Les voilà ramenés à trois partout. Le deuxième shot n’allait pas tarder à être bu mais le malheureux qui aurait à s’y coller était incertain. Enfin, puisqu’ils avaient tous les deux un verre de whisky à côté, un shot de plus ne ferait pas grande différence.

« Tu te rappelles quand je parlais de la police qui s’était trompé d’adresse et avait défoncé ma porte ? On n’était pas en plein acte à proprement parler mais il n’y avait aucun doute quant à ce qu’on s’apprêtait à faire. »

Ils étaient vraiment arrivés au pire moment, ceux-là. Pire, ils n’avaient de toute façon rien à faire chez lui. Tout cela résultait d’une malencontreuse erreur qui lui avait gâché à la fois l’occasion mais aussi l’humeur. Difficile d’être encore tenté par les plaisirs charnels après une telle visite. Auguste soupira et baissa un doigt. Plus qu’un.

Le Pulsar attrapa son verre et but une gorgée dans ce dernier, tentant de trouver sa prochaine question. Son regard passait successivement de la Nymphali qui recommençait à piquait du nez vers sa dresseuse attendant la suite.

« Je n’ai jamais été embarrassé à l’idée de révéler mes fantasmes à mon partenaire. »

Pour certains, ce pouvait être un sujet difficile à aborder. Que ce soit par manque de confiance ou par peur d’être jugé, tous ne parlaient pas facilement à l’autre de ce qui leur plaisait ou du moins, pas au début de leur relation. Restait à savoir si Lise avait des désirs difficilement avouables.

« Mais c’est pas possible, ça. Sors de ma tête. » soupira-t-il en baissant son dernier doigt, « En plus, tu vas finir par me prendre pour un dépravé. »

Il plaisantait, bien évidemment. Toujours était-il que Lise avait encore une fois réussi à le faire boire en premier tout en conservant elle-même un seul et unique doigt. Le pire dans tout ça, c’est qu’elle ne cherchait même pas à poser des questions outrageusement faciles. Ce round-ci était à nouveau pour elle-même si, au final, le « vainqueur » importait peu. Ce n’est pas comme s’il y avait une récompense à la clé.

Sur ces bonnes paroles, Auguste se leva et alla de nouveau commander des shots. Un pour lui et un pour Lise, aussi, car cette dernière ne tarderait pas à devoir boire. D’ici un tour ou deux, il lui faudrait également vider un shot d’alcool. Il avait soulevé la Nymphali endormie avec délicatesse et l’avait placée sur les jambes de sa maîtresse le temps qu’il s’absente. Lorsqu’il revint, elle y était toujours et le Pulsar décida de la laisser là. Inutile de la déplacer au risque de la réveiller.

« Prépare-toi, c’est bientôt ton tour. » dit-il en avalant d’une traite le contenu du verre.

Il releva cinq doigts, signifiant qu’il était prêt à passer à la suite. Il n’allait pas s’arrêter en si bon chemin, pas vrai ? C’était l’heure de poser la prochaine question.

« Je ne me suis jamais procuré ces mêmes objets. »

« Ce n’est plus vraiment un secret si je suis au courant » répondit-il avec un petit sourire.

Auguste n’eut même pas à réfléchir avant de replier son pouce. Bien évidemment qu’il avait déjà couché avec quelqu’un de plus jeune que lui !

« Je pense que la plupart des filles étaient dans ce cas de figure. »

Il n’avait pas compté mais en tout cas, ses conquêtes les plus récentes avaient à peu près toutes quelques années de moins que lui. Enfin, que Lise ne s’y trompe pas, il ne flirtait jamais avec l’illégalité. Plus jeune ne voulait pas dire trop jeune. Le dresseur avait certains principes.

« Ça me fait penser que je ne connais pas ton âge. La première fois qu’on s’est vu, je t’aurais donné un poil moins de la vingtaine mais là, tu fais un peu plus. Vingt-et-un ? Vingt-deux ? » demanda-t-il.

Etait-ce important ? Non mais maintenant qu’elle avait mentionné cette histoire d’âge, il était curieux de connaître celui de son interlocutrice. Elle n’était pas plus âgée que lui, ça il en était à peu près sûr. Bref. Il digressait.

« Je n’ai jamais couché avec un de mes ex. »

Dix-huit ans. Elle ne les faisait pas, c’était sûr ! Ce n’était pas si jeune que ça et pourtant, Auguste ne pouvait s’empêcher de penser que huit années d’écart, c’était beaucoup. Enfin, cela n’avait pas vraiment d’importance et surtout, cette information n’allait rien changer. Ce n’est pas comme s’il allait soudainement se mettre à la considérer comme un enfant. Il lui répondit que pour sa part, il avait vingt-six ans.

