Un sourire illuminant mon visage et le regard pétillant, je ne réfrène nullement ma joie. La veille, dans le courant de la matinée, j'ai décidé après un mûre et intensive réflexion qu'il était temps pour Ayshee et moi d'explorer un peu la région de Lumiris. Aujourd'hui est la journée idéale, je n'ai pas de cours à suivre, pas de service à prendre, rien, je suis totalement libre. Et depuis le temps que j'hésite à commencer ma visite de la région, il faut bien que je me lance. J'ai consulté activement la carte de la région, mon Absol à mes côtés, et elle m'a pointé d'une griffe assurée la ville de Voltapolis. Il est vrai que pour commencer, Voltapolis est une bonne destination, même s'il paraît que la cité a énormément perdu de sa splendeur d'antan. Splendeur dont je n'ai jamais eu connaissance, donc peu importe si la ville n'est plus ce qu'elle était, je suis certaine que ça sera une bonne découverte, quoi qu'il arrive.
Le réveil aux aurores pour s'y rendre a été plus difficile que ce que j'imaginais. Je suis habituée à me lever de bonne heure, notamment lorsque je dois me rendre à Windoria, mais là, ça n'a rien à voir. Il y a toute la route 4 à traverser, donc ça prend un peu plus de temps, d'où un départ au moment même du lever du jour. Ayshee, elle, a été enthousiaste et pleine d'énergie tout au long du trajet. Même là, aux portes de Voltapolis, elle ne peut me dissimuler son excitation de découvrir cette nouvelle ville, malgré une apparence très calme et sereine.
Nous nous mettons alors à déambuler timidement dans les rues de la ville, ne perdant pas de vue un seul détail du paysage urbain qui s'offre à nous. Je remarque que beaucoup de devantures sont closes, certaines rues ont un air morne tandis que d'autres ont l'air d'être encore assez animées. Ce n'est que lorsque nous sortons de la périphérie de la ville pour nous diriger vers le centre que les rues deviennent plus bondées, avec plus d'animation. Je sens Ayshee se rapprocher de moi, le pelage légèrement hérissé. Elle n'est pas habituée à croiser autant de monde, et moi non plus. Ça fait vraiment bizarre de se retrouver comme ça, au milieu d'une foule, dans une ville que ni elle ni moi ne connaissons. Si on ne fait pas attention, on risque soit d'être séparées, soit de se perdre en se laissant entraîner par la foule.
Je lui intime alors de rester de moi, par mesure de sécurité, lorsque soudain, mon épaule percute un corps au milieu de tout ce monde. Je titube quelques instants avant de retrouver mon équilibre. Je me suis déportée sur le côté, à l'entrée d'une ruelle qui semble, contrairement au reste, totalement déserte. En face de moi, la personne que je suppose avoir percutée, un homme, est immobile également. Coup de chance, je n'ai pas perdu Ayshee. Je me penche alors vers cet homme et lui demande d'une voix inquiète :
Voltapolis. C'était une ville que je n'avais pas encore eu le loisir de visiter, ou même d'explorer à vrai dire. Je n'en avait qu'entendu parler et on ne tarissait pas d'éloges à son sujet. Enfin, ça c'était avant. Depuis peu, il était dit que la ville se faisait petit à petit fuir, déserter même. Je ne savais pas trop pourquoi, ne m'étant pas plus intéresser que ça aux événements, puis je ne pouvais de toute façon pas répondre. Moi qui venait d'un village, je serais mal venu de commencer à critiquer un endroit qui se fait dépeupler. Surtout si je ne peux pas le concurrencer.
J'étais arrivé de bonne heure dans cette grande ville, enfin, entendre par la qu'on était encore dans la matinée, mais qu'elle était déjà relativement avancée. La météo était clémente aussi, ce qui était un bon plus. Moi qui voulais visiter l'endroit, j'allais pouvoir m'y donner à cœur joie et profiter pleinement de ce que la ville a à proposer. Et dire que je n'étais pas pressé, ce serait mentir. Évidemment que j'étais un peu pressé de déambuler ici et là, d'ailleurs je n'étais pas le seul à ressentir ça. Ma Zorua, qui avait pris une de ses places habituelles sur mon épaule, était déjà en train de regarder partout. Elle aussi n'avait jamais vu le coin, et il changeait sensiblement par rapport à Kishika.
Je m'aventurais donc dans les rues de cette ville encore inconnue. Mais je fut bien obligé de constater que les rumeurs comme quoi la ville se faisait peu à peu délaisser... étaient bien fondées. Ici et la, l'un ou l'autre magasin affichait porte close et même si ça ne semblait pas être la généralité sur la ville, rien que le fait de les voir donnait un peu le ton. Dans les rues plus animées en revanche, ce n'était absolument pas le cas. Au vu du monde qui y était présent, ça paraissait logique, mais ne sait-on jamais.
J'avançais lentement dans ces rues, faisant attention malgré tout, mais c'était chose plus facile à dire qu'à faire. Heureusement pour moi, je n'avais à faire attention qu'à ma personne. Avec May sur mon épaule, à moins qu'elle tombe, elle ne risquait pas grand chose. Et puis, elle pouvait profiter d'un bon point de vue, au lieu de devoir regarder dans les pieds des gens.
Mais ce qui devait forcément finir par arriver, dans une rue où il y a foule, arriva. Quelqu'un me bouscula, suffisamment fort pour me forcer à m'arrêter, sous peine de manger le mur d'une manière à peu près littérale. Je regarda rapidement autour de moi, cherchant pour la silhouette de ladite personne et fini par trouver une jeune femme blonde, avec deux couettes, qui semblait elle aussi récupérer d'une bousculade avec un Absol à ses côtés. Je m'avançait sans doute un peu, mais ça devait être elle... J'allais pour m'approcher d'elle et m'excuser, mais je n'étais pas le seul à avoir fait les frais de cette bousculade. Ma Zorua aux couleurs si particulières, qui était toujours sur mon épaule, avait perdu son équilibre et n'avait pas réussi à se reprendre. Résultat ? Elle tomba et glissa tout le long de mon bras, sans parvenir à s'arrêter jusqu'au dernier moment. En me mordant deux doigts en guise d'attache, suffisamment fort pour rester accrochée bien sûr. Ma réaction fut quasiment instantanée et je levai rapidement le bras, l'envoyant en l'air sans pouvoir retenir un petit couinement du fait de la douleur. Elle me lâcha les doigts et pendant qu'elle était en vol libre, je la rattrapa des deux mains, avant de l'ébouriffer un peu.
- Fait un peu attention, 'spèce de patate ! C'était mes doigts ça...
Sa seule réponse fut de me tirer la langue en gigotant un peu des pattes. Au final, je ne pouvais clairement pas lui en vouloir et elle retrouva sa place sur mon épaule, puis je fit face à la femme blonde que j'avais repéré. Qui était déjà en train de s'excuser. Elle avait été plus rapide que moi, mais au moins ce n'était pas une de ces personnes qui ne daignent même pas regarder et s'excuser par la suite. Je lui adressa un petit sourire en secouant la tête, lui répondant d'une voix que je voulais rassurante.
- Oui, tout va bien, ne vous en faites pas. J'ai eu plus de mal d'un tir allié que de vous, n'ayez pas peur. Et puis, je suis un peu fautif moi aussi, je ne connais pas la ville et j'étais plus occupé à regarder partout qu'à faire attention. C'est plutôt à moi de vous demander si tout va bien ?
Quelques secondes à peine après avoir posé ma question, je remarque qu'un Zorua aux couleurs inhabituelles, qui devait sans doute être perché sur son épaule, a glissé au bout de son bras, avant qu'il ne la renvoie légèrement en l'air pour pouvoir la récupérer dans ses deux mains. Cette scène est trop comique pour moi, alors j'éclate d'un rire doux et clair, mais qui reste discret. Une fois que le Zorua a repris sa place initiale, le jeune homme s'excuse également, avec une voix rassurante et une tête aussi désolée et perdue que la mienne. J'en profite alors pour le détailler. Carrure plutôt imposante, cheveux très pâles presque blancs, il est loin d'être laid, c'est certain. Je ne compte plus les fois où je me suis fait percuter par des hommes bedonnants au regard peu scrupuleux, où Ayshee comme moi ne pensions qu'à une chose : partir, et ce le plus vite possible. Là, pour une fois, j'ai eu un peu plus de chance en tombant sur quelqu'un qui a l'air d'être d'une douce gentillesse et qui ne me balance pas une flopée incroyable d'injures. D'ailleurs, on dirait qu'il a l'air plus âgé que moi, mais je sais que les apparences peuvent être trompeuses. Rares sont les personnes qui voient juste sur mon âge, alors désormais je fais attention avant d'en attribuer un à toute personne que je rencontre.
Une fois que j'ai pu enlever les quelques grains de poussière ayant atterri sur le bas de ma robe et qu'Ayshee frotte le museau contre la paume de ma main pour me signaler que tout va bien de son côté aussi, je m'empresse de rassurer l'inconnu que j'ai tamponné :
– Oh, ne vous en faites pas, je vais bien aussi ! Ce genre de chose m'arrive plutôt fréquemment, alors je dois avoir la tête dure, à force.
Je souris alors à mon interlocuteur, reprenant mon visage lumineux habituel. Il m'arrive bien souvent de me moquer de ma propre maladresse, et je suis toujours honnête avec les gens que je croise lorsque ce genre d'incident se produit. Parfois, ils en rient également. Et parfois, ils le prennent extrêmement mal, en me disant que si ça m'arrive aussi souvent, c'est que je dois le chercher, le faire exprès, ou vraiment être une cause perdue. Je penche plutôt pour l'option cause perdue, moi. J'espère en tout cas que lui ne va pas le prendre trop mal, mais vu la tête qu'il a fait tout à l'heure, je pense que ça ira.
En jetant un coup d'oeil dans la rue passante où nous nous sommes percutés, je me rends compte qu'il y a légèrement moins de monde. Et une évidence me frappe au passage. Je ne sais absolument pas dans quelle zone de Voltapolis je me trouve. Rien de grave en soi, puisque de toute façon, je suis ici pour visiter la ville. Que je sois perdue ou pas, ça ne change pas grand chose. C'est dans ces moments là que je me rends compte que lorsque beaucoup de personnes sont présentes autour de moi, j'ai du mal à avoir des repères topographiques fixes, et donc à retrouver mon chemin. Par conséquent, mon sens de l'orientation s'en retrouve affecté. Mais peut-être que le jeune homme dans lequel je suis rentrée par inadvertance sait où nous sommes, lui ?
Zeph', il t'a dit il y a quelques minutes à peine qu'il ne connaissait pas la ville, alors il y a peu de chance.
Je secoue la tête. Une petite idée vient alors s'insinuer dans mon esprit. Pourquoi ne pas lui proposer de visiter Voltapolis ensemble, puisque ni lui, ni moi, ne sommes du coin ? Il n'a pas l'air méchant, et puis je ne connais pratiquement personne, à Lumiris, contrairement à lorsque j'étais à Galar. Il faut bien commencer quelque part, après tout.
– Est-ce que ça vous dirait, comme vous aussi vous ne connaissez pas la ville, qu'on la visite ensemble ? Je marque une courte pause. Et puis, ça me permettra de vous offrir quelque chose en guise d'excuse pour le carambolage de tout à l'heure.
Ayshee, qui semble intriguée par le Zorua chromatique, n'est pas contre cette idée non plus. Enfin, elle n'est pas contre surtout pour que je lui offre quelque chose à elle aussi, et pour qu'on ne se perde pas plus qu'on ne l'est déjà. Il ne faut pas oublier qu'Ayshee et moi, c'est comme le jour et la nuit. Elle est aussi chanceuse et habile que je suis maladroite. Et je dois être aussi sociable qu'elle est totalement solitaire, à part avec quelques rares Pokémon et humains autres que moi.
Apparemment, tout allait bien, à en croire la réponse de la jeune femme. Tant mieux en un sens, même si le fait qu'elle ait l'habitude se faire bousculer n'était pas pour rassurer. Peut-être n'avait-elle juste pas de chance, ce qui l'amenait à souvent se faire rentrer dedans par des personnes dont la politesse n'était pas la chose la plus développée ? Enfin, qu'importe, c'était une autre histoire, elle et son pokémon allaient bien et c'était tout ce qui comptais. Je lui rendit son sourire et écouta par la même occasion la proposition qu'elle était en train de faire. Elle souhaitait que l'on continue la visite de la ville ensemble ? L'idée n'était pas si mauvaise que ça, à bien y réfléchir. A condition de ne pas penser au fait que ni l'un ni l'autre ne nous connaissions, mais pour le coup ce n'était qu'un détail. Nous étions dans une grande ville, l'un comme l'autre pouvait se défendre s'il y avait un souci... Et puis, elle n'avait pas l'air d'être une mauvaise bougre.
