Laissant ses pas la guider sur un chemin qu'elle connaissait par coeur, la native de Kalos se frayait un passage au milieu des personnes imbibées d'alcool et autres substances plus ou moins légales. Même si Voltapolis restait "THE place to be" pour faire la fête et se faire voir, Nemerya n'avait pas grand chose à lui envier une fois que les démons de minuit pointaient le bout de leurs cornes. Ils lui rappelaient un peu sa jeunesse folle à rire comme des con bien-heureux, leurs éclats de joie provoquaient les siens. Sans doute que le fait de les voir tomber en groupe de façon très peu élégante aidait. Ah, l'insouciance.
Tout de même pressée de rentrer se mettre au chaud, la demoiselle opta pour un raccourci. Tourner juste après le casino pour arriver plus vite à son arrêt. Le fait que ce soit une ruelle mal éclairée et un poil odorante à cause de ceux qui rendaient leurs tripes derrière les poubelles ne l'inquiètait pas plus que ça. Il ne fallait pas plus de deux minutes pour rejoindre l'autre rue passante. Enfin, ça c'était si on se faisait pas arrêter. D'abord des propos obscènes, puis des insultes en comprenant qu'elle ne se retournerait pas, pour au final la plaquer face contre un mur. L'effluve putride s'échappant de l'agresseur ferait pâlir de jalousie un Miasmax.
Grossière erreur de la part de ce déchet humain. Un talon épais vint lui écraser le pied sans ménagement alors qu'un coude lui arriva avec force dans le menton lorsque le petit bout de femme se retourna. Profitant du bref moment de déroute, elle attrapa le cutter rangé dans la poche arrière de son pantalon, ne sortant qu'un tout petit bout de la lame pour l'appuyer contre le bas ventre de l'ivrogne. Le message eut l'air de passer, l'énergumène préférant partir en lâchant au passage une flopée d'insultes. Toujours sous le coup de l'adrénaline, sa première réaction en voyant quelqu'un la dévisager fut de le fusiller du regard.
-Te r'gardes qu- Tian ?
La colère fut vite remplacée par de confusion. Qu'est-ce qu'un gros bonnet de Kalos pouvait bien faire dans une ruelle sombre, à Lurimis ? Avec précaution, la rousse s'approcha pour mieux le voir. La ressemblance était là, mais en même temps, son visage ne ressemblait pas exactement à celui des aînés Làn. Se trompait elle ? Quand bien même c'était bien lui, la dernière fois qu'ils s'étaient vus, sa peau n'était pas encore tatouée, ses joues encore vierges de piercings, puis sa crinière arborait une teinte bleue électrique. Malgré tout, ses traits n'avaient pas bougé d'un cil, le même regard expressif, les mêmes commissures hautes qui lui donnaient un air espiègle. Une plainte douloureuse lui échappa en essayant de dégager les mèches rousses de son visage. Elle ne s'en était pas rendue compte sur le coup, mais là, sur sa joue, le mur avait laissé quelques égratignures, et une vilaine bosse commençait déjà à faire son apparition sur son front.
Je finissais assez tard, ce jour-là ! Heureusement, personne de problématique dans le coin, donc le travail était plutôt facile, finalement ! J’étais habitué, de toute façon, puis c’était bien un des seuls contrats stables que j’avais, donc j’allais pas m’en plaindre ! Je crois que mon patron aimait bien mon chat de gouttière. Son Pokémon, c’était un Chaffreux en même temps ! Il devais aussi apprécier les félins. Bref, de toute façon, ce coup-ci, Jackpot était certes avec moi mais bien dans sa Pokéball, Pokéball qui était dans mon casier. Peut-être importe à quel point j’aimais mon félin, je savais que certains très clairement pas une bonne idée de lui laisser la possibilité de trainer dans un bar. Quoi, le laisser chez moi ? Je le faisais souvent aussi, ouais. Bon, là c’étaient juste les rideaux qui risquaient de prendre cher, mais pour le coup j’avais juste laissé mes autres Pokémons là-bas. J’essayais de passer un peu de temps seul avec le Miaouss, de temps à autre. Faire des efforts pour calmer ses problèmes de jalousies, en somme. Puis, les rues de la capitale, la nuit, c’était vraiment pas les coins les plus safe, donc autant ne pas me déplacer seul !