Les rounds s’enchaînèrent ensuite. De même que les verres et les questions toujours plus osées. Il fallait dire que vu l’ambiance installées entre eux, l’alcool faisait vite oublier la décence. Sobre, le Pulsar n’aurait ni demandé ni révélé la moitié de ce qu’il avait dit aujourd’hui. Ce n’était pas par timidité ou pas honte, rien de ce qu’il avait dit n’était secret, mais par principe, les gens gardaient certaines choses pour eux.

L’homme ne faisait pas vraiment attention au temps qui s’écoulait tant il passait un bon moment et par conséquent, il eut du mal à cacher sa surprise lorsque le patron leur indiqua qu’il allait bientôt fermer. Certes, c’était un petit bar tranquille qui ne restait jamais ouvert très tard mais quand même, il était déjà cette heure-là ? Un coup d’œil sur son téléphone lui indiqua que oui. Il n’avait pas vu le temps passer. Cela ne changeait rien au fait qu’il allait falloir se mettre en route. Lise elle-même drapait son écharpe autour de son cou.

« Ô joie, le froid. Il m’avait manqué. Garde ma veste, le temps est pire que tout à l’heure. »

A en juger par ce qu’il vit, il avait un peu neigé depuis tout à l’heure. Rien d’insurmontable mais cela confirmait que oui, il faisait froid. A forcé d’être assis au chaud, Auguste n’était pas très enclin à affronter les températures fraîches de la soirée. Au moins, l’alcool lui donnerait la sensation de ne pas trop crever de froid.

« Puisque ni toi ni moi n’habitons Windoria, je te propose de prendre le tramway jusque Nemerya. Si tu es partante, on peut se trouver un endroit où finir la soirée et puisque mon appartement est là-bas, on peut s’y arrêter prendre un verre. »

A moins que Lise ne souhaite rentrer mais elle n’avait pas indiqué ce souhait. C’était tant mieux car il était encore tôt et ce serait dommage que leurs retrouvailles se finissent déjà. C’est pour cela qu’il lui avait proposé de rallier la capitale. Là-bas, ils auraient tout le choix du monde quant à ce qu’ils allaient faire.

Le vent glacé lui battit le visage sitôt qu’il sorti. Même passablement ivre, Auguste sentait la bise mordante sur sa peau. Il faisait un froid de Couaneton. Il n’osait imaginer ce que ce devait être pour Lise, elle qui était si légèrement vêtue. Heureusement qu’il lui avait laissé son manteau, elle serait en train de grelotter dans le cas contraire. Elle avait même fait rentrer sa Nymphali dans sa Pokéball tellement les températures étaient basses. La pauvre. Après avoir somnoler pendant tout le début de soirée, ce ne devait pas être très agréable de se faire réveiller en mettant ses pattes dans la neige.

« On a de la chance, le prochain arrive dans cinq minutes. »

Ils étaient arrivés à la gare et il avait regardé les horaires de passage avant d’aller s’asseoir avec Lise sur l’un des nombreux bancs de cet endroit. Elle se collait à lui, essayant de profiter de toute la chaleur qu’elle pouvait récupérer. Lui ne s’en plaignait pas. Il y avait de pires traitements que d’avoir une jolie fille se presser contre soi. Ils étaient dans un bel état. Pas complètement ivres mais suffisamment éméchés pour qu’aucune des deux ne puisse prendre le volant – le Tramway était une bénédiction pour ce cas précis.

« C’est exactement ce que quelqu’un ayant beaucoup bu dirait. » répondit-il avec un clin d’œil.

Il était en vérité très touché par ce que lui avait confié la jeune femme. Certes, ils ne se connaissaient pas depuis très longtemps et ne s’étaient pas vus souvent mais il avait apprécié chaque seconde passée en sa compagnie. Surtout aujourd’hui où ils avaient appris à faire plus ample connaissance.

« Plus sérieusement, le sentiment est réciproque Lise. Je suis ravi de t’avoir croisée tout à l’heure. La soirée a été superbe et je ne doute pas que la suite le sera tout autant. »

Il n’y avait aucun sous-entendu dans sa phrase. Qu’importe comment la journée se finissait, il avait passé un très bon moment et déjà, il prévoyait de revoir la coordinatrice. Enfin, inutile de prévoir ce genre de chose pour le moment, il fallait avant tout profiter du moment présent.

« C’est celui-là. »

Il avait dit cela en se relevant. Bon sang qu’il était pressé de s’asseoir dans la chaleur relative du tramway, si pressé qu’il avait pris qu’elle se mette à son tour debout. Il n’y avait pas tant de trajet que cela jusqu’à Nemerya et pourtant, Auguste était déjà impatient d’y être et de rejoindre son appartement. La suite des événements promettait d’être intéressante.