Bienvenue à Nemerya ; ce panneau placé à la sortie de la gare la rassura.
Cette fois-ci elle était dans la bonne direction. Kiana ne pouvait pas s’être trompée : Nemerya était entre Voltapolis et Artiesta sur sa carte.
Tout n’était pas perdu !

Le principal inconvénient de ce détour, c’est qu’elle avait dépensé plus d’argent que prévu jusque là - entre les tickets de train qui se multipliaient et les nuits à l’hôtel imprévues, ses réserves bien maigres de base diminuaient rapidement. Désormais l’erreur n’était plus permise, sous peine de terminer le voyage le ventre vide. Cependant hormis ce souci financier la demoiselle ne regrettait aucunement ses erreurs d’orientation : d’une elle avait fait la rencontre de personnes adorables, de deux cela lui permettait de découvrir le centre de la région.

Et le moins qu’on puisse dire, c’est que toutes les villes étaient à couper le souffle. Kiana ne revenait pas des différences entre sa petite île natale et les métropoles de Lumiris. Comment pouvaient-ils être si avancés ?
Dans le cas de la capitale, elle était notamment impressionnée par l’architecture ultra-moderne. Certes Sunyra et Voltapolis n’étaient en rien désuètes, mais ils n’avaient pas ce côté pointe-de-la-technologie. Pas étonnant que le fameux professeur Baobab se soit installé ici, l’innovation y semblait au cœur des préoccupations.
A vrai dire la technologie la dépassait parfois, mais la fascinait. Le progrès avait du bon - comme du mauvais.

Au fil de sa marche hasardeuse la brunette s’était retrouvée dans un quartier assez particulier, avec plein de boutiques d’achat et de revente de pièces détachées et d’outils en tous genres. C’était vraiment étonnant à voir, elle ne savait pas à quoi servait la plupart des produits exposés.
Trop occupée à regarder sur les côtés plutôt que devant, Kiana ne remarqua pas la personne accroupie devant elle. Et trébucha dessus gauchement (la grâce d’une baleine échouée sur la plage).

La rencontre avec le sol ne fut pas agréable (un ouïe ! lui avait d’ailleurs échappé), et il lui fallut quelques secondes pour analyser ce qu’il venait de se passer après. Puis sauter sur ses jambes. “Oh mince désolée ? Vous allez bien ? Vous ne vous êtes pas fait mal ?” la jeune femme était prise de panique. Et s’il était blessé à cause d’elle ? C’était de sa faute. Elle devrait avoir compris pourtant, à force d’expérience, qu’il fallait regarder où on met les pieds.

Kiana, 18 ans, boulet de service. Devrait moins se dissiper dans la vie.
Parfois comme ça elle se maudissait.

On pourrait penser qu’à son âge, elle pouvait mieux faire que se cogner partout. Mais quelque part Kiana était encore une enfant ; et les enfants ça regarde ce qui les intéresse, pas ce qu’il se passe devant eux (ni l’avenir ni les obstacles).
Curieuse comme elle l’était un rien la distrayait.

C’est pour cela que la demoiselle s’en voulait : elle savait qu’en faisant plus attention, ce genre d’incident ne se produirait pas. En aucun cas le garçon n’était coupable de son point de vue. D’autant plus que tout le monde s’était déjà accroupi au moins une fois dans la rue - pour refaire des lacets par exemple -, ça ne veut pas dire qu’on leur avait tous forcément shooté dedans. Parce que la plupart des gens regardent où ils posent les pieds, un minimum.

Bref Kiana espérait vraiment ne pas lui avoir fait mal. Malheureusement la grimace que l’inconnu afficha avant de se relever ne la rassura pas en ce sens. Ni son sourire alors qu’il répondait. “Non tout... Tout va bien ! C'est ma faute, c'est moi qui étais par terre ! V-vous allez bien vous aussi ?”. Elle agita positivement la tête pour signaler que tout allait bien. “Je n’ai que des égratignures…” Un rapide examen de ses bras et ses genoux le prouvait.

Voyant que le brun se baissait pour récupérer ses affaires, l’insulaire entreprit de l’aider. “Je suis vraiment navré…” Le voilà encore qui s’excusait alors qu’il n’était pas coupable - et il avait l’air de se sentir vraiment mal. Elle s’empressa de le rassurer. “Non non, c’est de ma faute ! J’aurais dû regarder où j’allais. puis plus légèrement. Mais ne t’en fais pas je suis habituée à tomber.”
Kiana avait rajouté cela comme une blague, mais c’était on ne peut plus vrai.