Un bâillement s’échappa de mes lèvres. Service enfin fini, je n’avais plus qu’à rentrer chez moi, tranquillement. J’avais pu revêtir ma tenue habituelle, simple, t-shirt noir, jeans un peu déchiré et veste olive. Autant dire que ce soit niveau vêtement ou coiffure, je n’avais rien à voir quand je travaillait et je n’aimais clairement pas être tiré à quatre épingles. Je libérais enfin mon félin de sa Pokéball. Jackpot avait l’air, lui aussi, d’avoir hâte de rentrer. Maintenant, je n’avais plus qu’à prendre deux sac poubelle, les sortir et à moi la liberté ! J’ouvris la porte et …
- Uh ?
Evidement, la scène … suspecte qui se déroulais dans la petite rue ne manquait pas d’attirer mon attention. Un sac poubelle dans chaque main, j’observais la petite rousse plaquée un homme, le menacée avec une lame, alors que je lui lançais un regard de merlan frit. Bref, j’étais complétement à la ramasse. Mais, eh, j’étais fatigué, aussi !
Elle pointait son cutter vers moi, et instinctivement, je reculais de quelques pas et … Quoi ? Mes yeux s’écarquillèrent. Je clignais plusieurs fois du regard, lâchant même mes sacs sous la surprise. Jackpot, par contre, se plaça devant moi, comme par protection, néanmoins … le félin se rendit vite compte qu’il y avait quelques choses d’étrange à tout ça. Que c’était pas habituel.
Ce prénom, je l’avais pas entendu depuis longtemps. C’était pas le mien, aussi. Mais … Comment elle pouvait le connaître, elle ?! Je savais que je leurs ressemblait, mais quand même ! Si j’étais parti à Lumiris, c’était bien pour une raison !
Quelques secondes s’écoulèrent avant que je ne ramasse mes sacs, les lançant dans une benne à ordures à proximité. Je me sentait tendu. Mes sourcils se froncèrent d’eux même. C’était toujours un peu douloureux de penser à ça. Je fit quelques pas vers la rousse, glissant mes mains dans mes poches.
- Comment tu connais ce prénom ?
Ouais, je la tutoyais, mais j’avais du mal à faire autrement, en fait. Surtout que … son visage m’était familier. Comme si je l’avais vu il y a de ça une bonne paire d’années. Un soupir franchit mes lèvres. Je sortit une cigarette, la glissant entre ces dernières. J’avais besoin de me détendre les nerfs, là.
- C’est le prénom d’un de mes grand-frères.
Autant dissiper le malentendu. Ou au moins commencer à le faire ! Car j’avais aucune idée d’où elle sortait, cette fille.
La rouquine observait avec attention l'homme face à elle, ses prunelles olive le détaillant sans aucune gêne, trop prise par le besoin de mettre un nom sur ce visage. Nul doute que dans un autre contexte, l'expression du jeune lui aurait arraché quelques éclats de rire, familière dans un sens. Devinant sans mal que la présence du cutter inquiétait le félin, elle prit l'initiative de le rétracter la lame pour le ranger à sa place. L'adrénaline courrait encore dans ses veines et avec elle, l'impression d'être invincible. Voilà pourquoi Hellenna semblait aussi détendue, même avec la distance entre eux qui se réduisait. Son regard se leva pour ne pas rompre le contact visuel.
-Un fantôme du passé ?
D'aussi près, les traits titillaient sa mémoire sans ménagement. Ils semblaient si familiers, et pourtant, ils étaient sensés être ceux d'une jeune femme. Pour sûr, si les Làn avaient eu d'autres enfants, la nouvelle lui serait parvenue. Enfin, sauf s'ils voulaient étouffer l'affaire. Un enfant illégitime donc ? L'affirmation la fit tiquer un peu plus, les mots lui échappant avant qu'elle ne puisse y réfléchir.
-Tes ? Liu..?
Oh et voilà qu'avec la chute d'adrénaline, une vilaine migraine pointait le bout de son hideux museau. S'en fichant pas mal du fait que c'était impoli et donc que cela pourrait causer la colère de l'homme, Lenna lui pris la cigarette des mains pour prendre une bonne bouffée du poison avant de la lui rendre, l'air de rien. Du froid serait probablement plus efficace, surtout pour aider à limiter le gonflement.
-Lenna. Hellenna de Longeville. Nos..parents font affaires ensemble. Ça te dit un truc maintenant ?
