Ton histoire ne se veut pas si dramatique que ça à la base.
Mais sans ce fameux drame, tu n’aurais sans doute jamais fuis Kalos, n’est-ce pas ?

Revenons à nos bases.

Tu es né sous le nom de Florian Vidal, fils unique d’un jeune couple vivant à Flusselles, dans la merveilleuse région de Kalos. Tu avais tout pour plaire dès le départ, avec ta magnifique chevelure blonde adorablement bouclée, tes grands yeux bleu ciel, tes longs cils fournis et parfaitement recourbés, tes petites taches de rousseur parfaitement déposé ici et là sur ton visage d’ange.

Tu étais celui que faisait tourner des têtes et fondre des cœurs et ce, depuis ton plus jeune âge. Tout le monde t’adorait Florian et tu les adorais en retour. Tu étais tellement adorable. Tu voulais tellement plaire.

Mais tu es né à la mauvaise époque mon chéri.

Tu es né avant que la société soit prête.

Vois-tu Florian, tu dès ton plus jeune âge, tu avais un secret.
Un secret que tes parents connaissaient. Et si ta mère te réconfortait dans ton secret et te rassurait, ton père ne le voyait pas du même angle. Ce n’était qu’une phase, un truc de gamin, après tout, tu ne jouais qu’avec des filles. C’était l’effet de groupe te jouait sur ta logique. Tu ne pouvais pas savoir, à moins de 10 ans, que tu n’étais pas bien dans ton corps.

Innocent, tu portais des jupes, ta couleur préférée c’était le rose, tu voulais même te faire appeler Flora par tes amis. Enfin, c’est comme ça que tu voyais tes camarades de classe. Vous étiez 32 cette année-là. Ça te faisait 32 nouveau amis!
Tu te souviens très bien du sentiment euphorique que tu avais ressenti cette journée-là, tu étais tellement heureux.

Sauf que tu ignorais encore à quel point les enfants pouvaient être cruels.

À l’approche de la puberté, ton père essayait de te raisonner, de te ramener vers les shorts et les pantalons. Sous prétexte que tu ne pouvais pas continuer sous cette voie, que c’était pour ton mieux.

Car vois-tu Florian, depuis que tu es haut comme trois pommes, tu es convaincu que tu n’es pas dans le bon corps. Tu n’es pas attiré par ce qui est typiquement masculin aux yeux de la société. Ta couleur préférée n’est ni le Bleu, ni le Rouge, ni une autre couleur agressive et ‘masculine’. Tu aimes ce qui est doux, léger, comme le Rose et les couleurs pastel
Tu es doux et léger toi-même. Mais on te dit que ce n’est pas normal, que tu ne peux pas vivre ainsi. Qu’on va se moquer de toi.

Non sans déception, tu acceptes de te plier aux normes à l’approche de l’adolescence. Tu appréhendes ta puberté, tu n’as pas envie de ressembler… À ton père.
Tu ne veux tellement pas ressembler à un homme. Ça te terrifie.
Tu as passé plusieurs nuits à pleurer dans les bras de ta mère, tu la suppliais même de t’aider, que tu voulais changer de vie, que tu voulais fuir, loin, très loin de Kalos. Tu voulais vivre sans devoir te cacher, sans devoir prétendre quelqu’un que tu n’étais pas.

Si seulement c’était aussi simple Florian.


Par un quelconque miracle, ta figure maternelle semblait être ton mvp dans ta quête identitaire, si bien qu’elle avait remuée terre et mer pour t’obtenir de l’aide psychologique afin que tu puisses légalement obtenir des ralentisseurs d’hormones.
Et si tu étais réticent en apprenant que tu allais avoir un suivit mental, rapidement tu comprenais que tu gagnais des alliées dans ton combat. Et aussi jeune qu’à 13 ans, tu avais pu mettre un terme à ta puberté avant que les… Dommages soient faits.

Mais si tu semblais soulager de ne pas voir ton corps se changer pour le pire, tu ressentais un vide malgré tout? Comme si ce n’était pas assez. Mais tu savais au fond de toi que ce n’était pas le temps. Tu devais t’armer de patience encore un peu et essayer de vivre une vie se voulant ‘normal’.

École, cheerleading, petit ami, tu avais un mal fou à t’intéresser aux autres filles, c’était comme… Anormal pour toi? Car si tu enviais leur corps, tu ne voulais pas être avec une fille pour autant. Jalousie? Envie? Complexe? Sans doute toutes ces réponses.