Le ramassage terminé, nos deux jeunes gens se relevèrent. La jeune femme ne put s’empêcher de redemander “Tu es sûr que tout va bien ? Tu veux que je t'aide à porter tout ça ?” Si cet adolescent avait mal quelque part, mieux valait qu'il se ménage après tout. Sans oublier qu'elle lui devait au moins ça

Une ride d’inquiétude creusa son front. Est-ce qu’elle entendait mal ou est-ce qu’il respirait fort ? En plus, Kiana n’était pas experte en santé, mais elle n’avait jamais vu quelqu’un changer de couleur à ce point (en même temps sur Alola la plupart des habitants avaient la peau mate, ça se voyait donc moins quand ils rougissaient.).
C’était normal ou pas ? En tout cas, la manière dont l’adorable pokémon perché sur son épaule semblait se faire du souci aussi ne la rassurait pas.

Le garçon ne remarqua pas tout de suite qu’elle s’était rapprochée, mais quand leurs regards se croisèrent, il esquissa un mouvement de recul qui le fit lâcher tout ce qu’il venait de ramasser. La brunette ne savait pas comment le prendre : est-ce qu’elle lui faisait peur, ou est-ce qu’elle avait envahi son espace personnel et que ça l’avait surpris ? Quoi qu’il en soit, elle commença à réunir ce que l’inconnu venait de faire tomber, tout en réfléchissant à comment se faire pardonner si elle avait fait quelque chose de mal et éventuellement alléger l’ambiance. C’est sa voix qui la fit relever la tête.

“Non n-non ça va ! Je dois juste…”
Juste.... ? Kiana était tout ouïe. Prendre sa ventoline ? Manger quelque chose ? S’hydrater ?
Ah non, s’évanouir apparemment.
… Attendez QUOI.

Heureusement son vis à vis prit son temps pour chuter ; elle eut largement le temps de réagir pour amortir sa chute. Mais il n’empêche que cette fois-ci c’est son coeur à elle qui battait à cent à l’heure et son esprit qui s’embrouillait. Ok ok essaie de rester calme Kiana. Il a donc. Perdu connaissance - sans blague - une seconde c’était bien ça hein ? Il fait pas une crise cardiaque ou quoi hein ? bon sang de bonsoir pourquoiiiii. C’était pas parce qu’elle avait trébuché sur lui n’est-ce pas ? Non ce serait pas logique, enfin, sans doute ?
Au secours. Du calme !

La demoiselle prit une grande inspiration pour s’apaiser. Puis observa les alentours. Il n’y avait personne dans la rue à part eux, elle n’avait donc pas d’autre choix que de prendre les choses en main comme une grande. Tu peux le faire. Le plus délicatement possible elle allongea l’adolescent au sol, avant de fouiller nerveusement ses affaires en quête de son téléphone - sainte invention qui permettait de joindre les secours à tout moment.
Une fois en ligne l’insulaire expliqua au mieux la situation. Un soupir de soulagement lui échappa quand le standardiste lui annonça qu’une ambulance était en route. L’évanoui respirait encore. Tout irait bien.

Quand ils arrivèrent aux urgences, Kiana insista pour rester le plus près possible. Il était tombé dans les vapes juste devant elle, et après l’avoir percuté ; sa conscience la rendait responsable.
Finalement les médecins la rassurèrent : ce n’était rien de grave, juste un gros pic de stress sans doute. Ce fut comme si on lui retirait un poids des épaules. Cela dit la Nova tint à rester jusqu’à ce qu’il se réveille, ne serait-ce que pour s’assurer que tout allait bien et pour s’excuser.
Oh elle n’eut pas à patienter seule au moins.

Le jeune homme rouvrit les yeux une heure plus tard, alors que Kiana jouait avec un adorable rozbouton. Elle cessa en remarquant qu’il avait repris connaissance pour lui adresser un grand sourire. “Bon retour ! Eh ben, on peut dire que tu nous auras flanqué la frousse.” Notre touriste déposa le pokémon sur le lit, près de la tête de son dresseur. “Elle s’inquiétait tellement qu’elle ne t’a pas quitté des yeux une seule seconde.”

Kiana laissa leur laissa quelques secondes de tranquillité, avant de demander “Tu te sens bien ? Tu veux que j’appelle un docteur ?”
Sait-on jamais, elle préférait être sûre.