Je fit un hochement de tête pour lui répondre, avant de répliquer dans la foulée, comme pour joindre les mots au geste, à défaut de faire l'inverse. Toujours avec ce sourire gentil que je lui faisais depuis quelques secondes déjà.
- Pourquoi pas ! Quitte à ne pas connaître la ville, autant être en bonne compagnie. Ça sera moins embarrassant si l'on en viens à se perdre, on pourra en rire, pour peu que l'on ne soit pas séparés l'un de l'autre. Et si l'on voit quelque chose d'intéressant, ça restera plus sympathique à faire à deux, plutôt que seuls, pas vrai ?
Lentement, je lui tends le bras, un peu comme l'on tends le bras à sa cavalière lors d'une soirée huppée. Qu'elle le prenne ou non, ça ne regardait bien évidemment qu'elle, il était hors de question de la forcer en quoi que ce soit et j'étais prêt à retourner dans le cœur de la foule. Je profitais à peine de la petite pause pour continuer, la voix un peu plus enjôleuse qu'à l'instant.
- Mais, vous n'avez pas besoin de m'acheter quoi que ce soit pour vous faire pardonner. Votre présence me suffit, ne vous ruinez pas pour si peu. D'ailleurs, si nous visitons la ville ensemble... Il me faudrait connaître votre nom, si je peux me permettre de vous le demander, bien sûr. A vous et votre pokémon.
May, toujours penchée sur mon épaule, avait regarder l'échange sans bouger ou même sans broncher. Jusqu'à la fin tout du moins, ou elle vint directement me sauter sur la tête, non pas pour m'attaquer. Mais pour s'installer sur le haut de ma tête, à la manière d'un chat qui veux montrer à tout le monde sa propriété. Où bien, elle était juste contente d'avoir réussi à me décoiffer un peu et à me mettre au moins deux mèches devant les yeux. La connaissant... C'était plutôt la seconde option. Et depuis son trône chevelu, fière de sa bêtise, elle regarda le Absol pendant un bon moment. Sa curiosité était visible, à elle aussi, mais elle ne voulait pas descendre, pas en plein milieu de la ville. Je pouvais la comprendre, elle ne voulait risquer de se faire perdre bêtement par la faute de personnes qui ne regardent pas où ils vont. Il y en a tellement qui font ça et qui se soucient pas des autres...
Une fois de plus, je me dis que j'ai eu de la chance de ne pas tomber sur quelqu'un de mauvais, comme ça m'arrive presque à chaque fois. Enfin, tant que ce n'est pas Ayshee qui est blessée, pour moi, ça n'est pas grave. Je crois que cette situation ne s'est produite qu'une seule fois, le lendemain de notre arrivée à Lumiris. Nous étions encore à la capitale, Nemerya, à ce moment là. L'incident s'était produit au moment où nous étions allées faire quelques achats en prévision de notre longue route vers Fort-des-Songes. Un homme d'une cinquantaine d'années avait alors bousculé Ayshee, et part la même occasion, renversé le sachet en papier qu'elle tenait dans sa gueule avec la moitié des provisions dedans, désormais toutes immangeables. Je me souviens de ma colère et de ma détresse, non pas parce que nos provisions avaient été foutues en l'air, mais parce que l'homme avait fui comme un voleur sans présenter la moindre excuse, et mon Absol s'était retrouvée blessée à la patte. Résultat, notre départ avait été retardé de quelques jours, le temps qu'elle récupère complètement. Rien que d'y repenser, ça me ferait presque grincer des dents.
Le jeune homme répond alors favorablement à ma proposition, ce qui, je ne le cache pas, me fait grandement plaisir. D'un autre côté, ça me rassure : mieux vaut qu'on soit perdus à quatre qu'à deux seulement. C'est d'ailleurs ce qu'il explique lui aussi. Il a raison sur plusieurs points. A deux, on pourra rire de notre sens de l'orientation déplorable si l'on se perd à nouveau, le mien étant totalement inefficace avec cette foule. On pourra aussi profiter à deux des différents paysages ou des lieux d'activités qu'on croisera sur notre chemin. Même si Voltapolis est en déclin, je suis sûre qu'il reste encore quelques lieux comme ça. Ou peut-être des vestiges d'endroits qui ont été animés et sont déserts désormais, qui sait ?
Mon interlocuteur me tend alors le bras, exactement comme le ferait un partenaire de danse en invitant son duo à entrer sur scène avec lui pour enflammer les planches. Cela me fait sourire un peu plus, surtout avec le ton très adouci qu'il emploie derrière pour m'expliquer que je ne lui dois rien.
Merci inconnu. Grâce à toi, je peux sauver un peu plus mes économies.
Enfin, je dis ça, mais il est fort possible que j'insiste tout de même pour lui offrir quelque chose, que ça soit une boisson, un biscuit à grignoter, un souvenir, n'importe quoi en fait, tant que ça ne coûte pas une fortune et que ça peut me faire pardonner. Oui, je culpabilise toujours trop. Mais c'est plus fort que moi. Il me demande aussi mon nom, celui de mon Absol également, toujours avec ce ton doux qu'on pourrait presque qualifier d'enjôleur. Cet homme m'a l'air d'une sincère gentillesse, et s'il avait eu un quelconque mauvais fond, Ayshee l'aurait pressenti tout de suite. Or, elle est calme et simplement intriguée par le petit Zorua chromatique, qui grimpe subitement sur la tête de son maître. Elle lui ébouriffe les cheveux en faisant tomber quelques mèches sur son front, ce qui ne manque pas de me faire rire. J'aime beaucoup le caractère de ce Zorua, je crois bien. Avec son dresseur, ils doivent eux aussi faire un sacré duo.
En parlant de lui, il attend toujours, le bras tendu. Il n'attendra pas éternellement, je le sais bien. Il suffit d'un mouvement de tête de ma part, d'un geste de refus, pour qu'il reparte, et tout s'arrêtera là. Mais ce n'est pas ce que j'ai en tête. J'ai envie d'entrer dans son jeu. C'est donc ce que je fais. Je dépose ma main sur la sienne, un sourire malicieux presque enfantin prenant naissance au coin de mes lèvres.
– Je suis Zephyra Kromwell, et elle, c'est Ayshee, dis-je pour nous présenter toutes deux. Et vous ?
Ma partenaire s'est avancée, faisant un léger signe de tête pour saluer cette fois-ci de façon convenable -et non pas en les percutant- le jeune homme et son pokémon. Si nous parvenons à ne pas nous perdre de vue, eux et nous, à travers la foule, je sens que cette excursion va être bien plus amusante que si nous la faisions seulement à deux. Après tout, avoir de la compagnie, ça change tout.
Je ne savais pas si c'était quelque chose de volontaire ou non, et à vrai dire je m'en fichais un peu éperdument pour le coup, mais la jeune femme pris quelques très courts instants avant de finir par jouer le jeu en posant sa main sur la mienne avec un léger sourire taquin. Ce n'était pas vraiment ce que j'avais en tête, mais ça marchait tout aussi bien. Elle se chargea ensuite des présentations, avant de me retourner la question. Quoi de plus normal, je n'étais même pas surpris. Je regarda la foule un court instant, avant de lui répondre, en la regardant tout en imitant une petite courbette. Quoiqu'avec mon Pokémon sur la tête, ça y ressemblait tellement peu que c’était plus une grosse caricature qu'autre chose, étant donné que je ne pouvais pas baisser la tête pour accompagner le mouvement.
- Vous pouvez m'appeler Alexen, Alexen Isawa. Dis comme ça, on pourrait croire à un faux nom... Heureusement qu'il n'en est rien ! Et la miss sur ma tête, c'est May.
L'intéressée fit un coucou de la patte, après s'être assurée qu'elle ne tomberait pas de son perchoir vivant. Ce serait un peu bête de refaire une chute en aussi peu de temps. Suite aux présentations, je fixa à nouveau le flot de personnes, qui avait à peine diminué depuis le temps, avant de nous y emmener tout les quatre, nous y replongeant à nouveau. En faisant bien sûr en sorte de ne pas me faire lâcher par Zephyra. Cette fois-ci, nous restions proche des murs, les gens y semblait à peine moins présents, mais c'était toujours un petit plus. Et puis, ça nous permettais de voir ce que la ville pouvait proposer comme boutique, de ce côté-là de la rue.
- Il y a t'il quelque chose que vous aimeriez voir en particulier ? Où bien, devons-nous laisser nos pas et le flux humain nous guider jusqu'à un endroit... parfaitement inconnu ?
Parce que oui, c'était bien beau de vouloir visiter la ville, mais déambuler sans but ne marchait que pendant quelques temps. Au final, il était toujours question de trouver quelque chose à faire, à voir ou à visiter, peut-être même aller manger ou boire quelque part. Ou peut-être juste s'extirper de cette rue surpeuplée. Réussir à trouver un plan de la ville pourrait nous être fort profitable, dommage que je n'ai pas penser à en récupérer un avant de commencer ma visite. Tant qu'on ne se perdait pas de vue, c'était ça le principal, à bien y penser. La rencontre avait été fortuite et aurait put prendre un peu toutes les tournures, sauf qu'elle avait emprunté une bonne tournure, ce qui n'était pas pour déplaire. Devoir être forcé d'arrêter tout de suite à cause de quelconque idiots qui réfléchissait à grands coups d'épaule dans la foule serait quand même bien triste...
Si extérieurement, j'ai l'air parfaitement sûre de moi avec un visage presque charmeur, à l'intérieur, c'est le bordel total. Toutes sortes d'idées contradictoires se bousculent dans ma tête. Avec une qui ressort plus que les autres, mais qui est plutôt une interrogation, pour le coup.
Zeph, depuis quand t'es si audacieuse comme ça ?
Ça ne me ressemble pas. Pas du tout. Pas du tout du tout. Je me suis trop laissée emporter par le jeu et par mon assurance sortie de nulle part, là. J'espère que mon attitude ne va pas me faire courir droit à la catastrophe. Mais maintenant que j'ai déballé cet air assuré alors qu'en réalité j'ai peur de faire une nouvelle erreur qui nous emmènera droit dans un mur, je ne peux plus reculer. Et puis, après tout, peut-être que l'assurance ne me fera pas de mal ? Ne dit-on pas que les personnes avec de l'assurance sont moins maladroites ? Cette rencontre inattendue va être pour moi l'occasion de le vérifier.
L'homme se présente alors à son tour, en tentant une très légère courbette puisque s'il se penche un peu plus, son Zorua va finir par tomber de sa tête. Ça produirait une scène très drôle, je dois bien l'avouer, mais Alexen Isawa, car tel est son nom -un joli nom qui lui va très bien d'ailleurs-, y perdrait quelques cheveux et récolterait plusieurs griffures sur son visage. Et la petite Zorua, car c'est une femelle tout comme Ayshee, s'appelle May. Intriguée une fois de plus, Ayshee s'est avancée et est aux pieds d'Alexen, désormais, pour fixer la Zorua perchée tout là haut. Mon interlocuteur me demande alors si j'ai une idée précise, ou au moins un minimum vague, d'un endroit où nous pourrions nous rendre, ou si nous devrions nous laisser porter par la foule jusqu'à ce que nous trouvions un endroit touristique intéressant. Vu ce que ça a donné pour moi la première fois... Je ne suis pas très à l'aise avec la seconde option. En revanche, en ce qui est de la première... J'ai peut-être quelques idées en tête.
– Je vous propose... Commencé-je avec un ton assez mystérieux. De me laisser vous guider !
Ni une ni deux, je saisis sa main un peu plus fermement pour ne pas le perdre et jette quelques coups d'oeil à la foule dans la grande allée. Lorsque je repère une brèche, je m'y engouffre, en prenant soin de ne percuter personne, ni moi ni Alexen. Se rendre dans un stand qui vend des spécialités locales, ça me paraît être un bon début. Et il me semble en avoir repéré un il n'y a pas très longtemps, en me promenant dans l'autre sens. J'avance au rythme de la foule, qui heureusement n'est pas très rapide, et souris à mon compagnon de tourisme pour le rassurer. Quand je me retourne, mon visage blêmit instantanément.