Parents. Le mot seul eut un peu de mal à passer. Même s'ils savaient à présent se montrer cordiaux, la rousse ne les voyait pas comme tel. Ils l'avaient abandonnée pour préserver leur image, s'en fichant pas mal de savoir que toutes ses bêtises servaient d'appels à l'aide. En fait, seul son frère cherchait à recoller les morceaux. Un comble sachant qu'ils passaient leur temps à s'insulter ou se tirer dans les pattes depuis l'enfance.
Je sentait ses prunelles me détaillaient. Tenter de mettre un nom sur mon visage. Visage qui devais avoir une expression assez ridicule de surprise, sur le moment. Mais … moi aussi, je tentait de la nommer. De savoir d’où elle venais, comment elle pouvais savoir ce genre de choses. Car remuer mon passé pouvait être un peu douloureux, parfois. Je l’avais accepté mais, eh, je voulais pas retomber sur ce qu’elle appela … Des fantômes du passé. Je soupirais doucement, me détendant un peu.
- On peut dire ça comme ça, uh.
Ça restait une sacrée surprise. A voir si s’en était une bonne, ou une mauvaise. Surtout que de son côté, elle venais de faire les liens. Enfin, c’état ce qu’il me semblait. Je me refrognais un peu.
- Ouais, c’est mon prénom.
Je l’avais gardé. En grande partie par flemme, j’avais pas décidé de le changer. C’était mixte, et malgré ça, je m’étais approprié mon identité. Néanmoins, que je le veille ou non, ça restait un lien avec ma famille. M’enfin. Y avais aussi mon nom, de toute façon, qui me raccrochais à ses coincés vivant dans les beaux quartiers, d’Illumis.
- J’suis pas comme tu t’y attendais, j’suppose.
Ouais. Face à elle, elle aurais dû avoir une jeune femme. Enfin, si j’aurai suivi la voie qu’on m’avais tracée. Cette voie qui m’étais pas du tout la mienne. Je m’étais approprié mon destin, que ça plaise à la rousse inconnue, ou non. Mais … je ressentait pas forcément d’animosité de sa part. Son geste me surpris un peu. Ouais, arracher ainsi une clope à quelqu’un, c’était pas un truc de bourge coincé, ça c’était sûr. Un léger rictus étira mes lèvres, le temps de quelques secondes. Puis, enfin, la jeune femme se présenta.
- Mhm …
Quelques instants, je réfléchit. Reprenant mon bâton de cancer et le portant à mes lèvres, laissant échapper une longue trainée de fumée. Je laissais un peu mes yeux violacés se perdre dans cette dernière. De Longeville … J’avais déjà entendu ce nom.
- Ouais. Ça me dit un truc.
Je me reculais d’un pas, la regardant plus attentivement.
- Toi aussi, tu … ouais, c’est assez évident.
Un sourire joueur étira mes lèvres, un rictus peut-être un peu jaune, dans le fond.
- Toi aussi, tu a fuit ça, je suppose. Pas comme tes parents le voulaient.
Facile à conclure, ça. Peut-être un peu trop. Après tout, c’était mon vécu. Puis, je voyais à son physique, à ses manières, qu’elle était pas du tout la basique Kalosienne. Je me sentait un peu proche d’elle, dans un sens. Je lui souriais, plus solairement.
- On devrais continuer à causer autre part, ça caille, ici.
Ouais, peu-importe comment la conversation allait tourner … on était en plein hiver, quand même !
Le regard toujours posé sur le visage à la fois familier et inconnu, Hellenna se contenta de hocher la tête lorsque que Liu confirma son identité. Elle pouvait deviner que quelque chose le dérangeait sans réellement savoir quoi. Le fait de trouver quelqu'un qui le liait à son passé ? Ouais y avait mieux comme rencontre si on voulait vivre sans y penser. En revanche, la suite la fit froncer les sourcils, n'aimant pas vraiment ce que ça sous entendait. Pensait-il recevoir des commentaires négatifs ? Des questions déplacées ? Rien de tout ça ne viendrait. Se doutant bien que la pitié n'était pas une option, elle n'en ressentait de toute façon aucune, la rousse se contenta de sourire de façon espiègle. Les billes argentées décorant fièrement ses fossettes.
-T'as raison, j'm'attendais pas à croiser un bel homme au détour d'une ruelle sombre. Mais bon, entre nous, j'vais pas m'en plaindre.