Kiana était soulagée : le jeune homme avait rouvert les yeux et même trouvé la tablette de chocolat (tant que l’appétit va tout va, non ?).
N’empêche, il semblait avoir une bonne relation avec son pokémon. Celui-ci s’était blotti contre lui dès qu’elle l’avait posé sur le lit, n’avait cessé de s’inquiéter, et avait l’air sincèrement heureux dans les bras de son dresseur. Une scène aussi adorable ne pouvait laisser son cœur d’artichaut insensible.

La première conclusion que la brunette tirait, c’est que cet adolescent était forcément quelqu’un de bien. Les pokémon étaient comme les humains, plus on leur accordait d’affection sincère plus ils s’attachaient ; visiblement le jeune rozbouton en recevait énormément. Et pour aimer autant ses compagnons il fallait avoir l’âme pure.
La seconde conclusion, c’est qu’elle aimerait bien faire connaissance avec une personne aussi gentille. Mais chaque chose en son temps, il venait tout juste de se réveiller. Est-ce qu’ils allaient avoir une mauvaise surprise ?

“Non non tout va bien... Je crois ?” Kiana sentit ses épaules se détendre. Elle lui adressa un vif hochement de tête avec un sourire encore plus large. “Ca me rassure. Mais si quoi que ce soit ne va pas dis-le moi et j’irai chercher quelqu’un !” Dans tous les cas le docteur avait dit qu’il valait mieux que le brun se repose tranquillement après son réveil. Il n’allait donc pas sortir tout de suite.

Son regard retomba un instant sur le rozbouton (il était tellement adorable aussi), jusqu’à ce que son vis à vis reprenne la parole. “M-merci beaucoup ! Merci d'être restée, de m'avoir amené ici et euh... Merci. Désolé de t'avoir donner du soucis ! Je m'appelle Pavel. Et toi ?” A la manière dont il trébucha sur les mots, notre insulaire en était désormais certaine : Pavel était un jeune homme timide et renfermé, sans doute introverti. Non pas qu’elle ait quoi que ce soit contre. Mais cela faisait ressortir son instinct de grande sœur (on oubliait trop facilement qu’elle n’était pas la plus jeune de sa grande fratrie).

En revanche Kiana considérait qu’il n’avait pas à la remercier. Toute personne avec un minimum de conscience serait restée à son chevet. C’est pourquoi elle répondit “C’est normal, j’étais en partie responsable. avec un air embarrassé, puis avec un rire discret Je m’appelle Kiana, enchantée ! Drôle de manière de faire connaissance non ?” Elle qui lui donne un coup sans le vouloir et se casse la figure, lui qui perd connaissance, des présentations à l’hôpital… Oui, à priori tout était banal dans leur journée. Elle s’en amusait bien (comme de beaucoup de choses ; elle aimait rire après tout).

La nova désigna ensuite le petit pokémon blotti contre Pavel. “Et c’est ton pokémon j’imagine ? Il est adorable, je pourrais jouer avec lui toute la journée. Tu lui as donné un nom ?”

Elle aimait les pokémons, et tout ce qui était mignon. Pas surprenant qu’elle se soit attachée si rapidement donc.

S’il l’avait carrément vue naître, pas étonnant qu’ils soient si proches ! C’était une jolie histoire. Kiana aimerait bien faire éclore un oeuf un jour, ce doit être comme devenir maman un peu non ? Ou papa dans le cas de Pavel. D’ailleurs son rozbouton s’appelait donc Dahlia, ce prénom lui allait à merveille. Elle se demanda s’il y avait une signification particulière - le langage des fleurs lui était inconnu.

Elle allait continuer la conversation, lorsqu’une infirmière fit son apparition. Notre touriste resta sagement assise le temps de l’examen, en étudiant chaque geste de la spécialiste santé - d’une parce que l’état du brun l’intéressait, de deux parce qu’elle découvrait les examens standards et l’équipement de pointe de Lumiris.
Le patient demanda à quitter l’hôpital une fois le check-up terminé, ce qui fut accepté. C’était rassurant quelque part, s’ils le laissaient partir c’est que ses résultats étaient bons.

Les deux jeunes gens sortirent donc de l’établissement après quelques formalités ; Kiana prit une grande inspiration en étirant un peu les bras dans son dos. Elle avait oublié que le temps était magnifique et la journée à peine entamée - il devait être deux heures, à tout casser.
Maintenant qu’elle était moins tendue et se rappelait l’heure, son estomac se mit à faire des siennes.