Comment ça, "me laisser vous guider" ? C'est quoi ton but là Zeph' ? Il va te prendre pour une folle !
Inspire. Expire. Le stand finit par pointer le bout de son nez, ce qui nous permet de quitter la foule. Je remarque alors que May commence à glisser de la tête de son dresseur, alors je m'empresse de l'aider à se repositionner sous l'oeil attentif d'Ayshee. La Zorua me remercie en un petit grognement, et je lui souris, tout à fait ravie face à cette petite bouille si adorable et qui sort de l'ordinaire. Puis je réalise ce que je viens de faire.
– Oh, je suis désolée ! May allait tomber, alors j'ai préféré l'aider à se replacer avant qu'elle ne vous blesse. J'ajoute en me grattant l'arrière du crâne. Et je m'excuse aussi pour vous avoir entraîné comme ça. Je m'emporte un peu trop lorsqu'il s'agit de visite touristique, parfois.
Tu as surtout eu peur de ta propre audace, oui.
May, en tout cas, est plutôt ravie que je l'aie empêchée de tomber, et cela me réconforte dans ma honte d'avoir pris les choses en main avec quelqu'un que je connais à peine alors que ça ne me ressemble pas, ou peu. Honte que je ressens souvent, en ce moment, c'en devient presque habituel. Je choisis un beignet traditionnel pour Ayshee, qu'elle attrape sans masquer sa gourmandise, et une boisson chocolatée pour moi. J'attends qu'Alexen fasse son choix lui aussi. Enfin, si cela lui convient. D'ailleurs, il me semble être juste qu'on choisisse à tour de rôle comment va se dérouler notre périple. Ça me paraît être une bonne idée, que je m'empresse de suggérer :
– Vous choisirez la destination suivante. La ruelle que nous avons quittée est encore visible. Je vous suivrai, et puis, si vous souhaitez vous perdre dans la foule, je vous accompagnerai aussi !
Voilà une personne qui n'avat pas l'air de manquer pas d'assurance, ce qui n'était en rien pour me déplaire, ça me faisait même un peu rire intérieurement. Elle me traînait presque dans la foule, si je ne m'étais pas mis à suivre son pas, ça aurait put être littéral... A présent dans le cœur de la marée humaine, j'étais bien obligé de me laisser guider, pour reprendre les mots de la jeune femme. Bon, ok, la perspective de me laisser guider par quelqu'un qui ne connaissait pas la ville ne semblait pas folichonne au premier abord. Mais il y avait tout autant de risques que ça fasse un flop, que de risques que l'on passe une bonne journée, alors partant de ce principe-la... Je n'avais de toute façon pas grand chose à perdre, au demeurant.
Nous n'avons braver la foule que quelques minutes, avant de finir par en sortir, tout juste à côté d'un stand de petites spécialités locales. Voilà quelque chose d'intéressant, je n'avais pas encore pris le loisir de visiter le paysage culinaire de Voltapolis, chose qui allait sans doute commencer très rapidement. Quand bien même ça n'avait l'air d'être que des viennoiseries, c'était toujours ça.
Je fut toutefois sorti de ma rêverie contemplative de ce que ledit stand avait à proposer lorsque je vis la main de Zephyra se rapprocher de mon visage. Lentement, heureusement, je n'avais donc pas à craindre une gifle ou quoi que ce soit dans le style. Mais l'action me laissait un peu perplexe, suffisamment pour que je ne réagisse pas, étant donné que je ne comprenais pas. La situation devint tout de suite plus claire, à partir du moment ou je sentais qu'elle était en train de réinstaller May sur ma tête. Apparemment, la petite bougre était à nouveau en train de glisser, sauf que cette fois-ci je ne l'avais pas sentie. C'était un peu la faute à la foule, à force de faire attention à mes pas et aux autres personnes...
Puis la jeune Zephyra s'excusa en se grattant l'arrière du crâne. Je ne comprenais pas vraiment pour le coup, mais d'accord, j'imagine ? Elle avait eu raison de s'occuper de mon Pokémon, surtout alors que je ne l'avais pas sentie glisser. Alors pourquoi s'excuser ? Avait-elle peur de se montrer trop... rapide ? Proche ? Je ne sais pas... Au lieu de me faire un noeud dans le cerveau en essayant de comprendre, j'optais plutôt pour juste soulever les épaules en souriant, un air de "c'est loin d'être un drame" sur le visage.
- Ne vous en faites pas pour ça, il n'y a pas matière à s'excuser. Vous n'avez fait que l'aider, vous avez bien eue raison De même que pour le début de tourisme, s'excuser maintenant, ça reviendrais à dire que vous prévoyez déjà de passer un mauvais moment. Ou de me faire passer un mauvais moment, en fonction du point de vue, alors que j'ai très bien l'impression que c'est très loin de ce que vous cherchez.
L'incident semblait assez vite mis de côté, tant mieux, et la situation se concentra à nouveau sur le stand. La jeune blonde fut assez rapide à choisir ce qu'elle prenait et je fut d'ailleurs surpris par la gourmandise de son Pokémon. Ce n'était en rien inhabituel chez les Pokémons, bien sûr, mais ça produisait toujours son petit effet. Lorsque vint mon tour de choisir, je me contentait juste de prendre un thé vert, restant simple tandis que je pris un cornet de churros saupoudrés de sucre glace. Que je proposa à tout le monde, bien évidemment. Ce fut d'ailleurs May la première à en profiter, après l'avoir enlevée de ma tête pour l'installer dans une de mes poches, histoire qu'elle puisse grignoter en ayant les pattes avant libres et sans mettre plein de sucre dans ma tignasse. C'est plus facile à nettoyer sur la veste.
- A moi de choisir donc ? Mmh... Avec ce qu'on a, éviter la foule me semble être préférable. Sauf si vous voulez risquer de vous retrouver avec votre boisson renversée sur vos vêtements.
Typiquement, le genre de moment embarrassant à éviter, c'est donc dans cette optique la que je me dirige un peu à l'aveugle, évitant les rues surpeuplées et marchant d'un pas calme. Et puis, sortir un peu du bazar ambiant ne serait pas un mal non plus, c'est bien moins épuisant de marcher dans des rues plus tranquilles. Cela laissait aussi le temps de faire un petit brin de causette en même temps, malgré le fait que nous semblions nous diriger vers la base des rangers. A en croise la signalisation. Peut-être valait-il mieux éviter d'y entrer avec nos achats, après en revanche... Si l'endroit permettait l'une ou l'autre visite, pourquoi ne pas en profiter ? Ca pouvait être intéressant, aussi je nota cette idée dans un coin de mon esprit, en espérant ne pas l'oublier.
- Si je résume bien la situation, vous venez ici pour faire un peu de tourisme. Tant mieux, nous sommes deux, vous savez ce qu'on dit : plus on est de fous et moins il y a de riz... Vous venez de quel coin, si je peux me permettre de demander ?
Alexen n'a pas l'air de m'en vouloir, pas du tout même, ce qui me rassure fortement. Ma respiration intérieure se relâche comme si jusqu'à présent, je m'étais retrouvée en apnée. Et il n'a pas tort non plus sur le second point. Si je commence à m'excuser maintenant pour nous avoir conduit à une destination touristique que j'ai repérée peu de temps avant notre collision, cela ne nous avancera à rien, on passerait son temps à s'excuser mutuellement, et bref... Tout sauf ça. Il est certain que je ne veux pas que mon compagnon d'infortune passe une mauvaise journée de visite assommé par mes salves d'excuses répétées. Hors de question.
Zeph', à partir de maintenant, plus d'excuses et juste du positivisme !
Oui. Mon assurance insoupçonnée n'a pas si mal fonctionné, je crois. On ne s'est cognés dans personne, j'ai trouvé la destination rapidement, sans me perdre, sans incident. En somme, on peut donc dire que c'est une réussite. Je devrais essayer d'être assurée plus souvent, à l'avenir. Je regarde du coin de l'oeil Ayshee qui finit d'avaler sa viennoiserie à toute allure. En fait, si je résume au vu de son talent et de sa nature, je dois prendre exemple sur elle. Cette idée me fait grincer des dents. Si elle venait à savoir ce que je pense à cet instant précis, elle ne manquerait pas de se moquer de moi, tout en panache.
La petite Zorua d'Alexen descend dans sa poche quand celui-ci achète un cornet de churros pour pouvoir en grignoter un bout en toute tranquillité. J'essaie d'imaginer la scène si jamais elle avait mangé le beignet plein de sucre sur la tête de son dresseur... Mon dieu. Il aurait eu les cheveux couverts de sucre glace qui aurait mis plus d'une journée à partir. Mon partenaire de tourisme réfléchit ensuite à une destination suivante, maintenant que nous avons acheté chacun ce qui nous faisait plaisir pour nous remplir un peu la panse. J'attrape un churros en le remerciant et ne dis pas non lorsqu'il propose d'éviter la foule. On a eu de la chance de pouvoir la traverser une nouvelle fois sans se perdre, et ça, ça ne marchera pas à tous les coups, il ne faut pas rêver. Un retour au calme est ce qu'il y a de mieux pour le moment.
La main toujours dans celle du jeune homme, je le suis à travers les ruelles bien moins denses en population que celles que nous avons traversées précédemment. Je ne sais pas du tout où il se rend, alors je place ma confiance totale en sa capacité de guide. Mes parents m'auraient démolie s'ils avaient que je me baladais actuellement avec un inconnu sans la moindre once de méfiance. En même temps, mon paternel m'avait massacrée pour bien moins que ça, et je préfère ne pas trop m'en rappeler. Plus nous progressons, plus l'endroit près duquel on arrive me dit quelque chose. Je ne m'y suis jamais rendu, c'est certain. Mais peut-être que j'ai déjà aperçu quelques photos du lieu en fouinant sur internet ? Ça, c'est probable.
Alexen me demande alors, après que nous soyons sortis de la rue que nous venions de traverser, de quel coin je viens, non sans susciter un rire léger et franc de ma part quand il plaisante vis à vis du tourisme, bien mieux à deux qu'en solitaire. Un panneau sous mes yeux m'indique alors que ce bâtiment non loin qui ne m'est pas inconnu n'est autre que la base des rangers. Cela explique pourquoi je le connaissais, puisque j'en avais déjà vu des photographies à Fort-des-Songes. Je me rends compte, à cet instant, que je suis bien, comme ça, à faire du tourisme accompagnée. La présence du jeune homme me rassure, et je ne suis pas sur le qui-vive en permanence comme je peux l'être d'ordinaire. Formulant d'abord mes phrases dans mon esprit, je lui réponds ensuite, alors que nous faisons une courte pause dans notre progression touristique :
– A vrai dire, je ne suis pas d'ici, je suis originaire de la région de Galar. Mais depuis peu, je vis à Fort-des-Songes. Et vous ?
Je suis curieuse d'en savoir un peu plus à propos de mon camarade touristique d'infortune. Est-il natif de Lumiris, mais ne connait que le coin d'où il vient ? Ou bien, comme moi, vient-il d'une autre région est se trouve ici depuis peu ? J'observe la petite frimousse de May, de laquelle Ayshee s'est subitement approchée pour l'étudier avec un intérêt nouveau. Deux Pokémon de type Ténèbres. Même si Ayshee peut être difficile en matière d'affection envers d'autres Pokémon parfois, je pense que là, ça ne posera absolument aucun problème. Après tout, il n'y a pas que moi qui doit me sociabiliser en rencontrant de nouvelles personnes. Ayshee y a droit, elle aussi. Et May semble être une camarde idéale.
J'étais content de voir que le petit trait d'humour était passé, Zephyra ayant émit un petit rire à ma petite vanne. Je n'eut toutefois pas le temps de m'éterniser dessus, même si c'était déjà noté dans un coin de ma tête. Ainsi donc, elle ne venait pas de Lumiris, mais de Galar... Voilà qui m'intéressait un peu, je n'avais pas eu le loisir de voyager dans d'autres régions du globe. Je n'avais même pas visité ma propre région natale, alors avant même de penser à aller voir ailleurs... J'avais déjà bien assez à faire ici.
