts et la peau blanche. Même avec des habits aussi banals, je pouvais l’imaginer en prince d’un royaume à la recherche de sa princesse. Et il était aussi polie qu’un noble. Par contre, son Rocabot… Je le voyais dévorer ma crêpe des yeux. Riolu dévorait la sienne comme si rien n’était. A chaque bouché, ses yeux brillaient comme des étoiles brillantes la nuit tombée.

- Allez, tiens.

Je m’accroupis près du Rocabot et lui tendis ma crêpe. Ne vous méprenez pas, je ne faisais pas juste ça par acte de bonté. Ce Pokémon avait faim et c’était aussi une manière de m’excuser le fait que Riolu lui avait tiré les oreilles. Même si ce dresseur m’avait poliment répondu que ce n’était pas la peine. J’étais responsable de Riolu, donc quand il faisait une bêtise, c’était à moi de les réparer.

- Ca va, je m’en achèterai une autre après.

Bon, ce n’était pas comme si j’étais riche et que je pouvais m’en acheter autant que j’en voudrais, avec mon petit salaire de barman. Riolu finit rapidement sa crêpe. Il avait eu vraiment faim… Ou alors il adorait tellement le goût qu’il l’avait mangé rapidement, étant pressé de ressentir cette bonne sensation dans son palet, sans pour autant prendre le temps de déguster. Il me pointait avec sa patte et avec assistance le stand des crêpes.

- Non, tu viens de finir le tiens ! Fallait pas manger vite !

Mais il insistait et je continuais de refuser. Puis Riolu se met à pleurer comme un bébé, m’embarrassant au passage.

- Ce n’est pas la peine de pleurer !

Mais Riolu ne m’écoutait pas. Plusieurs personnes nous regardaient. Mon dieu, qu’est ce que c’était embarrassant de se donner en spectacle comme ça…

L’homme inconnu se révélait être encore plus sympa qu’il ne le montrait déjà. Il tenait à m’offrir une autre crêpe. Je n’avais même pas le temps de répondre qu’il partait vers le stand de crêpe avec son Pokémon dans les bras. Bon, je ne pouvais pas refuser sa proposition. D’autant plus qu’il avait calmé Riolu rien qu’en l’ouvrant. Autant en profiter. Bien que… d’un côté j’étais gêné de me faire offrir une crêpe par un inconnu alors qu’à la base c’était moi qui l’avait embêté. De loin je vis son Sabelette sortir de sa Pokeball. Les Pokémons aimaient vraiment manger. Après l’avoir attendu sur un banc, car je n’allais pas le laisser dépenser pour rien, il revint avec ses Pokémons et me souhaita bon appétit après avoir distribué les crêpes.

- Bon app’ et merci !

Je dégustais ma crêpe et c’était délicieux. Je comprenais la queue, les habitués devaient savoir que c’était tout simplement très bon. Cela valait son prix. Riolu mangea le sien avec sourire. Les Pokémons de l’inconnu aussi avaient eu droit à leur crêpe. C’était bizarre, cette sensation que je ressentais. Cela faisait longtemps que je n’avais pas partagé un tel goûté avec quelqu’un. Et je ne l’avais jamais fait avec des Pokémons. C’était… étrangement chaleureux. En fait, je pourrais m’y habituer.

- Alors, tu viens souvent ici avec tes Pokémons et tu offres des crêpes à des inconnus ?

Je ne savais pas trop quoi dire à part ça. Je n’étais pas habitué à discuter avec des inconnus dans un coin aussi tranquille et chaleureux. Non pas que je sois un asocial, mais ce n’était pas le style de vie que je vivais quotidiennement.