Mais bien sûr, tout était une raison pour intimider à ton école et ta relation faisait beaucoup parler. Parlons-en un peu d’ailleurs. Tu fréquentais avec un grand ténébreux qui écrivait pour le journal de l’école. Le truc un peu ennuyeux mais tu adorais passer des heures à lire ses articles à venir, trainer dans la bibliothèque pour simplement le regarder travailler sur l’ordinateur. Tu aimais si simplement être à ses côtés. Tu aimais tellement ton Ludovic. Vous étiez ensemble depuis tes 14 ans. Il était ton aîné que d’une année de plus sur toi, rien de dramatique en soit. Sauf que Ludovic avait beaucoup de noirceur en lui. Il masquait sa dépression derrière ses écrits mais tu savais au fond de toi que c’était difficile. Il ne venait pas d’une famille supportive, car si ses parents étaient confortables financièrement, ils n’étaient que trop présents. Trop occupés avec le boulot. Il n’était pas rare que tu passes des journées chez lui. Ou inversement. Tes parents l’aimaient beaucoup.

Après bon, ce n’était pas l’unique membre de ton cercle, tu avais pour meilleure amie Mérédith, la Queen Bee de ton établissement. Capitaine de l’équipe de Cheerleader, fille du directeur et prodige en matière Pokémon. Elle avait tout pour rendre quiconque jaloux. Dont la légendaire cascade blonde et les grands yeux bleus qui rappelaient les chaudes eaux d’Alola. Et si elle n’était pas des plus… Tendre envers les autres, elle t’avait toujours prix sous son aile. Tu étais son BGF! (Best Gay Friend)
Après tout, que serait la Queen Bee sans son meilleur ami gay.
Et puis, comme c’était ta meilleure amie, tu te sentais en confiance. Tu pouvais absolument tout lui dire, elle comprendrait, n’est-ce pas?

Si seulement tu savais que tu allais commettre la pire erreur de ta vie, Florian.


Mais tu lui confiais tout. Tous tes secrets. Sur toi, ta personne, ton identité et comme tu l’espérais tant, elle comprenait. Elle te supportait. T’encourageait même.
Tu étais tellement heureux, tellement soulagée. Tu avais enfin pu partager ton plus grand secret avec une personne de confiance en dehors de ta mère. Tu te sentais tellement léger. Légère même..? Comme si c’était un premier pas vers ta paix d’esprit.
C’est la tête reposée que tu allais te coucher cette nuit-là, non sans texter Ludovic au passage pour lui annoncer que tu étais enfin prête à le lui confier à lui aussi, ce terrible secret.
Tu étais anxieux mais tellement excité.
Tout allait bien aller.

Quelle était ta surprise en arrivant à l’école.
On te regardait, te dévisageais même, te pointais du doigt, certains rigolaient, alors que d’autres te regardaient comme si tu avais choppé la peste la nuit dernière. Dans le doute, tu te sentais, comme pour faire sûr que tu avais pris ta douche. Tu ne sentais pas mauvais, alors ce n’était pas ça…
Confus, tu cherchais naturellement ta chère Mérédith, en espérant comprendre ce qui se passait ce matin.

« Coucou Méré’, dis, tu sais qu’est-ce qui se passe ce matin? Les gens me regardent étrangement… J’ai un bouton sur le nez ou bien?»

Et alors que la grande blonde se retournait pour te faire face, elle te regardait avec le plus grand des mépris, te balayant du regard de haut en bas avant de pester.

« Eww me parles pas ‘spèce de freak. »

Pris de court, tu inclinais la tête, elle aussi?

« Méré? »

« Pour toi c’est Mlle Lawrence. Et si tu oses m’adresser la parole encore une fois… »
Elle s’arrêtait pour te regarder de haut en bas, non sans croiser les bras.
« Eh bien, disons que tu as laissé Ludo sur la corde raide ce matin. »

Ludovic? Corde raide..?
Le comportement de ton amie, ex-amie, te troublais tellement. Mais ce qu’elle insinuait te jouait dans la tête encore plus. Si bien que tu ne manquais pas de rebrousser chemin pour aller chez ton petit ami. Pourtant hier soir, votre conversation était positive, non? Tu voulais enfin lui confier ce que tu cachais à tous, tu voulais être enfin honnête avec lui, avec toi-même. Tu ne voulais plus vivre dans le secret et prétendre être quelqu’un que tu n’étais pas.
En arrivant chez lui, tu t’annonçais à la porte en faisant sonner une fois. Puis une seconde. L’absence de réponse te fit froncer les sourcils sur le coup, alors que tu sortais ton trousseau de clé. Heureusement, tu avais ton double confié des mois plus haut. Après tout, cela faisait 3 ans, bientôt 4 que vous étiez ensemble.