- Oh, une toute nouvelle arrivante sur nos terres, bienvenue avec sans doute beaucoup de retard dans ce cas ! Pour répondre, je suis originaire d'ici. De Kishika, plus précisément. C'est un village quasiment tout au Sud de la région, si jamais vous souhaitez y aller un jour, ne vous privez pas. C'est un endroit tout à fait charmant, même s'il n'y a pas grand chose à visiter...
Je taisais un peu le fait que je n'étais pas sorti de là-bas jusqu'à tout récemment. Ce n'était pas quelque chose dont j'avais honte, bien sûr, mais je n'allais pas le dire sur tout les toits non plus. Ce n'était véritablement qu'un détail pour moi. Pendant ce temps, nous continuions à marcher lentement des les rues, suivant sans vraiment le chercher les indications qui nous menaient vers le QG des Rangers. Nous n'y étions pas encore, bien sûr, mais ça ne saurait tarder malgré notre pas relativement posé. Le fait qu'il n'y ait pas de foule rendait nos déplacements bien plus simple et plus agréable, offrant même par moment un petit sentiment d'intimité, surtout lorsque nous n'étions que tout les deux présents et qu'aucune autre personne ne soit présente dans les environs proches. C'était quelque chose de fort plaisant au demeurant, aussi pour en profiter un peu, je profitais qu'un petit muret présent pour y déposer ma boisson. Enfin, petit muret qui faisait tout de même un petit mètre, ça n'empêchait pas de s'asseoir dessus ou même d'y grimper, si l'envie en était présente. Il fallait juste faire attention, après tout un muret, ce n'est pas bien épais et celui-là ne faisait absolument pas exception à la règle.
Après avoir une main à nouveau libre, je fis sortir ma Zorua de ma veste, qu'elle puisse un peu se dégourdir les jambes elle aussi. Je la vit s'intéresser à mon thé, ou du moins ce qu'il en restait, mais elle lâcha rapidement le sujet. Elle n'avais jamais très apprécier le thé, c'était d'ailleurs une des raisons pour laquelle j'en prenais aussi souvent. Non, cette fois-ci, elle avait autre chose qui l'intéressait, en la personne d'Ayshee, l'Absol de la jeune femme. C'est vrai qu'en y réfléchissant... elle n'en avait encore jamais vu, du moins depuis que je l'ai récupérée. Mais à en voir sa curiosité, Ayshee devait être sa première.
May restait la un petit moment, à fixer l'autre Pokémon, avant de finir par descendre. Essayant bien sûr de lui sauter sur le dos, sauf qu'elle n'y parvint pas et se retrouva les quatre pattes au sol. Pas que ça semblait la déranger, en réalité. Venait ensuite une inspection en bonne et due forme, mais surtout une inspection sous toutes les coutures possibles. Littéralement ou presque. Elle faisait le tour du Absol, puis le tour des pattes, passait sous le ventre, levait la tête, essayait même de lui sauter dessus... Elle était pire qu'un Rattata à la recherche de nourriture. Une fois l'inspection terminée, elle se planta devant son homologue ténèbres, toute fière et toute contente d'elle. Oui, il lui en fallait peu par moment. Pour ma part, je m'étais juste adossé au muret, malgré la taille qu'il avait je pouvais tout juste poser le bas de mon dos contre.
- ... J'imagine que ça confirme que nos deux Pokémons ne vont pas se bouffer la trogne, c'est pas si mal j'imagine ? Si on restait la quelques instants, juste le temps de finir nos boissons ? On pourra reprendre la visite les mains un peu plus libres. Et puis, si on veux visiter un quelconque bâtiment ou autre, on pourra y entrer de cette façon.
Détaillant Alexen avec mes grandes prunelles azur et un doux sourire sur le visage, je me rends compte une fois de plus que comme camarde de tourisme, j'aurai pu tomber -et à juste raison- sur bien pire. En fait, je crois que jusqu'à présent, je n'avais jamais envisagé de faire du tourisme avec quelqu'un, de faire quoi que ce soit comme activité avec des personnes rencontrées depuis mon arrivée à Lumiris. Il faut dire aussi que mes connaissances actuelles se comptent sur les doigts d'une main ou presque, et que si la sociabilité est naturelle chez moi, ce n'est pas le cas pour tout le monde. Ce n'est pas parce que je suis ouverte aux autres que les autres sont ouverts à moi, même si je suis plutôt bonne oreille et excellente confidente. Et ce n'est pas parce que j'ai l'impression de bien m'entendre avec quelqu'un que c'est forcément le cas. Ça, je l'ai appris à mes dépends. C'est pourquoi, même quand j'ai l'impression que le courant passe très bien avec quelqu'un, ici, en l'occurrence, Alexen, j'ai toujours peur de me tromper, ou de faire une gaffe, ou simplement de me faire trop d'idées trop vite. Non pas que je sois pessimiste, ce n'est pas du tout le cas. Mais je voudrais construire des amitiés sincères, sans déranger, sans être un poids ou avoir le sentiment de l'être, quand bien même je ferai tout pour que ça ne soit plus le cas. Enfin bref. Ce n'est pas le moment d'avoir des pensées sur des amitiés qui n'existent pas encore, là.
Mon compagnon de tourisme me souhaite alors la bienvenue à Lumiris, ce qui ne manque pas de me faire rire quand il souligne le retard sans doute -et véritablement- important avec lequel il m'accueille. Alors comme ça, lui est originaire de Kishika ? Si le village me dit quelque chose de nom, sur le reste en revanche, elle m'est totalement inconnue. C'est une destination supplémentaire qu'il faut que j'ajoute à ma liste de lieux et villes à visiter absolument à Lumiris. Je note le nom du village dans un recoin de ma mémoire, là où toutes mes idées de voyage s'entremêlent, pour ne pas l'oublier. Même si selon les dires de mon partenaire, il n'y a pas grand chose à visiter là bas, je suis certaine que ça reste un endroit magnifique. Pas besoin d'attractions touristiques quand un paysage à couper le souffle peut suffire.
Je me rends soudain compte que, au fur et à mesure que nous progressons dans la ville, toujours de façon hasardeuse, il y a de moins en moins de monde, jusqu'à ce qu'il n'y en ai plus du tout. Mes nerfs se relâchent. Je dois bien avouer que même si j'apprécie les endroits animés, je suis bien contente qu'il n'y ait plus personne actuellement et qu'on soit enfin tranquille pour souffler un peu sans se demander si, en dépliant légèrement notre coude, on ne va pas percuter malencontreusement quelqu'un au passage. Nous finissons finalement par dénicher un petit muret, assez large et assez long pour s'y asseoir à deux, également très pratique pour déposer boissons et viennoiseries qui n'ont pas encore été totalement consommées. Alexen s'y installe, et une petite frimousse pleine de poils surgit de sa poche pour en sortir et aller renifler le thé de son propriétaire, puis reportant ensuite son attention sur Ayshee.
Mon Absol est, elle aussi, bien curieuse vis à vis de May. Je crois même discerner un éclat de joie mêlé à une grande douceur affective dans ses pupilles, bien qu'elle n'en montre pratiquement rien. Et chez Ayshee, ce genre de marque affective, c'est plutôt très rare. La Zorua se met à inspecter son homologue de type Ténèbres sous toutes les coutures. Vraiment toutes. Essayant parfois de lui grimper sur le dos, comme elle peut le faire avec son dresseur. En vain. Ayshee ne bouge pas d'un pouce et se laisse docilement faire, jusqu'à ce que la petite May ait terminé et, toute fière de n'avoir décelé aucun danger, se plante face à elle. Alexen confirme à voix haute ce que je pense intérieurement : elles s'entendent bien, aucun chance qu'elles ne se sautent à la gorge.
– C'est une excellente idée ! Je réponds ensuite à sa proposition de rester sur le muret le temps de finir nos consommations. Ça me permettra de terminer ma viennoiserie sans encombres.
Enfin, sans encombres, c'est vite dit. Je m'approche du muret pour m'y installer tandis que Ayshee saisit la Zorua par la peau du cou et la dépose tout en douceur sur son dos, à un endroit où sa fourrure blanche est assez épaisse pour que si May y plante ses griffes, ça ne lui fasse aucune blessure lui donnant envie de la jeter par dessus bord. C'est vraiment inattendu de la part d'Ayshee, mais il faut croire qu'elle a, en quelques sortes, pris la Zorua chromatique sous son aile. Tellement attentive à cette scène, je ne remarque pas que lorsque je m'assois sur le muret, j'ai en réalité posé mes fesses bien trop loin, surestimant la largeur du petit mur. Je bascule alors vers l'arrière, essayant tant bien que mal de me rattraper, et retenant un cri étouffé. Il ne manquerait plus que je me blesse en tombant dans un buisson quelconque... Si buisson il y a derrière moi. Corps tendu et muscles contractés, je lutte contre l'attraction terrestre qui veut me faire tomber de l'autre côté, dans je ne sais pas trop quoi. Un jardin ? Un sol en béton ? Je ne sais pas. En tout cas, je ne vais pas tenir longtemps dans cette posture.
Tout avait l'air de bien se passer, finalement. Le gros risque étant d'être tomber sur une personne assez détestable, ou même tout simplement désagréable pour pas grand chose, mais j'étais assez content de constater que Zephyra n'était pas comme ça. Tant mieux ! C'était toujours agréable, de rencontrer des gens gentils et sympathiques comme elle, ça égayait toujours un peu la journée. Non pas que je sois du genre à toujours avoir de mauvaises journées ou à me plaindre, au contraire, mais ça restait toujours bien de le souligner.
En parlant de choses sympathiques aussi, la seconde bonne surprise était le fait que nos deux Pokémons semblaient bien s'entendre eux aussi. L'Absol n'avait pas l'air d'être ennuyée par le comportement plus que curieux de May, que certains pourraient même voir comme déplacé au vu de ses tentatives pour lui monter dessus. Non, au contraire, elle l'attrapa par la nuque afin de l'installer sur son dos. C'était un peu... surprenant ? Non pas que ça me dérangeait, même attrapée comme ça, ma Zorua était capable de se défendre et de faire en sorte de se faire lâcher. Ce qu'elle ne fit pas dans le cas présent, au contraire elle se laissait se faire installer avant de s'assurer de ne pas chuter une nouvelle fois. Un peu plus et elle aura visiter le dos de tout le monde... quoique, mieux valait ne pas parler trop vite non plus, elle serait capable d'arriver à le faire.
Je fut toutefois sorti de mon observation Pokémonesque en entendant quelque chose à droite, ou plutôt quelqu'un dans le cas présent. Le temps de tourner le regard dans la direction de Zephyra et je pouvais la voir assise sur le muret, en train de basculer en arrière. N'écoutant que mon courage et... bah rien du tout en fait, je n'allais pas la laisser tomber sans rien faire, surtout sans savoir ce qu'il y avait en bas de ce muret. Et ce n'était même pas le souci actuellement, à vrai dire. Si elle tombait en arrière, avec le mètre de hauteur du muret, peut-être plus du côté ou elle tombait, la jeune blonde risquait de se faire assez mal.
Sans vraiment réfléchir, je m'enlève du muret et j'attrape l'avant-bras de la jeune femme, essayant de la retenir pour pas qu'elle ne tombe. Lui attraper l'avant-bras n'était pas le problème, en y pensant. Le problème venait du fait qu'elle avait déjà commencer à basculer en arrière et moi qui pensait pouvoir la retenir... J'oubliais qu'un corps humain, ça pesait son petit poids, mine de rien. Elle continuait de basculer en arrière et je n'eut pas le temps de me préparer à tenir. Résultat ? Comme on pouvait s'y attendre, je ne parvint pas à arrêter sa chute. Mieux encore, je partit avec elle, du fait de mon manque d'appuis, si l'on peux dire. Au final, nous sommes tout les deux passés par-dessus le muret, pour à peine chuter.
De l'autre côté du muret, ce fut la bonne surprise d'avoir un petit buisson pour nous intercepter. Mieux encore, le sol était un peu plus élevé, ce qui avait fait que nous n'avions au final pas eu une grande chute. Même si ça ne changeait globalement rien, en soit, ça avait eu le mérite de réduire les dégâts, ce qui n'était pas un mal. La scène en elle-même, était un peu digne d'un film comique par contre. Zephyra avait finie sur le dos, dans la logique de la chute, et moi à moitié par-dessus elle, à moitié en vertical le long du muret, ma veste me retombant par-dessus et me recouvrant. Il me fallut un petit moment avant de comprendre ce qu'il venait de se passer. Et de me demander pourquoi j'étais sur quelque chose qui n'était pas dur... Je n'avais pas la tête sur un os ou quoi que ce soit d'autre, c'était plus confortable... J'eus un petit moment de flottement alors que je m'imaginais déjà avoir la tête à un endroit inconvenant, avant de réaliser que non. Heureusement... C'était le ventre de Zephyra qui était en train de me servir d'oreiller de fortune.