Un clin d'oeil complice accompagna les mots sincères. Honnêtement, elle se fichait pas mal du genre, du sexe, de l'orientation, des croyances ou de l'apparence générale des gens. Si le feeling passait, alors elle appréciait la personne. Point. Puis, qui était-elle pour juger quand on passait son temps à la descendre ? Ses tatouages, ses piercings, son poids, merde son être tout entier semblait être un affront à la Noblesse kalosienne. Si dans un premier temps l'idée la dérangeait, aujourd'hui, elle ça l'amusait presque. Le voyant faire un pas en arrière pour la voir dans son ensemble, Lenna fit un petit tour sur elle même, assez fière de sa tenue. Une paire de jeans déchirés au niveau des genoux et de la cuisse, un large pull décoré par les mots "No fake friends" et des Doc Martens pour compléter le style décontracté. Bien sûr, détestant le froid, la jeune femme portait des collants épais couleur chaire, ainsi qu'un col roulé à manches longues par dessous les couches visibles.
-Ouais, ils perdent au change si tu veux mon avis.
Malgré le ton nonchalant utilisé, l'amertume empêcha le sourire d'atteindre ses yeux. Pourquoi ce qu'ils voulaient devait primer sur le bonheur de leurs enfants ? Tout simplement parce qu'à leurs yeux, leur progéniture était une extension d'eux, des poupées servant à perfectionner leur image. Pas des êtres humains avec une volonté propres.
-J'ai cru que t'allais jamais proposer ! Mon studio est pas loin, on y va ?
Sans vraiment lui laisser le temps de répondre, Hellenna attrapa la manche de Liu, l'entraînant à sa suite. Malgré la courte distance à parcourir, elle zieutait régulièrement en arrière pour s'assurer que tout le monde suivait toujours. Dès qu'ils mirent un pied à l'intérieur, elle se dépêcha de rallumer le chauffage avant que restant de chaleur ne se dissipe. Contrairement à l'image qu'on se faisait des salons de tatouages, celui-ci était lumineux, chaleureux, doux. Les murs crème décorés par de multiples cadres contenant des dessins aux styles variés et autres fleurs séchées.
J’étais content de voir … que la rousse restait joueuse. Pas de questions, sur ma famille, mon passé, rien. Ça me poussais à lui sourire en retour, évidement ! J’avais pas envie de me prendre la tête. J’aimais pas ça. Sa remarque m’arrachais un petit ricanement. Ouais, je la sentait bien finalement. Même si la rencontre avais pas vraiment super bien débuté.
- De même, je suppose ! Pas commun de rencontrer des jeunes femmes entre deux poubelles, haha !
Bon, c’était bizarre dit comme ça mais peu-importe ! Elle semblait pas être du genre à prendre les choses de façon négative. Bien loin de la classique kalossienne. Ça me plaisait. Puis, à mes pieds, Jackpot se détendait déjà. Il devais avoir compris qu’il y avais pas de danger. Même si quand même, le chat de gouttière restait méfiant. Normal, vu son vécu, et vu le mien. Je savais que la bestiole avais vécue des choses pas cool. Ensuite, elle tourna sur elle-même, montrant sa tenue. Elle avais du style, je devais bien me l’avouer. Moi je mettait globalement à peu près toujours les mêmes fringues mais je m’en foutait pas mal.
- J’avoue ! Toujours mieux qu’une Kalosienne coincée, y a pas de doute à avoir !
Pour la suite, elle … m’invitait dans son studio. Le regard espiègle, je ricanais doucement.
- Eh bien, pas dès le premier rendez-vous, comme on dit !
Ouais bon, niveau humour, on pouvait repasser, mais c’était pas bien grave ! Dans tous les cas, je la suivait tranquillement, pa plus gêné que ça d’être trainé dans l’appart’ d’une quasi inconnue. La gêne, je connaissais pas trop en même temps. Bref. Le trajet se fit tranquillement, et je fini bien rapidement ma cigarette. J’étais un peu curieux, je devais bien me l’avouer. Et enfin j’arrivais chez elle et… Wah ! C’était bien décoré, en tout cas !
- Sympa, ici ! Tu es tatoueuse ?
Je devais bien avouer qu’elle avais la tête de l’emploi. Pour ma part, j’avais pas de tatouages. Même pas de piercing. Mais bon, je trouvais ça quand même super cool.
- Et j’veux bien un truc, ouais ! N’importe quoi me va !
Autant juste pas trop se bourrer la gueule, je venais de sortir du boulot donc… ouais. Pas une bonne idée. D’ailleurs, je gardais un œil sur Jackpot. Je le voyais scrutait la pièce, les meubles. Valais mieux pas qu’il vole quelques choses, je tenais pas à passer pour un cambrioleur.
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