La maison était relativement calme ce matin, si ce n’était pas de Sucrose, la Sucroquin de Ludovic qui s’empressait de venir t’accueillir à la porte. Mais plutôt que venir t’apporter sa balle pour t’initier à jouer avec elle, elle retournait sagement dans son lit et semblait attendre. Attendre quoi? Curieusement, tu approchais pour voir sa gamelle vide. Ludovic ne l’avait pas nourri ce matin? Intrigué, tu t’approchais des escaliers pour monter à l’étage. Il n’était pas rare que Ludovic soit seul avec son Pokémon, ses parents travaillaient dans le domaine de la santé et voyageaient énormément. C’était pratique pour passer du temps seul avec lui à vrai dire. Mais le silence de la demeure te troublait. Encore plus alors que tu arrivais devant la porte de sa chambre. Fermée.

C’était anormal venant de ton petit ami, il la laissait toujours ouverte pour permettre à Sucrose d’aller et venir à sa guise.
Tu avais vraiment un mauvais feeling face à tout cela. Encore plus en posant ta main sur la poignée, la tournant très lentement et…

Tu figeais.

Tu figeais, comme foudroyer par l’horreur qui se dévoilait de l’autre côté de la porte.
Tu avais envie de crier, de hurler mais absolument aucun son ne sortait de tes lèvres.
Tu n’avais pas envie de croire à la vision qui se tenait face à toi. Tu avais envie de chialer. Ça ne pouvait qu’être un mauvais rêve, n’est-ce pas?


.. Enfin, ça c’est la version de l’histoire que tu m’as donnée.
Elle semble assez cohérente avec celle de ta mère.
Mais combien d’années sont passées depuis, mon enfant?

Tu as passée des années dans un centre de crise, puis dans un centre d’aide psychiatrique.
Tu t’en voulais tellement. Si seulement tu n’avais pas parlée à Mérédith cette soirée-là, tu ne cesses de me répéter cette phrase. Pourtant.

Cela fait 7 ans que ta vie à basculée du tout au tout.
7 ans que tu as abandonné l’école.
7 ans que tu as arrêté de vivre, publiquement du moins.
Tu es comme.. Terrifiée? Traumatisée, clairement.
Peut-on seulement t’en vouloir?

Mais passer ta vie à te lamenter ce n’est pas… Toi.
Et les dernières années t’ont permis de doucement le réaliser pour mieux avancer. Mieux… Renaître. Car si la vie de Florian s’est brusquement arrêté ce matin-là, quelques années plus tard, Marguerite sortait lentement, timidement de son cocon.
Le monde réel est terrifiant. Horrifiant même.
Mais tu ne voulais plus vivre derrière un mensonge.

Armée du maigre courage qui t’habitais malgré les traumatismes, tu accumulais les sous nécessaires pour t’aider à repartir à zéro et tout recommencer. Nouvelle ville, nouvelle région, nouvelle vie, nouvelle face, nouveau prénom, nouveau nom même, nouveau tout.
Pourquoi changer de Vidal à Bailey dis-moi?
Eh bien, Bailey c'est le nom de ta mère. Et si pour mieux te détacher de Florian, cela inclut aussi ton nom de famille. D'ailleurs, ce changement n'a pas particulièrement plus à ton père mais bon. It is what it is.

Dis comme ça, tu sonnes comme un tueur qui essaie de fuir sa réalité.
Pourtant, c’est un peu l’image que tu as de ta personne par moment.


Il t’arrive de te perdre dans tes songes, lorsque tu es seule trop longtemps.
Mais ton besoin de renouveau est trop grand.
Tu es nerveuse, anxieuse même à l’idée de recommencer.
Mais la vie d’offre une seconde chance, ne la gaspille pas déjà.

Armée de ton maigre courage et de Sucrose, tu posais enfin les pieds en dehors du bus qui annonçait le début de ta nouvelle vie dans la ville de Mirawen.
C’est le cœur gros et pleine de fébrilités que tu embrassais le début de cette nouvelle vie, aux côtés de ton unique souvenir restant de ton unique petit et dernier souvenir de ton ancienne vie, ta Sucroquin.

Tu ignores ce que la vie te réserve, pour l'instant tu survis de petit boulot ici et là, actuellement tu travailles dans un petit café à titre de barista. Mais qui dit renouveau, dit nouvelle plateforme et depuis peu, tu as découvert une espèce de passion pour les TikTok? Oh tu sais le truc mal vu et limite ringard mais ça te fait sentir bien et puis... Tu reçois beaucoup d'attention et compliment.
Et plus que jamais, tu en ressens le besoin en ce moment.