- Ça va, tu n'as rien de cassé... ?
Ma voix était un peu étouffée et le tutoiement m'avait échappé, certainement parce que je n'avais pas pris le soin de relever la tête pour parler, ni de réfléchir avant de parler. Je n'avais pas vraiment envie de lever les yeux, pour le coup. Même si c'était une vue qui ne me dérangerait pas vraiment, le contexte ne s'y prêtait pas du tout. Et je n'avais pas envie de m'attirer bêtement les foudres de la jeune femme, quand bien même ce n'était pas du tout voulu de finir ainsi. Pendant ce temps, à notre place de l'autre côté du muret, ma Zorua bleue et noire avait regarder la scène un long moment, avant de commencer à se marrer sur le dos d'Ayshee, de ce que j'avais l'impression d'entendre. Génial... Elle allait très probablement pas se priver de me rappeler l'événement, juste pour gentiment se ficher un peu de moi. Bah, c'était de bonne guerre.
Alors que je bascule de façon inévitable vers l'arrière du muret, je peux distinguer vaguement Alexen se relever de celui-ci. Avec ma posture actuelle, en pleine chute que je ne peux plus stopper, je ne peux pas vraiment voir ce qu'il fait, si ce n'est qu'il a bougé de sa position assise initiale. Je le sens surtout saisir mon avant-bras en tentant en vain de me retenir pour que je ne tombe pas. En vain, oui. Si j'ai beau avoir une silhouette à l'apparence fine, les muscles qui composent mon corps sont lourds. Très lourds. Le poids qui s'affiche quand je me pèse sur la balance ne correspond guère à l'image que je renvoie aux autres. Mais j'en ai conscience, je pèse mon poids, et cela ne me dérange pas d'avoir cette masse là. Je ne me suis jamais focalisée dessus, avoir un poids plume n'a jamais fait partie de mes préoccupations. Tant que je garde la forme et que je ne perds pas en musculature, tout me va. Hors de question de me priver de quoi que ce soit pour quelques grammes en trop. Et puis, après tout, cette histoire d'avoir un poids dans la moyenne est très subjective. Tant qu'on se sent bien dans son corps, c'est le principal. La seule évidence actuelle, c'est que là, ma masse corporelle est en train de me faire tomber. Et manque de chance pour Alexen qui n'a pas pu préparer de bons appuis à temps, je l'entraîne avec moi dans ma chute.
Je me crispe entièrement en fermant les paupières, m'attendant à tomber de haut... Mais rien. Tout ce que je ressens, c'est de minuscules griffures provoquées par les branchages d'un pauvre petit buisson qui a eu le malheur de se trouver de l'autre côté du muret, à l'endroit exact où je suis tombé. Enfin, le malheur pour lui est plutôt un soulagement pour moi. Par chance, il a bien amorti la chute, et m'a évité de tomber sur le sol juste en dessous, qui certes est plus surélevé que le trottoir de l'autre côté. Mais c'est toujours plus agréable de ne pas tomber sur une surface dure qui en général nous coltine une bonne paire de bleus aux fesses. D'autant plus que les micro-entailles que j'imagine se trouver sur ma nuque et à quelques endroits de mes bras, là où ma peau me picote légèrement, disparaîtront en moins de vingt-quatre heures sans problème, ce qui n'est pas le cas d'un bleu.
La surprise de la chute passée, je rouvre les yeux après avoir identifié une masse inconnue sur mon ventre... Qui se trouve être la tête d'Alexen, qui s'est étalé à la fois sur moi et le long du muret. Mes joues rosissent instantanément lorsque je me rends pleinement compte de la posture dans laquelle on se trouve, et je prie intérieurement pour que le jeune homme ne bouge pas d'un pouce et ne lève pas les yeux. Ce qu'il ne fait pas, et heureusement, alors qu'il me demande si je ne me suis pas blessée au cours de notre chute collective. Cramoisie, je ne réponds pas tout de suite, essayant de mettre de l'ordre dans la multitude de pensées qui affluent dans mon esprit. Je remarque à peine qu'il m'a tutoyée et non plus vouvoyée comme il le faisait jusqu'à présent. J'essaie en parallèle d'analyser comment nous pourrions nous relever sans aggraver notre maladroite posture actuelle. Puisque j'ai un bras de libre, j'en profite pour redresser délicatement la tête et le haut du corps d'Alexen pour qu'il se retrouve assis en perpendiculaire de mon propre corps. Puis je tente de m'extirper du buisson, pour finir par en sortir d'un seul coup, tombant à quatre pattes devant lui.
Faites qu'il n'ait pas vu mon visage et que je reprenne une couleur normale, faites qu'il n'ait pas vu mon visage et que je reprenne une couleur normale...
Prenant une grande inspiration, je me relève d'un bloc et lui tends la main pour l'aider à se relever à son tour. Mais mon regard, lui, trahit la rougeur qui a affecté mes joues et est encore un peu présente.
– Tout va bien, je n'ai rien, je crois. Et... Je prends quelques secondes supplémentaires pour réussir à choisir la fin de ma phrase. Toi ?
J'ai finalement opté pour le tutoiement. De l'autre côté du petit muret, nos deux Pokémon respectifs se sont rapprochés, se demandant bien quel scène étrange on avait encore réalisée pour se retrouver là, par terre. Si Ayshee se contente de me fixer avec calme et dédain, même si dans ses prunelles transparait une légère pointe d'inquiétude, la Zorua d'Alexen, elle, se marre ouvertement. Ou du moins, c'est comme ça que j'interprète la bouille qu'elle est en train de faire avec les bruits moqueurs qui s'échappent de sa gueule. On dirait qu'elle ne va pas oublier de sitôt ce qui vient de se produire... Mes joues ayant enfin repris une couleur normale, c'est l'inquiétude également qui vient désormais poindre le bout de son nez chez moi. Même si j'ai amorti la chute de mon partenaire de tourisme, il a pu tout de même se blesser. J'espère vraiment qu'il n'a rien, ça serait un comble, alors que c'est moi qui suis tombée et qu'il a juste voulu m'aider.
Il ne fallut guère peu de temps avant que les choses ne commencent à bouger un peu. Non pas que ça empirait, au contraire, il s'agissait surtout de Zephyra qui avait une position lui permettant de s'extirper de la où elle était. Ce qu'elle fit d'ailleurs, après avoir pris quelques instants, sans doute pour se remettre de la chute. Quoi de plus normal, faut bien le temps que la surprise passe. De mon côté, je ne pouvais de toute façon rien faire, j'était un peu coincé. A moins bien sûr, de commencer à me mettre sur elle de tout mon long, je ne sais comment, mais ce n'était clairement pas envisageable. C'était limite un coup à en recevoir une en travers de la trogne et elle aurait été méritée, pour le coup.
Malgré tout, il fallait bien quelques secondes à la jeune blonde pour se sortir de la, m'aidant un peu au passage à me redresser ce qui était toujours un petit coup de pouce. Pendant qu'elle était en train de se reprendre une fois de nouveau à même le sol, je put ainsi m'extraire de ce petit buisson en grognant légèrement. C'est que c'est pas très confortable un buisson, mine de rien. Un muret non plus d'ailleurs, surtout à la verticale. Heureusement, je vis la main de la jeune femme et je ne l'a fit pas attendre, acceptant volontiers son aide pour finir de me remettre sur mes deux pieds.
- Oui, ça va. Il va juste falloir que je regarde mes genoux, ils ont un peu frotter sur le mur, mais ça devrait le faire. Merci. Et désolé de t'être tombé littéralement dessus...
Je la regardais et la remerciait à nouveau avec un petit hochement de tête et un sourire. Je la regarde pendant encore un petit moment, comme pour m'assurer qu'elle allait effectivement bien, mais je put en voir en regardant dans ses yeux qu'elle semblait encore un peu... gênée ? J'eut un peu de mal à en avoir le cœur net, mais j'avais la forte impression que c'était ça. Je n'avais pas besoin de réfléchir bien loin pour comprendre pourquoi... Et sans doute parce que je suis un peu idiot, je levais les bras devant elle comme si je cherchais à m'innocenter, avant de parler sur le ton d'une personne qui se veux rassurante mais qui ne sais pas trop comment s'y prendre sur le moment.
- Faut pas être gênée pour ça... Si ça peux te rassurer, même si je ne vois pas trop comment, je... Je n'ai rien vu, ni rien touché... enfin, à part ton ventre bien sûr...
Je ne termina pas ma phrase en revanche, obéissant à mon propre ordre mentale de ne pas continuer cette phrase et de me taire, plutôt que de dire une connerie plus grosse que moi. Plutôt que de creuser ma propre tombe de cette façon, je m'éclaircis la gorge avant d'épousseter ma veste, faisant ainsi tomber les quelques petites feuilles qui étaient prises dedans. Puis j'avance lentement la main vers le visage de Zephyra, lui enlevant une petite branche qui était encore prise dans sa tignasse, avant de lui sourire à nouveau, la main posée sur le haut de son bras.
- Voilà, c'est pas sa place ici, une fleur irait mieux. Et si nous remontions pour finir ce que nous avons commencer et donc laisser la haut ? En espérant qu'on a pas tout mis par terre en tombant, ça serait un peu triste de voir le reste de viennoiseries et les boissons par terre...
Et pendant tout l'échange, nos deux Pokémons étaient restés au même endroit, à nous regarder. Même si, le temps de voir que nous allions bien tout les deux, May s'était calmée et avait même pris la peine de remonter sur le muret, pour mieux nous regarder avec un air un peu curieux sur le visage. Ou nous surveiller, ce terme marchait à peu près tout aussi bien, surtout au vu des derniers événements. Que ce soit l'un ou l'autre, elle restait assise dessus à attendre, tandis que nous n'avions qu'à marcher quelques mètres pour remonter sur la route ou nous étions et pouvoir ainsi retrouver nos Pokémons respectifs.
Alexen attrape ma main et j'emprisonne la sienne assez fort dans ma poigne pour le relever sans nous faire tomber à nouveau. Une chute, ça va, deux, c'est déjà trop. Je soupire de soulagement quand il me dit qu'il n'a rien de cassé, si ce n'est peut-être quelques éraflures sur les genoux. C'est quand même lui qui a permis à ma chute d'être un peu moins violente que ce qu'elle n'aurait été si j'étais tombée toute seule, alors si en plus il s'était salement blessé, ça aurait été vraiment injuste. Il s'excuse ensuite de m'être tombé dessus, ce à quoi je réponds par un sourire en entortillant une mèche de cheveux autour de mon index. Honnêtement, je trouve qu'il peut y avoir bien pire en matière de gênance dans une chute. Là, ça va encore. Mes joues ont même repris leur couleur normale, je crois.
Mais il faut croire que pas tout à fait, puisque mon partenaire de tourisme lève les mains en signe de reddition, comme si j'étais une agente de police en train d'arrêter un criminel. Cette pensée se met à tourner dans un recoin de mon esprit. Moi, flic ? L'idée n'est pas si déplaisante, même si une flic maladroite, c'est encore du jamais vu. Aucun policier digne de ce nom n'est maladroit. Idem pour les détectives. La maladresse c'est un coup à ruiner sa carrière dans ce domaine, sur une erreur stupide. Je vais déjà travailler correctement en tant que serveuse et voir ce que je fais de mes études qui ne m'intéressent pas énormément pour le moment avant d'envisager de faire quoi que ce soit d'autre. Le jeune homme semble avoir remarqué ma gêne et essaie de me rassurer. Essaie. Mon teint flamboie instantanément lorsqu'il murmure qu'il n'a rien touché de... compromettant, à part mon ventre.
Tu imagines s'il avait.. ? Non, non, n'imagine pas en fait. Surtout pas.