La brunette se tourna vers Pavel, mais il la devança. “Pour te remercie de euh... De m'avoir aidé et tout ça, j'aimerai t'inviter à déjeuner. Enfin s-si tu veux bien ! Je ne voudrai pas imposer ma présence tu as peut-être des choses à faire et…”
Elle ne put dissimuler sa surprise. Non seulement ce jeune homme à l’air si réservé avait pris les devants, mais en plus ils avaient eu la même idée. Retroussant les lèvres, Kiana répondit “Avec plaisir ! Mais c’est moi qui invite, pour m’excuser de t’être rentré dedans. Et t’en fais pas tu ne t’imposes pas du tout, à vrai dire je suis en visite dans la région. Je viens d’Alola. Et toi, tu es du coin ?” C'est ce qu'on appelle faire d'une pierre deux coups : elle essayait subtilement de le mettre à l'aise en lançant une conversation badine, tout en profitant de l'occasion pour faire plus ample connaissance avec ce sympathique personnage.

Tout en parlant, ils se mirent en route vers les larges boyaux de Nemerya. Notre insulaire n’étant pas du tout spécialiste de la métropole ou de la nourriture du coin, elle se tourna vers Pavel. “Tu connais un restaurant sympa par ici ? Ou tu as une envie particulière ?”
Si la réponse était oui à au moins une de ces questions, autant le laisser guider. Dans tous les cas elle mangeait de tout.

Kiana ne détestait pas Alola, en soi. Elle aimait les matins pittoresques, l’air de l’océan et la patience des uns (moins les préjugés des autres). Ce n’est pas ça qui l’avait poussée à partir, bien au contraire. Elle avait forcément laissé un bout de son être là-bas, sur le sable chaud, près de sa famille. Mais ayant vu le jour et grandi là-bas, notre insulaire souhaitait tout de même voir autre chose - écrire une autre page de son histoire loin de ceux qui la connaissaient, encore plus loin de ceux qui la hantaient.

Elle appréciait Lumiris. La vie y était différente - l’île était bien plus peuplée, tout était si moderne, et les grandes villes grouillaient sans relâche telles des fourmilières, comme si tout le monde était pressé -, mais il fallait admettre que la région avait un charme indéniable de par ses paysages, le savoir-être de ses habitants et les rencontres qu’elle y faisait.
Bien que Kiana ait vécu quelques mésaventures qui l’avaient marquée au fer rouge, elle ne regrettait absolument pas son voyage.

De toute évidence Pavel n’avait, quant à lui, jamais quitté cette contrée. Quelles histoires avait-il à raconter ? Elle était curieuse de savoir. Mais avant cela ils devaient aussi trouver de quoi se nourrir, ou bientôt leurs estomacs entameraient un concerto.

Ils s’arrêtèrent justement devant un restaurant. La jeune femme adressa un regard curieux à son interlocuteur. “Eh bien... Ici je crois me souvenir que c'est bien. Je euh... Je suis né à Nemerya, mais pour être honnête je n'y suis plus revenu depuis mes cinq ans. Je vis chez mon oncle et ma tante à Kishika depuis. Mais j-je suis sûr d'avoir déjà mangé ici !” Oh, il se souvenait donc de cette façade ! Kiana l’examina quelques instants. L’endroit avait l’air convivial, parfait pour les déjeuners en famille. Elle hocha la tête en souriant. “Si tu penses te souvenir, je te fais confiance.” Après tout, s’il en gardait un souvenir indélébile, elle ne pouvait pas être déçue. Les lieux qui se gravent dans notre mémoire durant notre petite enfance sont toujours soit très positifs, soit très négatifs.

Sans plus traîner la brunette poussa la porte de l’établissement, faisant retentir un doux bruit de clochette qui attira une dame d’un certain âge. Elles échangèrent un sourire et des bonjour, puis ses yeux égayés par ses pattes d’oie s’attardèrent sur Pavel. Le reconnaissait-elle ? Allez savoir, en tout cas elle les installa sans poser de question.
Kiana relança la conversation tout en ouvrant le menu. “J’ai tellement faim, je pourrais tout commander ! Rit-elle. Et donc tu habites à Kishika maintenant ? J’en ai entendu du bien, c’est beaucoup plus petit il me semble. Mais tu venais faire quoi à Nemerya du coup ? Réalisation soudaine. La demoiselle rajouta, entre la précipitation et la panique Je t’ai pas empêchée de faire ce que tu avais à faire ici, hein ?”
Ne manquerait plus qu’à cause d’elle, le programme de l’adolescent soit sans dessus dessous.