Si j'avais pu, j'aurais caché mon visage dans mes mains. Mais j'essaie tant bien que mal de garder un doux sourire sur le visage, même si ma gêne nouvellement revenue s'exprime à travers mes lèvres tremblantes et, bien évidemment, mes joues cramoisies. Et mon ascenseur émotionnel interne n'a pas fini d'être tourmenté. Après avoir délogé les feuilles accrochées sur sa veste, Alexen se rapproche subitement de moi, tendant son bras vers mon visage. Mes poings se crispent et je ferme les yeux... Avant de les rouvrir quelques secondes plus tard en constatant à la branche qu'il tient du bout des doigts que celle-ci était accrochée dans mes cheveux. Il me sourit, et je sens la de son autre main se diffuser dans mon épaule. Prenant l'avantage sur mes émotions indisciplinées, je me détends et mes lèvres s'étirent en un sourire à leur tour. Si ma gêne d'origine continue de colorer mes joues, je réussis tant bien que mal à la mettre en sourdine.
Le calme émanant du jeune homme et le ton qu'il a pris soin d'employer pour me rassurer font leur effet, et mon sourire s'agrandit. Il espère que les viennoiseries sont intactes, et que les boissons ne se sont pas renversées. Je remonte alors le muret de quelques mètres pour passer de l'autre côté, Alexen sur mes talons. Pour mon plus grand bonheur, ma boisson n'a rien. Mais ma viennoiserie, elle... Où est-ce qu'elle est passée ? Je jette un coup d'oeil sur le muret, sur lequel May sautille, et tourne la tête vers Ayshee. Celle-ci se lèche les babines en me regardant avec un air narquois.
Elle n'aurait quand même pas... ?
Si. Elle a osé. Elle a profité de ma chute pour grignoter le reste de ma viennoiserie quand May est descendue de son dos. Une énième vengeance sortie de nulle part ou une pique envers ma personne, je ne sais pas. Mais elle ne perd rien pour attendre. J'attrape ma boisson comme si quelqu'un pouvait me la piquer elle aussi et la vide d'une traite, avant de jeter le verre à la poubelle. Et voilà, problème résolu, au moins de ce côté là.
– Je crois qu'il y a un parc, à côté de la base des Rangers. Si nous y allions ? Il devrait y avoir des bancs, là bas, ça sera plus agréable qu'un muret.
Je ponctue ma phrase d'un rire doux. Ça y est, toute ma gêne a enfin disparu. Sans attendre de réelle approbation de la part de mon compagnon de tourisme, je lui prends de nouveau la main pour l'entraîner à ma suite, Ayshee me suivant de près toujours avec cette expression qui donne le sentiment qu'elle se moque ouvertement de moi. La petite Zorua chromatique, elle, a repris place sur son dos, pattes bien agrippées dans la fourrure blanche de mon Absol. Elles font un sacré duo, toutes les deux.
Une fois que nous avons slalomé entre quelques rues, moi prenant bien soin de suivre les pancartes, nous débouchons dans le parc qui longe la base des Rangers. Vu de près, l'immeuble flambant neuf parait encore plus immense qu'il ne l'était de loin. Je lâche la main d'Alexen et lève la tête en direction du ciel pour le contempler. Je n'ai encore jamais croisé de ranger, que ce soit quand je vivais à Kickenham ou même depuis que je suis arrivée à Lumiris. En même temps, beaucoup de villes et villages de la région me sont encore inconnus, à commencer par le village natal d'Alexen. Il faudra que j'aille le visiter, lui parmi tant d'autres.
Une brise légère me caresse le visage, et je me rends compte que je suis bien heureuse d'être sortie des rues pour atterrir dans un espace bien plus large et plus ouvert. Ça me rappelle mes excursions interdites aux Terres Sauvages, que je faisais à l'époque où Kieran venait juste de partir, en pensant que je l'y retrouverai, qu'il n'était jamais bien loin. Grave erreur de ma part, puisqu'il n'est jamais réapparu en neuf ans. En entendant le bruit d'une roulade, je me tourne vers la gauche et constate avec amusement qu'Ayshee et May sont toutes les deux en train de se rouler dans l'herbe verte, profitant de l'endroit et de la douce chaleur qui y baigne, plus agréable que quand on était coincés au milieu d'une foule dense qui empêchait d'avoir le moindre point de repère. Je jette un coup d'oeil rapide à mon poignet ou ma montre brille par son absence. Combien de temps s'est écoulé, déjà ? Bonne question. Tournant la tête de l'autre côté, je vois qu'Alexen a pris place sur un banc, juste en face de l'endroit où nos Pokémon s'amusent. Inconsciemment, mon regard s'attarde sur lui. Je suis vraiment contente de l'avoir comme partenaire de tourisme, même si mes maladresses auraient pu nous blesser. Heureusement que ce n'est pas arrivé. Il avait raison dès le départ, en tout cas. Cette visite de la ville à quatre, nous plus nos Pokémon, est bien plus agréable et amusante que si nous l'avions fait chacun de notre côté.
Tout semblait rentrer dans l'ordre, visiblement. Zephyra semblait être un peu plus détendue et malgré la légère teinte rosée qui persistait sur ses joues, elle ne se laissait pas démonter par ça et c'est ensemble que nous sommes remontés pour retrouver nos Pokémons ainsi que nos affaires là où nous les avions laissées. Enfin, presque toutes, à en croire la tête que tirait la Absol ? Je n'en savais rien, mais j'étais quasiment prêt à parier que la jeune blonde savait ce qu'il s'était passer. Ne connaissant pas le Pokémon, je n'allais pas me risquer à me mêler de tout ça sauf s'il fallait de l'aide, mais ça n'avait pas l'air d'être le cas présentement.
Plutôt que de se réinstaller contre le muret et de risquer une nouvelle chute, qui pourrait cette fois-ci être un peu plus gênante principalement du fait que ça ferait beaucoup en très peu de temps, nous avons tout deux pris le temps de finir nos achats... à une vitesse plus ou moins élevée. Zephyra venait littéralement de descendre tout ce qui lui restait d'une traite, j'en connais qui en seraient jaloux et je ne pensais pas à moi. D'ailleurs, en parlant d'elle, elle indiqua qu'à proximité de la base des Rangers se trouvait un petit parc, ce qui serait plus agréable qu'ici. J'étais plus que disposé à la croire, au moins elle ne risquait pas de tomber d'un banc. C'est donc en souriant que je lui emboitais le pas, évitant de justesse de me faire emmener comme un poids mort.
C'est donc après un petit slalom dans quelques rues que nous sommes tout les quatre arrivées dans un petit parc qui était collé à ladite base. Le grand immeuble ne faisait pas d'ombre dans notre direction, non pas que le temps soit désagréable en soit, il était toujours agréable de pouvoir profiter d'un petit bout de soleil. Profitant du fait d'avoir à nouveau les mains libres, la jeune femme m'ayant lâché pour regarder le QG, je m'avançai un peu dans l'herbe avant de m'étirer les bras en prenant bien tout l'espace possible. Ca faisait un bien fou d'avoir vraiment de la place pour faire un peu ce que l'on voulait...
May, qui était restée sur le dos de Ayshee, profita aussi de l'endroit, à sa façon. Elle sauta de sa monture improvisée avant de se mettre à renifler un peu partout. Le banc, les arbres, les buissons... Même les petites touffes d'herbe. Ca lui prenait bien un petit moment, que je mis à profit pour m'installer sur le banc en soufflant un peu. Quand bien même un peu d'effort physique ne me faisait en rien peur, ça faisait du bien de pouvoir s'installer normalement. Je déposa mon petit sac à dos à côté de moi, avant d'en sortir une petite gamelle métallique, que je posa sur le sol avant de remplir d'eau. C'était bien beau de pouvoir se reposer, mais nos Pokémons aussi avaient besoin de se désaltérer un peu. Et je les voyaient mal engloutir un café ou un chocolat chaud...
Suite à ça, je regarda à nouveau la jeune blonde m'accompagnant sans rien dire, ne voulant pas la sortir de sa rêverie. Il n'allait rien lui arriver en soit, donc autant la laisser prendre son temps. Ce ne fut cependant pas l'avis des deux Pokémons Ténèbres, qui étaient déjà partis en mode roulade. Elles étaient toutes les deux vautrer dans l'herbe, non loin du banc, ce qui me fit sourire quand bien même ce serait un peu chiant à nettoyer. La terre, et la poussière en général, avait tendance à s'infiltrer partout entre les poils. Mais bon, le mal était fait, autant ne pas leur en tenir rigueur. Me reconcentrant sur Zephyra, cette dernière était en train de me regarder et je fut bien rapide à lui sourire, mon propre regard se perdant un instant dans ses yeux bleus.
- Viens, tu as aussi le droit de t'asseoir, je ne mords pas. Enfin, je crois... Et puis, c'est pas en restant debout que tu vas pouvoir faire un peu souffler tes jambes.
Je ponctua le tout d'un petit mouvement de main, me retenant au dernier moment de tapoter doucement ma jambe. J'avais pris l'habitude de le faire pour dire à ma Zorua qu'elle pouvait venir s'installer sur mes genoux, mais la... C'était quelque chose qui pouvait être interprété de tant de façons différentes qu'il valait mieux que je ne me plante pas.
Ayant entendu que j'avais, en un sens, fait le signal d'appel pour venir sur mes genoux, May vint se poster en bas du banc et me fixa quelques instants avant de se détourner sans même me laisser le temps de lui dire quoi que ce soit. Apparemment, elle avait compris d'elle-même que je ne m'adressais pas à elle cette fois-ci. Bon, elle avait aussi remarquer la gamelle d'eau et était directement aller en boire quelques lampées. Comme quoi, c'était une bonne chose de l'avoir sortie, elle n'avait pas été inutile.
- On dirait que le courant passe bien entre nos deux Pokémons, ça fait plaisir à voir. Tiens, juste par curiosité, d'où te viens Ayshee ? Si je peux me permettre de te demander bien sûr, tu n'es pas obligée de répondre si tu n'en as pas envie.
Toujours avec un petit sourire, je posais mes questions sur un ton qui laissait clairement apparaître ma curiosité. Mais qui dit curiosité dit aussi qu'il y a un risque que ce soit quelque chose dont le souvenir ne soit pas forcément joyeux... Tant pis, je prenais le risque. Si je devais marcher sur des œufs par après ou juste ne rien savoir, tant pis. Tant que ça ne change rien dans cette journée entre nous deux...
Perdue dans ma contemplation de l'homme qui m'accompagne, je mets quelques instants à réagir lorsqu'il m'invite à prendre place à ses côtés, sur le banc. Quand l'information remonte enfin jusqu'à mon cerveau, je me précipite pour m'asseoir à côté de lui dans un mouvement mal maîtrisé qui aurait pu me faire chuter, une fois de plus, s'il n'y avait pas eu le dossier du banc pour me permettre de m'appuyer dessus et de m'asseoir, feignant que la maladresse de ma précipitation est plus ou moins sous contrôle, ce qui n'est pas vraiment le cas. Heureusement, Alexen ne semble pas le remarquer, ce qui m'arrange bien, au fond. J'ai déjà été bien assez maladroite pour aujourd'hui, en témoignent la façon dont je l'ai rencontré en le percutant ainsi que ma chute de tout à l'heure. Ce n'est pas le moment de faire une autre bourde hasardeuse, la liste de mes maladresses étant déjà bien trop longue.
Ce n'est qu'après avoir épousseté le bas de ma robe en m'asseyant que je me rends compte que les muscles de mes jambes sont effectivement légèrement endoloris. Pourtant, j'ai l'habitude de faire de bouger, de marcher longtemps et de courir, puisque mes entraînements quotidiens avec ma partenaire sont assez sportifs. Mais il faut croire que tout le chemin que nous avons parcouru plus ma chute ont eu raison d'une partie de mon endurance, la grignotant à une certaine mesure. Ou alors c'est parce que j'ai mal effectué mes derniers étirements de la veille, ce qui ne me ressemble pas. Ou parce que je n'ai pas assez dormi et que j'ai trop bougé ces derniers temps ? Bonne question. Mon visage s'est imprégné de mes interrogations et ma mine est désormais pensive. Je remarque tout de même que May est venue pour s'installer sur les genoux de son dresseur, avant de redescendre vers la gamelle d'eau posée au sol par les soins du jeune homme aux cheveux blancs, gamelle que je n'avais encore même pas remarquée tellement j'étais ailleurs.
Je secoue la tête avant de faire un signe à Ayshee pour qu'elle vienne se désaltérer elle aussi si elle le souhaite. Mon Pokémon se débarrasse des derniers brins d'herbe encore logés dans sa fourrure immaculée puis se relève tout en douceur et en délicatesse -mon opposé donc- avant de se diriger à pas lents vers le récipient encore rempli d'eau pour y boire quelques lapées. Mon Absol en profite au passage pour passer son museau sur le sommet du crâne de la Zorua chromatique de façon totalement amicale. Dans la foulée, Alexen fait remarquer que nos Pokémon semblent vraiment bien s'entendre, ce qui me fait sourire. C'est vrai que toutes les deux, elles s'apprécient beaucoup. Du moins c'est ce qui ressort quand on les observe, et également ce qui transparaissait quand elles ont joué ensemble dans l'herbe du parc tout à l'heure.
Le jeune homme me demande ensuite d'où me vient ma partenaire Ténèbres et, inconsciemment, mes poings se crispent sur mes genoux. Mes traits deviennent plus sérieux, contrastant avec le visage gêné que je possédais jusqu'à présent. Je sais qu'il est juste curieux, ça transparait dans son regard et ça se ressent. Et puis en plus, ma rencontre avec Ayshee est un excellent souvenir. Mais elle est également reliée à l'un des fragments de mon passé le plus douloureux, une épine resté logée dans mon coeur. Elle ne peut pas disparaître, car Kieran qui en est à l'origine n'est pas revenu, rien ne s'est arrangé. Mais elle ne peut pas non plus croître pour plonger mon coeur dans les ténèbres, ou me donner l'occasion de m'en débarrasser par la force, puisque je ne sais pas où mon frère se trouve aujourd'hui. Je suis seulement plongée dans l'incertitude la plus totale. Alors cette épine est là, et elle attend. Comme moi. J'attends de voir si je pourrais retrouver Kieran. Ou non.
– Ayshee est mon tout premier et unique Pokémon, offerte comme cadeau d'anniversaire par mon frère aîné, commencé-je. Il me l'a confiée juste avant de disparaître.
Oui, disparaître. C'est bien le mot qui le qualifie aujourd'hui. Personne ne sait s'il est vivant ou mort. Et même si je nourris l'espoir qu'il se trouve ici, à Lumiris, ce n'est peut-être qu'une lubie vaine.
– Il n'est pas mort hein ! Je m'empresse d'ajouter, réalisant que j'ai assombri l'ambiance. Il est simplement parti du domicile familial il y a neuf ans. Je ne l'ai jamais revu depuis, et je n'ai plus eu aucune nouvelle.
Je lève ma tête vers la poignée de nuages traversant l'azur. Même si mon coeur est convaincu qu'il est toujours en vie, au fond, je n'en sais rien. Je finis par soupirer, histoire d'évacuer toutes ces mauvaises ondes, pour reprendre ensuite un visage moins tendu et plus serein. Même Ayshee a jeté un coup d'oeil vers moi, se souvenant parfaitement bien elle aussi de ce jour dont je parle à Alexen. Ça doit d'ailleurs être la première fois que je me confie comme ça.
– Et toi ? Dis-je ensuite d'un ton plus doux. Comment as-tu rencontré May ?
Avec un peu de chance, l'histoire de leur rencontre serait plus heureuse que la mienne. Je l'espère, en tout cas.
Tiens... Apparemment, je venais de poser une question sensible on dirait, à en croire la réaction de la jeune femme. Ses traits étaient devenus plus sérieux, à un tel point que j'appréhendais la réponse. J'espérais juste que je touchais à quelque chose de pas trop douloureux pour elle, même si je ne pouvait en rien le savoir, j'avais tout de même eu autant de tact qu'un Rhinoféros dans un magasin de porcelaine...
La réponse ne tarda pas à arrive néanmoins et elle avait à peu près autant d'effet qu'un ascenseur émotionnel. Son Absol était son seul Pokémon et c'était un cadeau d'anniversaire. Jusque la, tout allait bien. La chute vint après cependant. C'était un cadeau de son frère, qui avait disparu depuis. Et bien évidemment, en entendant cela... Mon esprit pensa tout de suite qu'il était mort, à vrai dire. C'est en général ce que l'on dit après tout, dans le cadre d'un décès ou autre. On dit que ladite personne a disparu, ou ne reviendra jamais, ce genre de choses. Autant dire que j'avais la forte impression d'avoir bien plomber l'ambiance en posant cette question, ce qui ne me faisait pas vraiment plaisir. Ce n'était pas ce que je cherchais à faire...
- ... Désol-... Ah il est pas mort ? Ouf, tant mieux !
Inconsciemment, je lâchais un petit soupir de soulagement. Au final, ce n'était pas aussi grave que ce que je m'étais imaginé. Heureusement... Je ne savais pas trop ce que j'aurai fait si ça avait été le cas, ni même ce que j'aurai fait si Zephyra s'était mise à être plus émotive. Mais c'est le genre de moment imprévisible, donc ça ne sers à rien d'y réfléchir. La jeune blonde tentait de changer un peu le sujet, en me retournant la question. Et elle avait bien raison ! Autant vite faire partir cette atmosphère un peu pesante et passer à autre chose, puis c'était normal qu'elle soit curieuse comme je l'ai été après tout. Mais malheureusement pour elle... L'ambiance allait encore être un peu morose, même si ça restait moins que pour son histoire à elle.
- Oh, c'est... même pas une longue histoire, en fait. Mais pour faire ça au plus simple, on suppose qu'elle a été rejetée par les siens à cause de sa différence. Etant donné qu'elle ne porte pas les mêmes couleurs que les autres Zorua, c'est ce qui nous as paru le plus logique.
Doucement, je cherchais ladite Zorua sans vraiment regarder ou je mettais les mains. Mais en cherchant un peu sous le banc, je put assez vite l'attraper et la soulever, avant de la poser sur mes genoux. Et de commencer à fouiller dans ses poils, ce qui ne lui faisait pas plaisir. Heureusement pour elle et pour mes doigts, je parvins à trouver rapidement ce que je cherchais, ce qui la calmait au passage. C'était une cicatrice d'une de ses blessures, de ce fameux jour. Pas bien grande, elle était suffisamment petite pour que son poil la masque sans soucis, mais elle était assez parlante de son état à ce moment-là. En gardant une main sur mon Pokémon, j'attrapai délicatement la main de la jeune blonde, avant de guider ses doigts jusqu'à ladite cicatrice avant de reprendre d'un ton tout aussi calme que le sien.
- Tiens. Tu peux y aller, elle te fera rien. Mais tu peux te faire une idée de l'état dans lequel elle était comme ça. C'était pas la grande joie... Du coup, on l'a soignée à la maison et elle n'est jamais partie, sans doute qu'elle nous considère comme sa famille depuis. C'est quand j'ai pris les routes il y a peu que ma mère l'a planquée dans mon sac sans rien me dire. Mais je lui en suis reconnaissante, je voyage pas seul et à la maison, il y a encore mon père et ma sœur pour lui tenir compagnie.
Au final, l'ambiance était encore un peu morose mais la note de fin avait permis de remonter quand même un peu le moral. C'était toujours mieux que de croire qu'il y avait un mort en tout cas. Lâchant la main de Zephyra, qui pouvait très bien continuer de caresser May si elle le souhaitait étant donné qu'elle s'était assise, je titillais un peu la touffe bleue de cette dernière, qui me lança un rapide regard ennuyé avant d'essayer de me mordre le doigt. Mais je pouvais voir que se rappeler de ça l'embêtait un peu, ce n'était clairement pas des souvenirs heureux pour elle, enfin pas avant que je la trouve tout du moins.
- Mais voilà, ça reste une histoire qui se finit bien et puis, si je ne l'avais pas eue, on se serait probablement pas croiser ici, alors je suis tout de même content d'avoir passer deux jours à la soigner !
Je regardai à nouveau la jeune femme qui m'accompagnait en lui souriant, la tête penchée un peu sur le côté. A bien s'amuser à comparer, les histoires de nos deux Pokémons étaient liées à la famille, d'une certaine façon. C'était une pure coïncidence, mais ça ne m'empêchait pas de trouver ça un peu rigolo, en un sens.
Je chasse les sentiments négatifs qui remontent à la surface dans mon esprit en commençant tout simplement par arborer un léger sourire. Rien que ça, ça permet de faire revenir ma joie et mon énergie habituelles en faisant disparaître les mauvaises qui m'assaillent assez souvent, en ce moment. Le soupir de soulagement d'Alexen ainsi que les quelques mots qu'il a prononcés ne m'ont pas échappé. Il a bien raison d'ailleurs d'être soulagé par le fait que Kieran n'est pas mort. C'est pour ça que le statut de disparu est celui qui lui convient le mieux. Tant que je ne récupère pas d'informations sur lui, impossible d'établir quoi que ce soit. Et il est certain que ce n'est pas mes parents qui vont pouvoir m'aider à ce sujet, puisqu'eux doivent faire comme si nous étions morts, lui et moi. Et c'est pas plus mal.
Je me pince discrètement les joues, paupières closes. Allez, du nerf ma grande ! C'est pas le moment de déprimer, loin de là. Surtout vu comment cette journée a été bien plus magnifique et géniale que ce que j'avais envisagé au tout départ. Je prête donc une oreille attentive au récit de mon compagnon aux cheveux blancs, qui m'explique que May a été, à l'origine, rejetée par les siens à cause de son chromatisme. Mon regard se porte automatiquement vers la petite Zorua, manquant de frissonner lorsqu'Alexen saisit ma main pour la déposer dans son pelage, à l'endroit où il la caressait quelques instants auparavant. Les yeux emplis de douceur et écoutant le jeune homme poursuivre son récit après avoir obtenu son aval et celui de la Pokémon Ténèbres pour continuer de passer ma main dans son pelage sombre, je ne peux qu'imaginer ce qu'elle a subi avant qu'elle ne choisisse de rester chez Alexen et sa famille, là où elle a été soignée et nourrie. Même Ayshee s'est avancée pour déposer son museau sur celui de sa nouvelle amie. Elle aussi ne peut qu'imaginer ce qui est arrivé à May. Après tout, même malgré les violences dont a fait preuve mon père par le passé et dont j'ai gardé les stigmates sur ma peau, il ne s'en est jamais pris aux Pokémon de la maison, et à mon Absol non plus. Je ne sais pas ce que j'aurai fait si ça avait été le cas. Mais j'aurai explosé d'une colère noire, sans aucun doute.
Je hoche la tête vigoureusement lorsque mon partenaire de tourisme conclut son histoire en disant que tout est bien qui finit bien, et qu'il ne regrette pas le moins du monde d'avoir passé du temps à soigner sa Zorua, puisque c'est grâce à elle qu'il en est là aujourd'hui. A ces mots, mon sourire s'agrandit et je plante mes prunelles où étincelle une douce joie dans celles du jeune homme.
– Je suis bien heureuse qu'on se soit croisés d'ailleurs ! M'exclamé-je presque en riant. Cette journée n'aurait pas du tout été aussi amusante sinon.
Ni aussi amusante, ni remplie d'autant de gaffes de ma part. Il faut que je m'améliore dans ce domaine, sinon ça finira par me causer d'autres problèmes encore pire que ceux d'aujourd'hui. Si je suis bien tombée pour ma visite de Voltapolis, cette chance nouvelle ne se reproduira sans doute pas. Du moins, pas à chaque fois. Je porte ensuite toute mon attention sur May avant de la grattouiller sur toute la longueur de son dos et derrière ses oreilles.
– Donc c'est grâce à toi si Alexen est là aujourd'hui ? Il en a de la chance de t'avoir, tu sais ?
L'intéressée semble ravie que je m'occupe d'elle ainsi, et je crois que l'amuse autant que moi que je parle de son maître de cette façon, à la troisième personne, comme s'il ne se trouvait pas avec nous. Je jette ensuite un rapide coup d'oeil vers le ciel pour constater que malheureusement et comme chaque jour, l'heure tourne. Même si je sais que bientôt, je devrais rentrer à Fort-des-Songes pour ne pas arriver trop tard dans la nuit et être en forme pour mon service de demain au White Spring, je n'ai pas envie de rentrer. Pas du tout. Parce que cette journée et l'une des meilleures que j'ai pu avoir depuis que je suis arrivée à Lumiris, si ce n'est pas la meilleure. Parce que j'ai envie de profiter encore de la nouvelle rencontre fortuite que j'ai faite aujourd'hui. Parce qu'on est bien, là, tous les quatre, assis dans ce parc. Le sourire qui illumine mon visage s'agrandit une fois de plus. Même si tout moment de bonheur touche un jour à sa fin, ça n'empêche pas de le garder gravé dans son coeur. Et cette journée, elle restera quoi qu'il arrive gravé au fond du mien.