Kiana n’avait même pas réalisé qu’elle posait trop de questions en même temps. C’était dans sa nature de partir un peu dans tous les sens, tel un électron libre incapable de rester sur place.
Heureusement Pavel ne s’en formalisa pas. Au contraire, il prit le temps de répondre à toutes ces interrogations lancées en salve. Le brun était à l’opposé : calme, réservé, réfléchi. Ils devaient avoir à peu près le même âge pourtant. Cela dit l’insulaire se demanda s’il était timide avec tout le monde, ou si elle le mettait mal à l’aise.

Quoi qu’il en soit ce n’était pas la fin de sa curiosité. Certes elle comptait évincer certains sujets (comme pourquoi il vivait avec son oncle et sa tante et non ses parents) mais les réponses de Pavel lui inspirèrent de nouvelles questions. Ce qui l’empêcha d’enchaîner ? Son estomac. Dès que Kiana vit la restauratrice s’approcher, elle n’avait plus qu’une idée en tête : manger.
Leurs commandes passées (un gratin dans son cas, ça lui paraissait exotique), son vis à vis reprit le fil de leur discussion - preuve qu’il était doté d’une meilleure concentration qu’elle.

La jeune femme l’écouta en hochant la tête. Oh, c’était donc un voyage initiatique ? Une sorte de baptême de l’âge adulte ? Elle aimait bien l’idée. C’est vrai que sortir de son cocon protecteur, rencontrer tout un tas d’individus, c’était une expérience à part entière. Elle-même avait l’impression d’avoir changé depuis son départ, sans encore pouvoir dire en quoi.
En tout cas quand le jeune homme évoqua qu’elle semblait s’en sortir, Kiana rigola doucement en secouant la main. “Alors là, pas du tout ! Déjà je suis une quiche en orientation, figure-toi que je devrais être à Artiesta en ce moment. Et en plus je suis tête en l’air, j’ai même oublié de vérifier si mon forfait couvrait l’étranger avant de venir.” Et puis pour elle, c’était plus une fuite en avant qu’autre chose. Une manière de s’éloigner de ce qui l’étouffait. Même si elle avait effectivement toujours rêvé de découvrir d’autres paysages, les raisons de sa présence à Lumiris n’étaient pas toutes si nobles ni pures.

Ces anecdotes racontées, la brunette reprit d’un air rêveur. “Mais j’ai toujours eu envie de voyager, pas toi ? Même si c’est ta famille qui t’y a poussé, je suis sûre que ça vous apportera plein de bons souvenirs, à toi et tes pokémons. Le monde est tellement riche !”
Et puis il y avait le dépaysement, l’aventure, briser la routine, explorer, voir, sentir, ressentir ; il n’y a pas à dire c’était passionnant à ses yeux. Cependant Kiana capta qu’elle s’emballait peut-être un peu trop. Elle adressa un sourire en coin à Pavel. “Excuse-moi, je me laisse un peu emporter. En tout cas je te trouve pas du tout fragile, tu as quand même pris ton courage à deux mains pour partir seul à l’aventure. Et tu as survécu à notre rencontre !” Même s’il s’était évanoui. Dans tous les cas cette dernière phrase était sortie sur le ton de l’humour. Et chaque mot était sincère.

Il fallait du courage pour partir en solitaire, quand on était aussi timide que lui et qu’il ne s’agissait pas de s’évader comme elle. Pavel n’était donc pas fragile.
Il était méritant.

Les deux jeunes gens discutèrent encore un bon moment, entourés des bonnes intentions de la cheffe de salle. Plusieurs fois encore Kiana eut l'impression qu'elle fixait Pavel, mais si elle l'avait reconnu, elle n'en dit rien.
Une fois repus d'un succulent repas et leur longue conversation terminée, ils sortirent du restaurant et échangèrent leurs numéros pour garder plus facilement contact. Ils décidèrent de s'échanger des photos des endroits intéressants et de tous les bons plans qu'ils trouveraient et de se donner des nouvelles régulièrement. Puis chacun partit de son côté, le météore vers ses créations, la métisse vers sa prochaine destination.

En espérant ne pas se tromper de train, cette fois.

RP Terminé