J'étais bien content de voir que le courant passait bien entre nous. Enfin, du moins, il avait l'air de bien passer et le fait que ça faisait écho à nos deux Pokémons était tout aussi plaisant à voir. Si l'on m'avais dis un jour que je rentrerais dans quelqu'un et que ça mènerait à une bonne journée ensemble, je ne l'aurai pas cru. Enfin, pas tout de suite tout du moins, en y réfléchissant un peu ce n'était pas vraiment un scénario qui était si irréaliste. Bien au contraire, on le vois dans tellement de films, si ce n'est que là-bas, c'est surjoué. Actuellement, nous avions le mérite de faire les choses "vraies", d'uen certaine façon. Pas de scénario, pas de script, juste... nous deux, en train d'être nous-même. Ca paraît idiot dit comme ça, et pourtant c'est très plaisant malgré tout.
- Oui c'est vrai, cette journée aurait été bien plus morose autrement ! Content de savoir que c'est un sentiment partagé.
La bonne humeur de la jeune blonde était contagieuse, même si je n'étais pas aussi riant qu'elle semblait l'être actuellement, on ne pouvait pas non plus dire que je n'appréciais pas. Enfin, pour être plus exact, j'appréciais être en sa compagnie et ce malgré cette maladresse qu'elle semblait avoir. Quoique je n'étais pas sûr de ce dernier point, mais il s'était passé plusieurs choses en assez peu de temps, suffisamment en tout cas pour que le point soit soulevé dans mon esprit. Etait-elle vraiment si malchanceuse tout le temps, où bien n'était-ce qu'aujourd'hui... pour une raison quelconque ?
Pendant que j'étais un peu plongé dans ma réflexion, May profitait sans aucune once de gêne des grattouilles qu'elle recevait, allant jusqu'à amener sa tête dans la main de Zephyra puis de faire le dos rond en prenant soin de s'étirer de tout son long. A croire que je ne lui donnais pas assez d'affection. Celle-là je vous jure, cela dit on ne pouvais pas lui en vouloir, elle avait même bien raison d'en profiter. Depuis que j'étais parti de chez moi en l'emmenant contre mon gré, je ne pouvais pas prétendre lui donner suffisamment d'attention que ce que mes parents lui donnait. Surtout ma mère. C'était normal qu'elle cherche à en profiter, surtout si on venait les lui donner de la sorte. Je pense qu'il n'y avait pas besoin de préciser qu'elle avait l'air d'apprécier notre compagne de visite.
Malheureusement, une fois n'est pas coutume, quelque chose nous sorti tout les deux de nos pensées. Un duo de ranger était en train de quitter la base au pas de courses, sans doute venaient-ils tout juste d'avoir une nouvelle affaire dans la ville. Mais le bruit de course de ces deux personnes fut suffisant à me rappeler que la journée avançait et qu'il allait sans doute falloir que nous nous séparions. Sauf si elle souhaitait rester dans la ville, auquel cas peut-être pourrions-nous passer encore un peu de temps ensemble ? Ce n'était pas moi qui allait refuser, loin de là. Aussi, je lâchai un petit soupir ennuyé avant de regarder la jeune femme et de lui demander d'une voix un peu incertaine.
- On est si bien ici, tous ensembles, que j'en viens à me poser une question... Est-ce que tu peux rester ? Où bien tu dois impérativement rentrer ?
Et en attendant sa réponse, je la regardait tout en souriant, une main venant se glisser sur la nuque de son Absol et la caressant affectueusement. Cela devait sans doute se voir que je souhaitais qu'elle puisse rester, mais je n'étais en rien maître de son emploi du temps. Si elle devait ou qu'elle voulait partir, hors de question de l'en empêcher. Me connaissant, je l'accompagnerai sans doute jusqu'à son point de départ, quel qu'il soit.
Laissant une fois de plus mon regard bleu-vert contempler le ciel azuré, mon sourire s'agrandit et un sentiment de douceur infinie parcourt mon corps tout entier. Je sais très bien que je vais devoir retourner à Fort-des-Songes et que cette journée ne s'étendra pas éternellement dans la course du temps. A l'origine, d'ailleurs, j'avais prévu de rentrer dans l'après-midi, après avoir fait un tour rapide et simple de Voltapolis. Mais l'après-midi étant déjà bien entamé voire même dépassé, ce n'est plus au programme. Je suis venue à pieds, laissant ma bicyclette à côté du White Spring, à Windoria. Du coup, est-ce que ça pourrait me poser problème si je décidais de rentrer de nuit ? Je réfléchis quelques instants, ma main gauche toujours fourrée dans la fourrure de May. A part tomber sur un Pokémon sauvage, je ne vois pas ce qui pourrait m'arriver de si catastrophique que ça. Et puis, en cas de pépin, j'ai Ayshee avec moi, donc ça devrait aller, non ? Ce n'est pas dangereux de rentrer de nuit, si ? Comme je l'ai souvent fait jusqu'à présent... Enfin, j'étais quand même plus proche de chez moi. La situation actuelle n'est pas tout à fait similaire.
Tandis que je caresse le bout des oreilles d'une May carrément ravie que je la papouille à ce point, un bruit de course produit par deux rangers me sort brutalement de ma réflexion, et je secoue la tête. Ce n'est pas la première fois que je sursaute pour pas grand chose. C'est qu'au fond de moi, je dois avoir des pensées qui me travaillent.
Alexen me pose alors une question à laquelle je ne m'attendais absolument pas. Il me demande si, à moins d'un impératif, je peux rester. Je me tourne vers lui, le dardant de mes pupilles écarquillées par la surprise. Il veut que je reste ? Moi ? Mes joues rosissent légèrement, mais la couleur disparait bien vite. Je constate également qu'il n'y a pas que lui ou moi qui souhaitons prolonger cette journée. Ayshee se plaît sous les caresses que le jeune homme lui donne, ce qui m'étonne une fois de plus, car elle n'est en général pas très proche des nouvelles personnes que je rencontre, et ne se laisse pas approcher ou même toucher facilement. Et ce même avec les infirmières des centres Pokémon, pour leur plus grand malheur. May finit par la rejoindre, et toutes deux ne cachent pas leur plaisir à obtenir des grattouilles de la part de mon compagnon de tourisme. Lui même a le visage radieux.
Leur joie finit vite par être contagieuse puisque mon visage est totalement illuminé face à ce doux spectacle. Je repense alors à ma bicyclette, accrochée en solitaire derrière le White Spring, au seul emplacement qu'il y a pour les vélos, et aux températures nocturnes actuelles, puisque l'hiver n'est pas loin. Il est fort probable que je gèle avant d'avoir pu rallier le salon de thé, et puis les bourrasques cinglantes qui me cisèleront le visage sur la piste cyclable ne m'enchantent pas rien que d'y penser. Je ne suis en service que demain soir à Windoria, je n'ai rien d'urgent qui m'attend dans mon appartement de Fort-des-Songes. Ça doit vouloir dire que je peux rester, non ?
– Eh bien... Pour tout te dire, j'avais prévu au départ de rentrer chez moi de nuit. Mais faire le trajet d'ici à Fort-des-Songes par les températures du moment, ce n'est peut-être pas une si bonne idée. Je passe une main à l'arrière de mon crâne, car oui, c'est certain qu'avec du recul, ce n'est pas mon meilleur plan retour du siècle. Alors je peux rester. J'ai bien envie de rester même. Le seul souci, c'est que je n'ai pas réservé de chambre ou quoi que ce soit pour dormir ce soir. Tu penses qu'ils auront une place pour moi encore ? Et toi, tu vas dormir où ?
Il est vrai que je ne sais rien des plans prévus par Alexen, s'il a prévu de dormir sur place ou non, de repartir dans une ville voisine pour s'y poser avec May. Là, au moins, je lui ai fait part de mon envie de rester ici pour qu'on passe plus de temps tous ensemble, lui montrant que nos souhaits sont partagés. Mais comme beaucoup de choses depuis que je suis arrivée à Lumiris, ce n'était pas prévu dans mon programme. Et même si je sais que la ville est sujette à moins de fréquentation touristique depuis les attentats qui l'ont frappées l'été passé, il y avait du monde aujourd'hui, quand même. Et si tout ce monde reste sur place... Il n'y aura plus grand chose pour Ayshee et moi, voire pour nous ainsi qu'Alexen et May, s'ils n'ont rien prévu non plus. Et dormir à quatre à la belle étoile, c'est toujours sympa, mais en été. Là, on se sera changés en Bekaglaçon avant même d'avoir pu sombrer dans le sommeil.
Ma question n'avait pas été ignorée et je pouvais en être sûr. La légère teinte rose sur les joues de Zephyra en était un bon indicateur, même si pour sa défense, ma demande pouvait être prise un peu pour tout et n'importe quoi. Au moins, elle n'était pas gênée comme elle l'avait été auparavant, ce qui était une très bonne chose. Je n'aurais probablement pas put résister à l'envie de la taquiner gentiment si ça avait été le cas. Cela dit, sa réponse ne vint pas tout de suite. Au contraire même, elle prenait un peu de temps, sans doute pour prendre un petit moment de réflexion. Qu'elle prenne tout le temps qui lui fallait, je n'allais pas partir d'ici.
Pendant ce temps, j'étais encore en train de chouchouter son Pokémon, tant et si bien que May se mit à demander quelques caresses elle aussi. Ce n'était pas par jalousie, ou du moins je n'en avais pas l'impression, mais c'est comme si elle ne voulait pas se sentir mise à l'écart... C'était compliqué à comprendre, je ne suis pas un expert dans le déchiffrage du langage corporel de ces bestioles. Ça viendra avec le temps et le nombre de Pokémons que je trimballerais avec moi j'imagine, mais en attendant je n'avais pas d'autres choix que de faire avec. Et puis, je n'étais pas encore tombé sur un Pokémon qui m'en voulait pour quelque chose, donc c'est que je devais bien m'en tirer, non ?
Voilà la fameuse réponse de la jeune femme ! Et elle soulevait pas mal de points assez pertinents. Il était vrai que les températures de nuits n'étaient pas des plus clémentes et c'était sans même compter ce qu'on pouvait trouver sur les routes. Après tout, Voltapolis avait la réputation d'être un peu moins sûre depuis l'incident de la centrale, nul doute que les environs étaient affectés eux aussi. Donc elle allait rester, à une condition. C'était de trouver un endroit où dormir... Elle marquait un point. Je n'avais pas encore commencer à me renseigner sur les logements possibles dans la ville et je ne voulais pas non plus me risquer à me balader de nuit...
- Où je vais dormir... C'est une très bonne question, je me suis pas encore penché sur le problème. Mais puisqu'on est dans ce cas de figure et que tu veux bien rester, pourquoi ne pas se chercher pour une chambre en commun ? Elle sera moins chère et c'est quand même bien plus sympathique que d'avoir une chambre solo, non ?
Je me gardais bien de mentionner le fait qu'il y avait un risque que l'on se retrouve ainsi à devoir partager un lit, la pauvre aurait très certainement refait une crise de gêne aigüe j'imagine et ce n'était pas vraiment le moment. D'autant plus qu'elle pourrait tout aussi bien refuser en sachant cela. Et ce n'était pas foncièrement la meilleure des façons. Je continuais un instant plus tard, alors que j'arrêtais de m'occuper d'Ayshee pour attraper mon téléphone et regarder l'heure, avec un petit ton amusé voir malicieux.
- Et puis, May ne serais pas d'accord de te laisser dormir toute seule dans ton coin !
L'intéressée me regarda un instant, l'air de me dire d'arrêter de dire des bêtises, avant de comprendre ma pensée. Elle se releva d'un bond avant de fixer Zephyra et de hocher vivement la tête. Sans doute trop vivement d'ailleurs, mais elle était comme ça. Ce qui me fit rire un peu. J'espérais toutefois qu'elle soit d'accord, je voulais profiter de sa compagnie encore un moment. C'était suffisamment rare de rencontrer quelqu'un de la sorte et que l'on accroche si bien, alors je voulais prolonger l'expérience le plus longtemps possible.
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